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CJUE, 28 juin 2007, aff. C-467/05, Procédure pénale contre Giovanni Dell'Orto

 

Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 28 juin 2007

Affaire C-467/05

Procédure pénale

contre

Giovanni Dell'Orto

 

(demande de décision préjudicielle, introduite par

le juge chargé des enquêtes préliminaires près le Tribunale di Milano)

«Coopération policière et judiciaire en matière pénale — Décision-cadre 2001/220/JAI — Directive 2004/80/CE — Notion de 'victime' dans le cadre de procédures pénales — Personne morale — Restitution de biens saisis au cours d'une procédure pénale»

 

Sommaire de l'arrêt

1.        Questions préjudicielles — Question portant sur l'interprétation d'une décision-cadre adoptée sur le fondement du titre VI du traité UE

(Art. 234 CE; art. 35 UE et 46, b), UE)

2.        Questions préjudicielles — Compétence de la Cour — Coopération policière et judiciaire en matière pénale

(Art. 234 CE; art. 35 UE et 46, b), UE)

3.        Actes des institutions — Application dans le temps — Règles de procédure

4.        Union européenne — Coopération policière et judiciaire en matière pénale — Statut des victimes dans le cadre des procédures pénales — Décision-cadre 2001/220

(Décision-cadre du Conseil 2001/220, art. 1er, a), 2, § 1, et 8, § 1)

1.        Le fait qu'une décision de renvoi portant sur l'interprétation d'une décision-cadre adoptée sur le fondement du titre VI du traité UE ne mentionne pas l'article 35 UE, mais se réfère à l'article 234 CE, ne saurait, à lui seul, entraîner l'irrecevabilité de la demande de décision préjudicielle. Il en est d'autant plus ainsi que le traité UE ne prévoit ni explicitement ni implicitement la forme dans laquelle la juridiction nationale doit présenter sa demande de décision préjudicielle.

(cf. point 36)

2.        En vertu de l'article 46, sous b), UE, le régime prévu à l'article 234 CE a vocation à s'appliquer à l'article 35 UE, sous réserve des conditions prévues à cette dernière disposition. À l'instar de l'article 234 CE, l'article 35 UE subordonne la saisine de la Cour à titre préjudiciel à la condition que la juridiction nationale estime qu'une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, en sorte que la jurisprudence de la Cour relative à la recevabilité des questions préjudicielles posées au titre de l'article 234 CE est, en principe, transposable aux demandes de décisions préjudicielles présentées à la Cour en vertu de l'article 35 UE.

Il s'ensuit que la présomption de pertinence qui s'attache aux questions posées à titre préjudiciel par les juridictions nationales ne peut être écartée que dans des cas exceptionnels, lorsqu'il apparaît de manière manifeste que l'interprétation sollicitée des dispositions du droit de l'Union visées dans ces questions n'a aucun rapport avec la réalité ou l'objet du litige au principal ou lorsque le problème est de nature hypothétique ou que la Cour ne dispose pas des éléments de fait ou de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées. Sauf en de telles hypothèses, la Cour est, en principe, tenue de statuer sur les questions préjudicielles portant sur l'interprétation des actes visés à l'article 35, paragraphe 1, UE.

(cf. points 34, 39-40)

3.        Les règles de procédure sont généralement censées s'appliquer à tous les litiges pendants à la date à laquelle elles entrent en vigueur, à la différence des règles de fond qui sont habituellement interprétées comme ne visant pas des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur.

Or, la question de la compétence juridictionnelle aux fins d'une décision concernant la restitution à la victime de biens qui ont été saisis au cours de la procédure pénale relève du domaine des règles de procédure, en sorte qu'aucun obstacle relatif à l'application de la loi dans le temps ne s'oppose à la prise en compte, dans le cadre d'un litige portant sur cette question, des dispositions pertinentes de la décision-cadre 2001/220, relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales, en vue d'une interprétation conforme à celle-ci du droit national applicable.

(cf. points 48-49)

4.        La décision-cadre 2001/220, relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales, doit être interprétée en ce sens que, dans le cadre d'une procédure pénale et, plus spécifiquement, d'une procédure d'exécution postérieure à un jugement définitif de condamnation, la notion de victime au sens de cette décision-cadre n'inclut pas les personnes morales qui ont subi un préjudice directement causé par des actes ou des omissions enfreignant la législation pénale d'un État membre.

En effet, interpréter la décision-cadre en ce sens qu'elle viserait également les personnes morales qui prétendent avoir subi un préjudice directement causé par une infraction pénale irait à l'encontre de la lettre même de l'article 1er, sous a), de cette décision-cadre, qui vise seulement les personnes physiques qui ont subi un préjudice directement causé par des comportements contraires à la législation pénale d'un État membre. À cela s'ajoute qu'aucune autre disposition de la décision-cadre ne comporte une indication selon laquelle le législateur de l'Union européenne aurait entendu étendre la notion de victime à des personnes morales aux fins de l'application de cette décision-cadre. Tout au contraire, plusieurs dispositions de celle-ci, dont notamment les articles 2, paragraphes 1 et 2, et 8, paragraphe 1, confirment que l'objectif du législateur a été de viser exclusivement les personnes physiques victimes d'un préjudice résultant d'une infraction pénale.

La directive 2004/80, relative à l'indemnisation des victimes de la criminalité, n'est pas de nature à infirmer cette interprétation. En effet, à supposer même que les dispositions d'une directive adoptée sur le fondement du traité CE puissent avoir une quelconque incidence sur l'interprétation des dispositions d'une décision-cadre fondée sur le traité UE et que la notion de victime au sens de la directive puisse être interprétée comme visant des personnes morales, la directive et la décision-cadre ne se trouvent en toute hypothèse pas dans une relation appelant une interprétation uniforme de la notion en cause.

(cf. points 53-55, 57-58, 60 et disp.)

 

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

28 juin 2007

 

«Coopération policière et judiciaire en matière pénale – Décision-cadre 2001/220/JAI – Directive 2004/80/CE – Notion de ‘victime’ dans le cadre de procédures pénales – Personne morale – Restitution de biens saisis au cours d’une procédure pénale»

Dans l’affaire C‑467/05,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le juge chargé des enquêtes préliminaires près le Tribunale di Milano (Italie), par décision du 6 octobre 2005, parvenue à la Cour le 27 décembre 2005, dans la procédure pénale contre

Giovanni Dell’Orto,

en présence de:

Saipem SpA,

 

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. A. Rosas, président de chambre, MM. J. Klučka, J. N. Cunha Rodrigues (rapporteur), A. Ó Caoimh et Mme P. Lindh, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er février 2007,

considérant les observations présentées:

–        pour M. Dell’Orto, par Me M. Brusa, avvocato,

–        pour le gouvernement italien, par M. I. M. Braguglia, en qualité d’agent, assisté de M. D. Del Gaizo, avvocato dello Stato,

–        pour l’Irlande, par M. D. O’Hagan, en qualité d’agent, assisté de M. N. Travers, BL,

–        pour le gouvernement néerlandais, par Mmes H. G. Sevenster et C. ten Dam ainsi que par M. M. de Grave, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement autrichien, par M. H. Dossi, en qualité d’agent,

–        pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme E. O’Neill, en qualité d’agent, assistée de M. J. Turner, barrister,

–        pour la Commission des Communautés européennes, par Mmes M. Condou-Durande et E. Righini ainsi que par M. L. Visaggio, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 8 mars 2007,

rend le présent

 

Arrêt

 

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la décision-cadre 2001/220/JAI du Conseil, du 15 mars 2001, relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales (JO L 82, p. 1, ci-après la «décision-cadre»), et de la directive 2004/80/CE du Conseil, du 29 avril 2004, relative à l’indemnisation des victimes de la criminalité (JO L 261, p. 15, ci-après la «directive»).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure pénale d’exécution postérieure à un jugement définitif de condamnation, poursuivie devant le juge chargé des enquêtes préliminaires près le Tribunale di Milano, faisant fonction de juge de l’exécution, et portant sur la restitution de biens mis sous séquestre.

 

 Le cadre juridique

 

 Le droit de l’Union européenne

 La décision-cadre

3        L’article 1er de la décision-cadre dispose:

«Aux fins de la présente décision-cadre, on entend par:

a)      ‘victime’: la personne physique qui a subi un préjudice, y compris une atteinte à son intégrité physique ou mentale, une souffrance morale ou une perte matérielle, directement causé par des actes ou des omissions qui enfreignent la législation pénale d’un État membre;

[…]

c)      ‘procédure pénale’: la procédure pénale conformément à la loi nationale applicable;

d)      ‘procédure’: la procédure au sens large, c’est-à-dire comprenant, outre la procédure pénale, tous les contacts que la victime établit, en sa qualité de victime, avec toute autorité, tout service public ou tout organisme d’aide aux victimes avant, pendant ou après le procès pénal;

[…]»

4        L’article 2 de la décision-cadre prévoit:

«1. Chaque État membre assure aux victimes un rôle réel et approprié dans son système judiciaire pénal. Il continue à œuvrer pour garantir aux victimes un traitement dûment respectueux de leur dignité personnelle pendant la procédure et reconnaît les droits et intérêts légitimes des victimes, notamment dans le cadre de la procédure pénale.

2. Chaque État membre veille à ce que les victimes particulièrement vulnérables bénéficient d’un traitement spécifique répondant au mieux à leur situation.»

5        Conformément à l’article 8, paragraphe 1, de la décision-cadre:

«Chaque État membre garantit un niveau approprié de protection aux victimes et, le cas échéant, à leur famille ou aux personnes assimilées à des membres de leur famille, notamment en matière de sécurité et de protection de leur vie privée, dès lors que les autorités compétentes estiment qu’il existe un risque grave d’actes de rétorsion ou de solides indices laissant présumer une perturbation grave et intentionnelle de leur vie privée.»

6        Aux termes de l’article 9 de la décision-cadre:

«1.      Chaque État membre garantit qu’il existe, pour la victime d’une infraction pénale, le droit d’obtenir qu’il soit statué dans un délai raisonnable sur la réparation par l’auteur de l’infraction dans le cadre de la procédure pénale, sauf lorsque, pour certains cas, la loi nationale prévoit que l’indemnisation interviendra dans un autre cadre.

[…]

3.      Sauf nécessité absolue de la procédure pénale, les biens restituables qui appartiennent à la victime et qui ont été saisis au cours de la procédure lui sont rendus sans tarder.»

7        Conformément à l’article 17, troisième tiret, de la décision-cadre, chaque État membre devait mettre en vigueur les lois, règlements et dispositions administratives nécessaires aux fins de l’application des articles cités aux points 3 à 6 du présent arrêt au plus tard le 22 mars 2002.

 La directive

8        Aux termes de l’article 1er de la directive:

«Si l’infraction intentionnelle violente a été commise dans un État membre autre que celui où le demandeur réside habituellement, les États membres veillent à ce que celui-ci ait le droit de présenter sa demande [d’indemnisation] à une autorité ou à tout autre organisme dudit État membre.»

9        L’article 2 de la directive énonce:

«L’indemnité est versée par l’autorité compétente de l’État membre sur le territoire duquel l’infraction a été commise.»

10      L’article 12 de la directive est libellé comme suit:

«1.      Les dispositions relatives à l’accès à l’indemnisation dans les situations transfrontalières établies par la présente directive fonctionnent sur la base des régimes en vigueur dans les États membres pour l’indemnisation des victimes de la criminalité intentionnelle violente commise sur leurs territoires respectifs.

2.      Tous les États membres veillent à ce que leurs dispositions nationales prévoient l’existence d’un régime d’indemnisation des victimes de la criminalité intentionnelle violente commise sur leurs territoires respectifs qui garantisse une indemnisation juste et appropriée des victimes.»

11      L’article 17 de la directive prévoit:

«La présente directive n’empêche pas les États membres, dans la mesure où ces dispositions sont compatibles avec la présente directive:

a)      d’adopter ou de maintenir des dispositions plus favorables, dans l’intérêt des victimes d’infractions ou de toute autre personne affectée par une infraction;

b)      d’adopter ou de maintenir des dispositions en vue d’indemniser les victimes d’infractions commises en dehors de leur territoire ou toute autre personne affectée par ces infractions, sous réserve d’éventuelles conditions que les États membres peuvent préciser à cet effet.»

12      L’article 18, paragraphes 1 et 2, de la directive dispose:

«1.      Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 1er janvier 2006, à l’exception de l’article 12, paragraphe 2, pour lequel la mise en conformité aura lieu au plus tard le 1er juillet 2005. Ils en informent immédiatement la Commission.

2.      Les États membres peuvent prévoir que les mesures nécessaires pour se conformer à la présente directive ne s’appliquent qu’aux demandeurs ayant subi des dommages corporels du fait d’infractions commises après le 30 juin 2005.»

 La réglementation nationale

13      Conformément à l’article 263 du code de procédure pénale italien, tel que modifié par la loi n° 134, du 12 juin 2003 (ci-après le «CPP»):

«1.      La restitution des biens mis sous séquestre est fixée par le juge sur ordonnance dès lors qu’il ne subsiste aucun doute sur leur appartenance.

[…]

3.      En cas de litige sur la propriété des biens mis sous séquestre, le juge saisit, en ce qui concerne la restitution, la juridiction civile du lieu compétente en première instance, en maintenant pendant ce temps la mise sous séquestre.

[…]

6.      Dès lors que le jugement ne peut plus faire l’objet d’un appel, le juge de l’exécution procède à la restitution des biens.»

14      L’article 444 du CPP prévoit:

«1.      Le prévenu et le ministère public peuvent demander à la juridiction l’application d’une sanction de substitution, de l’espèce et dans la mesure indiquées, ou d’une sanction pécuniaire, réduite au maximum d’un tiers du quantum, ou d’une peine d’emprisonnement lorsque celle-ci, compte tenu des circonstances et réduite au maximum d’un tiers du quantum, ne dépasse pas cinq années, seules ou assorties d’une sanction pécuniaire.

2.      S’il existe un accord, même de la partie n’ayant pas formulé la demande, et pour autant qu’il n’y ait pas de jugement de relaxe […], la juridiction, sur la base des actes, à supposer que la qualification des faits, l’application et la comparaison des circonstances exposées par les parties soient exactes et que la sanction indiquée soit adéquate, dispose par jugement l’application de ladite sanction, en mentionnant dans le dispositif que les parties en ont introduit la demande. En cas de constitution de partie civile, la juridiction ne se prononce pas sur cette demande; […]

[…]»

15      Aux termes de l’article 665, paragraphe 1, du CPP:

«Sauf disposition contraire de la loi, seul le juge ayant statué sur une décision est compétent pour connaître de l’exécution de cette décision.»

 

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

 

16      Il ressort de la décision de renvoi qu’une procédure pénale a été engagée devant le Tribunale di Milano contre M. Dell’Orto et d’autres prévenus pour des faits constitutifs du délit de fausses informations sur les sociétés (faux en écritures comptables), également perpétrés dans le but de commettre les délits d’abus de confiance aggravé et de financement illégal de partis politiques. Parmi les personnes affectées par ces infractions figurent plusieurs sociétés appartenant au groupe italien ENI, au nombre desquelles se trouve Saipem SpA (ci-après «Saipem»), qui s’est constituée partie civile dans le cadre de cette procédure pénale.

17      Selon la décision de renvoi, M. Dell’Orto et les autres prévenus ont détourné des sommes d’argent importantes, qui étaient la propriété desdites sociétés, au moyen de la rémunération d’activités de conseil fictives fournies à des sociétés offshore organiquement liées à l’un des coauteurs, s’appropriant ainsi une partie de ces sommes. Plus particulièrement, M. Dell’Orto se serait approprié une somme de 1 064 069,78 euros appartenant à Saipem, somme qui aurait été mise sous séquestre par les autorités judiciaires italiennes au cours de la procédure pénale. Une telle mesure conservatoire aurait, notamment, pour finalité principale et spécifique de garantir la satisfaction des obligations civiles découlant de l’infraction pénale.

18      Ladite procédure pénale a abouti à l’adoption par le juge chargé des enquêtes préliminaires près le Tribunale di Milano d’un jugement, en date du 4 mai 1999 et passé en force de chose jugée le 5 juin suivant, prononçant une peine sur le fondement de l’article 444 du CPP, à savoir par voie dite «de négociation». Par ce jugement, M. Dell’Orto a été condamné à une peine d’emprisonnement et à une amende, cette peine étant assortie du sursis. Rien n’a été prévu quant au sort de la somme mise sous séquestre.

19      Saipem a obtenu la restitution de ladite somme en application d’une ordonnance dudit juge, rendue le 3 décembre 1999. Cette ordonnance a été annulée par un arrêt de la Corte suprema di cassazione du 8 novembre 2001. Celle-ci a relevé en particulier que, dans la mesure où rien n’avait été prévu dans le jugement du 4 mai 1999 quant à la somme mise sous séquestre, la juridiction pénale n’avait pas le pouvoir d’en ordonner la restitution à Saipem.

20      À la suite de l’arrêt du 8 novembre 2001, M. Dell’Orto a demandé audit juge d’ordonner à Saipem de restituer à son tour la somme en cause, étant donné que celle-ci pourrait à nouveau faire l’objet d’une mise sous séquestre dans l’attente d’une décision concernant son éventuelle restitution. Selon M. Dell’Orto, il appartient au juge civil de prendre cette décision en application de l’article 263, paragraphe 3, du CPP, au motif qu’il s’agit d’un litige relatif à la propriété de ladite somme.

21      Par ordonnance du 18 juillet 2003, le juge chargé des enquêtes préliminaires près le Tribunale di Milano a ordonné la transmission du dossier à la juridiction civile, rejetant pour le surplus la demande de M. Dell’Orto.

22      Cette dernière ordonnance a été annulée par un arrêt du 21 avril 2005 de la Corte suprema di cassazione, qui a renvoyé l’affaire devant le même juge. Selon ledit arrêt, si, conformément à l’article 263, paragraphe 3, du CPP, le litige sur la propriété des biens saisis est résolu par le juge civil dans le cadre d’une procédure incidente, cela ne fait pas pour autant disparaître la compétence du juge pénal pour prendre des mesures en ce qui concerne la garde de ces biens jusqu’à ce que le litige sur la propriété de ceux-ci soit résolu, en sorte qu’il appartient au juge chargé des enquêtes préliminaires près le Tribunale di Milano d’«adopter les mesures appropriées aux fins de la mise concrète sous séquestre de la somme entre-temps restituée à Saipem».

23      La procédure suivie devant la juridiction de renvoi a dès lors été rouverte en vue d’assurer l’exécution du second arrêt de la Corte suprema di cassazione.

24      Selon la juridiction de renvoi, il ne saurait subsister dans l’affaire au principal un «litige au regard de la propriété» des sommes mises sous séquestre de nature à justifier l’ouverture d’une procédure incidente devant le juge civil. Les avoirs mis sous séquestre constitueraient un indu devant être restitué à Saipem en vertu de l’article 2037 du code civil italien et il résulterait de l’examen des pièces versées au dossier que M. Dell’Orto n’a jamais contesté que les sommes en litige sont la propriété de cette société.

25      La juridiction de renvoi considère que, à la vérité, un obstacle de nature purement procédurale l’empêche d’ordonner elle-même la restitution desdites sommes à Saipem, la question ayant trait au pouvoir du juge de l’exécution de prendre une décision quant à une telle restitution des sommes mises sous séquestre, à la suite du jugement d’application de la peine prise au titre de l’article 444 du CPP. Selon la jurisprudence de la Corte suprema di cassazione, telle qu’elle résulte en particulier de l’arrêt précité du 8 novembre 2001, le juge de l’exécution n’aurait pas de pouvoir de décision en matière de restitution à la victime des biens saisis à la suite d’un jugement rendu au titre dudit article 444, qui ne prévoit rien à cet effet.

26      Dans ce contexte, la juridiction de renvoi s’interroge sur l’applicabilité des principes énoncés aux articles 2 et 9 de la décision-cadre.

27      Elle se demande, en particulier, si ces articles de la décision-cadre sont applicables du point de vue de leur champ d’application personnel, dès lors que la victime est non pas une personne physique, mais une personne morale.

28      Conformément à son article 1er, sous a), la décision-cadre s’applique à une «personne physique» qui a subi un préjudice. La juridiction de renvoi se demande toutefois s’il est possible d’interpréter la décision-cadre, lue à la lumière des articles 12 et 17 de la directive, en ce sens qu’elle s’applique également à toute autre personne victime d’un crime et, en particulier, aux personnes morales. Si tel était le cas, le principe visé à l’article 9, paragraphe 3, de la décision-cadre, selon lequel les biens saisis dans le cadre de la procédure pénale qui appartiennent à la victime sont rendus sans tarder à cette dernière, trouverait application dans la procédure au principal. Conformément à la jurisprudence de la Cour (arrêt du 16 juin 2005, Pupino, C‑105/03, Rec. p. I-5285), il en résulterait l’obligation pour le juge national d’interpréter, dans toute la mesure du possible, les dispositions du CPP concernant l’étendue des pouvoirs de décision du juge de l’exécution en matière de restitution de biens saisis au cours de la procédure pénale en conformité avec l’article 9, paragraphe 3, de la décision-cadre, qui autorise une procédure simplifiée pour atteindre les objectifs fixés par la réglementation relative à l’indemnisation des victimes.

29      La juridiction de renvoi observe par ailleurs que la Cour a jugé en ce qui concerne des formes d’extinction de l’action pénale qui sont analogues à celle résultant d’un jugement de «négociation» au sens de l’article 444 du CPP qu’elles doivent être considérées de la même manière qu’un arrêt définitif qui clôt la procédure pénale (arrêt du 11 février 2003, Gözütok et Brügge, C‑187/01 et C-385/01, Rec. p. I‑1345).

30      Étant donné que, dans l’affaire au principal, le litige relatif à la restitution des sommes mises sous séquestre est consécutif à la clôture de la procédure pénale intervenue avec le jugement du 4 mai 1999, la juridiction de renvoi s’interroge également sur l’applicabilité des principes visés aux articles 2 et 9 de la décision-cadre dans le contexte spécifique d’une procédure pénale d’exécution postérieure à la clôture de la procédure pénale proprement dite.

31      Dans ces conditions, le juge chargé des enquêtes préliminaires près le Tibunale di Milano a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1      Les règles visées aux articles 2 et 9 de la décision-cadre […] peuvent-elles s’appliquer dans le cadre d’une procédure pénale, de manière générale, à toute partie affectée par une infraction, en vertu des dispositions visées aux articles 1er et suivants de la directive […] ou d’autres dispositions de droit communautaire?

2      Les règles visées aux articles 2 et 9 de la décision-cadre […] peuvent-elles s’appliquer dans le cadre d’une procédure pénale d’exécution postérieure au jugement définitif de condamnation (et donc également au jugement d’application de la peine, prévu à l’article 444 du code de procédure pénale) à toute partie affectée par une infraction, en vertu des dispositions des articles 1er et suivants de la directive […] ou d’autres dispositions de droit communautaire?»

 

 Sur les questions préjudicielles

 

 Sur la recevabilité

32      Plusieurs gouvernements ayant déposé des observations dans le cadre de la présente procédure ont mis en doute la recevabilité de la demande de décision préjudicielle.

33      Le gouvernement du Royaume-Uni soutient que l’irrecevabilité de la demande de décision préjudicielle résulte de la circonstance que ladite demande est fondée sur l’article 234 CE, alors que l’interprétation sollicitée concerne la décision-cadre, à savoir un acte adopté en vertu du titre VI du traité UE. Dans un tel cas, la demande devrait être fondée exclusivement sur l’article 35, paragraphe 1, UE, tandis que l’article 234 CE ne serait pas applicable. L’Irlande relève que, dans la mesure où en l’occurrence les conditions d’application de l’article 35 UE sont remplies, l’invocation erronée de l’article 234 CE en tant que fondement de la demande ne devrait pas empêcher la Cour de répondre aux questions posées par la juridiction de renvoi.

34      Il convient de relever d’emblée que, conformément à l’article 46, sous b), UE, les dispositions des traités CE et CEEA relatives à la compétence de la Cour et à l’exercice de cette compétence, parmi lesquelles figure l’article 234 CE, sont applicables à celles du titre VI du traité UE, dans les conditions prévues à l’article 35 UE. Contrairement à ce que soutient le gouvernement du Royaume-Uni, il en résulte que le régime prévu à l’article 234 CE a vocation à s’appliquer à la compétence préjudicielle de la Cour au titre de l’article 35 UE, sous réserve des conditions prévues à cette disposition (voir, en ce sens, arrêt Pupino, précité, points 19 et 28).

35      Il est constant que la République italienne a indiqué, par une déclaration prenant effet le 1er mai 1999, date de l’entrée en vigueur du traité d’Amsterdam, qu’elle acceptait la compétence de la Cour pour statuer sur la validité et l’interprétation des actes visés à l’article 35 UE selon les modalités prévues au paragraphe 3, sous b), de cet article. Il est également constant que la décision-cadre, fondée sur les articles 31 UE et 34 UE, relève des actes visés à l’article 35, paragraphe 1, UE, à propos desquels la Cour peut statuer à titre préjudiciel (arrêt Pupino, précité, points 20 et 22) et il n’est pas contesté que le juge chargé des enquêtes préliminaires près le Tribunale di Milano, agissant dans le cadre d’une procédure telle que celle en cause au principal, doit être considéré comme une juridiction d’un État membre au sens de l’article 35 UE.

36      Dans ces conditions, et abstraction faite de la circonstance que les questions préjudicielles portent également sur l’interprétation d’une directive adoptée au titre du traité CE, le fait que la décision de renvoi ne mentionne pas l’article 35 UE, mais se réfère à l’article 234 CE, ne saurait, à lui seul, entraîner l’irrecevabilité de la demande de décision préjudicielle. Il en est d’autant plus ainsi que le traité UE ne prévoit ni explicitement ni implicitement la forme dans laquelle la juridiction nationale doit présenter sa demande de décision préjudicielle (voir par analogie, à propos de l’article 234 CE, arrêt du 6 avril 1962, De Geus, 13/61, Rec. p. 89, 102).

37      Le gouvernement néerlandais met en doute la recevabilité de la demande de décision préjudicielle au motif que le cadre factuel et réglementaire ne serait pas suffisamment défini dans la décision de renvoi. Selon ce gouvernement, il en résulte plus particulièrement que l’utilité des questions posées n’apparaît pas clairement, dans la mesure où, en l’absence de précisions sur le droit national applicable, il est impossible de vérifier si, comme le soutient la juridiction de renvoi, se pose une question d’interprétation de ce droit en conformité avec la décision-cadre, qui est par ailleurs dépourvue d’effet direct.

38      Le gouvernement autrichien relève que le droit italien empêche la juridiction de renvoi de se prononcer dans le cadre de la procédure au principal sur des demandes ressortissant au droit civil, en sorte que les questions préjudicielles revêtent un caractère hypothétique.

39      Il convient de relever que, à l’instar de l’article 234 CE, l’article 35 UE subordonne la saisine de la Cour à titre préjudiciel à la condition que la juridiction nationale «estime qu’une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement», en sorte que la jurisprudence de la Cour relative à la recevabilité des questions préjudicielles posées au titre de l’article 234 CE est, en principe, transposable aux demandes de décisions préjudicielles présentées à la Cour en vertu de l’article 35 UE (arrêt Pupino, précité, point 29).

40      Il s’ensuit que la présomption de pertinence qui s’attache aux questions posées à titre préjudiciel par les juridictions nationales ne peut être écartée que dans des cas exceptionnels, lorsqu’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée des dispositions du droit de l’Union visées dans ces questions n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal ou lorsque le problème est de nature hypothétique ou que la Cour ne dispose pas des éléments de fait ou de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées. Sauf en de telles hypothèses, la Cour est, en principe, tenue de statuer sur les questions préjudicielles portant sur l’interprétation des actes visés à l’article 35, paragraphe 1, UE (arrêt Pupino, précité, point 30).

41      Par ailleurs, la nécessité de parvenir à une interprétation du droit communautaire qui soit utile pour le juge national exige que celui-ci définisse le cadre factuel et réglementaire dans lequel s’insèrent les questions qu’il pose ou que, à tout le moins, il explique les hypothèses factuelles sur lesquelles ces questions sont fondées. À cet égard, il est indispensable que le juge national donne un minimum d’explications sur les raisons du choix des dispositions du droit de l’Union dont il demande l’interprétation et sur le lien qu’il établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige (voir notamment, s’agissant de l’article 234 CE, arrêt du 19 avril 2007, Asemfo, C‑295/05, non encore publié au Recueil, points 32 et 33).

42      Les informations fournies dans les décisions de renvoi servent non seulement à permettre à la Cour de donner des réponses utiles, mais également à donner aux gouvernements des États membres ainsi qu’aux autres parties intéressées la possibilité de présenter des observations, conformément à l’article 23 du statut de la Cour de justice (voir, notamment, arrêt du 3 mai 2007, Advocaten voor de Wereld, C-303/05, non encore publié au Recueil, point 20).

43      Ainsi qu’il ressort des points 16 à 30 du présent arrêt, la décision de renvoi expose les faits à l’origine du litige au principal ainsi que les dispositions directement pertinentes du droit national applicable et elle explique les raisons pour lesquelles la juridiction de renvoi sollicite l’interprétation de la décision-cadre, de même que le lien entre cette dernière et la législation nationale applicable en la matière.

44      Contrairement à l’argumentation soutenue par le gouvernement autrichien, il n’est pas manifeste que, dans l’affaire au principal, une interprétation du droit national en conformité avec la décision-cadre soit impossible, ce qu’il appartient au juge national de vérifier (voir, en ce sens, arrêt Pupino, précité, point 48).

45      Dans ces conditions, il n’est pas manifeste que l’interprétation sollicitée des dispositions de la décision-cadre visées dans les questions posées n’ait aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, que le problème soit de nature hypothétique ou que la Cour ne dispose pas des éléments de fait ou de droit nécessaires pour répondre de manière utile à ces questions.

46      Enfin, les indications contenues dans la décision de renvoi sont également suffisantes pour sauvegarder la possibilité de présenter des observations dont disposent les parties en cause au principal, les États membres, le Conseil de l’Union européenne et la Commission des Communautés européennes, conformément à l’article 23 du statut de la Cour de justice, ainsi qu’en témoignent d’ailleurs les observations déposées par les parties qui sont intervenues dans la présente procédure.

47      Lors de la phase écrite de la procédure suivie devant la Cour, la question a été soulevée de savoir si la décision-cadre peut être considérée comme applicable du point de vue temporel à un ensemble de circonstances qui, comme dans l’affaire au principal, sont bien antérieures à l’adoption de la décision-cadre le 15 mars 2001, sans compter le délai de mise en œuvre de celle-ci, lequel expirait, s’agissant notamment de son article 9, le 22 mars 2002.

48      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à tous les litiges pendants à la date à laquelle elles entrent en vigueur, à la différence des règles de fond qui sont habituellement interprétées comme ne visant pas des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur (voir, notamment, arrêt du 9 mars 2006, Beemsterboer Coldstore Services, C-293/04, Rec. p. I-2263, point 21 et jurisprudence citée).

49      Or, la question qui est au centre du litige au principal, à savoir celle de la compétence juridictionnelle aux fins d’une décision concernant la restitution à la victime de biens qui ont été saisis au cours de la procédure pénale, relève du domaine des règles de procédure, en sorte qu’aucun obstacle relatif à l’application de la loi dans le temps ne s’oppose à la prise en compte, dans le cadre de ce litige, des dispositions pertinentes de la décision-cadre en vue d’une interprétation conforme à celle-ci du droit national applicable.

50      La demande de décision préjudicielle est dès lors recevable.

 Sur les questions préjudicielles

51      Par ses deux questions, qu’il y a lieu d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande en substance si la décision-cadre doit être interprétée en ce sens que, dans le cadre d’une procédure pénale et, plus spécifiquement, d’une procédure d’exécution postérieure à un jugement définitif de condamnation, telle que celle en cause au principal, la notion de «victime» au sens de la décision-cadre inclut les personnes morales qui ont subi un préjudice directement causé par des actes ou des omissions enfreignant la législation pénale d’un État membre.

52      L’article 1er, sous a), de la décision-cadre définit, aux fins de celle-ci, la victime comme étant la personne «physique» qui a subi un préjudice, y compris une atteinte à son intégrité physique ou mentale, une souffrance morale ou une perte matérielle, directement causé par des actes ou des omissions qui enfreignent la législation pénale d’un État membre.

53      Il résulte du libellé de cette disposition que la décision-cadre vise seulement les personnes physiques qui ont subi un préjudice directement causé par des comportements contraires à la législation pénale d’un État membre.

54      Interpréter la décision-cadre en ce sens qu’elle viserait également les personnes «morales» qui, à l’instar de la partie civile dans l’affaire au principal, prétendent avoir subi un préjudice directement causé par une infraction pénale irait à l’encontre de la lettre même de l’article 1er, sous a), de cette décision-cadre.

55      À cela s’ajoute qu’aucune autre disposition de la décision-cadre ne comporte une indication selon laquelle le législateur de l’Union européenne aurait entendu étendre la notion de victime à des personnes morales aux fins de l’application de cette décision-cadre. Tout au contraire, plusieurs dispositions de celle-ci confirment que l’objectif du législateur a été de viser exclusivement les personnes physiques victimes d’un préjudice résultant d’une infraction pénale.

56      À cet égard, outre l’article 1er, sous a), de la décision-cadre, qui se réfère, en tant que chefs de préjudice, à l’atteinte à l’intégrité physique ou mentale ainsi qu’à la souffrance morale, il convient de mentionner l’article 2, paragraphe 1, de la décision-cadre, qui oblige les États membres à œuvrer pour garantir que les victimes reçoivent un traitement dûment respectueux de leur dignité personnelle, le paragraphe 2 du même article 2, qui évoque le traitement spécifique dont doivent bénéficier les victimes particulièrement vulnérables, de même que l’article 8, paragraphe 1, de la décision-cadre, qui oblige les États membres à garantir un niveau approprié de protection à la famille ou aux personnes assimilées à des membres de la famille de la victime.

57      La directive n’est pas de nature à infirmer cette interprétation. La décision-cadre et la directive régissent des matières différentes. La directive instaure un système de coopération visant à faciliter aux victimes de la criminalité l’accès à l’indemnisation dans des situations transfrontalières. Elle tend à assurer que, dans le cas d’une infraction intentionnelle violente qui a été commise dans un État membre autre que celui où se trouve la résidence habituelle de la victime, celle-ci soit indemnisée par ce premier État. En revanche, la décision-cadre vise à rapprocher les législations des États membres pour ce qui est de la sauvegarde des intérêts de la victime dans le cadre de la procédure pénale. Elle tend à assurer la réparation, par l’auteur de l’infraction pénale, du préjudice subi par la victime.

58      Dès lors, à supposer même que les dispositions d’une directive adoptée sur le fondement du traité CE puissent avoir une quelconque incidence sur l’interprétation des dispositions d’une décision-cadre fondée sur le traité UE et que la notion de victime au sens de la directive puisse être interprétée comme visant des personnes morales, la directive et la décision-cadre ne se trouvent en toute hypothèse pas dans une relation appelant une interprétation uniforme de la notion en cause.

59      Par ailleurs, une situation telle que celle en cause au principal ne relève pas du champ d’application de la directive. Ainsi qu’il ressort du point 57 du présent arrêt, la directive prévoit une indemnisation dans le seul cas d’une infraction intentionnelle violente qui a été commise dans un État membre autre que celui où se trouve la résidence habituelle de la victime, alors que l’affaire au principal porte sur des délits de faux en écritures comptables, d’abus de confiance aggravé et de financement illégal de partis politiques commis pour l’essentiel sur le territoire de l’État membre de résidence de la victime.

60      Il convient dès lors de répondre aux questions posées que la décision-cadre doit être interprétée en ce sens que, dans le cadre d’une procédure pénale et, plus spécifiquement, d’une procédure d’exécution postérieure à un jugement définitif de condamnation, telle que celle en cause au principal, la notion de «victime» au sens de cette décision-cadre n’inclut pas les personnes morales qui ont subi un préjudice directement causé par des actes ou des omissions enfreignant la législation pénale d’un État membre.

 

 Sur les dépens

 

61      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit:

La décision-cadre 2001/220/JAI du Conseil, du 15 mars 2001, relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales, doit être interprétée en ce sens que, dans le cadre d’une procédure pénale et, plus spécifiquement, d’une procédure d’exécution postérieure à un jugement définitif de condamnation, telle que celle en cause au principal, la notion de «victime» au sens de cette décision-cadre n’inclut pas les personnes morales qui ont subi un préjudice directement causé par des actes ou des omissions enfreignant la législation pénale d’un État membre.

Signatures


Langue de procédure: l’italien.

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