Master 2 Etudes Européennes et Internationales

Découvrez nos formations

 

Livre vert de la Commission européenne du 21 avril 2009 sur la révision du Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale - COM/2009/0175 final

 

Livre vert de la Commission européenne du 21 avril 2009 sur la révision du Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale

 

COM/2009/0175 final


 


Le présent livre vert accompagne le rapport de la Commission sur l'application du règlement (CE) n° 44/2001 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale («le règlement»)[1]. Il a pour objet d'engager une large consultation des parties intéressées sur les possibilités d'améliorer le fonctionnement du règlement en ce qui concerne les points soulevés dans ce rapport.

La Commission invite toutes les personnes intéressées à lui faire parvenir leurs observations sur les points abordés ci-après, ainsi que toute autre contribution utile, avant le 30 juin 2009, à l'adresse suivante:

Commission européenne

Direction générale de la justice, de la liberté et de la sécurité

Unité E2 – Justice civile

B -1049 Bruxelles Fax: + 32 (0) 2 299 64 57

Courriel: Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Les contributions reçues seront publiées sur l'internet. Pour tout renseignement sur le traitement qui sera réservé aux données à caractère personnel et aux contributions reçues, il est vivement conseillé de prendre connaissance de la déclaration spécifique de confidentialité jointe au dossier de consultation. Les organisations professionnelles sont invitées à s'inscrire au registre des représentants d'intérêts de la Commission européenne[2].

 

1. Suppression de toutes les mesures intermédiaires nécessaires à la reconnaissance et à l'exécution des décisions rendues à l'étranger («exequatur»)

 

L'actuelle procédure d'exequatur du règlement a simplifié la reconnaissance et l'exécution des décisions par rapport au système antérieurement prévu par la convention de Bruxelles de 1968. Il est néanmoins difficile de justifier, dans un marché intérieur sans frontières, que les citoyens et les entreprises aient à supporter des frais et une perte de temps pour exercer leurs droits à l'étranger. Si les demandes de déclaration constatant la force exécutoire aboutissent presque toujours et que la reconnaissance et l'exécution des décisions étrangères ne sont que très rarement refusées, il devrait être réaliste de tendre vers l'objectif de supprimer la procédure d'exequatur dans toute matière civile et commerciale. Dans la pratique, cela s'appliquerait principalement aux créances contestées. La suppression de l'exequatur devrait, cependant, s'accompagner des garanties nécessaires.

Dans le domaine des créances incontestées, les mesures intermédiaires ont été supprimées sur la base d'un contrôle, dans l'État membre d'origine, des normes minimales relatives à la notification ou signification de l'acte introductif d'instance au défendeur et à son information sur la créance et la procédure. En outre, le réexamen exceptionnel devrait remédier aux situations dans lesquelles l'acte introductif d'instance n'a pas été personnellement signifié au défendeur d'une manière lui permettant d'organiser sa défense ou dans lesquelles il lui a été impossible de contester la créance pour cause de force majeure ou de circonstances extraordinaires. Dans le système actuel, le demandeur doit toujours se soumettre à une procédure de certification, même si cette procédure se déroule dans l'État membre d'origine plutôt que dans l'État membre d'exécution.

Par ailleurs, dans le domaine des créances contestées et incontestées, le règlement n° 4/2009 relatif aux obligations alimentaires[3] supprime l'exequatur sur la base de règles harmonisées en matière de loi applicable, et la protection des droits de la défense est assurée par la procédure de réexamen exceptionnel qui s'applique une fois que la décision a été rendue. Le règlement n° 4/2009 part donc du principe que, compte tenu du faible nombre de décisions «problématiques» présentées pour reconnaissance ou exécution, une libre circulation est possible pour autant que le défendeur dispose d'une voie de recours effective a posteriori (réexamen exceptionnel). Si une approche similaire était suivie en matière civile et commerciale en général, le manque d'harmonisation de cette procédure de réexamen exceptionnel risquerait d'introduire une certaine insécurité dans les quelques situations où le défendeur n'a pas pu se défendre devant la juridiction étrangère. Il conviendrait donc d'examiner si une procédure de réexamen plus harmonisée ne serait pas souhaitable.

 

Question 1: Considérez-vous que, dans le marché intérieur, toutes les décisions en matière civile et commerciale devraient circuler librement, sans procédure intermédiaire (suppression de l'exequatur)? Dans l'affirmative, considérez-vous que certaines garanties devraient être maintenues pour permettre cette suppression de l'exequatur? Si oui, lesquelles? |

 

2. Le fonctionnement du règlement dans l'ordre juridique international

 

Le bon fonctionnement du marché intérieur et la politique commerciale de la Communauté, tant au niveau interne qu'au niveau international, requièrent que l'égal accès à la justice sur la base de règles claires et précises en matière de compétence internationale soit assuré non seulement pour les défendeurs, mais aussi pour les demandeurs domiciliés dans la Communauté. Les citoyens de la Communauté ont tous les mêmes besoins juridictionnels dans leurs relations avec les ressortissants de pays tiers. La réponse à ces besoins ne devrait pas varier d'un État membre à l'autre, d'autant que des règles de compétence subsidiaire n'existent pas dans tous les États membres. Une approche commune renforcerait la protection juridique des citoyens et des opérateurs économiques de la Communauté et garantirait l'application de la législation communautaire contraignante.

Pour étendre aux défendeurs domiciliés dans des pays tiers le champ d'application personnel des règles de compétence, il y a lieu d'examiner dans quelle mesure les règles de compétence spéciales du règlement, avec les critères de rattachement actuels, pourraient être appliquées aux défendeurs de pays tiers.

Il conviendrait en outre d'examiner dans quelle mesure il est nécessaire et opportun de créer des motifs de compétence supplémentaires pour les litiges impliquant un défendeur de pays tiers («compétence subsidiaire»). Les règles existant au niveau national visent un objectif important qui est de garantir l'accès à la justice; il conviendrait de réfléchir aux règles uniformes qui pourraient convenir. À cet égard, il conviendrait de trouver un équilibre entre l'accès à la justice, d'une part, et la notion de courtoisie internationale, d'autre part. Trois chefs de compétence pourraient être envisagés à cet égard: la compétence fondée sur l'exercice d'activités, pour autant que le litige porte sur ces activités; la localisation de biens, pour autant que la créance concerne ces biens; et un forum necessitatis, qui permettrait d'engager une procédure dans les cas où il n'y aurait pas autrement d'accès à la justice[4].

Or, si des règles uniformes sont établies pour les créances sur des défendeurs de pays tiers, le risque de procédures parallèles devant les juridictions des États membres et des pays tiers augmentera. Il faut donc examiner dans quelles situations l'accès aux juridictions des États membres doit être assuré indépendamment de la procédure en cours ailleurs et dans quelles situations et quelles conditions il pourrait être opportun d'autoriser les juridictions à se dessaisir en faveur des juridictions de pays tiers. Tel pourrait être le cas, par exemple, lorsque les parties ont conclu un accord exclusif d'élection de for en faveur des juridictions d'un pays tiers, lorsque le litige relève pour d'autres motifs de la compétence exclusive des juridictions d'un pays tiers, ou lorsqu'une procédure parallèle a déjà été engagée dans un pays tiers[5].

Enfin, il conviendrait de se demander dans quelle mesure une extension du champ d'application des règles de compétence devrait s'accompagner de règles communes sur l'effet des décisions rendues dans des pays tiers. Une harmonisation de l'effet de ces décisions renforcerait la sécurité juridique, notamment pour les défendeurs communautaires qui sont parties à une procédure devant une juridiction d'un pays tiers. Un régime commun de reconnaissance et d'exécution des décisions rendues dans les pays tiers leur permettrait de prévoir dans quelles circonstances une telle décision pourrait être exécutée dans un État membre de la Communauté, notamment lorsque cette décision enfreint la législation communautaire contraignante ou que la législation communautaire prévoit une compétence exclusive des juridictions des États membres[6].

 

Question 2:

 

Estimez-vous que les règles de compétence spéciales du règlement pourraient être appliquées aux défendeurs de pays tiers? Quels motifs de compétence supplémentaires jugez-vous nécessaires contre de tels défendeurs?

Comment le règlement devrait-il tenir compte de la compétence exclusive des juridictions de pays tiers et des procédures engagées devant ces juridictions?

À quelles conditions les décisions de juridictions de pays tiers devraient-elles être reconnues et exécutées dans la Communauté, notamment dans les cas où une législation communautaire contraignante est concernée ou dans lesquels les juridictions des États membres ont compétence exclusive?

 

3. Élection de for

 

Il conviendrait de donner le plus large effet possible aux accords d'élection de for conclus par les parties, notamment en raison de leur pertinence pratique dans le commerce international. Il y aurait donc lieu d'examiner dans quelle mesure et de quelle manière l'effet de ces accords pourrait être renforcé dans le cadre du règlement, en particulier en cas de procédures parallèles.

Une solution pourrait consister à libérer la juridiction désignée dans un accord exclusif d'élection de for de son obligation de surseoir à statuer conformément à la règle de litispendance[7]. Cette solution présente cependant l'inconvénient de rendre possibles des procédures parallèles aboutissant à des décisions inconciliables.

Une autre solution pourrait consister à inverser la règle de priorité dans le cas des accords exclusifs d'élection de for. Dans cette option, la juridiction désignée par l'accord d'élection de for aurait la priorité pour établir sa compétence et toute autre juridiction saisie sursoirait à statuer jusqu'à ce que la compétence de la juridiction élue soit établie. Cette solution s'applique déjà dans le cadre du règlement lorsqu'aucune des parties n'est domiciliée dans un État membre. Elle alignerait dans une large mesure les règles communautaires internes sur les règles internationales, mais présenterait un inconvénient en cas d'invalidité de l'accord d'élection de for car une partie devrait d'abord chercher à établir l'invalidité de cet accord devant la juridiction qu'il désigne, avant de pouvoir saisir les juridictions qui seraient autrement compétentes.

Il serait également possible de maintenir la règle de litispendance existante, mais en envisageant une communication et coopération directes entre les deux juridictions, associées, par exemple, à un délai pour que le tribunal premier saisi statue sur la question de la compétence et à l'obligation qui lui incomberait d'informer régulièrement la juridiction saisie en second lieu du déroulement de la procédure. Dans cette option, il conviendrait de veiller à ce que le demandeur ne perde pas un for légitime pour des raisons indépendantes de sa volonté.

L'efficacité des accords d'élection de for pourrait également être renforcée par l'octroi de dommages-intérêts en cas de violation, à la suite par exemple d'un retard ou de l'application des clauses de défaut des contrats de prêt.

Une autre solution pourrait aussi consister à exclure l'application de la règle de litispendance dans les cas où les procédures parallèles consistent, d'une part, en une procédure au fond et, d'autre part, en une procédure tendant à obtenir une décision déclaratoire (négative) ou du moins à assurer une suspension des délais de prescription pour la demande au fond en cas d'échec de la demande de décision déclaratoire.

Enfin, il pourrait être remédié à l'insécurité entourant la validité de l'accord d'élection de for, par exemple, en prescrivant une clause d'élection de for type, qui pourrait en même temps permettre d'accélérer la décision sur la question de la compétence[8]. Il serait possible d'associer cette option à certaines des solutions précitées: l'acceptation de procédures parallèles ou le renversement de la règle de priorité pourraient être limités aux cas dans lesquels l'accord d'élection de for correspond au modèle prescrit par le règlement.

 

Question 3: Laquelle des solutions précitées ou d'autres solutions possibles considérez-vous comme la plus apte à renforcer l'efficacité des accords d'élection de for dans la Communauté? |

 

4. Propriété industrielle

 

La possibilité de faire respecter ou de contester effectivement des droits de propriété industrielle dans la Communauté est d'une importance capitale pour le bon fonctionnement du marché intérieur. Le droit matériel de la propriété intellectuelle fait déjà largement partie de l'acquis communautaire[9]. La directive 2004/48/CE relative au respect des droits de propriété intellectuelle[10] vise à rapprocher certaines questions de procédure relatives au respect de ces droits. Afin de remédier à l'insécurité juridique et aux coûts élevés qu'entraîne la multiplication des procédures devant les juridictions nationales, la Commission a proposé la création d'une structure juridictionnelle intégrée, par la mise en place d'un système unifié de règlement des litiges en matière de brevets européens, qui serait habilitée à statuer sur la validité et la contrefaçon des brevets européens et des futurs brevets communautaires sur l'ensemble du territoire du marché intérieur[11]. En outre, le 20 mars 2009, la Commission a adopté une recommandation au Conseil concernant les directives de négociation aux fins de la conclusion d'un accord international entre la Communauté, ses États membres et les autres États contractants de la convention sur le brevet européen[12]. En attendant la création du système unifié de règlement des litiges en matière de brevets, il est possible d'épingler certaines lacunes du système actuel et d'y remédier dans le cadre du règlement (CE) n° 44/2001.

En ce qui concerne la coordination des procédures parallèles en contrefaçon, il pourrait être envisagé de renforcer la communication et l'interaction entre les juridictions saisies parallèlement et/ou d'exclure l'application de cette règle en cas de décision déclaratoire négative (cf. point 3 ci-dessus).

Pour ce qui est de la coordination des procédures en contrefaçon et en nullité, plusieurs solutions destinées à contrer les pratiques de «torpillage» ont été proposées dans l'étude générale, à laquelle il convient de se reporter pour de plus amples informations sur ces solutions. Cependant, la création d'un système unifié de règlement des litiges en matière de brevets pourrait remédier aux problèmes, sans qu'il soit nécessaire de modifier le règlement.

S'il est jugé opportun de joindre les procédures engagées contre plusieurs contrefacteurs de brevet européen lorsque ceux-ci appartiennent à un groupe d'entreprises agissant d'une manière coordonnée, une solution pourrait consister à établir une règle spécifique permettant de porter les procédures en contrefaçon concernant certains droits de propriété industrielle qui sont engagées contre plusieurs défendeurs devant les juridictions de l'État membre où est domicilié le défendeur coordonnant les activités ou ayant le rapport le plus étroit avec la contrefaçon. Comme l'a fait observer la Cour de justice, cette règle pourrait présenter l'inconvénient que sa forte base factuelle pourrait entraîner une multiplication des chefs potentiels de compétence et nuire ainsi à la prévisibilité des règles de compétence prévues par le règlement et au principe de sécurité juridique. En outre, cette règle risquerait de conduire à la recherche du tribunal le plus favorable («forum shopping»). On pourrait par ailleurs envisager une reformulation de la règle relative à la pluralité de défendeurs afin de renforcer le rôle des juridictions de l'État membre dans lequel le principal responsable est domicilié.

 

Question 4: Selon vous, quelles sont les insuffisances du système actuel de règlement des litiges en matière de brevets auxquelles il conviendrait de remédier en premier lieu dans le cadre du règlement n° 44/2001 et quelles sont parmi les solutions précitées celles qui permettraient de mieux faire respecter les droits de propriété industrielle, tant du point de vue des titulaires des droits que de celui des demandeurs qui les contestent, dans le cadre du règlement? |

 

5. Litispendance et connexité

 

En ce qui concerne le fonctionnement général de la règle de litispendance, il conviendrait d'examiner si le renforcement de la communication et de l'interaction entre les juridictions saisies de procédures parallèles et/ou l'exclusion de l'application de cette règle en cas de décision déclarative négative (cf. point 3 ci-dessus) pourraient remédier aux problèmes actuels.

S'agissant de la règle sur la connexité, il conviendrait de se demander dans quelle mesure il serait opportun d'autoriser la jonction des actions formées par plusieurs parties et/ou contre plusieurs parties sur la base de règles uniformes. Le risque de conflits de compétence négatifs pourrait être évité par un mécanisme de coopération et de communication entre les juridictions concernées et par l'obligation pour la juridiction qui s'est dessaisie de rouvrir l'affaire si le tribunal premier saisi se dessaisit à son tour. À l'article 30, paragraphe 2, il conviendrait de préciser que l'autorité chargée de la notification ou de la signification est l'autorité qui reçoit en premier les actes à notifier ou à signifier. De même, compte tenu de l'importance de la date et de l'heure de réception, les autorités chargées de la notification ou de la signification et les juridictions, selon le cas, doivent prendre note de la date et de l'heure exactes auxquelles elles ont reçu les actes à notifier ou à signifier ou auxquelles l'acte introductif d'instance a été déposé auprès de la juridiction.

Il serait aussi possible de prévoir une extension limitée de la règle prévue à l'article 6, paragraphe 1, afin d'autoriser une jonction lorsque la juridiction a compétence pour un certain quorum de défendeurs.

Question 5: De quelle manière, selon vous, la coordination de procédures parallèles (litispendance) devant des juridictions d'États membres différents pourrait-elle être améliorée? Estimez-vous qu'une jonction des actions formées par plusieurs parties et/ou contre plusieurs parties devrait être prévue au niveau communautaire sur la base de règles uniformes? |

 

6. Mesures provisoires

 

Le rapport met en évidence plusieurs difficultés liées à la libre circulation des mesures provisoires.

En ce qui concerne les mesures adoptées sans que le défendeur soit entendu[13], il pourrait être opportun de préciser que ces mesures peuvent être reconnues et exécutées en vertu du règlement si le défendeur a la possibilité de les contester ultérieurement, notamment à la lumière de l'article 9, paragraphe 4, de la directive 2004/48/CE.

En outre, la question de l'attribution de la compétence pour les mesures provisoires ordonnées par un tribunal qui n'est pas compétent pour connaître du fond pourrait être abordée autrement qu'elle ne l'est aujourd'hui selon la jurisprudence existante de la Cour. En particulier, si l'État membre dont les juridictions sont compétentes pour connaître du fond était habilité à abroger, modifier ou adapter une mesure provisoire octroyée par les juridictions d'un État membre ayant compétence en vertu de l'article 31, la condition de l'existence d'un «lien de rattachement réel» pourrait être supprimée. Le rôle de la juridiction saisie de la demande serait d'apporter son assistance à la procédure au fond en «prêtant des voies de recours», notamment lorsqu'une protection effective n'est pas disponible dans tous les États membres, sans empiéter sur la compétence du juge du fond. Lorsque cette assistance ne serait plus nécessaire, ce dernier pourrait annuler la mesure étrangère. Là encore, une communication entre les juridictions concernées pourrait être utile. Cela permettrait aux demandeurs de solliciter une protection provisoire efficace lorsque celle-ci est disponible en Europe.

Pour ce qui est de l'exigence de la garantie de remboursement d'un paiement intermédiaire, il pourrait être souhaitable de préciser que cette garantie ne doit pas nécessairement consister en une provision ou une garantie bancaire. On pourrait par ailleurs considérer que cette difficulté sera résolue à l'avenir par la jurisprudence.

Enfin, si l'exequatur est supprimé, l'article 47 du règlement doit être adapté. À cet égard, son libellé pourrait s'inspirer de celui de l'article 18 du règlement (CE) n° 4/2009.

Question 6: Estimez-vous que la libre circulation des mesures provisoires puisse être améliorée de la manière proposée dans le rapport et dans le présent livre vert? Voyez-vous d'autres possibilités d'améliorer cette circulation? |

 

7. L'interface entre le règlement et l'arbitrage

 

L'arbitrage est d'une importance capitale pour le commerce international. Il conviendrait donc de conférer le plus large effet possible aux conventions d'arbitrage et d'encourager la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales. La convention de New York de 1958 est généralement considérée comme fonctionnant de façon satisfaisante et est appréciée des praticiens. Il semble donc opportun de ne rien changer au fonctionnement de cette convention ou, du moins, de s'en servir de base pour d'autres mesures. Cela ne devrait toutefois pas empêcher l'aménagement de certains points du règlement relatifs à l'arbitrage, non pas pour réglementer l'arbitrage, mais avant tout pour assurer une circulation sans heurts des décisions en Europe et pour prévenir les procédures parallèles.

En particulier, une suppression (partielle) de l'exclusion de l'arbitrage du champ d'application du règlement pourrait améliorer l'interface entre l'arbitrage et la procédure judiciaire. En conséquence de cette suppression, la procédure judiciaire à l'appui de l'arbitrage pourrait entrer dans le champ d'application du règlement. Une règle spécifique d'attribution de compétence dans ce type de procédures renforcerait la sécurité juridique. Par exemple, il a été proposé de donner compétence exclusive dans ce type de procédures aux juridictions de l'État membre dans lequel se déroule l'arbitrage, éventuellement sous réserve d'un accord entre les parties[14].

La suppression de l'exclusion de l'arbitrage pourrait également faire en sorte que toutes les règles de compétence du règlement s'appliquent pour l'octroi de mesures provisoires à l'appui de l'arbitrage (pas uniquement l'article 31). Les mesures provisoires ordonnées par les juridictions sont en effet importantes pour garantir l'efficacité de l'arbitrage, notamment jusqu'à la constitution du tribunal arbitral.

Ensuite, la suppression de cette exclusion pourrait permettre la reconnaissance des décisions statuant sur la validité d'une convention d'arbitrage et clarifier la reconnaissance et l'exécution des décisions incorporant une sentence arbitrale. Elle pourrait également garantir la reconnaissance d'une décision annulant une sentence arbitrale[15]. Cela pourrait éviter les procédures parallèles entre les juridictions et les tribunaux d'arbitrage lorsque la convention est jugée invalide dans un État membre et valide dans un autre.

Plus généralement, on pourrait veiller à la coordination des procédures concernant la validité d'une convention d'arbitrage engagées devant une juridiction et devant un tribunal d'arbitrage. On pourrait, par exemple, donner la priorité aux juridictions de l'État membre où se déroule l'arbitrage pour statuer sur l'existence, la validité et la portée d'une convention d'arbitrage. Cela pourrait, de même, s'accompagner d'une coopération renforcée entre les juridictions saisies, y compris la fixation d'un délai pour contester la validité de la convention. Une règle de conflit uniforme concernant la validité des conventions d'arbitrage renvoyant, par exemple, à la législation de l'État où se déroule l'arbitrage, pourrait réduire le risque qu'une convention soit considérée comme valide dans un État membre et invalide dans un autre. Cela pourrait renforcer, au niveau communautaire, l'efficacité des conventions d'arbitrage par rapport à l'article II, paragraphe 3, de la convention de New York.

En outre, en ce qui concerne la reconnaissance et l'exécution, les sentences arbitrales qui sont exécutoires en vertu de la convention de New York pourraient bénéficier d'une règle permettant de refuser l'exécution d'une décision qui est inconciliable avec une sentence arbitrale. Une solution autre ou supplémentaire pourrait consister à donner à l'État membre où une sentence arbitrale a été rendue compétence exclusive pour certifier sa force exécutoire et son équité procédurale, après quoi cette sentence circulerait librement dans la Communauté. Une autre solution envisagée consiste à tirer parti de l'article VII de la convention de New York pour faciliter davantage au niveau de l'UE la reconnaissance des sentences arbitrales (question qui pourrait également faire l'objet d'un instrument communautaire distinct).

Question 7: Quelle action vous paraît indiquée au niveau communautaire: renforcer l'efficacité des conventions d'arbitrage; assurer une bonne coordination des procédures judiciaires et arbitrales; accroître l'efficacité des sentences arbitrales? |

 

- 8. Autres aspects

 

8.1 . Champ d'application

 

En ce qui concerne le champ d'application, les obligations alimentaires devraient être ajoutées à la liste des exclusions, suite à l'adoption du règlement (CE) n° 4/2009 relatif aux obligations alimentaires. S'agissant du fonctionnement de l'article 71 qui porte sur la relation entre le règlement et les conventions relatives à des matières particulières, il a été proposé d'en réduire le champ d'application autant que possible.

 

8.2. Compétence

 

Eu égard à l'importance du domicile en tant que principal critère de rattachement pour établir la compétence, il y a lieu d'examiner la possibilité de définir une notion autonome.

En outre, il faudrait apprécier l'opportunité de créer une compétence non exclusive fondée sur la situation des actifs mobiliers en ce qui concerne la possession ou les droits réels relatifs à ces actifs. Pour ce qui est des contrats de travail, il conviendrait d'examiner l'opportunité de permettre la jonction des actions conformément à l'article 6, paragraphe 1S'agissant de la compétence exclusive, il y aurait lieu de débattre de la question de savoir si l'élection de for devrait être autorisée dans les contrats de location de bureaux. En ce qui concerne les contrats de location de logements de vacances, une certaine souplesse pourrait être souhaitable afin d'éviter que la procédure judiciaire ne se déroule en un for éloigné pour toutes les parties. Il conviendrait aussi de se demander s'il serait opportun d'étendre le champ de la compétence exclusive en droit des sociétés (article 22, paragraphe 2) à d'autres matières relatives à l'organisation interne et à la prise de décision des sociétés. Il faudrait également voir si une définition uniforme du «siège» d'une société peut être envisagée. En ce qui concerne le fonctionnement de l'article 65, il conviendrait d'examiner l'opportunité d'établir une règle uniforme en matière de demandes en intervention, qui se limiterait éventuellement aux demandes à l'encontre de tiers étrangers. Une autre possibilité serait de maintenir les différentes règles de procédure nationales, mais le libellé de l'article 65 pourrait être modifié afin de permettre aux législations nationales d'évoluer vers une solution commune. De plus, l'obligation imposée à la juridiction saisie de la demande formée contre un tiers dans une procédure en intervention de vérifier la recevabilité de l'avis de mise en cause pourrait réduire l'insécurité quant à l'effet de la décision de cette juridiction à l'étranger.

En matière maritime, il conviendrait d'examiner l'opportunité d'une jonction des actions visant à obtenir la constitution d'un fonds de responsabilité et des actions individuelles en responsabilité, sur la base du règlement. Pour ce qui est de la force obligatoire d'une clause d'élection de for dans un connaissement pour le tiers porteur de ce dernier, les parties prenantes ont proposé que le transporteur sous connaissement soit lié par cette clause et soit, en même temps, autorisé à l'opposer au tiers porteur, à moins que le connaissement ne soit pas suffisamment clair sur ce point.

S'agissant du crédit aux consommateurs, il conviendrait d'examiner la possibilité d'aligner le libellé de l'article 15, paragraphe 1, points a) et b), du règlement sur la définition du crédit aux consommateurs contenue dans la directive 2008/48[16].

En ce qui concerne les travaux en cours à la Commission en matière de recours collectifs[17], il y aurait lieu de s'interroger sur la nécessité de règles de compétence spécifiques pour ce type de recours.

 

8.3. Reconnaissance et exécution des décisions

 

En ce qui concerne la reconnaissance et l'exécution des décisions, il conviendrait de réfléchir à l'opportunité d'aborder la question de la libre circulation des actes authentiques[18]. En matière familiale (les règlements (CE) n° 2201/2003 et n° 4/2009), le règlement d'un litige dans un acte authentique est automatiquement reconnu dans les autres États membres. Il s'agit à présent de se demander si une «reconnaissance» serait indiquée dans la totalité ou seulement dans certaines des matières civiles et commerciales, compte tenu des effets juridiques spécifiques des actes authentiques.

En outre, la libre circulation des décisions imposant des paiements à titre de pénalités pourrait être améliorée en faisant en sorte que le montant de la pénalité soit fixé soit par la juridiction d'origine soit par une autorité de l'État membre d'exécution. Il convient également d'examiner dans quelle mesure le règlement devrait permettre non seulement le recouvrement de pénalités par le créancier, mais aussi celles qui sont perçues par le tribunal ou les autorités fiscales.

Enfin, l'accès à la justice au stade de l'exécution pourrait être amélioré en établissant un formulaire uniforme disponible dans toutes les langues de la Communauté et contenant un extrait de la décision[19]. Un tel formulaire éviterait de devoir traduire l'intégralité de la décision et ferait en sorte que les autorités chargées de l'exécution disposent de toutes les informations requises (par exemple, en ce qui concerne les intérêts). Les coûts d'exécution pourraient être réduits en supprimant l'obligation de faire élection de domicile ou de désigner un mandataire ad litem[20]. Vu l'harmonisation actuelle de la législation communautaire, notamment le règlement (CE) n° 1393/2007 relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale[21], cette obligation apparaît en effet obsolète aujourd'hui.

 

Question 8: Pensez-vous que le fonctionnement du règlement pourrait être amélioré de la manière exposée ci-dessus? |

 

[1] JO L 12 du 16.1.2001, p. 1.

[2] (http://ec.europa.eu/transparency/regrin). Ce registre a été mis en place dans le cadre de l'Initiative européenne en matière de transparence afin de fournir à la Commission et au grand public des informations sur les objectifs, le financement et les structures des représentants d'intérêts.

[3] JO L 7 du 10.1.2009, p. 1.

[4] Voir la disposition relative au forum necessitatis à l'article 7 du règlement n° 4/2009. Cette disposition prévoit que lorsque aucune juridiction d’un État membre n’est compétente en vertu du règlement, les juridictions d’un État membre peuvent, dans des cas exceptionnels, connaître du litige si une procédure ne peut raisonnablement être introduite ou conduite, ou se révèle impossible dans un État tiers avec lequel le litige a un lien étroit.

[5] Sur ces questions, on peut se reporter à l'étude sur la compétence subsidiaire mentionnée dans le rapport, ainsi qu'aux travaux du Groupe européen de droit international privé (GEDIP), notamment ceux de sa réunion de septembre 2008 à Bergen (voir http://www.gedip-egpil.eu/gedip_documents.html).

[6] Cette préoccupation s'est exprimée, par exemple, dans le contexte des recours collectifs de consommateurs, dans lesquels des entreprises communautaires sont parties à une action collective dans un pays tiers (par exemple, les États-Unis).

[7] La règle de litispendance prévoit que lorsque des demandes ayant le même objet et la même cause sont formées entre les mêmes parties devant des juridictions d’États membres différents, la juridiction saisie en second lieu sursoit d’office à statuer jusqu’à ce que la compétence du tribunal premier saisi soit établie.

[8] En ce qui concerne la validité de l'accord, il est parfois suggéré qu'une règle de conflit harmonisée pourrait permettre d'assurer une application uniforme des dispositions du règlement. Il convient de souligner que la loi applicable aux accords d'élection de for est exclue du champ d'application du règlement (CE) n° 593/2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I).

[9] Les droits de propriété intellectuelle incluent également le droit d'auteur, qui ne fait pas l'objet du présent livre vert. En tant que droit non soumis à enregistrement, le droit d'auteur n'est pas couvert par les règles de compétence exclusive du règlement.

[10] Directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle (JO L 157 du 30.4.2004, p. 45).

[11] COM(2007) 165.

[12] SEC(2009) 330.

[13] Dans le contexte des mesures provisoires, il s'agit d'ordonnances de référé rendues par une juridiction à la demande d'une partie sans que l'autre soit entendue.

[14] Si cette approche était retenue, des critères uniformes devraient permettre de déterminer le lieu d'arbitrage. L'étude générale propose de se référer à l'accord des parties ou à la décision du tribunal d'arbitrage. Si ce lieu ne peut être établi sur cette base, il est proposé de se tourner vers les juridictions de l'État membre qui auraient eu à connaître du litige en vertu du règlement en l'absence de convention d'arbitrage.

[15] Ce point est particulièrement important, notamment si la sentence est infirmée pour violation de dispositions contraignantes de la législation communautaire (par exemple, les règles en matière de concurrence).

[16] Directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil, JO L 133 du 22.5.2008, p. 66.

[17] Voir le Livre vert sur les recours collectifs pour les consommateurs (COM(2008) 794 final du 27.11.2008) et le Livre blanc sur les actions en dommages et intérêts pour infraction aux règles communautaires sur les ententes et les abus de position dominante (COM(2008) 165 final du 2.4.2008).

[18] Dans sa résolution du 18 décembre 2008, le Parlement européen a également mentionné un acte authentique européen.

[19] Voir, par exemple, le règlement (CE) n° 4/2009.

[20] Un mandataire ad litem est une personne désignée pour agir au nom d'une partie au cours de la procédure judiciaire.

[21] JO L 324 du 10.12.2007, p. 79.

Back to top