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CJUE, 10 mars 2016, aff. C-94/14, Flight Refund Ltd contre Deutsche Lufthansa AG

 

 

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

10 mars 2016 (*)

 

 

«Renvoi préjudiciel – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Coopération judiciaire en matière civile – Procédure européenne d’injonction de payer – Règlement (CE) n° 1896/2006 – Articles 17 et 20 – Obligations d’une juridiction saisie aux fins de la désignation d’une juridiction territorialement compétente pour connaître de la procédure contentieuse à la suite de l’opposition du défendeur à l’injonction de payer européenne – Compétence des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer européenne – Règlement (CE) n° 44/2001 – Créance tirée du droit à indemnisation au titre du règlement (CE) n° 261/2004 en raison du retard d’un vol»

Dans l’affaire C‑94/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Kúria (Cour suprême, Hongrie), par décision du 27 février 2014, parvenue à la Cour le même jour, dans la procédure

Flight Refund Ltd

contre

Deutsche Lufthansa AG,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. M. Ilešič (rapporteur), président de chambre, Mme C. Toader, M. A. Rosas, Mme A. Prechal et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

–        pour le gouvernement hongrois, par MM. M. Z. Fehér et G. Szima, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement allemand, par M. T. Henze et Mme J. Kemper, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par Mme A.-M. Rouchaud-Joët ainsi que par MM. A. Sipos et M. Wilderspin, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 22 octobre 2015,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, instituant une procédure européenne d’injonction de payer (JO L 399, p. 1).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Flight Refund Ltd (ci‑après «Flight Refund»), société établie au Royaume-Uni, à Deutsche Lufthansa AG (ci‑après «Deutsche Lufthansa»), société établie en Allemagne, au sujet d’une créance relative à l’indemnisation réclamée en raison du retard d’un vol.

 Le cadre juridique

 Le droit international

3        La convention pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international, conclue à Montréal le 28 mai 1999, a été signée par la Communauté européenne le 9 décembre 1999 et approuvée au nom de celle-ci par la décision 2001/539/CE du Conseil, du 5 avril 2001 (JO L 194, p. 38, ci-après la «convention de Montréal»).

4        L’article 19 de la convention de Montréal, intitulé «Retard», prévoit:

«Le transporteur est responsable du dommage résultant d’un retard dans le transport aérien de passagers, de bagages ou de marchandises. Cependant, le transporteur n’est pas responsable du dommage causé par un retard s’il prouve que lui, ses préposés et mandataires ont pris toutes les mesures qui pouvaient raisonnablement s’imposer pour éviter le dommage, ou qu’il leur était impossible de les prendre.»

5        Aux termes de l’article 33, paragraphe 1, de cette convention:

«L’action en responsabilité devra être portée, au choix du demandeur, dans le territoire d’un des États Parties, soit devant le tribunal du domicile du transporteur, du siège principal de son exploitation ou du lieu où il possède un établissement par le soin duquel le contrat a été conclu, soit devant le tribunal du lieu de destination.»

 Le droit de l’Union

 Le règlement (CE) n° 261/2004

6        L’article 5 du règlement (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol, et abrogeant le règlement (CEE) n° 295/91 (JO L 46, p. 1), intitulé «Annulations», prévoit, à son paragraphe 1, sous c), que les passagers concernés ont, en cas d’annulation d’un vol, en principe, droit à une indemnisation du transporteur aérien effectif conformément à l’article 7 de ce règlement.

7        L’article 6 dudit règlement, intitulé «Retards», prévoit certaines obligations qui pèsent sur le transporteur aérien effectif, relatives à l’assistance aux passagers concernés, en cas de retard d’un vol.

8        L’article 7 du même règlement, intitulé «Droit à indemnisation», dispose, à son paragraphe 1, sous c), que, lorsqu’il est fait référence à cet article, les passagers reçoivent une indemnisation dont le montant est fixé à 600 euros pour tous les vols dont la distance est supérieure à 3 500 km.

 Le règlement n° 1896/2006

9        Le considérant 8 du règlement n° 1896/2006 énonce:

«Les entraves à l’accès à une justice efficace [...] dans les litiges transfrontaliers [...] rendent nécessaire la mise en place d’une législation communautaire garantissant des conditions identiques aux créanciers et débiteurs dans l’ensemble de l’Union européenne.»

10      Aux termes du considérant 10 de ce règlement:

«La procédure instituée par le présent règlement devrait constituer un instrument complémentaire et facultatif pour le demandeur, qui demeure libre de recourir à une procédure prévue par le droit national. En conséquence, le présent règlement ne remplace ni n’harmonise les mécanismes de recouvrement de créances incontestées prévus par le droit national.»

11      Le considérant 24 dudit règlement énonce:

«Une opposition formée dans le délai imparti devrait mettre un terme à la procédure européenne d’injonction de payer et entraîner le passage automatique du litige à la procédure civile ordinaire, sauf si le demandeur a expressément demandé l’arrêt de la procédure dans cette éventualité. Aux fins du présent règlement, le concept de ‘procédure civile ordinaire’ ne devrait pas nécessairement être interprété au sens du droit national.»

12      L’article 1er du règlement n° 1896/2006 prévoit:

«1.      Le présent règlement a pour objet:

a)      de simplifier, d’accélérer et de réduire les coûts de règlement dans les litiges transfrontaliers concernant des créances pécuniaires incontestées en instituant une procédure européenne d’injonction de payer;

[...]

2.      Le présent règlement n’empêche pas le demandeur de faire valoir une créance au sens de l’article 4 en recourant à une autre procédure prévue par le droit d’un État membre ou par le droit [de l’Union].»

13      Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, de ce règlement, le champ d’application de ce dernier est défini comme suit:

«Le présent règlement s’applique en matière civile et commerciale dans les litiges transfrontaliers, quelle que soit la nature de la juridiction. Il ne recouvre notamment pas les matières fiscales, douanières ou administratives, ni la responsabilité de l’État pour des actes ou des omissions commis dans l’exercice de la puissance publique (‘acta jure imperii’).»

14      L’article 5, paragraphe 1, dudit règlement définit l’«État membre d’origine» comme étant «l’État membre dans lequel une injonction de payer européenne est délivrée».

15      L’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2006 énonce que, aux fins de l’application de ce règlement, la compétence est déterminée conformément aux règles du droit de l’Union applicables en la matière, notamment au règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1).

16      L’article 7, paragraphe 2, sous f), du règlement n° 1896/2006 dispose qu’une demande d’injonction de payer européenne comprend les chefs de compétence.

17      L’article 16, paragraphes 1 à 3, de ce règlement prévoit:

«1.      Le défendeur peut former opposition à l’injonction de payer européenne auprès de la juridiction d’origine au moyen du formulaire type F figurant dans l’annexe VI, qui lui est transmis en même temps que l’injonction de payer européenne.

2.      L’opposition est envoyée dans un délai de trente jours à compter de la signification ou de la notification de l’injonction au défendeur.

3.      Le défendeur indique dans l’opposition qu’il conteste la créance, sans être tenu de préciser les motifs de contestation.»

18      L’article 17 dudit règlement, intitulé «Effets de l’opposition», énonce, à ses paragraphes 1 et 2:

«1.      Si une opposition est formée dans le délai prévu à l’article 16, paragraphe 2, la procédure se poursuit devant les juridictions compétentes de l’État membre d’origine conformément aux règles de la procédure civile ordinaire, sauf si le demandeur a expressément demandé qu’il soit mis un terme à la procédure dans ce cas.

[...]

2.      Le passage à la procédure civile ordinaire au sens du paragraphe 1 est régi par le droit de l’État membre d’origine.»

19      L’article 18, paragraphe 1, du même règlement prévoit:

«Si, dans le délai prévu à l’article 16, paragraphe 2, compte tenu d’un délai supplémentaire nécessaire à l’acheminement de l’opposition, aucune opposition n’a été formée auprès de la juridiction d’origine, la juridiction d’origine déclare sans tarder l’injonction de payer européenne exécutoire, au moyen du formulaire type G figurant dans l’annexe VII. La juridiction vérifie la date à laquelle l’injonction de payer a été signifiée ou notifiée.»

20      L’article 20 du règlement n° 1896/2006 prévoit un «réexamen dans des cas exceptionnels». En particulier, le paragraphe 2 de cet article dispose que, «[a]près expiration du délai prévu à l’article 16, paragraphe 2, le défendeur a [...] le droit de demander le réexamen de l’injonction de payer européenne devant la juridiction compétente de l’État membre d’origine lorsqu’il est manifeste que l’injonction de payer a été délivrée à tort, au vu des exigences fixées par le présent règlement, ou en raison d’autres circonstances exceptionnelles». Selon l’article 20, paragraphe 3, dudit règlement, si la juridiction décide que le réexamen est justifié, l’injonction de payer européenne est nulle et non avenue. Dans le cas contraire, en vertu de la même disposition, cette injonction reste valable.

21      L’article 26 dudit règlement, intitulé «Relation avec le droit procédural national», dispose:

«Toute question procédurale non expressément réglée par le présent règlement est régie par le droit national.»

 Le règlement n° 44/2001

22      Les règles de compétence édictées par le règlement n° 44/2001 figurent sous le chapitre II de ce règlement, aux articles 2 à 31 de ce dernier. À la section 7 de ce chapitre II, intitulée «Prorogation de compétence», l’article 24 dudit règlement dispose:

«Outre les cas où sa compétence résulte d’autres dispositions du présent règlement, le juge d’un État membre devant lequel le défendeur comparaît est compétent. Cette règle n’est pas applicable si la comparution a pour objet de contester la compétence ou s’il existe une autre juridiction exclusivement compétente en vertu de l’article 22.»

 Le droit hongrois

 Le code de procédure civile

23      La loi n° III de 1952, relative au code de procédure civile (a polgári perrendtartásról szóló 1952. évi III. törvény, ci-après le «code de procédure civile»), énonce les règles de compétence juridictionnelle.

24      L’article 45 du code de procédure civile dispose:

«1.      En cas de conflit de compétence matérielle ou territoriale résultant de décisions définitives, ainsi que dans le cas où il est impossible d’établir quelle est la juridiction territorialement compétente ou bien encore lorsque celle-ci, [à la -] suite [d’]une récusation, ne peut pas traiter de l’affaire, il convient de procéder de manière prioritaire à la désignation de la juridiction compétente.

2.      La juridiction compétente pour opérer cette désignation est:

[...]

c)      dans les cas autres que ceux visés sous a) et b), la Kúria [(Cour suprême)].»

 La loi n° L de 2009 relative à l’injonction de payer

25      L’article 59, paragraphe 1, de la loi n° L de 2009, relative à l’injonction de payer (a fizetési meghagyásos eljárásról szóló 2009. évi L. törvény), donne compétence au notaire pour délivrer l’injonction de payer européenne prévue par le règlement n° 1896/2006.

26      En application de l’article 38, paragraphe 1, de cette loi, le notaire, en cas d’opposition, transmet le dossier relatif à la procédure à la juridiction désignée par le demandeur dans la demande d’injonction de payer.

27      L’article 38, paragraphe 3, de cette loi prévoit que, lorsque le demandeur n’a pas désigné de juridiction, le notaire transmet le dossier à la juridiction matériellement et territorialement compétente en application des articles 29, 30 et 40 du code de procédure civile.

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

28      Il ressort de la décision de renvoi qu’un passager a, par contrat, cédé ses droits à indemnisation en raison du retard d’un vol à Flight Refund, société spécialisée dans le recouvrement de ce type de créances. Cette société a introduit, auprès d’un notaire hongrois, une demande d’injonction de payer européenne contre Deutsche Lufthansa. Flight Refund a justifié sa demande, qui porte sur une somme de 600 euros en principal, par le fait qu’elle était en droit, à la suite de la cession de créance intervenue, de réclamer des dommages et intérêts à Deutsche Lufthansa, en raison du retard supérieur à trois heures du vol LH 7626 assurant, selon les informations fournies à ce notaire, la liaison entre les aéroports de Newark (États-Unis) et London Heathrow (Royaume-Uni).

29      Ledit notaire a fait droit à cette demande et a délivré une injonction de payer contre Deutsche Lufthansa, sans avoir déterminé le lieu de la conclusion du contrat, celui de son exécution, le lieu de la survenance du fait dommageable, celui de l’établissement du transporteur par le soin duquel le contrat avait été conclu, non plus que la destination du vol concerné. Le même notaire s’est déclaré compétent pour délivrer cette injonction de payer sur le fondement de l’article 33 de la convention de Montréal, au motif que la Hongrie est un État partie à cette convention.

30      Deutsche Lufthansa a fait usage de son droit d’opposition à ladite injonction et a fait valoir qu’elle n’exploitait pas la liaison aérienne à laquelle Flight Refund avait fait référence dans sa demande d’injonction, le transporteur aérien effectif exploitant la liaison concernée étant, selon elle, la compagnie aérienne United Airlines, Inc.

31      Le représentant de Flight Refund ayant, à l’invitation du notaire concerné, déclaré qu’il ne pouvait désigner la juridiction nationale compétente à la suite du passage de la procédure européenne d’injonction de payer à la procédure civile ordinaire, ce notaire s’est adressé à la Kúria (Cour suprême), afin que celle-ci désigne cette juridiction territorialement compétente, dès lors qu’il ne pouvait, sur le fondement des dispositions pertinentes du code de procédure civile et au vu des informations dont il disposait, identifier cette juridiction.

32      La juridiction de renvoi a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour cinq questions qui portaient sur l’interprétation de plusieurs dispositions de la convention de Montréal, du règlement n° 44/2001 et du règlement n° 1896/2006. Cette demande de décision préjudicielle est parvenue à la Cour le 27 février 2014.

33      Le 26 septembre 2014, Flight Refund a fait part à la Cour du fait qu’elle avait informé la juridiction de renvoi, par une lettre du 5 mars 2014, que sa créance était fondée sur le règlement n° 261/2004 et non pas sur les dispositions de la convention de Montréal. Afin d’obtenir des précisions supplémentaires de la part de la juridiction de renvoi, la Cour a, le 21 octobre 2014, décidé d’adresser, en application de l’article 101, paragraphe 1, de son règlement de procédure, une demande d’éclaircissements à cette juridiction.

34      Dans sa réponse, parvenue à la Cour le 26 novembre 2014, la juridiction de renvoi a, en premier lieu, confirmé que les articles 6 et 7 du règlement n° 261/2004, et non pas les dispositions de la convention de Montréal, avaient été invoqués par Flight Refund, en tant que fondement juridique de sa créance. Par conséquent, la juridiction de renvoi a retiré trois des cinq questions posées et a reformulé l’une des deux questions maintenues.

35      En second lieu, cette juridiction a souligné qu’elle ne disposait pas d’informations relatives au vol concerné, autres que celles figurant déjà dans sa demande de décision préjudicielle. Elle a souligné que, dans le cadre d’une procédure portant sur la désignation de la juridiction territorialement compétente, elle ne pouvait, en vertu du droit national, rechercher davantage d’éléments relatifs au fond de l’affaire.

36      La juridiction de renvoi a, en outre, émis des doutes quant aux règles de compétence internationale applicables à une procédure européenne d’injonction de payer introduite aux fins de faire valoir une créance fondée sur le règlement n° 261/2004. Cette juridiction considère que le notaire ayant émis l’injonction de payer européenne a délivré cette injonction en méconnaissance de l’article 6 du règlement n° 1896/2006, selon lequel il aurait dû examiner la question de la compétence des juridictions hongroises sur le fondement du règlement n° 44/2001.

37      Ladite juridiction souhaite ainsi obtenir des précisions quant à la question de savoir si sont applicables, en l’occurrence, les règles édictées par la convention de Montréal, celles prévues par le règlement n° 44/2001 ou encore d’autres règles de compétence, telles que celles figurant à l’article 17, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2006, prévoyant que la procédure qui fait suite à l’opposition du défendeur à l’injonction de payer européenne se poursuit devant les juridictions compétentes de l’État membre d’origine de cette injonction. Elle s’interroge également sur les conséquences qu’il convient de tirer de son constat relatif à l’existence ou à l’absence d’une compétence internationale des juridictions hongroises.

38      Dans ces circonstances, la Kúria (Cour suprême) a décidé de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Une injonction de payer européenne qui a été délivrée en méconnaissance de l’objet du règlement [n° 1896/2006] ou par une autorité internationalement incompétente peut-elle faire l’objet d’un réexamen d’office? Ou bien la procédure contentieuse faisant suite à une opposition doit-elle, en l’absence de compétence, être classée d’office ou sur demande?

2)      Dans la mesure où les juridictions hongroises sont compétentes pour connaître de la procédure contentieuse, la règle de compétence pertinente doit-elle alors être interprétée en ce sens que la Kúria [(Cour suprême)], saisie aux fins de la désignation d’une juridiction, doit désigner au moins une juridiction qui, même en l’absence de compétence matérielle et territoriale en application des règles procédurales de l’État membre, a l’obligation de connaître au fond de la procédure contentieuse faisant suite à l’opposition?»

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la recevabilité

39      Le gouvernement allemand estime que la demande de décision préjudicielle est irrecevable. À cet égard, ce gouvernement soutient qu’il ressort du site Internet de Flight Refund, qu’il a consulté le 9 juin 2014, que cette société a interrompu, pour une durée indéterminée, le fonctionnement de son site et qu’elle a, dans le même temps, suspendu la poursuite des actions en recouvrement engagées. Pour cette raison, ledit gouvernement suggère que la Cour demande à la juridiction de renvoi des éléments d’information relatifs à l’état de la procédure pendante devant elle.

40      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les questions relatives à l’interprétation du droit de l’Union posées par le juge national dans le cadre réglementaire et factuel qu’il définit sous sa responsabilité, et dont il n’appartient pas à la Cour de vérifier l’exactitude, bénéficient d’une présomption de pertinence (arrêts Fish Legal et Shirley, C‑279/12, EU:C:2013:853, point 30, ainsi que Verder LabTec, C‑657/13, EU:C:2015:331, point 29).

41      Or, s’agissant de la fin de non-recevoir ainsi soulevée par le gouvernement allemand, il suffit de constater que la juridiction de renvoi a, dans sa réponse à la demande d’éclaircissements que lui a adressée la Cour, confirmé qu’elle était toujours saisie de la demande relative à la désignation de la juridiction territorialement compétente pour connaître de la procédure contentieuse, à la suite de l’opposition du défendeur à l’injonction de payer européenne. Aucun élément du dossier ne permet, dès lors, de considérer que la présomption de pertinence dont jouissent les questions préjudicielles pourrait, en l’occurrence, être remise en cause.

42      La demande de décision préjudicielle est, par conséquent, recevable.

 Sur le fond

43      Avant de procéder à l’examen des questions posées par la juridiction de renvoi, il convient de relever que cette juridiction a émis, dans sa réponse à la demande d’éclaircissements que lui a adressée la Cour, des doutes quant aux règles pertinentes qu’il convient d’appliquer aux fins d’examiner la question de la compétence internationale des juridictions d’un État membre pour connaître de la procédure contentieuse relative à la créance à l’origine de l’injonction de payer, contre laquelle le défendeur a formé opposition, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, dans lesquelles le créancier a invoqué les articles 6 et 7 du règlement n° 261/2004 comme fondement juridique de sa créance. Plus précisément, cette juridiction demande si les règles applicables dans ce contexte sont celles relatives à la compétence internationale prévues à l’article 33 de la convention de Montréal ou celles prévues par le règlement n° 44/2001.

44      Par ailleurs, ladite juridiction demande des précisions quant à la portée de l’article 17, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2006, en particulier sur le point de savoir si cette disposition pourrait être interprétée en ce sens qu’elle comporte une règle de compétence en faveur des juridictions de l’État membre d’origine, au sens de l’article 5, point 1, de ce règlement, indépendamment des règles prévues par le règlement n° 44/2001.

45      À cet égard, il convient de rappeler, en premier lieu, la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle le droit à une indemnisation forfaitaire et uniformisée du passager à la suite du retard d’un vol, tiré des articles 5 à 7 du règlement n° 261/2004, dont se prévaut Flight Refund en l’occurrence, est indépendant de la réparation du dommage prévue dans le cadre de l’article 19 de la convention de Montréal (voir, en ce sens, arrêts Rehder, C‑204/08, EU:C:2009:439, point 27, ainsi que Nelson e.a., C‑581/10 et C‑629/10, EU:C:2012:657, points 46, 49 et 55).

46      Ainsi, dans la mesure où les droits fondés respectivement sur les dispositions du règlement n° 261/2004 et les stipulations de la convention de Montréal relèvent de cadres réglementaires différents, les règles de compétence internationale prévues par cette convention ne trouvent pas à s’appliquer aux demandes introduites sur le fondement du seul règlement n° 261/2004, ces dernières devant être examinées au regard du règlement n° 44/2001 (voir, en ce sens, arrêt Rehder, C‑204/08, EU:C:2009:439, points 27 et 28).

47      En second lieu, s’agissant de l’hypothèse évoquée par la juridiction de renvoi, exposée au point 44 du présent arrêt, la Cour a déjà jugé qu’une opposition du défendeur à l’injonction de payer européenne, dont les effets sont régis par l’article 17, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2006, ne saurait entraîner une prorogation de compétence des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer, au sens de l’article 24 du règlement n° 44/2001, et ainsi signifier que le défendeur a accepté, en formulant une telle opposition, même si elle est assortie de moyens relatifs au fond de l’affaire, la compétence des juridictions de cet État membre pour connaître de la procédure contentieuse relative à la créance contestée (voir, en ce sens, arrêt Goldbet Sportwetten, C‑144/12, EU:C:2013:393, points 38, 41 et 43).

48      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que, par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi s’interroge, en substance, sur les pouvoirs et les obligations d’une juridiction telle que la juridiction de renvoi, au titre du droit de l’Union et, notamment, du règlement n° 1896/2006, dans des circonstances dans lesquelles cette juridiction est saisie d’une procédure relative à la désignation d’une juridiction territorialement compétente de l’État membre d’origine d’une injonction de payer européenne et examine la question de la compétence internationale des juridictions de cet État membre pour connaître de la procédure contentieuse relative à la créance à l’origine de ladite injonction de payer, contre laquelle le défendeur a formé opposition dans le délai prévu à cette fin.

49      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 1er, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1896/2006, ce dernier a pour objet, notamment, de simplifier, d’accélérer et de réduire les coûts de procédure dans les litiges transfrontaliers concernant des créances pécuniaires incontestées en instituant une procédure européenne d’injonction de payer. Ce règlement s’applique, selon son article 2, paragraphe 1, en matière civile et commerciale dans des litiges transfrontaliers, quelle que soit la nature de la juridiction.

50      La procédure spéciale régie par le règlement n° 1896/2006 ainsi que les objectifs que ce dernier poursuit ne trouvent toutefois pas à s’appliquer lorsque les créances à l’origine d’une injonction de payer sont contestées au moyen de l’opposition prévue à l’article 16 de ce règlement (voir, en ce sens, arrêts eco cosmetics et Raiffeisenbank St. Georgen, C‑119/13 et C‑120/13, EU:C:2014:2144, point 39, ainsi que Goldbet Sportwetten, C‑144/12, EU:C:2013:393, points 31 et 42).

51      Or, en l’occurrence, il est constant que le défendeur a formé opposition, dans le délai prévu à cette fin à l’article 16, paragraphe 2, du règlement n° 1896/2006, contre l’injonction de payer européenne délivrée à son encontre. Dès lors, dans la mesure où l’article 17, paragraphe 1, de ce règlement constitue la seule disposition dudit règlement régissant les effets d’une telle opposition, il convient d’examiner si cette disposition permet de déterminer les pouvoirs et les obligations d’une juridiction telle que la juridiction de renvoi, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, en se référant tant à la lettre de cette disposition qu’à l’économie du même règlement.

52      Selon son libellé, l’article 17, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2006 se borne à exiger, en cas d’opposition du défendeur introduite dans le délai prévu à cette fin, la poursuite automatique de la procédure devant les juridictions compétentes de l’État membre d’origine de l’injonction de payer, conformément aux règles de la procédure civile ordinaire, sauf si le demandeur a expressément demandé qu’il soit mis un terme à la procédure dans ce cas.

53      S’agissant de l’économie du règlement n° 1896/2006, il ressort d’une lecture combinée des considérants 8 et 10 ainsi que de l’article 26 de ce règlement que ce dernier institue une procédure européenne d’injonction de payer qui constitue un instrument complémentaire et facultatif pour le demandeur, sans que ledit règlement remplace ou harmonise les mécanismes de recouvrement des créances incontestées prévus par le droit national. En effet, le règlement n° 1896/2006 met en place un instrument uniforme de recouvrement, garantissant des conditions identiques aux créanciers et aux débiteurs dans l’ensemble de l’Union, tout en prévoyant l’application du droit procédural des États membres à toute question de procédure non expressément réglée par ce règlement.

54      Dans la mesure où il ressort de l’économie du règlement n° 1896/2006 que celui-ci ne vise pas à harmoniser les droits procéduraux des États membres, et compte tenu de la portée limitée de l’article 17, paragraphe 1, de ce règlement, telle que précisée au point 52 du présent arrêt, il y a lieu d’interpréter cette disposition, en tant qu’elle prévoit la poursuite automatique de la procédure, en cas d’opposition du défendeur, conformément aux règles de la procédure civile ordinaire, en ce sens qu’elle n’impose aucune exigence particulière relative à la nature des juridictions devant lesquelles la procédure doit se poursuivre ou aux règles qu’une telle juridiction doit appliquer.

55      Il s’ensuit qu’il est, en principe, satisfait aux exigences prévues à l’article 17, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2006 lorsque la procédure se poursuit, à la suite de l’opposition du défendeur, devant une juridiction telle que la juridiction de renvoi, qui examine, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, la compétence internationale des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer européenne pour connaître de la procédure civile ordinaire afférente à la créance contestée, en application des règles prévues par le règlement n° 44/2001.

56      Or, ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 72 de ses conclusions, ni l’article 17, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2006 ni aucune autre disposition de ce règlement ne permettent d’identifier les pouvoirs et les obligations d’une juridiction telle que la juridiction de renvoi, dans des circonstances telles que celles en cause au principal. En l’absence, dans le règlement n° 1896/2006, de règle expresse relative à cette question de procédure, cette question demeure, conformément à l’article 26 dudit règlement, régie par le droit national.

57      Par ailleurs, dans la mesure où il ressort de la demande de décision préjudicielle que la juridiction de renvoi est amenée à se prononcer sur la question de la compétence internationale des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer européenne pour connaître de la procédure contentieuse relative à la créance contestée, en appliquant à cette fin, ainsi qu’il a été dit au point 46 du présent arrêt, les règles prévues par le règlement n° 44/2001, il convient de vérifier les obligations éventuelles qui découlent, pour cette juridiction, de ce règlement.

58      À cet égard, il est constant que le règlement n° 44/2001 n’a pas pour objet d’unifier l’étendue des obligations de contrôle qui incombent aux juridictions nationales lors de la vérification de leur compétence internationale. L’application des règles nationales pertinentes ne doit toutefois pas porter atteinte à l’effet utile du règlement n° 44/2001 (voir arrêt Kolassa, C‑375/13, EU:C:2015:37, points 59 et 60 ainsi que jurisprudence citée).

59      S’agissant des exigences à respecter lors de la procédure, il convient également de rappeler que l’ensemble des dispositions du règlement n° 44/2001 expriment l’intention de veiller à ce que, dans le cadre des objectifs de celui-ci, les procédures menant à l’adoption de décisions judiciaires se déroulent dans le respect des droits de la défense (voir, en ce sens, arrêts G, C‑292/10, EU:C:2012:142, point 47, ainsi que A, C‑112/13, EU:C:2014:2195, point 51 et jurisprudence citée).

60      Dans ce contexte, il convient de souligner que tant l’objectif d’une bonne administration de la justice, qui sous-tend le règlement n° 44/2001, que le respect dû à l’autonomie du juge dans l’exercice de ses fonctions exigent que la juridiction amenée à se prononcer sur la question de la compétence internationale puisse examiner cette question à la lumière de toutes les informations dont elle dispose, y compris, le cas échéant, les contestations émises par le défendeur (voir, en ce sens, arrêt Kolassa, C‑375/13, EU:C:2015:37, point 64).

61      En l’occurrence, il ressort de la demande de décision préjudicielle que la juridiction de renvoi ne dispose que d’informations relatives à la question de la compétence internationale des juridictions de l’État membre d’origine fournies par le demandeur dans sa demande d’injonction de payer européenne, ces informations pouvant être, selon l’article 7, paragraphe 2, sous f), du règlement n° 1896/2006, réduites à une simple indication des chefs de compétence internationale, sans que le demandeur soit obligé d’exposer des éléments de rattachement de la créance réclamée dans le cadre de la procédure d’injonction de payer européenne à l’État membre dans lequel il a introduit une telle demande.

62      Il convient de relever dans ce contexte que le dossier dont dispose la Cour ne permet pas d’identifier les règles nationales applicables à la procédure dont la juridiction de renvoi est, en l’occurrence, saisie. Cela étant, si cette juridiction était, en application du droit procédural national, obligée d’apprécier la compétence internationale des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer exclusivement au regard des éléments présentés par le demandeur dans sa demande d’injonction de payer européenne, une telle procédure ne pourrait garantir ni l’effet utile des règles de compétence établies par le règlement n° 44/2001 ni les droits de la défense dont bénéficie le défendeur.

63      En effet, les règles nationales applicables à la procédure dont la juridiction de renvoi est en l’occurrence saisie doivent permettre à cette dernière d’examiner la question de la compétence internationale, en application des règles prévues par le règlement n° 44/2001, eu égard à toutes les informations qui lui sont nécessaires à cette fin, ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 63 de ses conclusions, en entendant, le cas échéant, les parties à ce sujet.

64      Si tel n’était pas le cas, il serait loisible à cette juridiction soit d’interpréter ses règles de procédure en ce sens qu’elles lui permettent de satisfaire auxdites exigences, soit de désigner, ainsi que la juridiction de renvoi l’a elle-même suggéré, une juridiction matériellement compétente pour connaître au fond d’une créance telle que celle en cause au principal au titre de la procédure civile ordinaire, en tant que juridiction territorialement compétente, et appelée, dans ce cas, à statuer, le cas échéant, sur sa propre compétence internationale au regard des critères énoncés par le règlement n° 44/2001.

65      Enfin, il convient de répondre aux interrogations de la juridiction de renvoi relatives aux obligations qui lui incombent à la suite de l’examen de la compétence des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer européenne, auquel elle aurait procédé dans les conditions rappelées aux points 62 et 63 du présent arrêt.

66      À cet égard, s’il s’avérait, à l’issue des vérifications, que la compétence des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer européenne puisse être établie au titre des dispositions du règlement n° 44/2001, une juridiction telle que la juridiction de renvoi ne pourrait, sous peine de porter atteinte à l’effet utile de la règle prévue par ledit règlement, en vertu de laquelle la compétence est établie, mettre fin à la procédure, au seul motif qu’elle ne parvient pas, en application du droit national, à identifier une juridiction territorialement compétente pour statuer au fond sur la créance contestée.

67      En effet, cette juridiction est obligée, ainsi que l’a relevé le gouvernement hongrois dans ses observations écrites, d’interpréter le droit national en ce sens que ce dernier lui permet d’identifier ou de désigner la juridiction territorialement et matériellement compétente pour statuer au fond sur la créance à l’origine de l’injonction de payer contre laquelle le défendeur a formé opposition dans le délai prévu à cette fin.

68      Par ailleurs, mettre fin à la procédure contentieuse relative au fond de la créance contestée, alors que la compétence des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer est établie au titre du règlement n° 44/2001, porterait atteinte également à l’effet utile de l’article 17, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2006, dans la mesure où cette disposition exige que la procédure soit poursuivie, en cas d’opposition du défendeur, automatiquement devant les juridictions compétentes de l’État membre d’origine de l’injonction de payer.

69      En revanche, si les juridictions de l’État membre d’origine ne sont pas compétentes au titre du règlement n° 44/2001, il n’est pas nécessaire, contrairement à ce que semble considérer la juridiction de renvoi, de réexaminer d’office, par analogie avec l’article 20 du règlement n° 1896/2006, l’injonction de payer contre laquelle le défendeur a valablement formé opposition.

70      À cet égard, il ressort de la jurisprudence de la Cour que les possibilités de réexamen de l’injonction de payer, prévues à l’article 20 du règlement n° 1896/2006, ne s’appliquent que si le défendeur n’a pas formé opposition dans le délai prévu à l’article 16, paragraphe 2, de ce règlement (voir, en ce sens, arrêt Thomas Cook Belgium, C‑245/14, EU:C:2015:715, points 47 et 48).

71      De plus, dans la mesure où une situation procédurale telle que celle en cause au principal est, ainsi que cela ressort des points 55 et 56 du présent arrêt, régie non pas par les dispositions du règlement n° 1896/2006, mais par le droit national, les dispositions de ce règlement, y compris son article 20, ne sauraient s’appliquer, même par analogie, à cette situation (voir, en ce sens, arrêt eco cosmetics et Raiffeisenbank St. Georgen, C‑119/13 et C‑120/13, EU:C:2014:2144, point 45).

72      En outre, conformément à l’article 18, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2006, une injonction de payer contre laquelle le défendeur a formé opposition dans le délai prévu à cette fin ne peut se voir conférer force exécutoire. Par conséquent, il est loisible à une juridiction telle que la juridiction de renvoi de tirer de son constat de l’absence de compétence des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer européenne au titre du règlement n° 44/2001 les conséquences prévues, dans cette hypothèse, par le droit procédural national.

73      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il convient de répondre aux questions posées que le droit de l’Union doit être interprété en ce sens que, dans des circonstances dans lesquelles une juridiction est saisie d’une procédure, telle que celle au principal, relative à la désignation d’une juridiction territorialement compétente de l’État membre d’origine de l’injonction de payer européenne, et examine, dans lesdites circonstances, la compétence internationale des juridictions de cet État membre pour connaître de la procédure contentieuse relative à la créance à l’origine d’une telle injonction de payer, contre laquelle le défendeur a formé opposition dans le délai prévu à cette fin:

–        le règlement n° 1896/2006 ne fournissant pas d’indications relatives aux pouvoirs et aux obligations de cette juridiction, ces questions de procédure demeurent, en application de l’article 26 de ce règlement, régies par le droit national dudit État membre;

–        le règlement n° 44/2001 exige que la question de la compétence internationale des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer européenne soit tranchée en application des règles de procédure qui permettent de garantir l’effet utile des dispositions de ce règlement et les droits de la défense, que ce soit la juridiction de renvoi ou une juridiction que cette dernière désigne en tant que juridiction territorialement et matériellement compétente pour connaître d’une créance telle que celle en cause au principal, au titre de la procédure civile ordinaire, qui se prononce sur cette question;

–        dans l’hypothèse où une juridiction telle que la juridiction de renvoi se prononce sur la compétence internationale des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer européenne et conclut à l’existence d’une telle compétence au regard des critères énoncés par le règlement n° 44/2001, ce dernier règlement et le règlement n° 1896/2006 obligent cette juridiction à interpréter le droit national en ce sens que ce dernier lui permet d’identifier ou de désigner une juridiction territorialement et matériellement compétente pour connaître de cette procédure, et,

–        dans l’hypothèse où une juridiction telle que la juridiction de renvoi conclut à l’absence d’une telle compétence internationale, cette juridiction n’est pas tenue de réexaminer d’office, par analogie avec l’article 20 du règlement n° 1896/2006, cette injonction de payer.

 Sur les dépens

74      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit:

Le droit de l’Union européenne doit être interprété en ce sens que, dans des circonstances dans lesquelles une juridiction est saisie d’une procédure, telle que celle au principal, relative à la désignation d’une juridiction territorialement compétente de l’État membre d’origine de l’injonction de payer européenne, et examine, dans lesdites circonstances, la compétence internationale des juridictions de cet État membre pour connaître de la procédure contentieuse relative à la créance à l’origine d’une telle injonction de payer, contre laquelle le défendeur a formé opposition dans le délai prévu à cette fin:

–        le règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, instituant une procédure européenne d’injonction de payer, ne fournissant pas d’indications relatives aux pouvoirs et aux obligations de cette juridiction, ces questions de procédure demeurent, en application de l’article 26 de ce règlement, régies par le droit national dudit État membre;

–        le règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, exige que la question de la compétence internationale des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer européenne soit tranchée en application des règles de procédure qui permettent de garantir l’effet utile des dispositions de ce règlement et les droits de la défense, que ce soit la juridiction de renvoi ou une juridiction que cette dernière désigne en tant que juridiction territorialement et matériellement compétente pour connaître d’une créance telle que celle en cause au principal, au titre de la procédure civile ordinaire, qui se prononce sur cette question;

–        dans l’hypothèse où une juridiction telle que la juridiction de renvoi se prononce sur la compétence internationale des juridictions de l’État membre d’origine de l’injonction de payer européenne et conclut à l’existence d’une telle compétence au regard des critères énoncés par le règlement n° 44/2001, ce dernier règlement et le règlement n° 1896/2006 obligent cette juridiction à interpréter le droit national en ce sens que ce dernier lui permet d’identifier ou de désigner une juridiction territorialement et matériellement compétente pour connaître de cette procédure, et,

–        dans l’hypothèse où une juridiction telle que la juridiction de renvoi conclut à l’absence d’une telle compétence internationale, cette juridiction n’est pas tenue de réexaminer d’office, par analogie avec l’article 20 du règlement n° 1896/2006, cette injonction de payer.

Signatures


* Langue de procédure: le hongrois.

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