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Communication de la Commission européenne du 18 mai 2004 : Renforcer la coopération policière et douanière dans l'Union européenne - I. Rapport sur les mesures prises et les actions entreprises depuis l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam - II. Propositions d'améliorations - COM/2004/0376 final

 

Communication de la Commission européenne du 18 mai 2004 : Renforcer la coopération policière et douanière dans l'Union européenne - I. Rapport sur les mesures prises et les actions entreprises depuis l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam - II. Propositions d'améliorations

 

COM/2004/0376 final


1. INTRODUCTION

 

Le domaine politique "justice et affaires intérieures", qui couvre la coopération entre les services de police et les administrations douanières des États membres, a été introduit dans le droit primaire communautaire par le traité de Maastricht de 1992 [1]. Son article K citait la coopération policière et la coopération douanière parmi les "questions d'intérêt commun... aux fins de la réalisation des objectifs de l'Union." Le traité sur l'Union européenne tel que modifié par le traité d'Amsterdam (ci-après abrégé en "TUE") [2], qui est entré en vigueur le 1er mai 1999, a élargi les possibilités de coopération dans le domaine de la justice et des affaires intérieures. Ce traité a notamment précisé les objectifs et détaillé les actions à entreprendre dans le domaine de la coopération policière et douanière, dont il a en outre renforcé le cadre institutionnel et développé le processus décisionnel.

[1] JO C 191 du 29 juillet 1992. Ce traité marque une "nouvelle étape dans le processus d'intégration européenne" et fixe un nouvel objectif, "faciliter la libre circulation des personnes, tout en assurant la sûreté et la sécurité de leurs peuples, en établissant un espace de liberté, de sécurité et de justice, conformément aux dispositions du présent traité"

[2] JO C 340 du 10 novembre 1997

Dès l'origine, les chefs d'État et de gouvernement se sont attachés à faire avancer la mise en oeuvre des dispositions du traité relatives à la justice et aux affaires intérieures. Ainsi, le Conseil européen de Cardiff des 15 et 16 juin 1998 a invité le Conseil et la Commission à présenter, à la réunion de Vienne de décembre 1998, un "plan d'action concernant les modalités optimales de mise en oeuvre des dispositions du TUE relatives à l'établissement d'un espace de liberté, de sécurité et de justice." Le Plan d'action de Vienne qui en a résulté, en décembre 1998 [3], comportait un nombre considérable de mesures en matière de coopération policière et douanière. Certaines d'entre elles devaient être mises en oeuvre dans les deux ans de l'entrée en vigueur du traité, d'autres dans les cinq années suivant cette date.

[3] "Plan d'action du Conseil et de la Commission concernant les modalités optimales de mise en oeuvre des dispositions du Traité d'Amsterdam relatives à l'établissement d'un espace de liberté, de sécurité et de justice", JO C 19 du 23 janvier 1999, p. 1.

Un conseil européen spécialement consacré aux questions Justice et affaires intérieures a été organisé à Tampere en octobre 1999, soit cinq mois seulement après l'entrée en vigueur du TUE. En matière de coopération policière et douanière, il a appelé les États à prendre certaines mesures en complément de celles mentionnées dans le plan d'action de Vienne. Le programme de Tampere invitait en outre le Conseil et la Commission à favoriser la mise en oeuvre intégrale et immédiate du TUE, sur la base du plan d'action de Vienne et des mesures convenues à Tampere. Le plan d'action de Vienne et le TUE prévoyaient tous les deux l'obligation de mettre certaines mesures en oeuvre dans les cinq années suivant l'entrée en vigueur du traité, c'est-à-dire au plus tard en octobre 2004.

Le conseil européen de Tampere a chargé la Commission d'établir un tableau de bord en vue de suivre les progrès réalisés dans la mise en oeuvre des objectifs fixés dans ce programme. Lors de la rédaction du tableau de bord et de ses mises à jour régulières, la Commission a donc donné la priorité aux mesures recommandées par le conseil de Tampere. Le tableau de bord s'est révélé très utile à l'observation de l'évolution de l'espace de liberté, de sécurité et de justice.

Le conseil européen de Laeken de décembre 2001 avait dressé un bilan à mi-parcours de la mise en oeuvre des conclusions du conseil de Tampere. La Commission procède aujourd'hui à une évaluation des cinq années écoulées depuis ce sommet. La présente communication n'entend pas anticiper sur les résultats de cette évaluation officielle mais plutôt à identifier les mesures prioritaires de coopération policière et douanière qu'il conviendra de reconduire ou d'ajouter à l'agenda européen au cours des prochaines années pour réaliser les avancées nécessaires.

Depuis l'entrée en vigueur du TUE, l'Union européenne a adopté de très nombreuses mesures destinées à améliorer la coopération entre les services de police et les administrations douanières des États membres. Cependant, à la fin de l'année 2002, il est apparu indispensable à la Commission de dresser un bilan des principales évolutions intervenues dans ce domaine, dans le cadre d'une communication.

Tout d'abord, il avait été constaté que nombre de mesures inscrites dans le plan d'action de Vienne n'étaient pas mises en oeuvre et que certaines des instances créées par le conseil européen de Tampere, telles que la Task force des chefs de police européens (TFPC), rencontraient des difficultés. En outre, la coopération entre les services de police et les services des douanes des États membres avait manifestement besoin d'être renforcée. Il existait par ailleurs des exemples de coopération très fructueuse entre certains États membres dans les régions adjacentes à leurs frontières communes, qui n'étaient jamais cités dans les discussions au niveau européen.

Ensuite, la coopération policière et douanière est un domaine très vaste couvrant des sujets multiples, variés et extrêmement techniques, qui sont discutés au sein de maints groupes de travail et organismes distincts, de sorte qu'il n'est pas aisé de suivre toutes ses évolutions importantes. Une communication permettrait d'avoir une vision claire et exhaustive de la situation de la coopération policière et douanière dans l'Union européenne.

En raison de l'élargissement de l'Union, il était en outre indispensable de recenser et de fixer les priorités de la coopération policière et douanière pour les prochaines années. L'intégration de dix nouveaux États membres dans l'ensemble des structures de coopération policière et douanière de l'Union aura des répercussions non négligeables sur un processus décisionnel déjà compliqué.

Enfin, la coopération policière et douanière semblait progresser plus lentement que la coopération judiciaire en matière pénale dans l'Union. Une communication était susceptible d'apporter des éléments permettant de mieux cerner les facteurs à l'origine de cette avancée moins rapide.

Pour toutes les raisons qui viennent d'être exposées, la Commission européenne estimait nécessaire de présenter une vue d'ensemble et une analyse de l'évolution de la coopération policière et douanière dans l'Union européenne depuis l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam en 1999. Elle entend ainsi définir clairement les mesures qui sont indispensables à une coopération plus efficace en vue d'atteindre l'un des principaux objectifs de l'Union, à savoir "... offrir aux citoyens un niveau élevé de protection dans un espace de liberté, de sécurité et de justice..." (article 29 du TUE).

La présente communication se limite à la coopération entre les services de police et les autorités douanières des États membres dans le cadre de la lutte contre la criminalité. Elle exclut les matières exclusivement liées à la coopération judiciaire, ainsi que l'assistance administrative dans le domaine douanier [4] et la coopération douanière visée à l'article 135 du traité instituant la Communauté européenne (TCE) [5], même si elle aborde très brièvement ces domaines connexes lorsque c'est nécessaire. Cette communication n'aborde pas non plus les mesures préventives adoptées ou en cours d'adoption dans le cadre communautaire, même s'il convient de noter que la Communauté se dote graduellement d'instruments destinés à prévenir les actes illicites intentionnels, dont les menées terroristes, notamment pour ce qui concerne les transports aériens et maritimes. Il convient en outre de rappeler que la Stratégie de l'Union européenne sur la criminalité organisée, présentée en mai 2000, formule des recommandations en matière de coopération policière. Lorsque c'est utile, ces mesures sont brièvement examinées dans la présente communication. [6]

[4] JO L 82 du 22 mars 1997, règlement (CE) n°515/97 du Conseil du 13 mars 1997 relatif à l'assistance mutuelle entre les autorités administratives des États membres et à la collaboration entre celles-ci et la Commission en vue d'assurer la bonne application des réglementations douanière et agricole.

[5] JO C 325 du 24 décembre 2002.

[6] Programme d'action de l'Union européenne pour le prochain millénaire en matière de prévention et de contrôle de la criminalité organisée, JO C 124 du 3 mai 2000.

La communication suit le plan suivant: la première partie rappelle les obligations juridiques et les engagements politiques spécifiques à la coopération policière et douanière mentionnés dans le TUE, la convention de Schengen, le plan d'action de Vienne et les conclusions du conseil européen de Tampere. Elle présente également un résumé et un bref bilan des évolutions survenues dans les principaux domaines de la coopération policière et douanière, ainsi que des suggestions pour l'améliorer dans le futur. La seconde partie analyse les principaux facteurs entravant la coopération policière et douanière dans l'UE et émet des recommandations sur les mesures qui, selon la Commission, devraient être arrêtées pour que la coopération enregistre des progrès sensibles dans les prochaines années.

 

I RAPPORT SUR LES MESURES PRISES ET LES ACTIONS ENTREPRISES DEPUIS L'ENTRÉE EN VIGUEUR DU TRAITÉ D'AMSTERDAM

 

1. OBLIGATIONS JURIDIQUES ET ENGAGEMENTS POLITIQUES EN MATIERE DE COOPERATION POLICIERE ET DOUANIERE (TUE, SCHENGEN, PLAN D'ACTION DE VIENNE ET CONCLUSIONS DU CONSEIL EUROPEEN DE TAMPERE)

 

Les obligations juridiques et engagements politiques spécifiques à la coopération policière et douanière en matière pénale dans l'UE sont énoncés dans le traité sur l'Union européenne (TUE), la Convention d'application de l'Accord de Schengen (ci-après dénommée la "convention de Schengen") [7], le plan d'action de Vienne de 1998 et les conclusions du conseil européen de Tampere d'octobre 1999.

[7] JO L 239 du 22 septembre 2000.

L'article 29 du TUE dispose que "...l'objectif de l'Union est d'offrir aux citoyens un niveau élevé de protection dans un espace de liberté, de sécurité et de justice, en élaborant une action en commun entre les États membres dans le domaine de la coopération policière et judiciaire en matière pénale." Cet objectif est atteint par la prévention et la répression de la criminalité, organisée ou autre, grâce notamment à une coopération plus étroite entre les forces de police, les autorités douanières et les autres autorités compétentes dans les États membres, à la fois directement et par l'intermédiaire d'Europol.

L'article 30 expose que l'action en commun dans le domaine de la coopération policière couvre entre autres:

- la coopération opérationnelle entre les autorités compétentes, y compris les services de police, les services des douanes et autres services répressifs spécialisés des États membres, dans le domaine de la prévention et de la détection des infractions pénales et des enquêtes en la matière;

- la collecte, le stockage, le traitement, l'analyse et l'échange d'informations, notamment par l'intermédiaire d'Europol;

- la coopération et les initiatives conjointes dans les domaines de la formation, des échanges d'officiers de liaison et de la recherche en criminalistique;

- et l'évaluation en commun de techniques d'enquête.

Cet article définit également des obligations générales et obligations particulières en ce qui concerne la coopération dans le cadre d'Europol.

Outre les articles 29 et 30 du TUE, il existe des obligations qui sont consécutives à l'intégration de la convention de Schengen de 1990 dans le droit européen. Cette dernière prévoit l'abolition des contrôles aux frontières entre États membres, avec le renforcement simultané des mesures de surveillance aux frontières extérieures communes. Des obligations nouvelles ont été créées en matière de coopération policière, pour compenser le déficit de sécurité qui pourrait résulter de l'abolition des contrôles aux frontières intérieures. Les matières relatives à l'immigration, aux visas et à l'asile ont été intégrées dans le traité instituant la Communauté européenne (titre IV, "premier pilier") et celles relatives à la coopération policière et judiciaire en matière pénale ont été incorporées au titre VI du TUE ("troisième pilier").

Parallèlement à ces textes contraignants, d'autres documents importants contiennent l'engagement, pris au plus haut niveau politique, de réaliser des avancées concrètes dans la coopération policière: le programme d'action relatif à la criminalité organisée de 1997 [8], le plan d'action de Vienne de décembre 1998 et les conclusions du conseil européen de Tampere d'octobre 1999. Plus récemment, la Commission a publié un document intitulé "Prévention et contrôle de la criminalité organisée: une stratégie de l'Union européenne pour le prochain millénaire". [9]

[8] JO C 251 du 15 août 1997.

[9] JO C 124 du 3 mai 2000.

Après l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, le conseil européen de Tampere avait prescrit la mise en oeuvre d'une nouvelle série de mesures importantes dans le domaine de la coopération policière, notamment la création d'une task force opérationnelle des chefs de police européens qui participerait à la planification des interventions, la faculté pour Europol de faire partie des équipes d'enquêteurs et de demander aux États membres d'ouvrir des enquêtes, et la création d'un collège européen de police chargé de former les hauts fonctionnaires des services de police. Les conclusions de Tampere mentionnaient expressément que le plan d'action de Vienne demeurerait en vigueur.

Le fait que deux conseils européens aient adopté des mesures d'une telle portée à la veille et au lendemain de l'entrée en vigueur du TUE témoigne de la volonté des plus hautes instances politiques de l'Union de faire progresser rapidement la coopération policière et douanière.

Outre les mesures requises par le TUE, le plan d'action de Vienne et les conclusions de Tampere, certains événements ont produit l'élan politique nécessaire pour avancer dans plusieurs domaines. Ainsi, à la suite des violentes manifestations qui avaient eu lieu à l'occasion des conseils européens de Nice et de Göteborg en 2001, la coopération en matière de maintien de l'ordre public a été intensifiée. De même, au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, de nombreuses mesures ont été prises pour accroître la coopération dans la lutte antiterroriste.

La coopération policière dans l'Union élargit et complète la coopération bilatérale qui existe déjà, et qui a porté ses fruits, entre les États membres. Une nouvelle étape a récemment été franchie dans cette coopération bilatérale, qui a été formalisée et intensifiée entre États membres limitrophes par la création de commissariats communs ou de centres de coopération policière et douanière. Le relais entre les initiatives bilatérales et la coopération policière au niveau européen est assuré par le plan d'action de Vienne, qui encourage expressément à renforcer cette coopération à travers toute l'Union.

 

2. LA COOPERATION DEPUIS MAI 1999 - REALISATIONS ET BILAN

 

2.1. La coopération policière

 

2.1.1. La police dans la coopération Schengen

 

Ainsi qu'il a été dit au chapitre 2, le traité d'Amsterdam de 1997 a intégré la Convention d'application de l'Accord de Schengen de 1990 dans le cadre de l'Union européenne.

Schengen avait pour objectif "la suppression des contrôles aux frontières communes dans la circulation des personnes [10]". La coopération policière figurait parmi les "mesures complémentaires pour la sauvegarde de la sécurité [11]."

[10] Voir le préambule de la convention de Schengen

[11] Art. 17 de l'accord de Schengen de 1985.

La convention de Schengen impose aux États membres [12] un certain nombre d'obligations en ce qui concerne la coopération policière à leurs frontières intérieures communes, aux frontières extérieures du territoire Schengen (frontières terrestres, aéroports internationaux, frontières maritimes) et à l'intérieur de l'espace Schengen en général, afin de compenser le déficit de sécurité qui pourrait résulter de l'abolition des contrôles aux frontières intérieures. Le plan d'action de Vienne de 1997 et les conclusions du conseil de Tampere de 1999 [13] constituent l'architecture normative et, dans une moindre mesure, opérationnelle de l'espace de liberté, de sécurité et de justice. Dans ce contexte, "Schengen" a une importance fondamentale car il est la clé de voûte de cet espace, en octroyant la liberté de circuler tout en prévoyant le minimum de mesures nécessaires pour compenser les déficits de sécurité, et il garantit que le système judiciaire pourra faire face aux conséquences de cette mobilité accrue. La convention de Schengen fixe le cadre législatif de l'abolition des contrôles aux frontières intérieures, de la mise en place de contrôles aux frontières extérieures sur la base de normes communes, et des règles d'application obligatoires qui en découlent en vue de l'intensification de la coopération des services répressifs.

[12] La convention de Schengen parle de "Parties Contractantes". Le terme "États membres" est toutefois employé dans la présente communication pour en faciliter la lecture.

[13] Voir l'annexe III.

Les obligations créées par la convention de Schengen qui sont décrites ci-dessous sont les plus importantes en matière de coopération policière.

L'article 39 dispose que les États membres "s'engagent à ce que" les services de police s'accordent l'assistance aux fins de la prévention et de la recherche de faits punissables. Les demandes d'assistance doivent être échangées entre "organes centraux chargés de la coopération policière", sauf si l'urgence de l'affaire justifie qu'elles soient échangées directement entre autorités de police compétentes. Il arrive toutefois que des litiges surgissent car, d'une part, les compétences des services de police diffèrent considérablement d'un État membre à l'autre, d'autre part, l'article 39, paragraphe 2, de la convention de Schengen prévoit que l'État membre requérant ne peut utiliser les informations écrites aux fins de preuve dans une procédure pénale qu'avec l'accord des autorités judiciaires compétentes de l'État membre requis.

Cet article, combiné à l'article 46 (voir ci-dessous), est à l'origine de maintes conventions bilatérales entre États Schengen. Les accords qui vont le plus loin sont ceux qui ont instauré des structures d'échange d'informations et une coopération permanentes, sous la forme de commissariats communs et de centres de coopération policière et douanière (CCPD) aux frontières intérieures. Parmi les exemples, on peut citer les CCPD de Kehl/Offenburg (Allemagne/France) [14], Tournai (Belgique/France) [15]; Vintimille et Modane [16] (France/Italie), Canfranc-Somport-Urdos, Le Perthus-La Junquera, Melles Pont du Roy-Les et Biriatou-Irún (France/Espagne) [17], Tuy/Valença do Minho, Caya/Elvas, Vilar Formoso/Fuentes de Oñoro, Vila Real de Santo Antonio/Ayamonte (Espagne /Portugal) [18].

[14] Accord du 7 décembre 1995 relatif à la coopération policière dans les régions transfrontalières, qui crée des commissariats communs franco-allemands permanents, et accord intergouvernemental de Mondorf-les-bains du 9 octobre 1997 relatif à la coopération policière et douanière dans les régions transfrontalières (entré en vigueur le 1er avril 2000).

[15] Accord du 5 mars 2001 relatif à la coopération policière et douanière dans les régions transfrontalières (qui crée le centre de coopération policière et douanière de Tournai).

[16] Convention de Chambéry du 3 octobre 1997 créant les services communs de Vintimille et Modane.

[17] Traité de Blois du 7 juillet 1998 relatif à la coopération policière et douanière transfrontalière.

[18] Accord du 19 novembre 1997.

Par ailleurs, une coopération policière trilatérale s'est développée avec succès entre les Pays-Bas, la Belgique et l'Allemagne, dans le triangle Maastricht, Aix-la-Chapelle, Eupen. La France et le Luxembourg ont conclu un accord [19], qui n'est pas encore entré en vigueur. Une structure de coopération quadrilatérale réunissant le Luxembourg, la France, la Belgique et l'Allemagne est sur le point d'être mise en place. Ces centres de coopération ont permis de résoudre les problèmes posés par le "déficit de sécurité" dans les régions frontalières consécutif à la disparition des contrôles aux frontières, et par la compétence territoriale exclusivement nationale des services répressifs. La coopération facilite les échanges d'informations, les opérations et les contrôles communs, et l'organisation d'actions coordonnées. Il est à noter que ces formes de coopération sont jugées utiles tant par les services concernés des États membres que par la population des régions dans lesquelles elles ont été créées.

[19] Accord du 15 octobre 2001 avec le Luxembourg.

Le plan d'action de Vienne invite à étendre cette coopération transfrontalière. La Commission est arrivée à la conclusion que si l'on appliquait plus largement ce modèle dans toute l'Union, d'une part, la lutte contre la criminalité gagnerait en efficacité, d'autre part, la confiance mutuelle et la coopération entre les services répressifs des différents États membres se développeraient. Il serait du reste utile de choisir quelques exemples de cette coopération et d'en faire des modèles de référence pour les États membres dans lesquels elle n'existe pas encore. Le projet de recommandation du Conseil concernant les commissariats communs et les centres de coopération policière et douanière [20], préparé par la Belgique durant sa présidence, constituerait un excellent point de départ. La Commission aura recours au programme AGIS pour favoriser l'adoption de ces modèles de coopération.

[20] Document du Conseil ENFOPOL 45 du 5 avril 2002.

L'article 44 de la convention de Schengen contient des obligations à court terme, et des engagements à long terme, visant à améliorer les liaisons , notamment dans les régions frontalières. On ne dispose toutefois pas d'informations suffisantes pour déterminer si ce texte a été respecté. Les liaisons à établir concernent non seulement le téléphone et la télécopie, mais également les liaisons de données et entre ordinateurs. Les mesures à explorer dans le long terme concernent essentiellement l'amélioration des radiocommunications.

Le principal obstacle relatif aux radiocommunications réside dans l'incompatibilité technique des deux grandes normes de communication, TETRA et TETRAPOL. Pour y remédier, l'échange d'équipements radio entre les services de police des régions frontalières est stipulé dans la plupart des accords bilatéraux cités précédemment. Afin de favoriser l'interopérabilité, le comité de l'article 36 a approuvé, le 15 décembre 2002, les conclusions d'un séminaire organisé à Helsinki les 20 et 21 septembre 1999 [21], qui suggérait d'instaurer l'interopérabilité entre les normes TETRA et TETRAPOL. Dans cette perspective, la Commission salue le questionnaire élaboré par la présidence grecque au premier semestre 2003, en vue faire le point sur l'achat, l'installation, le fonctionnement et l'interopérabilité des systèmes sans fil numériques [22].

[21] Voir document du Conseil 11626/2/99 ENFOPOL 64 Rev 2, et 142117/99 CATS 40.

[22] Voir document du Conseil 15788/02 ENFOPOL 159.

Les radiocommunications directes sont plus particulièrement destinées aux opérations transfrontalières. Dans les autres cas, l'échange d'informations au titre des articles 39 ou 46 par relais (radio) direct avec le commissariat commun ou le CCPD, ce qui est de plus en plus fréquent, suffit généralement à couvrir les besoins de communication. Aucune donnée n'étant disponible sur les opérations transfrontalières, il n'est pas possible de savoir si des besoins de communication demeurent non satisfaits. Outre l'interopérabilité des systèmes de communication, l'échange des numéros de téléphone et des tables de fréquences, ainsi que la connaissance de la langue de l'autre État membre, sont tout aussi nécessaires à une bonne communication. C'est pourquoi la Commission encourage fortement la formation linguistique des personnels de police, qu'elle considère comme essentielle au succès de la coopération policière transfrontalière.

Les policiers des zones frontalières pourraient également envisager de recourir au téléphone portable pour joindre leurs homologues de l'autre côté de la frontière lorsque des contacts directs sont nécessaires. Bien que cela semble aller de soi, certains services de police y sont réticents en raison des risques de fuite et de dépendance à l'égard des opérateurs commerciaux que cela comporte. Mais comme l'a démontré la police de certains États membres, ces problèmes peuvent être résolus par le cryptage.

L'article 45 dispose que les États membres "s'engagent à prendre les mesures nécessaires" pour garantir que les non-ressortissants remplissent et signent les fiches de déclaration des établissements d'hébergement et justifient de leur identité par la production d'un document d'identité valable, et que ces fiches soient conservées ou transmises aux autorités compétentes. Ces informations peuvent être capitales pour la police, comme en témoignent des succès passés dans la lutte antiterroriste.

Or, à l'heure actuelle, on ne sait pas exactement dans quelle mesure les États membres respectent cette obligation, ni quel usage les services de police font des informations recueillies. Il semble donc nécessaire d'en débattre au Conseil. Les données échangées doivent être protégées conformément à l'article 129, ainsi qu'aux articles 126 et 127, de la convention de Schengen qui imposent, notamment, de respecter comme une norme obligatoire la recommandation R(87)15 du 17 septembre 1987 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe visant à réglementer l'utilisation des données à caractère personnel dans le secteur de la police. Une obligation mérite d'être mentionnée ici, en raison de son utilité pratique pour la coopération transfrontalière: la mise à jour semestrielle du "mémento de coopération policière transfrontalière". Cette obligation est imposée par la décision du Comité exécutif Schengen du 16 décembre 1998 [23]. L'importance du mémento réside dans le fait qu'il précise comment gérer la coopération entre autorités de police situées de part et d'autre des frontières intérieures. Il contient des informations telles que les adresses et les numéros de téléphone des contacts, ou les limites et les obligations auxquelles est soumise la coopération policière transfrontalière. Les États membres se sont engagés à intégrer le mémento dans leurs instructions nationales et à l'actualiser régulièrement. L'initiative de la présidence grecque du Conseil en 2003 tendant à garantir la mise à jour du mémento, et la préparation d'une version actualisée par la Présidence italienne sont donc les bienvenues.

[23] Document du Conseil SCH.Com-ex (98) 52.

Outre les obligations susmentionnées, la convention de Schengen a créé les instruments de coopération suivants, ou fixé des règles d'application, qui facilitent la réalisation de ses objectifs.

Le premier concerne l'observation discrète d'un suspect (article 40), le second, le cas où une personne prise en flagrant délit tente de se soustraire à l'arrestation en franchissant des frontières internationales (la "poursuite" au sens des articles 41 à 43). L'autorisation d'intervenir au-delà du ressort national constituant une exception, ces dispositions prévoient des garanties juridiques et des restrictions qui compliquent singulièrement leur application par la police. Bien que l'on ne dispose pas de statistiques précises à leur sujet, certains éléments indiquent que le recours à ces instruments est rare.

Ces restrictions peuvent être assouplies au moyen d'accords bilatéraux, mais il n'existe aucune information indiquant que les opérations transfrontalières effectuées dans ce cadre ont augmenté. Au niveau européen, de nombreuses initiatives ont été prises pour faciliter l'application de ces articles. Ainsi, en octobre 2000, le Conseil a adopté une décision qui simplifie la procédure de modification des références aux "agents" et "autorités" visés aux articles 40 et 41 de la convention de Schengen [24]. En outre, il a arrêté une décision qui élargit le champ d'application de l'article 40 en autorisation l'observation pour des faits punissables supplémentaires et en y incluant les personnes susceptibles de conduire au suspect [25]. Au second semestre 2001, la présidence belge du Conseil a réuni un groupe d'experts chargés de formuler des recommandations concrètes sur les modalités selon lesquelles les poursuites transfrontalières pourraient être étendues aux voies aériennes, ferroviaires (trains internationaux), maritimes et fluviales. Ces recommandations n'ont fait l'objet d'aucun débat au Conseil.

[24] Décision du Conseil du 28 septembre 2000, JO L 248 du 3 octobre 2000.

[25] Décision du Conseil du 2 octobre 2003, JO L 260 du 11 octobre 2003.

La Commission estime que la création d'un espace de sécurité doit nécessairement aller de pair avec la suppression des obstacles à la coopération tenant au moyen de franchissement de la frontière. La police doit pouvoir effectuer des poursuites transfrontalières pour des types d'infraction supplémentaires et être en mesure, lorsque les autorités territorialement compétentes des États membres dans lesquels la poursuite a lieu ne peuvent intervenir immédiatement, d'agir elle-même en vue d'établir l'identité de la personne poursuivie et de la remettre à ces autorités. La Commission recommande donc de poursuivre les travaux du groupe d'experts précité, en vue de définir les conditions dans lesquelles les opérations transfrontalières pourront avoir lieu et les compétences de chacun. La Commission est d'avis que l'instrument serait plus efficace et plus viable si les États membres appliquaient un corps de règles uniforme.

L'article 46 de la convention de Schengen confère aux autorités de police le droit d'échanger avec un autre État membre, de leur propre initiative ("sans y être invitée[s]"), des informations "qui peuvent être importantes pour [celui]-ci aux fins de l'assistance" pour la prévention d'infractions et de menaces pour l'ordre public. Il n'existe pas de données comparables permettant de savoir jusqu'à quel point cet article est appliqué et si des actions policières ont été entreprises sur la base d'informations communiquées à ce titre. Il en est de même pour l'application et le recours aux autres articles mentionnés dans la présente partie. Un bon moyen d'obtenir et d'échanger des informations est le détachement de fonctionnaires de liaison, visé à l'article 47. La procédure particulière à suivre pour recourir à ces personnes affectées dans des pays tiers a été modifiée par une décision du Conseil adoptée le 27 février 2003 à l'initiative de la présidence danoise [26]. Cependant, on ne sait pas dans quelle mesure cette décision est appliquée dans la pratique. La Commission propose donc au Conseil de se pencher sur cette question.

[26] Décision du Conseil 2003/170/JAI du 27 février 2003, JO L 067 du 12 mars 2003.

Les articles traitant du Système d'information Schengen (SIS) instaurent l'obligation de "crée[r] et entret[enir] un système d'information commun", en précisant les mesures à prendre en cas d'identification certaine obtenue conformément aux articles 95 à 100 et en définissant le régime de protection des données. Ces articles donnent la possibilité d'intégrer et de rechercher des données déterminées dans les conditions décrites aux articles 95 à 100. La liaison entre l'État membre qui intègre les données dans le SIS et les agents qui identifient une personne ou un objet recherché est assurée par les bureaux SIRENE de chaque État membre. Dans la plupart des États membres, le SIRENE est également "l'organe central" et "l'instance centrale" respectivement mentionnés aux articles 39 et 46 (voir ci-dessus).

En 1999, dix États membres utilisaient le SIS. En mars 2001, leur nombre était passé à quinze, après l'adhésion des cinq pays nordiques au système SIS. Le 29 mai 2000, le Conseil a approuvé la demande du Royaume-Uni de participer à certaines dispositions de l'acquis de Schengen, notamment à la coopération policière, à la lutte contre le trafic de stupéfiants et au système SIS. Une décision analogue a été prise le 28 février 2002 pour l'Irlande. Des préparatifs sont en cours pour connecter le Royaume-Uni avant la fin de l'année 2004. L'Irlande suivra. Le nombre total d'utilisateurs du SIS passera ainsi à dix-sept.

Or, dans sa forme actuelle, le SIS n'est prévu que pour dix-huit utilisateurs, et dix nouveaux États membres devront s'y connecter dans les années à venir. La Commission a donc été chargée de mettre au point un SIS seconde génération. À la suite des initiatives législatives prises par la présidence espagnole pendant le premier semestre 2002 pour ajouter de nouvelles fonctions au SIS [27], et des conclusions du Conseil sur le SIS II [28], le nouveau système SIS comptera beaucoup plus d'utilisateurs (non seulement les États membres, mais également Eurojust et Europol) et proposera de nouvelles fonctionnalités (recherche sur des données incomplètes, croisements de signalements de personnes, etc.) et des catégories de données supplémentaires (biométrie, aéronefs et conteneurs). Étant donné ses résultats opérationnels extrêmement positifs et le rôle essentiel joué par le SIS dans la lutte contre la criminalité, l'introduction rapide de nouvelles fonctions, si possible dans le SIS actuel, doit être encouragée.

[27] JO C 160 du 4 juillet 2002.

[28] Adoptées par le conseil JAI des 5 et 6 juin 2003.

En juillet 2003, la Commission a présenté une proposition visant à permettre aux services d'immatriculation des véhicules des États membres de consulter le SIS, afin d'empêcher l'immatriculation des véhicules volés [29]. Les procédures d'interconnexion SIS-SIRENE sont rassemblées dans un manuel qui doit être régulièrement remis à jour si l'on veut assurer une bonne organisation et le respect des nouvelles obligations légales. Or cela n'a jamais été fait jusqu'à présent. Au premier semestre 2003, la présidence grecque a donc pris une initiative en vue de l'adoption d'une procédure formelle d'actualisation régulière du manuel. Elle a proposé de confier cette tâche à la Commission. Il est essentiel que la procédure soit adoptée sans délai [30].

[29] COM (2003) 510 final

[30] Initiative de la République hellénique en vue de l'adoption d'un règlement du Conseil relatif aux procédures de modification du manuel Sirene, JO C 82 du 5 avril 2003, ainsi que l'initiative de la République hellénique en vue de l'adoption d'une décision du Conseil relative aux procédures de modification du manuel Sirene, JO C 82 du 5 avril 2003.

Le SIS représente une avancée majeure pour la coopération policière dans l'Union. En mars 2003, plus de onze millions de fiches relatives à des personnes et des objets recherchés avaient été enregistrées. Plus de trente-cinq mille identifications certaines de personnes ou d'objets sont transmises chaque année aux bureaux nationaux SIRENE. Ce succès est principalement dû au rôle central du SIS dans l'abolition des contrôles frontaliers, aux contrôles pratiqués aux frontières extérieures, à l'intégration du SIS dans le travail quotidien des services de police et de douane nationaux, et au suivi très attentif assuré par les groupes de travail du Conseil sous chaque présidence.

Le SIS a répondu aux attentes élevées des services répressifs et il va maintenant connaître une évolution déterminante (SIS II) pour offrir davantage de fonctionnalités. À long terme, des fonctions plus sophistiquées pourraient progressivement le transformer en un outil susceptible d'avoir d'autres usages, pour mieux correspondre aux réalités de la gestion partagée d'un espace de sécurité commun. L'une de ces fonctions avancées pourrait être le stockage de données biométriques. Une telle évolution aurait l'avantage déterminant de permettre d'affiner les recherches pour éviter les problèmes posés par les recherches alphanumériques actuelles, qui perdront inévitablement en précision au fur et à mesure que la base de données croîtra. Mais cela ne signifie pas, comme les ministres Justice et affaires intérieures l'ont confirmé à leur réunion des 5 et 6 juin 2003, que le système simple et rapide du "hit-no hit", sur lequel repose le SIS, doive être modifié. De toute façon, cette évolution possible ne devrait pas concerner le SIS actuel, mais plutôt le futur SIS II.

 

2.1.2. Europol

 

Les articles 29 et 30 du TUE et les conclusions du conseil européen de Tampere soulignent le rôle d'Europol dans la coopération policière au sein de l'Union européenne et mentionnent une série de mesures concrètes à prendre dans les cinq années suivant l'entrée en vigueur du TUE. Auparavant, le plan d'action de Vienne avait énuméré certaines mesures à arrêter au sujet d'Europol.

Du point de vue formel, la plupart des sujets liés à Europol mentionnés dans le TUE et dans le programme de Tampere ont été traités sous la forme de décisions du Conseil. Nombre des mesures visées dans le plan d'action de Vienne ont également été mises en oeuvre.

Le premier pas a été fait en 2000, lorsque le Conseil a adopté un protocole qui étend la compétence d'Europol au blanchiment d'argent en général. Toutefois, à la date de la présente communication, neuf États membres n'ont toujours pas ratifié ce texte. [31]

[31] JO C 358 du 13 décembre 2000. Au 5 juin 2003, le protocole avait été ratifié et notifié par l'Allemagne, l'Espagne, la France, la Grèce, le Portugal et la Suède.

En décembre 2001, constatant que la criminalité organisée internationale ne limite pas ses activités aux domaines d'attribution d'Europol, le Conseil a décidé d'étendre son mandat à toutes les formes de criminalité énumérées à l'annexe de la convention Europol. [32] Cette extension, qui aidera Europol à organiser son travail plus efficacement, a pris effet le 1er janvier 2002.

[32] JO C 362 du 18 décembre 2001.

En novembre 2002, le Conseil a adopté un protocole modifiant la convention Europol, qui prévoit expressément la participation d'Europol aux équipes communes d'enquête des États membres et lui permet de demander aux autorités compétentes des États membres d'ouvrir ou de coordonner des enquêtes pénales dans des cas précis. Le protocole est actuellement en cours de ratification par les États membres. [33]

[33] JO C 312 du 16 décembre 2002.

Un nouveau protocole a été adopté par le Conseil en novembre 2003. Il s'attaque à plusieurs problèmes empêchant le développement des capacités opérationnelles d'Europol. Il permet des contacts directs entre Europol et les services de police compétents des Etats membres, et l'interrogation par ces derniers du Système d'information Europol.

L'évolution d'Europol au cours de ces dernières années ne s'est pas limitée aux mesures requises par le TUE, par le plan d'action de Vienne et par Tampere. En effet, pendant sa première année de fonctionnement, il avait déjà été constaté que l'organisation n'était pas aussi efficace qu'elle aurait dû l'être.

L'un des principaux problèmes est la réticence des États membres à transmettre des informations et des renseignements à Europol, ce qui l'empêche d'apporter la valeur ajoutée nécessaire à l'analyse criminelle réalisée au niveau européen. La conséquence en est que les États membres estiment souvent qu'Europol ne satisfait pas les demandes de ses clients, leurs services de police, et ils ne sont dès lors pas enclins à lui fournir plus d'informations. Cela provient également de ce qu'il manque encore un système d'information, dont l'élaboration n'est toujours pas achevée à la date de la présente communication (voir ci-dessous).

En 2002, le conseil d'administration d'Europol a donc réalisé une étude pour identifier les principaux obstacles à une coopération fructueuse avec ses services. Les chefs d'unités nationales Europol ont ensuite dressé une longue liste de problèmes et de solutions envisageables. L'une de leurs principales conclusions était que la convention Europol devait être adaptée et assouplie. Ils estimaient en outre indispensable d'éliminer les divers obstacles, souvent d'ordre juridique, qui existaient dans les États membres et empêchaient la transmission des informations. Il est proposé de mettre en oeuvre dans un délai de douze mois ces conclusions réunies dans un "document matrice" interne datant de l'été 2002.

Un protocole remaniant la convention Europol a été rédigé à l'issue de séances de réflexion approfondie qui ont eu lieu au premier semestre 2002. Il traitait non seulement de l'analyse, de l'accès aux données et de leur protection, mais également du contrôle démocratique sur Europol. Le Conseil a obtenu un accord politique sur ce texte le 19 décembre 2002. [34] Par ailleurs, au printemps 2003 a démarré la troisième série d'évaluations mutuelles, au cours desquelles on étudie l'échange d'informations et de renseignements entre les États membres et Europol, et entre les États membres eux-mêmes. Cette évaluation devrait aboutir à des recommandations importantes sur les moyens d'améliorer davantage cet aspect de la coopération.

[34] Document du Conseil 13254/02-EUROPOL 76 rev 5.

Pour disposer d'informations fiables lui permettant d'exécuter efficacement ses missions, outre les données en provenance des États membres, Europol a besoin d'informations détenues en dehors de l'Union européenne. Il a donc sensiblement renforcé sa coopération avec des pays tiers et des organisations internationales figurant sur la liste établie par la décision du Conseil du 27 mars 2000 [35]. Ces accords de coopération sont essentiels au travail d'Europol car sans eux, il ne peut échanger des données à caractère personnel avec ces pays tiers et ces organisations.

[35] JO C 106 du 13 avril 2000.

À ce jour, Europol a signé des conventions de coopération, comprenant l'échange des données à caractère personnel, avec plusieurs pays adhérents, avec l'Islande, avec la Norvège et avec Interpol. Il a également conclu des accords avec la Commission européenne et la Banque centrale européenne. Il négocie actuellement une convention avec Eurojust et une convention administrative avec l'Office de lutte anti-fraude (OLAF). À la fin de l'année 2003, Europol aura conclu des accords avec tous les pays adhérents et candidats.

Les attentats du 11 septembre 2001 ont contribué à accélérer la conclusion de conventions avec les États-Unis. Le 6 décembre 2001, Europol a signé avec eux un accord de coopération stratégique et, en décembre 2002, une convention portant sur l'échange de données à caractère personnel. La signature de cette dernière convention constitue une avancée positive, au vu des divergences que présentent les législations américaine et européenne sur la protection des données.

Une condition préalable indispensable au bon fonctionnement d'Europol est l'existence du Système d'information Europol (SIE). Depuis quelques années, Europol travaille en effet à l'élaboration d'un système très sophistiqué qui permettrait le stockage et l'extraction décentralisés d'informations sur la criminalité organisée détenues par les États membres et Europol. Mais jusqu'à présent, la complexité d'un tel système (traduction automatique des textes en 11 langues) empêche sa mise en place. Selon la Commission, il est essentiel qu'une version simplifiée du SIE soit disponible au plus tôt pour qu'Europol puisse remplir sa mission. La version plus sophistiquée devrait intervenir à un stade ultérieur.

Les organes de direction d'Europol ont eux aussi été suivis en permanence. Il est progressivement apparu que le statut du personnel d'Europol ne pouvait pas s'appliquer à ses directeurs ou qu'il y manquait des dispositions spécifiques à leur cas. Le statut a donc été modifié pour y inclure des dispositions relatives à la sélection, au licenciement et au régime disciplinaire du directeur et des directeurs adjoints d'Europol. [36]

[36] Acte du Conseil du 19 décembre 2002 modifiant le statut du personnel d'Europol, JO C 24 du 31 janvier 2003.

Le contrôle démocratique sur Europol constitue un autre sujet important. Il a plus particulièrement été critiqué par le Parlement européen qui, à de nombreuses reprises, l'a déclaré non satisfaisant. Afin de permettre de bien appréhender cette question, le 26 février 2002, la Commission européenne a présenté au Parlement européen et au Conseil une communication intitulée "Exercice d'un contrôle démocratique sur Europol" [37]. Elle y décrivait et évaluait les différents types de contrôle auquel il est soumis (convention Europol, règles régissant la protection des données, fonctions de surveillance de son conseil d'administration). Sa conclusion était que, Europol disposant de compétences limitées par rapport aux services de police nationaux des États membres, on ne peut affirmer que le contrôle démocratique est insuffisant dans son cas.

[37] COM(2002) 95 final.

La Commission considérait cependant que le contrôle exercé par les quinze parlements nationaux et le rôle limité accordé au Parlement européen morcelaient le contrôle démocratique sur Europol. Elle émettait donc des recommandations pour remédier à la situation. La principale d'entre elles concernait la création d'une commission mixte, composée de représentants des parlements nationaux et du Parlement européen, qui serait chargée de surveiller de près l'évolution d'Europol et de communiquer avec lui.

Europol a accompli beaucoup de choses ces quatre dernières années. Les dispositions du traité et des conclusions de Tampere qui lui étaient consacrées ont été mises en oeuvre, mais plusieurs points du plan d'action de Vienne doivent encore être appliqués ou être examinés en détail. Dans certains cas, il conviendrait toutefois de vérifier si les recommandations formulées en 1998 sont toujours d'actualité.

Parmi les mesures à prendre dans les deux années suivant l'entrée en vigueur du TUE, le plan d'action de Vienne demandait d'envisager l'accès d'Europol aux données du SIS. Cette question est en discussion depuis quelque temps. Le Conseil a donné son accord de principe pour l'octroi d'un accès partiel au SIS, notamment aux données stockées conformément aux articles 95, 99 et 100 de la convention de Schengen. À cet effet, le Conseil se prononcera prochainement sur une modification introduisant un nouvel article 101A dans la convention, qui sera la base légale de l'accès d'Europol au SIS.

Cependant, en raison de contraintes techniques, il se pourrait que l'accès d'Europol ne soit possible qu'après la mise en place du SIS II, c'est-à-dire pas avant 2006. La Commission juge ce délai beaucoup trop long et suggère d'envisager des solutions alternatives pragmatiques comme, par exemple, accorder à Europol un accès limité à la lecture ("read-only") via le SIS national. Il faut toutefois savoir que cette solution impliquerait une modification de la convention de Schengen.

L'idée de la base de données sur les enquêtes en cours a été discutée au sein d' Europol avec ses unités nationales, mais aucune action dans ce sens n'a encore été lancée. Étant donné la complexité technique et juridique d'un tel projet, il serait irréaliste d'en attendre la concrétisation dans un proche avenir.

En ce qui concerne les mesures à prendre dans le délai de cinq ans fixé par le plan d'action de Vienne, il convient d'approfondir les points suivants:

Les statistiques sur la criminalité transfrontalière n'ont connu aucun progrès. Il n'existe toujours pas de critères communs permettant d'établir des statistiques à l'échelle européenne, du fait de l'absence de définitions communes des infractions, qui empêche toute comparaison valable des statistiques nationales. Les discussions auxquelles a donné lieu l'extension du mandat d'Europol ont montré qu'il sera difficile de s'accorder sur la définition de certaines infractions.

La question de l'opportunité et des modalités de l'accès d'Europol au Système d'information des douanes (SID) n'a pas encore fait l'objet de discussions approfondies. L'article 7, paragraphe 3, de la convention SID permettrait en principe à Europol d'y avoir accès. Mais un protocole additionnel doit être conclu à cet effet. La Commission est d'avis que cette question importante devrait être réglée dès que possible.

Quant au réseau de recherche et de documentation sur la criminalité transfrontalière, une avancée concrète a été réalisée avec la création du Knowledge Management Centre (centre de gestion des connaissances) d'Europol, qui fournit des informations sur les personnes possédant des compétences spécialisées en matière de répression criminelle dans l'Union, par exemple dans les universités, mais également sur des sujets plus pratiques, comme le matériel technique. En outre, avec l'aide des États membres et de la Commission, Europol est en train de remanier son rapport annuel sur la situation du crime organisé qui, d'un simple document descriptif, deviendra une évaluation de la menace que représente la criminalité organisée. Le but est d'en faire un instrument de planification essentiel dans la lutte contre cette forme de criminalité. La Commission propose d'examiner avec Europol si les mesures prises jusqu'à présent correspondent à celles que visait le plan d'action de Vienne et d'étudier les éventuelles initiatives supplémentaires à prendre.

Quant à l'idée d'élaborer et de mettre en oeuvre une stratégie d'information visant à faire connaître les activités et l'étendue des compétences d'Europol au public, les deux dernières années ont montré qu'il importe davantage d'informer les services de police des États membres que le public en général. C'est pourquoi les stratégies d'information d'Europol et des États membres ont surtout consisté à élaborer un programme de sensibilisation à l'intention des services répressifs, qui sera appliqué en 2003 et 2004 et sera cofinancé par le programme européen AGIS.

La Commission est d'avis qu'un programme de sensibilisation concret et s'inscrivant dans la durée est indispensable au développement de la compréhension mutuelle et de la coopération entre Europol et les services de police des États membres. Elle se félicite que le programme AGIS puisse contribuer au lancement de cette action, mais elle rappelle que son financement à plus long terme incombera à Europol et aux États membres.

Au premier semestre 2002, le Conseil a examiné la possibilité d'instaurer une procédure simplifiée pour les futures modifications de la convention Europol. Cette mesure est apparue nécessaire parce que les procédures actuelles requièrent que chaque modification soit ratifiée par l'ensemble des États membres. Les discussions à ce sujet n'ont pas pu aboutir pour le moment. Selon la Commission, il est capital de simplifier cette procédure pour les prochaines modifications à apporter à la convention Europol, notamment dans la perspective de l'élargissement. La seule solution envisageable est de remplacer la convention par une décision du Conseil au sens de l'article 34, paragraphe 2, point c), du TUE. La Commission est prête à proposer un projet de décision du Conseil dans ce sens.

Europol est totalement opérationnel depuis quatre ans maintenant. Son potentiel en tant qu'outil essentiel de la lutte de l'Union européenne contre les formes graves de criminalité internationale est pleinement apparu pendant cette période. Toutes les mesures concrètes recommandées par le TUE et Tampere ont été adoptées par le Conseil sous la forme de décisions ou d'actes, dont certains étaient soumis à la ratification des États membres. Dès que toutes ces mesures auront été définitivement ratifiées et mises en oeuvre, Europol fonctionnera plus efficacement.

Pour l'avenir, ce dont Europol aura besoin à court terme, c'est d'une période de consolidation pendant laquelle tous les actes juridiques qui le concernent seront ratifiés et appliqués, le programme de sensibilisation sera poursuivi, une version simplifiée du SIE sera mise en place et le rapport du HENU sera mis en oeuvre.

Au terme de cette consolidation, certains pouvoirs d'enquête devraient être attribués à Europol. Lors du débat sur une évolution aussi importante, il conviendrait également de s'intéresser à ses conséquences possibles pour le contrôle juridictionnel et parlementaire sur Europol.

 

2.1.3. La coopération policière opérationnelle, et notamment la task force des chefs de police européens

 

Le plan d'action de Vienne invitait à développer et à étendre la coopération opérationnelle entre les services répressifs de l'Union dans les deux ans suivant l'entrée en vigueur du TUE. Il proposait de s'inspirer des actions communes menées par les administrations des douanes des États membres.

La conclusion 44 du conseil européen de Tampere peut être considérée comme un premier pas concret vers le développement et l'élargissement de cette coopération. Elle appelle à créer une "structure de liaison opérationnelle au sein de laquelle les responsables des services de police européens échangeraient, en coopération avec Europol, expériences, meilleures pratiques et informations sur les tendances de la criminalité transfrontière, et contribueraient à l'organisation des opérations."

Depuis sa première réunion d'avril 2000, la task force des chefs de police européens s'est réunie huit fois, une fois par présidence du Conseil. Les participants ont passé une bonne partie des réunions à tenter de s'accorder sur la nature des missions qu'elle doit remplir. Lors de sa réunion de Copenhague, en juillet 2002, la task force a atteint un consensus sur les principales fonctions suivantes:

* développer une approche coordonnée axée sur la criminalité transfrontalière dans l'UE, à partir, entre autres, des analyses de la criminalité organisée réalisées par Europol;

* adopter des initiatives, planifier et lancer des opérations requérant la participation de plusieurs États membres et axées sur les domaines prioritaires de la lutte contre le crime organisé;

* servir de centre d'échange des informations et de forum de discussion sur l'évolution de la criminalité, et définir des stratégies de lutte contre cette dernière;

* adresser des recommandations au Conseil sur les politiques en matière de police (au sens générique) et assurer leur mise en oeuvre et leur suivi;

* contribuer à assurer que les systèmes policiers européens respectent l'État de droit et les principes démocratiques.

Par ailleurs, à la réunion de Copenhague de 2002, une méthodologie a été adoptée pour la préparation, la réalisation et le suivi des opérations conjointes. Ainsi, les opérations seront proposées par un "pays chef de file", sur la base des analyses stratégiques réalisées par Europol; les autres pays intéressés pourront se joindre à l'équipe opérationnelle; Europol apportera son analyse; des rapports intermédiaires et finaux seront présentés à la task force des chefs de police. On ne sait toutefois pas encore exactement qui sera chargé de la préparation, la planification, la surveillance et l'évaluation des opérations conjointes.

Lors de sa réunion d'avril 2002, la task force a décidé d'instituer un comité directeur qui assurera la continuité de ses travaux en prenant en charge toute l'organisation des réunions, en surveillant la suite donnée aux recommandations et en identifiant et proposant les sujets à soumettre à la discussion. Ce comité directeur est composé des présidences sortante, actuelle et suivante du Conseil, d'Europol, de la Commission, et du Secrétariat général du Conseil. Pendant la réunion de la task force à Rome en 2003, il a été convenu que le rôle de ce comité directeur devrait être renforcé, par exemple en organisant plus souvent des réunions ou en invitant les représentants des unités chargées des relations internationales des polices des Etats membres. La prochaine réunion du comité directeur aura lieu le 30 janvier 2004.

La task force des chefs de police a pris un nombre considérable d'initiatives, notamment en matière de protection de l'euro, d'immigration clandestine, de traite des êtres humains, de vol et de cambriolage de véhicules et de maltraitance infantile. Cependant, tout le monde s'accorde à dire que, jusqu'à présent, ces efforts n'ont produit aucune valeur ajoutée au niveau européen (même si les décisions prises lors de la dernière réunion de la task force, les 19 et 20 mai 2003, sur les futures actions communes contre l'immigration clandestine, la traite des êtres humains et le trafic de stupéfiants sont encourageantes).

Plusieurs facteurs expliquent ce manque de résultat. Tout d'abord, les directeurs de la police des États membres doivent généralement gérer une multitude de domaines, allant des questions administratives jusqu'aux dossiers hautement politiques, de sorte que les questions européennes ne sont qu'une priorité parmi de nombreuses autres.

Ensuite, les représentants des polices des États membres composant la task force disposent de compétences extrêmement hétérogènes. Dans certains cas, il existe un seul et unique directeur national de la police habilité à décider d'engager des ressources, alors que dans d'autres États membres, le chef de police délégué auprès de la task force représente un corps de police national décentralisé. Dans les États fédéraux, la représentation est particulièrement complexe. Enfin, il y a le problème de continuité entre les séances plénières de la task force, bien que la situation se soit améliorée depuis la création du comité directeur mentionné précédemment.

Des faiblesses organisationnelles sont venues amplifier les problèmes de la task force. Comme elle ne se réunit généralement qu'une seule fois par présidence du Conseil, son ordre du jour est surchargé, ce qui interdit tout travail approfondi; la remise tardive des documents empêche en outre les délégations de préparer convenablement leurs dossiers. Il faut souligner que, la task force opérant en dehors des structures du Conseil, son fonctionnement n'en est pas facilité.

Les réunions de la task force contribuent pourtant de manière déterminante à l'amélioration des contacts bilatéraux et multilatéraux entre les directeurs de la police des États membres, car elles sont la seule occasion de les réunir tous en même temps, et cela ne saurait être sous-estimé.

En leur qualité de directeurs des polices de l'Union, les membres de la task force jouent un double rôle essentiel: d'une part, leur proximité des ministres leur permet d'influencer les décisions politiques touchant à la police, d'autre part, ils sont investis du pouvoir de décider de l'utilisation des forces de police. En ce qui concerne l'avenir de la task force, la Commission est d'avis que son intégration dans les structures officielles du Conseil devrait sérieusement être envisagée. Elle pourrait ainsi participer au processus décisionnel de toutes les matières relevant de la coopération policière dans l'UE. En attendant cette intégration, la task force devrait se concentrer sur l'organisation, la planification et le suivi des opérations conjointes de police dans les domaines prioritaires.

Lors de la dernière réunion de la task force en mars 2004, ses membres ont examiné un document de réflexion sur l'avenir de la task force, à la lumière des propositions faites dans le traité pour une Constitution pour l'Europe.

 

2.1.4. Le Collège européen de police (CEPOL)

 

Le conseil européen de Tampere demandait la création d'une académie européenne de police destinée à former les hauts responsables des services de police, qui consisterait dans un premier temps en un réseau d'instituts nationaux de formation existants. Le 22 décembre 2000, le Conseil a adopté une décision portant création du Collège européen de police [38], désigné sous son abréviation française "CEPOL".

[38] JO L 336 du 30 décembre 2000.

L'article 6, paragraphe 1, de la décision du Conseil du 22 décembre 2000 mentionne que "le CEPOL a pour objet de contribuer à la formation des hauts responsables des services de police des États membres" et "soutient et [il] développe une approche européenne des principaux problèmes qui se posent aux États membres, dans les domaines de la lutte contre la criminalité, de la prévention de la délinquance et du maintien de l'ordre et de la sécurité publics, notamment transfrontaliers."

Le CEPOL a pour principaux objectifs et missions d'approfondir la connaissance mutuelle des systèmes et structures nationaux de police des autres Etats membres, d'Europol et de la coopération policière transfrontalière dans l'Union européenne; d'améliorer la connaissance des instruments internationaux, notamment ceux existant déjà au niveau de l'Union européenne dans le domaine de la coopération relative à la lutte contre la criminalité; d'assurer une formation adéquate quant au respect des garanties démocratiques, en particulier droits de la défense; et de favoriser la coopération entre le CEPOL et les autres instituts de formation policière.

Pour réaliser ces objectifs, le CEPOL peut engager diverses actions: assurer des sessions de formation fondées sur des normes communes au bénéfice des hauts responsables des services de police; participer à l'élaboration de programmes harmonisés de cours et contribuer à l'élaboration des programmes appropriés de formation avancée; fournir une formation spécialisée; élaborer et assurer une formation destinée aux formateurs; diffuser les meilleures pratiques et les résultats de la recherche; élaborer et assurer une formation pour préparer les forces de police de l'Union européenne à participer à la gestion de crises non militaires, et une formation destinée aux autorités de police des États candidats à l'adhésion à l'Union européenne, et faciliter les échanges et détachements pertinents de policiers dans le cadre de la formation. Le CEPOL peut coopérer avec les instituts nationaux de formation de police des États non membres de l'Union européenne. En particulier, il met ses infrastructures à la disposition des hauts responsables de police des pays candidats, de l'Islande et de la Norvège, et il étudiera la possibilité de s'ouvrir aux fonctionnaires des institutions européennes et d'autres organes de l'Union européenne.

La décision du Conseil créant le CEPOL lui faisait obligation de soumettre un rapport sur son fonctionnement et son devenir au Conseil, fin 2003. Or cette décision du Conseil du 22 décembre 2000 ne lui ayant octroyé ni personnalité juridique ni budget, le CEPOL a connu des débuts difficiles. Pendant sa première année d'existence, il n'avait pas de budget et pas de secrétariat; ensuite, lorsqu'une décision a provisoirement installé son secrétariat à Copenhague, il a encore connu des difficultés administratives parce qu'aucun personnel ne pouvait être mis à sa disposition.

C'est donc à l'aune de ces débuts laborieux qu'il convient de mesurer l'action du CEPOL. Les progrès réalisés sont considérables. Depuis 2001, CEPOL a proposé chaque année un nombre croissant de formations: de 10 en 2001, elles sont passées à 38 en 2003, en couvrant un éventail toujours plus large de sujets qui va du contre-terrorisme au contrôle des frontières, en passant par l'ordre public. Le CEPOL a également créé son site Internet et, plus important, le European Police Learning Network (réseau européen de formation policière) ou "EPLN", un instrument innovant offrant une formation policière virtuelle sur Internet. La Commission a apporté son soutien au développement de l'EPLN par les programmes OISIN et AGIS.

Le Conseil européen, réuni à Bruxelles le 13 décembre 2003, est arrivé à un accord sur la localisation des sièges de nombre d'agences européennes, dont le CEPOL (Royaume-Uni). À présent, deux initiatives concernant le CEPOL sont en discussion au Conseil: une initiative irlandaise visant à le doter de la personnalité juridique [39], et l'autre, britannique, visant à établir le siège permanent du CEPOL à Bramshill [40].

[39] JO C 1 du 6 janvier 2004.

[40] JO C 20 du 24 janvier 2004.

L'adoption de ces deux initiatives aidera sans doute le CEPOL à surmonter ses deux principaux handicaps à court terme. Néanmoins, il est clair que ces amendements à la décision originale créant le CEPOL ne sont que des solutions partielles à ses problèmes, et qu'une discussion plus approfondie sur son avenir et sa structure future doit avoir lieu.

Parallèlement aux problèmes spécifiques posés par son absence de personnalité juridique et à la question du siège permanent de son secrétariat, le fonctionnement du CEPOL a révélé des problèmes d'ordre structurel. Ils tiennent principalement à l'incapacité des différentes écoles de police d'organiser efficacement des formations, et/ou au faible taux de participation dû à une connaissance insuffisante des langues étrangères chez les bénéficiaires potentiels des formations. Certains pays candidats sont en outre confrontés à des difficultés financières qui limitent leur participation aux activités du CEPOL.

Ces problèmes structurels ont fait l'objet d'une réflexion et de discussions suivies avec le CEPOL. La nécessité d'améliorer les connaissances linguistiques des policiers européens a été reconnue et il y sera répondu, du moins en partie, au moyen de l'EPLN. Cette lacune demeure néanmoins l'un des principaux obstacles à une meilleure coopération dans le domaine de la formation policière et devrait être l'une de ses priorités.

Le fait que les diverses écoles de police de l'Union aient des conceptions différentes de la formation ne devrait pas constituer un problème en soi. Des normes de qualité et une méthodologie communes sont cependant indispensables pour garantir un niveau minimal de formation policière dans toute l'UE, au moins dans les domaines d'intérêt commun et pour les policiers qui y interviennent directement.

Pour l'avenir, CEPOL devrait plus particulièrement s'attacher à élaborer des programmes et des méthodes d'enseignement communs pour les domaines prioritaires de la coopération policière, qui seraient alors uniformément appliqués dans toutes les écoles nationales de police. Enfin, pour remplir correctement ses missions, le CEPOL devrait être doté de la personnalité juridique, disposer d'un personnel administratif suffisant et être financé sur le budget communautaire.

 

2.1.5. Les autres sujets mentionnés à l'article 30 du TUE

 

2.1.5.1. Les techniques d'enquête

 

La police assure une double fonction dans la répression des infractions: d'une part, elle rassemble des informations en vue de détecter les infractions et les menaces à la sécurité publique, d'autre part, elle enquête sur les infractions commises, apportant ainsi son soutien aux autorités judiciaires chargées de les poursuivre. Pour ce faire, la police recourt à différentes techniques d'enquête.

Aux termes de l'article 30, paragraphe 1, point d), du TUE, l'action en commun dans le domaine de la coopération policière couvre, entre autres, "l'évaluation en commun de techniques d'enquête particulières concernant la détection de formes graves de criminalité organisée." Le plan d'action de Vienne invite à procéder à cette évaluation dans les deux années suivant l'entrée en vigueur du TUE. Or, bien que des lignes directrices communes aient été élaborées dans le cadre d'Europol, par exemple sur l'utilisation des informateurs ou sur les livraisons surveillées, il ne s'agit que de guides pratiques qui ne sont pas nécessairement mis en oeuvre par tous les Etats membres .Jusqu'à présent, il n'existe aucune interprétation consensuelle de l'article 30, paragraphe 1, point d), du TUE au niveau de l'Union.

L'article 30, paragraphe 1, point a), du TUE établit une claire distinction entre "la prévention et [de] la détection des infractions pénales et [l]es enquêtes en la matière". Il semble ainsi confirmer que la détection se dissocie de l'enquête. On pourrait donc en conclure que les "techniques d'enquête particulières" visées à l'article 30, paragraphe 1, point d), sont les techniques utilisées par les services de police pour trouver des indices pouvant conduire à établir l'existence d'une activité délictueuse, telles que l'analyse du risque, le profilage et la surveillance des transferts d'argent. Ces techniques ont démontré leur efficacité pour la détection des formes graves de criminalité liées au trafic de stupéfiants et au blanchiment d'argent [41]. La Commission est donc d'avis qu'il serait effectivement utile de faire réaliser une évaluation commune de ces techniques par des experts, afin de déterminer celles d'entre elles pouvant servir de "bonnes" ou de "meilleures" pratiques dans certaines situations.

[41] Rapports sur la deuxième série d'évaluations mutuelles sur "les services répressifs et leur rôle dans la lutte contre le trafic de drogue". Document 9615/3/03 REV 3 CRIMORG 43 du 22 septembre 2003.

Par ailleurs, la Commission pense qu'il serait souhaitable de ne pas limiter cette évaluation aux techniques d'enquête utilisées pour détecter des infractions, mais de l'étendre à celles qui sont particulièrement pertinentes aux enquêtes sur la grande criminalité. Il s'agit, par exemple, des techniques appliquées dans la collecte et le traitement des informations (gestion des informateurs, observation, livraisons surveillées, enquêtes discrètes, perquisitions et saisies), mentionnées dans la Convention relative à l'assistance mutuelle et à la coopération entre les administrations douanières [42] et dans la Convention relative à l'entraide judiciaire en matière pénale [43]. D'autres exemples relèvent de la criminalistique, comme la gestion de la scène de crime.

[42] Acte du Conseil du 18 décembre 1997, JO C 24 du 23 janvier 1998.

[43] JO C 197 du 12 juillet 2000.

Le projet de constitution européenne proposé par la Convention sur l'avenir de l'Europe modifie légèrement le texte de l'article 30, paragraphe 1, point d). Il ne parle plus de "l'évaluation en commun" des techniques d'enquête, mais de la possibilité d'adopter une loi-cadre établissant des "mesures portant sur [...] les techniques communes d'enquête concernant la détection des formes graves de criminalité organisée".

Selon la Commission, le Conseil devrait désormais s'attacher à faire adopter, dans toute l'Union, des techniques d'enquête éprouvées pour détecter les formes graves de criminalité. La Commission est toutefois d'avis que ces mesures ne doivent pas s'arrêter à la détection des infractions, mais également couvrir leur prévention et les enquêtes les concernant.

Enfin, la Commission estime utile de souligner brièvement l'importance des profils génétiques dans la résolution des crimes. Ces dernières années, certains États membres ont connu des succès spectaculaires en résolvant des affaires criminelles bien plus rapidement, voire intégralement, grâce aux banques de données génétiques qu'ils avaient constituées au niveau national. L'Union européenne pourrait résoudre certaines affaires criminelles bien plus rapidement et bien plus efficacement si tous les États membres créaient de telles banques de données. Il conviendrait bien évidemment de veiller au strict respect des législations nationales et européenne sur la protection des données. La capacité de l'Union de résoudre les affaires criminelles serait encore renforcée si les services de police des États membres pouvaient comparer les profils génétiques.

 

2.1.5.2. La police technique et scientifique

 

La police technique et scientifique est chargée d'examiner les scènes de crime, de relever les indices matériels, de procéder aux examens en laboratoire, d'interpréter les éléments trouvés et de présenter des conclusions qui serviront aux services de renseignement et d'enquête, ou à l'administration de la preuve en justice. Elles couvre des domaines aussi variés que la toxicologie, la sérologie et le profilage génétique, l'analyse des traces (particules de combustion, débris de verre, peintures, résidus de tir), la balistique, l'examen des documents et la comparaison des écritures, les empreintes digitales, les marques et les impressions (marques laissées par des outils, empreintes de chaussures), les analyses audio, vidéo et informatiques, les enquêtes sur les accidents, les enquêtes sur les scènes de crime et la médecine légale.

La finalité de ces activités est de contribuer à la manifestation de la vérité dans les affaires criminelles. Il est dès lors essentiel que les enquêtes de la police technique et scientifique soient réalisées avec la plus grande compétence et par des personnes indépendantes, impartiales et intègres.

En Europe, les laboratoires de police scientifique effectuent chaque année des milliers d'examens dans le cadre d'enquêtes criminelles individuelles, dans les divers domaines couverts par la police technique et scientifique. Parallèlement à ce travail quotidien, les laboratoires ont également des activités de recherche et de développement, ou de formation.

La plupart de ces laboratoires appartiennent aux services de police ou sont des laboratoires publics coopérant étroitement avec les autorités répressives.

Depuis le début des années 90, les grands laboratoires de police scientifique européens échangent des informations au sein du réseau européen des laboratoires de sciences forensiques (European Network of Forensic Science Institutes - "ENFSI"). L'ENFSI compte actuellement 49 membres dans 33 pays. L'objet défini dans ses statuts est de "faire en sorte que, dans toute l'Europe, la qualité du développement et des résultats des sciences forensiques soit la meilleure du monde". L'ENFSI réalise ces objectifs dans le cadre de ses réunions et du travail des quinze groupes d'experts qui traitent tous les aspects des différentes spécialités.

Ces dernières années, grâce à l'ENFSI, les laboratoires de police scientifique des États membres de l'Union européenne ont considérablement développé leur coopération, ainsi que celle avec les laboratoires d'autres pays européens.

Dans la plupart des pays, y compris les États membres, les laboratoires de police scientifique ne sont soumis qu'à quelques conditions de forme pour ce qui a trait aux normes de qualité. Cela contraste fortement avec la réglementation du secteur de la restauration, le contrôle de la viande, l'agrément des nouveaux médicaments, l'eau potable, etc. Dans tous ces domaines, des organismes officiels sont chargés de vérifier que certaines normes de qualité sont respectées, de façon à ce que les résultats des tests en laboratoire soient suffisamment fiables pour fonder des décisions généralement lourdes de conséquences.

Pour améliorer la qualité des laboratoires de police scientifique de l'UE, il convient avant tout d'imposer des critères de qualité concrets. Depuis les années 80, un moyen très répandu d'améliorer la qualité d'un laboratoire consiste à exiger que son système de contrôle-qualité repose sur une norme reconnue. Ces normes existent depuis de nombreuses années et couvrent tous les aspects techniques et organisationnels nécessaires à garantir un certain degré de qualité. Les normes recommandées pour les laboratoires de police scientifique sont NEN-EN-ISO/IEC 17025, une norme qui ne leur est pas spécifique, et ILAC-G19:2002, qui explique la norme 17025 pour ces laboratoires. Cette façon de procéder est bien plus efficace qu'une harmonisation rigide des méthodes.

La mise en place d'un système de contrôle-qualité est coûteuse et demande du temps. Il est donc raisonnable de laisser aux laboratoires un délai acceptable pour se conformer à ces normes. Parallèlement à cette introduction d'un système de contrôle-qualité (accrédité) par les laboratoires de police scientifique, les autorités policières et judiciaires devraient être incitées à ne coopérer qu'avec les laboratoires "accrédités".

Jusqu'à présent, seuls six laboratoires membres de l'ENFSI (tous situés dans des États membres de l'UE) ont un système de contrôle-qualité officiellement reconnu reposant sur les deux normes précitées. Une première étape essentielle pour améliorer la qualité des laboratoires de police scientifique dans toute l'Union consiste donc à leur faire adopter un système de contrôle-qualité fondé sur ces deux normes et à les faire agréer par leur organisme national d'accréditation (en supposant que ce dernier fait partie du réseau international d'accréditation et de certification).

L'ENFSI est devenu un organisme de coopération très utile pour la police technique et scientifique dans l'Union. Comme il compte également des membres qui n'appartiennent pas à l'Union européenne, cette dernière ne peut pas faire de l'ENFSI une instance officielle représentant ses intérêts dans ce domaine. Il serait dès lors souhaitable que les membres de l'ENFSI appartenant à l'Union européenne constituent un sous-groupe avec lequel elle pourrait communiquer officiellement.

Au niveau de l'UE, il n'existe que deux textes en rapport avec la police scientifique: la résolution du Conseil du 9 juin 1997 relative à l'échange des résultats des analyses d'ADN [44] et la résolution du Conseil du 25 juin 2001 sur le même sujet [45]. Ces deux instruments ne sont pas contraignants. Plusieurs projets cofinancés dans le cadre du programme OISIN visaient à définir des normes de qualité communes pour les laboratoires de police scientifique. Les résultats de ces études pourraient être utiles au niveau européen. La Commission propose de compiler les résultats et de les présenter au groupe de travail Coopération policière du Conseil pour discussion et approfondissement.

[44] JO C 193 du 24 juin 1997.

[45] JO C 187 du 3 juillet 2001.

2.1.6. Les autres sujets relevant de la coopération policière

 

2.1.6.1. Le terrorisme

 

L'article 29 du TUE mentionne, en termes généraux, la nécessité de lutter contre le terrorisme, qui est une forme particulière de grande criminalité. La présente communication n'a pas vocation à traiter de phénomènes de criminalité spécifiques. Cependant, depuis les attentats du 11 septembre 2001 et du 11 mars 2004, la lutte contre le terrorisme international focalise l'attention politique et l'Union a pris de nombreuses initiatives, dont certaines dans le domaine de la coopération policière, pour accroître l'efficacité des services répressifs des États membres dans la lutte antiterroriste. Une communication sur la coopération policière ne saurait donc être exhaustive sans une brève analyse de la coopération dans ce domaine particulier.

Le contre-terrorisme repose principalement sur une coopération entre les services de renseignement, les services de police et les autorités judiciaires. Les États membres confrontés depuis longtemps à des menaces terroristes internes ont créé des services de renseignement au sein de leur police, qui sont au premier plan de la lutte contre le terrorisme. Dans ces pays, les services de renseignement de la police s'occupent généralement des menaces terroristes, tandis que les services de renseignement traditionnels se concentrent sur les menaces à la sécurité nationale venant de l'extérieur. Dans les États membres qui n'ont pas connu le terrorisme sur leur territoire, ce sont les services de sécurité intérieure et de renseignement qui sont chargés de la collecte, de l'analyse et de la diffusion des renseignements dans le cadre de la lutte antiterrorisme.

Ainsi coexistent dans l'Union deux formes de coopération distinctes qui déterminent pour une large mesure la capacité des structures institutionnelles à gérer la coopération instaurée pour lutter efficacement contre le terrorisme: l'une, entre les services de police, l'autre, entre les services de sécurité/renseignement. Depuis longtemps déjà, les services de renseignement des États membres combattent ensemble le terrorisme au sein du réseau informel appelé "Club de Berne", auquel adhèrent également d'autres pays européens. Cette coopération est fondée sur la confiance mutuelle et la flexibilité. Après le 11 septembre 2001, les services de renseignement des États membres, suivant ainsi les conclusions du conseil européen du 21 septembre 2001, ont intensifié leur coordination antiterroriste au sein du groupe antiterrorisme du Club de Berne, qui rassemble les experts en la matière appartenant aux services de renseignement. Les services de police ne font pas partie de ce groupe.

Dans l'Union, la coopération antiterroriste institutionnelle relevant du troisième pilier est coordonnée par le groupe de travail Terrorisme ("TWG") du Conseil. Certaines délégations siégeant dans ce groupe représentent les "services de renseignement de la police", d'autres, les services de sécurité/renseignement, d'autres encore, les deux. Cette hétérogénéité des délégations est un obstacle à la bonne coopération, en raison de la méfiance qui règne entre les différents services. Europol fait également partie de ce groupe.

En ce qui concerne le rôle d'Europol dans la politique antiterroriste de l'UE, les services de police et de renseignement des États membres continuent souvent de penser qu'Europol n'a pas la capacité de diriger les opérations dans ce domaine et que son système d'échange d'informations est trop rigide. Les services de renseignement demeurent particulièrement réticents au partenariat avec Europol. Or la communication par les États membres de toute information opérationnelle et de tout renseignement à Europol figure précisément parmi les mesures mentionnées par la Commission dans le document qu'elle a rédigé aux fins de la réunion du Conseil européen consacrée au renforcement de la coopération antiterroriste dans l'Union [46], qui a eu lieu à Bruxelles le 19 mars 2004, à la suite des attentats commis la semaine précédente à Madrid.

[46] SEC (2004) 348 «Document de la Commission au Conseil sur le terrorisme pour préparer le Conseil européen», 18 mars 2004.

On se doit toutefois de reconnaître que la coopération antiterroriste dans l'Union a progressé depuis le 11 septembre 2001. Le 20 septembre suivant, le conseil JAI se réunissait en session extraordinaire et adoptait une longue liste de mesures d'envergure destinées à renforcer l'intervention de l'Union dans cette lutte, avec pour objectifs l'intensification de la coopération judiciaire et de la coopération policière, la lutte contre le financement du terrorisme, les contrôles aux frontières, la sécurité aérienne et maritime et la coopération avec les Etats Unis (ce qui a conduit à la signature d'accords entre Europol et les services répressifs des Etats-Unis sur l'échange de données à caractère personnel ou d'officiers de liaison).

Dans le domaine de la coopération policière, un grand pas en avant a été fait avec l'adoption de mesures concrètes visant à améliorer les relations entre les forces de police, Europol et les services de renseignement des États membres. À cet égard, il importe de citer la création d'une équipe de spécialistes de la lutte anti-terroriste ("Counter Terrorism Task Force") chez Europol, la création d'équipes multinationales chargée de rassembler et d'échanger des informations sur les terroristes, les réunions des chefs des unités antiterroristes et de ceux des services de renseignement de la police, l'intensification des contrôles aux frontières extérieures et des mesures de sécurité dans les aéroports et les avions, et l'établissement de profils de terroristes. En outre, la task force des chefs de police européens s'est accordée sur des améliorations à apporter au traitement de l'information et à la coopération entre les unités d'intervention.

En matière de coopération judiciaire et policière, le 13 juin 2002, le Conseil a adopté une décision-cadre relative à la lutte contre le terrorisme [47], qui vise à rapprocher les définitions des infractions terroristes dans tous les États membres et à fixer un seuil commun pour les peines et les sanctions. Un autre instrument récent est le mandat d'arrêt européen [48], qui devrait faciliter l'extradition entre États membres en remplaçant les instruments existants. Il couvre, entre autres, les délits et les crimes commis par des terroristes. De plus, en février 2002 a eu lieu la création du réseau Eurojust [49], qui réunit des procureurs, des magistrats et des officiers de police ayant des prérogatives équivalentes. Le 28 novembre 2002, le Conseil a adopté une décision [50] instaurant un mécanisme d'évaluation de l'application et de la mise en oeuvre au plan national des engagements internationaux en matière de lutte contre le terrorisme. Le 19 décembre 2002, une décision du Conseil relative à l'application de mesures spécifiques de coopération policière et judiciaire en matière de lutte contre le terrorisme a été adoptée [51].

[47] Décision-cadre du Conseil 2002/475/JAI du 13 juin 2002, JO L 164 du 22 juin 2002.

[48] Décision-cadre du Conseil 2002/584/JAI du 13 juin 2002. JO L 190 du 18 juillet 2002.

[49] Décision du Conseil 2002/187/JAI du 28 février 2002, JO L 63 du 6 mars 2002.

[50] Décision du Conseil 2002/996/JAI du 28 novembre 2002, JO L 349 du 24 décembre 2002.

[51] Décision du Conseil 2003/48/JAI du 19 décembre 2003, JO L 16 du 22 janvier 2003.

Le terrorisme n'en demeure pas moins une menace pour la sécurité de l'Union, comme l'ont démontré les attentats de Madrid. Ainsi que le souligne la réponse de la Commission à la Stratégie européenne de sécurité en matière de lutte contre le terrorisme [52], «le terrorisme défie le principal objectif de l'UE, à savoir la promotion de la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux et met en évidence le lien intrinsèque entre sécurité intérieure et extérieure». Une bonne coordination est dès lors la condition essentielle d'une lutte plus efficace contre le terrorisme.

[52] SEC (2004) 332 du 19 mars 2004.

Il est donc primordial d'améliorer la coordination entre tous les services participant à la lutte antiterroriste au sein des structures du Conseil. Une première étape consisterait à faire en sorte que toutes les délégations siégeant dans le groupe de travail Terrorisme comprennent leurs deux services de renseignement (policier et non policier) et à accroître le rôle d'Europol dans la politique européenne antiterroriste. Ensuite, il serait nécessaire de rapprocher le groupe antiterrorisme du Club de Berne du groupe de travail Terrorisme et du groupe COTER. Europol devrait être transformé en un véritable centre de renseignement, avec création d'une base de données commune sur le terrorisme dans laquelle figureraient des noms de personnes, des incidents, des indications et des opérations, dans le strict respect des dispositions de la convention Europol sur la protection des données. Des progrès ont été faits récemment puisqu'Europol peut désormais assister les équipes multinationales ad hoc pour la collecte et l'échange d'information sur le terrorisme et qu'il aura bientôt une connexion au réseau BDL, dès qu'il satisfera aux conditions de sécurité et à la convention Europol. La recommandation du Conseil relative à la constitution d'équipes multinationales chargées de rassembler des informations sur les terroristes [53] devrait devenir un instrument contraignant.

[53] Recommandation du conseil JAI du 13 juin 2002.

Comme le mentionne le document précité de la Commission relatif à la lutte contre le terrorisme, il serait souhaitable d'améliorer la coordination des activités antiterroristes au sein même des institutions européennes (en suivant l'exemple de la rédaction conjointe du recueil d'évaluations de la menace terroriste par les groupes COTER et TWG ou encore les réunions mixtes de ces deux groupes de travail du Conseil) et de renforcer le rôle du groupe de travail Terrorisme dans l'élaboration des politiques européennes. Il va sans dire que toutes les mesures envisagées dans le présent chapitre devraient respecter strictement la législation sur la protection des données à caractère personnel.

 

2.1.6.2. Autres sujets relevant de la coopération policière

 

L'ordre public et la sécurité des réunions à haut niveau

Après les violentes manifestations qui ont eu lieu pendant les conseils européens de Nice et de Göteborg, et plus encore après la réunion du G-8 à Gênes, en juillet 2001, la capacité des forces de police à garantir l'ordre et la sécurité publics tout en respectant les droits fondamentaux a été mise en cause. Le 13 juillet 2001, un conseil JAI extraordinaire s'est réuni pour examiner cette question. Une série de mesures visant à prévenir les manifestations violentes pendant les réunions à haut niveau ont été adoptées, parmi lesquelles l'intensification de la coopération entre les polices, l'échange d'informations (dans le respect du droit à la protection des données à caractère personnel), le franchissement des frontières, la coopération judiciaire et des mesures d'organisation.

Le Conseil soulignait en même temps que les citoyens doivent pouvoir exercer leur droit de s'exprimer librement et de se réunir pacifiquement, dans des conditions ne menaçant pas leur sécurité, celle d'autrui ou leurs biens. Il a recommandé d'établir un dialogue constructif entre les organisateurs de manifestations publiques et les autorités du pays hôte, ainsi que des contacts étroits au niveau international pour s'assurer que des manifestations légitimes ne sont pas exploitées ou dénaturées par des groupes violents.

La task force des chefs de police européens a suggéré au Conseil de créer un groupe d'experts chargé de rédiger un manuel commun à l'intention de la police et des autorités qui préparent des réunions à haut niveau. Les travaux du groupe ont abouti à l'élaboration d'un manuel.

Par ailleurs, le Conseil a adopté divers instruments pour relancer la coopération policière dans d'autres domaines. Certains d'entre eux sont contraignants comme, par exemple, la décision du Conseil du 25 avril 2002 concernant la sécurité lors de matches de football revêtant une dimension internationale [54], la décision du Conseil du 13 juin 2002 portant création d'un réseau européen de points de contact en ce qui concerne les personnes responsables de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre [55], et la décision du Conseil du 28 novembre 2002 relative à la création d'un réseau européen de protection des personnalités [56].

[54] JAI/348/2002 du 25 avril 2002, JO L 121 du 8 mai 2002.

[55] 2002/494/JAI du 13 juin 2002, JO L167 du 26 juin 2002.

[56] 2002/956/JAI du 28 novembre 2002, JO L 333 du 10 décembre 2002.

Mais un nombre considérable des documents adoptés sont non contraignants. Leur prolifération est l'un des obstacles à une bonne coopération policière dans l'UE, qui seront examinés de plus près dans le chapitre suivant.

 

2.1.6.3. L'article 32 du TUE

 

Cet article dispose que "[l]e Conseil fixe les conditions et les limites dans lesquelles les autorités compétentes visées aux articles 30 et 31 peuvent intervenir sur le territoire d'un autre État membre en liaison et en accord avec les autorités de cet État." Le plan d'action de Vienne mentionne cet article parmi les domaines dans lesquels des progrès doivent être réalisés dans les deux années suivant l'entrée en vigueur du TUE, "en tenant compte de l'acquis de Schengen." Il souligne que la création d'un cadre collectif pour ce type d'opération constitue l'une des priorités de la coopération policière, en ajoutant que ce cadre peut être souple.

Jusqu'à présent, l'article 32 n'a servi de base légale à aucune proposition ou initiative législative. Mais des décisions ont été adoptées dans l'esprit de cet article, par exemple la convention relative à l'entraide judiciaire en matière pénale de 2000 et la décision-cadre relative aux équipes communes d'enquête de 2002 [57]. Toutes deux fixent de nouvelles conditions et restrictions à l'intervention de la police sur le territoire d'un autre État membre. Parmi d'autres exemples, on peut citer les initiatives lancées pour étendre l'application et la portée des articles 40 à 43 de la convention de Schengen (observation transfrontalière et poursuite). De plus, plusieurs accords bilatéraux conclus dans le cadre de Schengen élargissent les compétences des agents pour leur permettre d'intervenir sur le territoire de l'autre État membre.

[57] Décision-cadre 2002/465/JAI du 13 juin 2002, JO L 162 du 20 juin 2002.

En raison de son importance potentielle pour la coopération policière opérationnelle, et puisque le plan d'action de Vienne en fait une priorité absolue, la Commission estime essentiel que les moyens envisageables pour mettre cet article en oeuvre soient discutés au Conseil.

La nécessité de définir clairement les conditions d'intervention des services de police d'un État membre sur le territoire d'un autre État membre apparaît clairement dans les discussions menées pour améliorer la coopération entre les différentes unités d'intervention de la police, et entre les unités spécialisées dans la protection contre les risques biologiques, nucléaires, chimiques et radiologiques. De futures situations de crise pourraient obliger ces services d'un État membre à intervenir, et éventuellement à recourir à la force, sur le territoire d'un autre État membre.

C'est également une nécessité si l'on veut développer la coopération transfrontalière dans les régions des États membres partageant des frontières communes (voir également le chapitre sur la coopération Schengen). Dans le cadre de ces discussions, il serait utile d'envisager l'adoption d'un modèle commun de coopération transfrontalière, basé sur l'expérience réussie de quelques États membres, ainsi que sur les accords bilatéraux de coopération policière existants.

À ce sujet, on se doit de mentionner une convention bilatérale de coopération policière qui a été négociée récemment entre l'Autriche et l'Allemagne, car elle représente une avancée certaine par rapport aux accords existants. En effet, parmi ses dispositions, cette convention prévoit la possibilité de subordonner des policiers nationaux aux autorités de l'autre État membre, d'exercer certains pouvoirs coercitifs sur le territoire de ce dernier, de participer à la protection des personnes et des biens sur le territoire de l'autre État membre, de transmettre et de comparer des profils génétiques, de simplifier et d'élargir l'observation transfrontalière et la poursuite, et d'également permettre l'observation pour protéger des personnes et des biens. Selon la Commission, c'est un exemple prometteur de l'évolution que devrait connaître la coopération policière européenne.

 

2.2. La coopération douanière

 

Tout comme la coopération policière, la coopération douanière a été introduite dans la partie intergouvernementale du traité de Maastricht sur l'Union européenne, en 1992. Son article 29 institue une coopération plus étroite entre les forces de police, les autorités douanières et les autres autorités compétentes dans les États membres. Bien que les conclusions de Tampere ne mentionnent pas expressément la coopération douanière, nombre des questions relèvent spécifiquement de la compétence des douanes. Les autorités douanières des États membres jouent un rôle vital dans la lutte contre la grande criminalité internationale. On peut notamment citer la lutte contre les trafics de stupéfiants, d'armes, de munitions et d'explosifs, la lutte contre le vol de biens culturels, la protection des trésors nationaux ayant une valeur artistique, historique ou archéologique (article 30 du TCE), les déchets dangereux et toxiques, les matières nucléaires, ou les matières ou les équipements destinés à la fabrication d'armes atomiques, biologiques et/ou chimiques.

À la différence de la coopération policière, une part non négligeable de la coopération douanière relève du premier pilier, comme en témoigne l'article 135 du traité instituant la Communauté européenne. Lorsque l'on étudie la coopération douanière dans l'Union européenne, il importe donc de ne pas oublier de quel pilier relèvent les différentes compétences des douanes.

Des objectifs plus précis en matière de coopération douanière sont fixés dans le plan d'action de Vienne. Il s'agit de la ratification de la convention d'assistance mutuelle et de la coopération entre les États membres (Naples II) [58] et de la convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes (SID) [59]. S'il y a eu des avancées pour les deux conventions, certains États membres n'ont pas encore achevé la procédure de ratification.

[58] JO C 24 du 23 janvier 1998.

[59] JO C 316 du 27 novembre 1995.

Parmi ceux qui ont ratifié les conventions (à ce jour, treize États membres ont ratifié la convention SID, et dix la convention de Naples II), aucun ne recourt actuellement aux formes spéciales de coopération prévues par Naples II ni ne fournit de données à la base de données SID troisième pilier, alors que les pays ayant procédé à la ratification pourraient provisoirement appliquer ces conventions. Il est donc trop tôt pour déterminer si leur application améliore l'entraide et la coopération entre les services répressifs des États membres.

Les douanes participent à la lutte contre les trafics de multiples façons. L'une d'elles est le partage d'informations et de renseignements. C'est dans ce domaine que la convention SID et la base de données du troisième pilier faciliteront l'échange et la diffusion des informations en vue de prévenir ou de détecter les infractions aux droits nationaux, et les demandes d'intervention. Avec l'aide des États membres, la Commission (OLAF) a bien avancé dans le développement technique de la base de données, qui est devenue pleinement opérationnelle le 24 mars 2003.

Le SID troisième pilier sera encore étendu par l'intégration du fichier d'identification des dossiers d'enquêtes douanières (FIDE), qui fournira aux douaniers des informations précieuses sur les personnes physiques ou morales qui ont commis des infractions graves à la législation douanière, ou qui font l'objet d'une enquête à ce sujet. Le protocole nécessaire à la modification de la convention SID a été adopté par le Conseil le 8 mai 2003 [60]. La Commission (OLAF) a engagé des ressources pour développer le FIDE et, en 2003, a commencé une étude de faisabilité. Le développement technique commencera dans le courant de l'année 2004, de sorte que ce très utile complément au SID troisième pilier sera opérationnel assez rapidement.

[60] JO C 139 du 13 juin 2003.

La convention de Naples II a été signée le 18 décembre 1997. Elle vise à améliorer l'efficacité de la coopération douanière et de la répression dans l'Union européenne, en prévenant et en recherchant les infractions aux réglementations douanières nationales, et en poursuivant et en réprimant la violation des réglementations douanières communautaire et nationales. La convention prévoit des formes particulières de coopération, telles que la poursuite, l'observation transfrontalière, les livraisons surveillées, les enquêtes discrètes et les équipes communes d'enquête spéciale. Ces mesures particulières ont été jugées indispensables après la réalisation du marché unique et l'abolition des contrôles douaniers de routine aux frontières intérieures de l'Union européenne.

Bien que le texte de la convention mentionne expressément le terme "administrations douanières", son article 4, paragraphe 7, les définit comme étant les autorités douanières des États membres ainsi que les autres autorités chargées de l'application des dispositions de la convention. Cette dernière instaure ainsi une coopération entre les services répressifs disposant des pouvoirs nécessaires pour réprimer les infractions douanières définies à l'article 4, paragraphes 1 et 2.

Afin de favoriser l'application pratique de la convention, un manuel a été élaboré en 2002 par le groupe de travail Coopération douanière (CCWG) du Conseil. Il permet d'expliquer aux services opérationnels les dispositions de la convention et la manière de les appliquer.

Par ailleurs, les États membres ont mis en place des actions bilatérales. Ainsi qu'il a été expliqué au point 2.1.1, des centres de coopération communs aux douanes, à la gendarmerie et à la police ont été créés, conformément à l'article 39 de la convention de Schengen. Ils visent à favoriser un travail plus étroit et l'échange d'informations à la frontière entre les services s'occupant de la criminalité transfrontalière, de la contrebande et de l'immigration clandestine. Ces centres sont indispensables au renforcement de la coopération et au développement d'une connaissance et d'une compréhension mutuelles entre les services répressifs concernés.

Chaque année, les États membres organisent au moins quatre opérations conjointes de surveillance douanière, souvent avec l'appui du réseau OISIN et, depuis 2003, des programmes AGIS. Ces dernières années, ces opérations ciblaient la contrebande de drogues dures, de cigarettes et d'alcool, et les transferts d'argent frauduleux, afin de lutter contre les activités des groupes criminels. Ces opérations sont extrêmement utiles car elles maintiennent une pression sur les organisations criminelles et donnent de bons résultats en termes de saisies et d'obtention de renseignements, tout en faisant connaître le rôle joué par les douanes dans la protection de la société et en contribuant à créer un espace de liberté, de justice et de sécurité. Elles améliorent en outre les relations de travail entre les autorités douanières, non seulement en les faisant travailler ensemble, mais en développant des formes particulières de coopération: l'établissement du profil des personnes à risque, l'évaluation des menaces, le ciblage, et l'échange d'informations. Les rapports sur les opérations comportent en outre des recommandations constructives. On constate toutefois que lors de la planification des opérations, il n'a pas toujours été tenu compte de recommandations antérieures.

Ces dernières années, la participation des pays adhérents et candidats a fait l'objet d'une attention particulière, afin de faciliter leur future adhésion à l'UE. Europol a participé à plusieurs opérations en fournissant les locaux et l'équipement nécessaires aux réunions et aux centres de contrôle opérationnel, ainsi qu'une assistance pour l'analyse des résultats. En outre, la Commission (OLAF) a apporté un précieux soutien technique aux opérations grâce à l'AFIS (Anti Fraud Information System), qui garantit la confidentialité des échanges d'informations, et un soutien matériel à l'unité de coordination opérationnelle (UCO). La récente mise au point par la Commission d'une application créant une UCO virtuelle favorisera encore davantage ces opérations en réduisant leur coût et en permettant à tous les pays de participer aux activités de l'UCO sans devoir être physiquement présents pour autant. La contribution d'Europol s'est révélée utile et devrait être étendue à l'avenir, particulièrement pour l'analyse criminelle. Son aide à la planification et à l'organisation des opérations est un autre volet à développer car elle pourrait affiner le ciblage et veiller à ce que les tendances et les menaces actuelles soient prises en compte.

Depuis l'entrée en vigueur du TUE, les administrations douanières des États membres continuent de prendre des mesures de renforcement de leur coopération. Elles ont créé un réseau de points de contact opérationnels pour développer encore davantage l'échange d'informations et l'assistance mutuelle. Cette coopération sera encore améliorée lorsque les conventions SID et Naples II auront été ratifiées et seront intégralement appliquées dans tous les États membres. Les opérations conjointes continuent à donner de bons résultats, même s'il faut veiller à faire respecter les recommandations antérieures. Il est souhaitable que d'autres services répressifs et Europol participent pleinement aux futures opérations pour favoriser une coopération plus étroite.

En juillet 2003, la Commission a présenté au Parlement européen et au Conseil une communication sur le rôle des douanes dans la gestion des frontières extérieures [61]. Cette communication a trait à la coopération douanière dans le cadre du premier et du troisième pilier. Elle suggère de rationaliser les opérations de contrôle aux frontières extérieures en se concentrant sur les contrôles prioritaires, en définissant une méthode commune de gestion des risques, en favorisant la coopération et l'échange rapide d'informations entre tous les services chargés de la sécurité; elle évoque également les mesures envisageables pour satisfaire les besoins d'équipements et assurer des contrôles de degré équivalent tout au long de la frontière extérieure de l'UE. Le conseil ECOFIN du 4 novembre 2003 a invité les États membres et la Commission à travailler dans le sens d'une gestion intégrée des frontières extérieures, pour assurer une coordination entre les services chargés du contrôle des personnes et ceux procédant au contrôle des marchandises.

[61] "Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur le rôle de la douane dans la gestion intégrée des frontières extérieures." COM(2003) 452 final du 24 juillet 2003.

Au sein du Conseil, le groupe de travail Coopération douanière a élaboré un programme étendu sur plusieurs présidences (18 mois) pour la coopération douanière relevant du troisième pilier. Dans le cadre de ce programme, le 2 octobre 2003, le Conseil a adopté une résolution appelant à élaborer une stratégie pour la coopération douanière [62]. Dans la résolution, le Conseil reconnaît qu'une approche intégrée de la lutte contre la criminalité, englobant une participation à la lutte antiterroriste, à l'intérieur d'un espace de liberté, de sécurité et de justice, devrait comporter, outre une coopération douanière, une coopération multilatérale étroite et efficace entre, d'une part, les douanes et, d'autre part, les autres services répressifs et les autres organes et agences de l'Union européenne, tels Europol, Eurojust et la Commission (OLAF).

[62] JO C 247 du 15 octobre 2003.

La stratégie et le programme d'action ont été adoptés par le groupe de travail Coopération douanière en décembre 2003 et leur mise en oeuvre commencera sous la présidence irlandaise. Ces instruments fournissent le cadre d'une coopération renforcée entre les autorités douanières pour les prochaines années. La stratégie inclut certaines mesures suggérées par la Commission pour accroître l'efficacité de la coopération douanière européenne, par exemple la création d'une unité de coordination opérationnelle (UCO) permanente, le partage d'officiers de liaison, l'évaluation des menaces existant à l'échelle européenne, l'établissement de profils de risque communs, l'organisation de formations communes, et des entraînements avec la police lorsque cela est opportun et mentionne les mesures envisageables pour satisfaire les besoins d'équipements et assurer des contrôles de niveau équivalent tout au long de la frontière extérieure de l'UE. Il demeure essentiel que tous les États membres ratifient immédiatement et intégralement la convention de Naples II.

Dans les domaines qui viennent d'être cités, il importe d'établir des rapports étroits avec le travail entrepris dans le cadre de la coopération douanière relevant du premier pilier.

2.3. Les programmes OISIN et AGIS, instruments de promotion de la coopération policière et douanière dans l'UE.

Le 20 décembre 1996, le Conseil avait adopté une action commune établissant un programme commun d'échanges, de formation et de coopération entre les services répressifs (le programme OISIN [63]). Une seconde phase, OISIN II, avait été instaurée pour la période 2001-2002 par la décision du Conseil du 28 juin 2001 [64].

[63] 97/12/JAI, JO L 7 du 10 janvier 1997

[64] 2001/513/JAI, JO L 186 du 7 juillet 2001.

Le programme OISIN II a ensuite été remplacé, ainsi que les autres programmes gérés par la Commission conformément au Titre VI du TUE [65], par le programme AGIS créé par la décision du Conseil du 22 juillet 2002 [66] aux fins de promouvoir la coopération policière et judiciaire en matière pénale et de soutenir les efforts déployés par les praticiens de la justice pour développer la politique européenne dans ce domaine. Entre 1999 et 2002, la Commission a apporté son soutien à 192 projets concernant la coopération policière et douanière dans le cadre des programmes OISIN et OISIN II [67].

[65] Grotius II Pénal, Falcone, Hippocrate et Stop II.

[66] 2002/630/JAI, JO L 203 du 1er août 2002.

[67] Voir le rapport sur le programme OISIN II 2001 présenté au Parlement européen et au Conseil, SEC(2003) 316 du 14 mars 2003.

Parmi les exemples de réussite, on peut citer les opérations Viking et TRACK, qui portaient respectivement sur des cargaisons de drogues et des vols de véhicules, ainsi que plusieurs projets visant à fixer des normes de qualité communes pour la gestion des scènes de crime, à l'intention de la police technique et scientifique. Les programmes OISIN ont été très utiles au développement concret de la coopération policière et douanière dans l'UE, ainsi que dans les pays adhérents et candidats. Pour chaque euro investi, les programmes ont produit près de deux euros en moyenne, en termes de coopération entre les services répressifs des États membres et des pays adhérents et candidats.

Quant au programme AGIS, le premier appel à propositions lancé début 2003 a reçu 216 réponses, dont 99 projets concernant la coopération policière et douanière. Au total, la Commission a proposé de cofinancer 148 projets cette année, dont 77 projets en matière de coopération policière et douanière.

Il est primordial que les projets cofinancés par AGIS aident à résoudre des problèmes objectifs dans des domaines prioritaires de la coopération policière et douanière européenne. Les États membres et la Commission devraient collaborer plus étroitement pour qu'un nombre supérieur de projets financés par AGIS atteignent cet objectif. La Commission proposera donc qu'à partir de 2004, le programme de travail AGIS se concentre, pour la coopération entre les services de police et les services douaniers, sur les priorités définies par la présente communication. Une plus grande coordination au niveau des États membres serait souhaitable afin que les propositions de projet soumises par les services de police et des douanes soient davantage axées sur les priorités décrites dans le programme de travail AGIS. La Commission examinera en outre s'il est possible de simplifier encore les procédures de demande et d'accélérer les paiements.

Enfin, la Commission constituera un catalogue des rapports sur les projets cofinancés par les programmes OISIN et OISIN II au fil des années. Il permettra de mieux identifier les domaines dans lesquels la coopération policière est plus ou moins avancée, ainsi que ceux où une coopération doit être instaurée.

 

II PROPOSITIONS D'AMÉLIORATIONS

 

1. LES FACTEURS ENTRAVANT LA COOPERATION POLICIERE ET DOUANIERE

 

1.1. La nature du travail de la police

 

Confier à la police le soin de faire respecter la loi, de maintenir l'ordre public et d'assurer la sécurité si situe au coeur même de ce qui fait la souveraineté d'un État, le monopole du recours à la force, qui donne le droit d'arrêter, d'interroger et de détenir des personnes, ou de faire usage d'armes à feu. Si l'on se place dans une perspective nationale, on comprend dès lors que les pays soient réticents à adhérer à des conventions internationales qui empiètent sur leur souveraineté nationale. Cette résistance des autorités nationales se manifeste plus particulièrement à l'égard des accords habilitant la police d'autres pays ou les représentants d'un organisme international à exercer des pouvoirs de police sur leur territoire, même si, objectivement, leur présence est nécessaire à une lutte plus efficace contre la criminalité.

Outre ceux qui viennent d'être cités, trois obstacles à la coopération policière internationale peuvent être mentionnés: une réticence naturelle à partager les informations, la coexistence dans les États membres de différents services de police et le fait que le renforcement de la coopération policière est tributaire de l'amélioration de la coopération judiciaire en matière pénale.

La recherche et le traitement des informations sont une part essentielle du travail policier, notamment pour prévenir et déceler les infractions et enquêter à leur sujet. Le succès des enquêtes et la répression consécutive des infractions dépendent de la qualité des informations rassemblées, de leur analyse et, plus spécialement, de la protection contre leur fuite vers des personnes ou des organisations qui ne doivent pas en avoir connaissance. D'où une réticence naturelle à les partager, en particulier avec des services ou des personnes avec lesquels il n'existe aucune relation de confiance mutuelle.

Cette réticence s'observe non seulement dans les contacts au niveau international, mais également entre les différentes forces de police d'un même pays (voire parfois au sein d'une même force). C'est pourquoi, aujourd'hui encore, on recourt aux contacts informels et aux officiers de liaison dans les échanges internationaux. La confiance mutuelle s'installera progressivement avec le temps, fruit d'une coopération durable et approfondie dans les structures formelles créées par l'Union, telles que les groupes de travail du Conseil, Europol ou la task force des chefs de police. Mais ce processus naturel prend beaucoup de temps. Il convient donc de trouver des moyens de progresser plus rapidement.

La formation dispensée par le CEPOL et le programme de sensibilisation d'Europol, qui devrait être renforcé, constituent de bons moyens d'instaurer un climat de confiance et de coopération. L'extension des structures de coopération transfrontalière à toutes les régions de l'Union adjacentes à sa frontière intérieure devrait elle aussi grandement contribuer à bâtir cette confiance mutuelle.

La coopération internationale est encore compliquée par la coexistence, dans de nombreux pays, de différents corps de police: police civile, police militaire, polices nationale, régionale et/ou locale, ou police entièrement régionalisée. Sur le plan organisationnel, on conçoit bien que cette coexistence de corps de police distincts complique la coopération, notamment lorsqu'il s'agit de partager des informations. C'est pourquoi les États membres désignent généralement un seul service qui sera compétent pour tous les contacts internationaux. Il est indispensable que chaque État membre organise sa coordination interne de telle sorte que tous les services concernés soient en mesure de prendre part à la coopération internationale.

L'échange international d'informations ne peut s'améliorer sans que les États membres disposent de certaines structures, dans le pays même et au niveau international. Au plan national doit exister un système électronique d'échange d'informations qui permette à tous les services concernés de se transmettre des données rapidement et en toute sécurité. Le système doit comprendre une fonction d'analyse criminelle pouvant être alimentée et consultée par tous les services partout dans le pays.

Pour procéder à l'échange international d'informations, il est indispensable de désigner des points de contact nationaux centralisés (PCNC) dans tous les États membres. Cette mesure était déjà recommandée dans le programme d'action relatif à la criminalité organisée de 1997 [68] et sa nécessité a été soulignée une nouvelle fois dans le rapport final sur la deuxième série d'évaluations [69], dont le point 5.4.1 concluait que "la coopération internationale n'est pas encore optimale étant donné que tous les États membres n'ont pas encore institué un point de contact central. C'est surtout au début d'une enquête que l'existence d'un grand nombre de services répressifs dans l'ensemble de l'Union peut compliquer la tâche consistant à identifier le partenaire adéquat avec lequel coopérer." Les PCNC devraient réunir, idéalement au sein d'un seul et même bureau, les unités nationales d'Europol, les bureaux Sirene, les douanes, les bureaux centraux nationaux d'Interpol et les représentants des autorités judiciaires. Les États membres qui ont établi ces points de contact voient la communication entre les services concernés et l'échange d'informations avec d'autres pays s'améliorer sensiblement.

[68] Décision du Conseil du 28 avril 1997, JO C 251/01.

[69] Document du Conseil 9615/1/03 REV 1 LIMITE CRIMORG 43 du 30 juin 2003.

Le troisième facteur concerne la coopération policière internationale dans les enquêtes sur le terrain. La plupart des techniques d'enquête utilisées par la police (observation, interception, livraisons surveillées, enquêtes discrètes, etc.) doivent en effet préalablement être autorisées par les autorités judiciaires, en accord avec le code de procédure pénal national. La convention relative à l'entraide judiciaire en matière pénale de 2000 vise à simplifier les procédures générales de coopération judiciaire et à favoriser la coopération concernant les techniques d'enquête spéciales.

Or, à ce jour, la convention n'a été ratifiée que par trois États membres. C'est extrêmement préoccupant car l'Union est ainsi privée d'un instrument qui pourrait être déterminant. De plus, des pessimistes prédisent que les dispositions de la convention relatives à certaines techniques d'enquête n'apporteront pas de réel progrès par rapport à la situation actuelle, parce que leur application est généralement du ressort de la législation nationale. La Commission estime donc nécessaire d'examiner s'il y a lieu d'adopter un texte pour faire avancer de manière décisive la coopération judiciaire concernant ces techniques.

 

1.2. L'absence d'approche stratégique

 

L'un des principaux problèmes de la coopération policière et douanière dans l'UE a été l'absence évidente d'une approche stratégique. Le tableau de bord de la Commission ne rend compte de l'évolution que des seules mesures qui ont été adoptées. Le droit d'initiative demeurant entre les mains des États membres, en pratique, chaque présidence du Conseil définit la liste des priorités en fonction de ses propres priorités. Et la règle de l'unanimité qui prévaut encore dans ce domaine vient encore ralentir les choses.

La Convention sur l'avenir de l'Europe a proposé des mécanismes décisionnels améliorés, ainsi qu'une modification du droit d'initiative. Ils sont examinés plus loin (point 1.4) Mais à supposer même que la Conférence intergouvernementale (CIG) accepte ces nouvelles règles au final, il faudra plusieurs années pour que ses décisions soient ratifiées par tous les États membres. Il est donc essentiel de faire adopter des méthodes de travail par les procédures décisionnelles existantes, afin qu'une avancée concrète et décisive puisse avoir lieu d'ici la fin du processus de ratification.

La définition d'une liste de priorités concrètes pour chaque année, sur la base d'un programme de travail pluriannuel, constituerait un progrès majeur. La décision du Conseil du 22 juillet 2002 fait obligation au conseil "Affaires générales et relations extérieures" de recommander au Conseil européen, en vue de son adoption, un programme stratégique pluriannuel pour les trois années qui suivent. [70] Ce programme est basé sur une proposition conjointe des présidences concernées, établie en consultation avec la Commission. À la lumière du programme stratégique pluriannuel, les deux présidences qui seront en exercice l'année suivante doivent présenter conjointement un projet de programme opérationnel annuel des activités du Conseil pour cette année là. Ce projet de programme est présenté en décembre de chaque année au conseil "Affaires générales et relations extérieures".

[70] JO L 230 du 28 août 2002.

Tout comme il l'est aujourd'hui, le tableau de bord demeurera l'outil de suivi des progrès enregistrés dans le domaine de la coopération policière et douanière. Plusieurs États membres ont récemment reconnu qu'il importait de fixer des priorités objectives et d'établir un programme de travail pour la coopération policière. La Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas ont ainsi rédigé une proposition définissant une procédure concrète pour la fixation des priorités objectives et l'élaboration des programmes de travail annuels et pluriannuels. La proposition vise en outre à garantir une bonne coopération policière opérationnelle dans l'Union et à l'intégrer dans la coopération policière officielle. La coopération opérationnelle est abordée au point 2.1.3 de la présente communication.

 

1.3. La prolifération des textes non contraignants

 

Un autre problème du troisième pilier est la prolifération des textes non contraignants que le Conseil a approuvés ou dont il a pris acte, comme les recommandations ou les conclusions. La valeur ajoutée de ce type d'instruments est réduite : ils font perdre un temps et mobilisent des ressources précieux, et ils tendent à créer la confusion en donnant lieu à diverses interprétations sur l'obligation de les appliquer. La Commission est d'avis que si les États membres considèrent un sujet comme suffisamment important pour être discuté au niveau du Conseil, les discussions doivent aboutir à des mesures qui seront effectivement mises en oeuvre par tous.

 

1.4. La procédure de décision dans le troisième pilier

 

Les faibles progrès réalisés dans la coopération policière et douanière ces dernières années tiennent pour beaucoup à la procédure de décision actuellement appliquée dans l'Union pour les matières relevant du Titre VI du TUE. Son article 34, paragraphe 2, prévoit en effet que le Conseil doit statuer à l'unanimité et que le droit d'initiative législative est partagé entre les quinze États membres et la Commission.

Dans le meilleur des cas, cette situation rend la prise de décision très longue et très lente à tous les niveaux des structures du Conseil et des organismes tels qu'Europol, le CEPOL et la task force des chefs de police. Dans le pire des cas, soit aucune décision n'est prise, soit on adopte des textes non contraignants, comme les conclusions ou les recommandations du Conseil. Les pays assurant la présidence veulent pouvoir affirmer que la coopération dans les domaines relevant du troisième pilier a fait des avancées notoires pendant leur mandat.

Personne n'a jamais usé de la faculté donnée par l'article 34, paragraphe 2, point c), d'adopter à la majorité qualifiée les mesures d'application des décisions du Conseil qui favorisent la coopération. Pour améliorer cette dernière, il importe de mieux exploiter les possibilités offertes par cet article.

La question des procédures de vote et du droit d'initiative pour les matières relevant actuellement du Titre VI a été discutée dans le cadre de la Convention sur l'avenir de l'Europe. Il est proposé de confier le droit d'initiative à la Commission et à un groupe représentant au moins 25% des États membres. Le projet de constitution européenne améliore considérablement la procédure de décision pour la coopération policière et douanière. En effet, même si les décisions concernant la coopération opérationnelle et celles relatives à l'intervention d'un État membre sur le territoire d'un autre État membre demeurent soumises à l'unanimité, les décisions qui ont trait au cadre et aux mécanismes de coopération (comme Europol) seraient prises à la majorité qualifiée et en co-décision. La Commission estime que l'équilibre atteint dans le projet de constitution européenne reflète fidèlement les compétences respectives des États membres et de l'Union dans ce domaine.

 

1.5. La mise en oeuvre insuffisante des instruments juridiques adoptés par le Conseil

 

Les progrès de la coopération policière et douanière sont freinés par la mise en oeuvre trop lente et insuffisante des instruments juridiques adoptés par le Conseil. À titre d'exemple, la convention de Naples II de 1997 et le protocole étendant le mandat d'Europol au blanchiment d'argent en général de septembre 2000 n'ont toujours pas été ratifiés par l'ensemble des États membres.

Eu égard à cette situation insatisfaisante, le conseil européen de Laeken de décembre 2001 a réaffirmé la nécessité de transposer rapidement en droit national les décisions prises par l'Union. Il a également souligné l'urgence de ratifier les conventions signées depuis l'entrée en vigueur du traité de Maastricht. Cet appel ne semble toutefois pas avoir été suivi d'effets concrets dans le domaine de la justice et des affaires intérieures.

Si différentes procédures permettent de vérifier systématiquement l'avancement de la mise en oeuvre par les États membres des textes contraignants adoptés par le Conseil, tels que les décisions-cadres, il n'existe en revanche aucun dispositif général les obligeant à appliquer ces textes. L'abolition des trois piliers prévue par le projet de constitution européenne suppose que les règles de droit commun de la procédure d'infraction s'appliqueront désormais aux textes réglant des matières qui relèvent actuellement du troisième pilier. En attendant, la Commission examine systématiquement l'application des textes par les États membres.

 

1.6. L'absence de recherche sur la coopération policière et douanière

 

Une politique publique dans un domaine donné produira d'autant plus d'effets positifs qu'elle sera basée sur une analyse objective des problèmes et des solutions envisageables et sur des statistiques permettant d'établir des comparaisons entre pays. Cela se vérifie tout particulièrement dans les domaines de politique complexes et sensibles tels que celui de la coopération policière et douanière. Les experts scientifiques indépendants ont un rôle majeur à jouer dans cette analyse.

Telle qu'elle existe actuellement dans l'UE, la recherche scientifique sur la coopération policière et douanière comporte bien des lacunes. La recherche proprement dite sur le sujet est très peu développée et le peu qui en existe se cantonne souvent à une analyse normative des traités, des institutions, des compétences et des procédures, sans s'intéresser suffisamment au véritable fonctionnement de la coopération existante. À l'inverse, il arrive fréquemment que la recherche se focalise sur certains aspects de la coopération policière et laisse de côté l'organisation et le fonctionnement de l'ensemble. La majeure partie de la recherche n'aborde donc pas les problèmes concrets auxquels l'Union est confrontée en matière de criminalité transfrontalière.

De surcroît, la recherche demeure généralement limitée à une analyse des méthodes de coopération et n'accorde pas une attention suffisante à sa nécessaire intégration dans les systèmes policiers et judiciaires des États membres. Du reste, il y a eu très peu de recherche sur les investissements et l'éventuelle adaptation des systèmes nationaux que requiert cette coopération. Enfin, on ne dispose pas de statistiques sur les principaux phénomènes de criminalité dans les États membres. Or ces données sont indispensables pour relever les différences d'occurrence et de gravité de ces phénomènes. Si ces données étaient disponibles, il deviendrait possible d'élaborer des mesures politiques efficaces au niveau de l'UE.

Il y a malgré tout eu une bonne nouvelle pour la recherche dans le domaine de la justice et des affaires intérieures dans l'Union : la mise à disposition de financements pour des projets de recherche portant, entre autres, sur la lutte contre la criminalité, dans le cadre du sixième programme-cadre pour des actions de recherche et de développement technologique [71]. Un nouvel appel à propositions pour des projets s'inscrivant dans ce programme sera publié en octobre 2004.

[71] Décision du Conseil du 30 septembre 2002 (2002/834/CE), JO L 294 du 29 octobre 2002, p. 1.

La Commission estime essentiel de développer considérablement les connaissances sur la coopération policière et douanière dans l'Union au cours des prochaines années. Une première étape consisterait à déterminer avec exactitude la demande de recherche dans les services répressifs de l'UE, d'une part, et l'offre potentielle chez les chercheurs, d'autre part. La Commission pense que le CEPOL est tout désigné pour remplir cette mission au niveau de l'Union.

Il convient de doter la recherche de financements suffisants. Cette charge incombe à la fois aux États membres et à l'Union. La Commission propose de réserver des fonds du programme AGIS à la recherche sur les sujets prioritaires identifiés dans la présente communication. En même temps, la Commission continuera à oeuvrer en matière de justice et affaires intérieures par le biais du sixième programme-cadre. À plus long terme, elle étudiera s'il convient d'envisager un programme de recherche distinct pour cette matière.

 

1.7. La nature de la coopération entre la police et les douanes

 

L'article 29 du TUE instaure une coopération plus étroite entre les forces de police, les autorités douanières et les autres autorités compétentes dans les États membres.

Pour ce qui concerne la coopération entre les douanes et la police, au niveau international, elle semble fonctionner de manière diversifiée selon les États membres; au niveau national, on constate qu'elle n'existe pas dans tous les États. Ce fait est particulièrement évident dans le domaine des stupéfiants. Certains États membres ont conclu des accords renforçant la collaboration entre les services de police et des douanes en matière de lutte contre le trafic de drogues, conformément à la résolution du Conseil du 29 novembre 1996 [72], dans laquelle le Conseil priait instamment les États membres d'établir des accords formels ou d'autres arrangements au niveau national qui tiennent compte des grandes orientations définies dans la résolution. Ces dispositions prévoient, entre autres, la délimitation précise et le respect des compétences de chacun des deux services, et l'échange et le partage de renseignements pertinents.

[72] JO C 375 du 12 décembre 1996.

Les autres domaines dans lesquels la coopération entre les douanes et d'autres services répressifs est en voie d'intensification sont la lutte contre le terrorisme et la sécurité de la chaîne internationale d'approvisionnement. Cette coopération renforcée fait suite aux récents attentats terroristes qui touché toutes les parties du monde. On peut espérer qu'elle permettra de localiser des terroristes connus ou présumés et qu'elle augmentera la sécurité des transports de marchandises.

Dans certains États membres, la coopération a été développée en tenant compte des compétences spécifiques de ses acteurs : coopération et assistance mutuelle dans les zones frontalières, interventions réunissant plusieurs services répressifs, actions répressives conjointes, capacités d'intervention accrues, cellules de renseignement communes destinées à l'échange d'informations et de renseignements au profit de tous les participants.

Après avoir examiné la situation et consulté les États membres, la Commission est d'avis qu'il convient d'établir une coordination et une communication plus efficaces entre les services respectifs de la police et des douanes, tant dans les États membres qu'au sein des structures de travail du Conseil.

 

1.8. Les bases de données et les systèmes de communication relevant du troisième pilier

 

Ces dernières années, divers systèmes de communication et bases de données ont été mis au point dans l'Union à l'intention des services répressifs des États membres. Ils sont tous mentionnés dans les parties concernées de la présente communication. Parmi les plus importants, on peut citer le Système d'information Europol, le Système d'information Schengen, le Système d'information des douanes (premier et troisième piliers), le fichier d'identification des dossiers d'enquêtes douanières et le réseau privé virtuel d'Europol. Certains d'entre eux risquent de faire double emploi et il y a également lieu de s'interroger sur l'interopérabilité de ces outils.

Pour que le Conseil puisse mieux appréhender ce sujet très technique et complexe et prendre les décisions qui s'imposent, au début de l'année 2002, la Commission a présenté au comité de l'article 36 un document de séance résumant la finalité et le fonctionnement de chaque base de données et de chaque système de communication. Ce document a servi de base aux discussions du groupe ad-hoc constitué par le comité, en novembre 2002, pour étudier la question et formuler des propositions.

Le groupe ad-hoc, composé de la présidence du Conseil, de la Commission, d'EUROPOL, d'EUROJUST, de l'Autorité de contrôle commune pour la protection des données et du Secrétariat général du Conseil, a conclu que le risque de chevauchement des informations était limité et n'avait pas posé de problème jusqu'à présent [73]. Il a présenté

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