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CJUE, 8 mai 2008, aff. C-14/07, Ingenieurbüro Michael Weiss und Partner GbR c/ Industrie- und Handelskammer Berlin

 

Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 8 mai 2008

Affaire C-14/07

Ingenieurbüro Michael Weiss und Partner GbR

contre

Industrie- und Handelskammer Berlin

 

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Bundesgerichtshof)

«Coopération judiciaire en matière civile — Règlement (CE) nº 1348/2000 — Signification et notification des actes judiciaires et extrajudiciaires — Absence de traduction des annexes de l’acte — Conséquences»

Sommaire de l'arrêt

1.        Coopération judiciaire en matière civile — Signification et notification des actes judiciaires et extrajudiciaires — Règlement nº 1348/2000 — Acte introductif d'instance — Notion

(Règlement du Conseil nº 1348/2000, art. 8, § 1)

2.        Coopération judiciaire en matière civile — Signification et notification des actes judiciaires et extrajudiciaires — Règlement nº 1348/2000 — Notification d'un acte établi dans une langue autre que la langue officielle de l'État membre requis

(Règlement du Conseil nº 1348/2000, art. 8, § 1)

3.        Coopération judiciaire en matière civile — Signification et notification des actes judiciaires et extrajudiciaires — Règlement nº 1348/2000 — Notification d'un acte établi dans une langue autre que la langue officielle de l'État membre requis

(Règlement du Conseil nº 1348/2000, art. 8, § 1, b))

4.        Coopération judiciaire en matière civile — Signification et notification des actes judiciaires et extrajudiciaires — Règlement nº 1348/2000 — Notification d'un acte établi dans une langue autre que la langue officielle de l'État membre requis

(Règlement du Conseil nº 1348/2000, art. 8, § 1)

1.        La notion d'«acte à signifier ou à notifier» visée à l'article 8, paragraphe 1, du règlement nº 1348/2000, relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, est interprétée, lorsque cet acte consiste en un acte introductif d'instance, comme désignant le ou les actes, dont la signification ou la notification au défendeur, effectuée en temps utile, met celui-ci en mesure de faire valoir ses droits dans le cadre d'une procédure judiciaire dans l'État d'origine. Un tel acte doit permettre d'identifier de façon certaine à tout le moins l'objet et la cause de la demande, ainsi que l'invitation à comparaître devant une juridiction ou, selon la nature de la procédure en cours, la possibilité d'exercer un recours devant une juridiction. Des pièces qui remplissent uniquement une fonction de preuve et ne sont pas indispensables à la compréhension de l'objet et de la cause de la demande ne font pas partie intégrante de l'acte introductif d'instance au sens de ce règlement.

(cf. point 73)

2.        L'article 8, paragraphe 1, du règlement nº 1348/2000, relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que le destinataire d’un acte introductif d’instance à notifier ou à signifier n’a pas le droit de refuser la réception de cet acte pour autant que celui-ci le met en mesure de faire valoir ses droits dans le cadre d’une procédure judiciaire dans l'État membre d’origine, lorsque cet acte est accompagné d’annexes constituées de pièces justificatives qui ne sont pas rédigées dans la langue de l'État membre requis ou dans une langue de l'État membre d’origine comprise du destinataire, mais qui ont uniquement une fonction de preuve et ne sont pas indispensables pour comprendre l'objet et la cause de la demande.

En effet, d'une part, il résulte de l'examen de plusieurs dispositions des conventions de La Haye de 1965, de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, telle que modifiée, et de la convention du 26 mai 1997 relative à la signification et à la notification dans les États membres de l'Union européenne des actes judiciaires et extra-judiciaires en matière civile ou commerciale, des règlements nº 1348/2000 et nº 44/2001 ainsi que des communications des États membres conformément à l’article 14, paragraphe 2, du règlement nº 1348/2000, que la traduction d’un acte introductif d'instance effectuée par les soins du requérant n'est pas considérée comme un élément indispensable à l'exercice des droits de défense du défendeur, celui-ci devant uniquement disposer du délai suffisant pour lui permettre de faire traduire l’acte et d’organiser sa défense.

D'autre part, il ressort de l'interprétation autonome de la notion d’acte introductif d’instance qu'un tel acte doit contenir la ou les pièces, lorsque celles-ci sont intrinsèquement liées, qui permettent au défendeur de comprendre l'objet et la motivation du recours du demandeur, ainsi que l'existence d'une procédure judiciaire au cours de laquelle il peut faire valoir ses droits. En revanche, des pièces qui remplissent uniquement une fonction de preuve, distincte de l'objet de la signification ou de la notification elle-même, et ne sont pas intrinsèquement liées à la requête dans la mesure où elles ne sont pas indispensables pour comprendre l'objet et la cause du recours du demandeur ne font pas partie intégrante de l'acte introductif d'instance au sens de cette disposition. Il appartient au juge national de vérifier si le contenu de l'acte introductif d’instance est suffisant pour permettre au défendeur de faire valoir ses droits ou s'il incombe à l’expéditeur de remédier à l’absence de traduction d’une annexe indispensable.

(cf. points 52, 56, 64-65, 69, 75, 78, disp. 1)

3.        L'article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 1348/2000, relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que le fait que le destinataire d’un acte signifié ou notifié a convenu, dans un contrat conclu avec le requérant dans le cadre de son activité professionnelle, que la langue de correspondance est celle de l'État membre d’origine, ne constitue pas une présomption de connaissance de la langue, mais est un indice que le juge peut prendre en considération lorsqu'il vérifie si ce destinataire comprend la langue de l'État membre d’origine de telle manière qu'il puisse faire valoir ces droits.

(cf. point 88, disp. 2)

4.        L'article 8, paragraphe 1, du règlement nº 1348/2000, relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que le destinataire d'un acte introductif d'instance signifié ou notifié ne peut, en tout cas, se prévaloir de cette disposition pour refuser la réception d’annexes à un acte qui ne sont pas rédigées dans la langue de l’État membre requis ou dans une langue de l'État membre d'origine que le destinataire comprend lorsque, dans le cadre de son activité professionnelle, il a conclu un contrat dans lequel il a convenu que la langue de correspondance est celle de l'État membre d'origine, et que les annexes, d'une part, concernent ladite correspondance et, d'autre part, sont rédigées dans la langue convenue.

En effet, la traduction des annexes peut être requise lorsque le contenu de cet acte qui a été traduit est insuffisant pour identifier la cause et l'objet de la demande et permettre au défendeur de faire valoir ses droits. Une telle traduction n'est cependant pas nécessaire lorsqu'il ressort des circonstances de fait que le destinataire de l'acte introductif d'instance a connaissance du contenu de ces annexes. Tel est le cas, lorsqu'il en est l'auteur ou est supposé en comprendre le contenu, par exemple, parce qu'il a signé un contrat dans le cadre de son activité professionnelle, dans lequel il a convenu que la langue de correspondance est celle de l'État membre d'origine, et que les annexes concernent ladite correspondance et sont rédigées dans la langue convenue.

(cf. points 90-92, disp. 3)

 

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

8 mai 2008

 

«Coopération judiciaire en matière civile – Règlement (CE) n° 1348/2000 – Signification et notification des actes judiciaires et extrajudiciaires – Absence de traduction des annexes de l’acte – Conséquences»

Dans l’affaire C‑14/07,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre des articles 68 CE et 234 CE, introduite par le Bundesgerichtshof (Allemagne), par décision du 21 décembre 2006, parvenue à la Cour le 22 janvier 2007, dans la procédure

Ingenieurbüro Michael Weiss und Partner GbR

contre

Industrie- und Handelskammer Berlin,

en présence de:

Nicholas Grimshaw & Partners Ltd,

 

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. A. Rosas (rapporteur), président de chambre, MM. U. Lõhmus et J. Klučka, Mme P. Lindh, et M. A. Arabadjiev, juges,

avocat général: Mme V. Trstenjak,

greffier: M. B. Fülöp, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 24 octobre 2007,

considérant les observations présentées:

–        pour Ingenieurbüro Michael Weiss und Partner GbR, par Me N. Tretter, Rechtsanwalt,

–        pour l’Industrie- und Handelskammer Berlin, par Me H. Raeschke-Kessler, Rechtsanwalt,

–        pour Nicholas Grimshaw & Partners Ltd, par Mes P.-A. Brand et U. Karpenstein, Rechtsanwälte,

–        pour le gouvernement tchèque, par M. T. Boček, en qualité d’agent,

–        pour le gouvernement français, par M. G. de Bergues et Mme A.-L. During, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement italien, par M. I. M. Braguglia, en qualité d’agent, assisté de Mme W. Ferrante, avvocato dello Stato,

–        pour le gouvernement slovaque, par M. J. Čorba, en qualité d’agent,

–        pour la Commission des Communautés européennes, par M. W. Bogensberger, puis par Mmes A.-M. Rouchaud-Joët et S. Grünheid, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 29 novembre 2007,

rend le présent

 

Arrêt

 

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 8 du règlement (CE) nº 1348/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale (JO L 160, p. 37).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Industrie- und Handelskammer Berlin (ci-après l’«IHK Berlin») au bureau d’architectes Nicholas Grimshaw & Partners Ltd (ci-après le «bureau Grimshaw»), société de droit anglais, au sujet d’une demande en dommages et intérêts en raison d’un défaut de conception d’immeuble, cette dernière société ayant appelé à la cause Ingenieurbüro Michael Weiss und Partner GbR (ci-après le «bureau Weiss») établi à Aachen.

 

 Le cadre juridique

 

 Droit communautaire et international

3        Les huitième et dixième considérants du règlement nº 1348/2000 sont libellés comme suit:

«(8) Afin d’assurer l’efficacité du règlement, la possibilité de refuser la signification ou la notification des actes est limitée à des situations exceptionnelles.

[...]

(10) Afin de défendre les intérêts du destinataire, il convient que la signification ou la notification se fasse dans la langue ou l’une des langues officielles du lieu où elle sera effectuée ou dans une autre langue de l’État membre d’origine que le destinataire comprend.»

4        L’article 4, paragraphe 1, de ce règlement prévoit:

«Les actes judiciaires sont transmis directement et dans les meilleurs délais entre les entités désignées conformément à l’article 2.»

5        L’article 5 dudit règlement, intitulé «Traduction de l’acte», dispose:

«1.       Le requérant est avisé par l’entité d’origine à laquelle il remet l’acte aux fins de transmission que le destinataire peut refuser de l’accepter s’il n’est pas établi dans l’une des langues indiquées à l’article 8.

2.       Le requérant prend en charge les frais éventuels de traduction préalables à la transmission de l’acte, sans préjudice d’une éventuelle décision ultérieure de la juridiction ou de l’autorité compétente sur la prise en charge de ces frais.»

6        L’article 8 du règlement nº 1348/2000, intitulé «Refus de réception de l’acte», prévoit:

«1      L’entité requise avise le destinataire qu’il peut refuser de recevoir l’acte à signifier ou à notifier s’il est établi dans une langue autre que l’une des langues suivantes:

a)       la langue officielle de l’État membre requis ou, s’il existe plusieurs langues officielles dans cet État membre requis, la langue officielle ou l’une des langues officielles du lieu où il doit être procédé à la signification ou à la notification

ou

b)       une langue de l’État membre d’origine comprise du destinataire.

2.       Si l’entité requise est informée que le destinataire refuse de recevoir l’acte conformément au paragraphe 1, elle en informe immédiatement l’entité d’origine au moyen de l’attestation visée à l’article 10 et lui retourne la demande ainsi que les pièces dont la traduction est demandée.»

7        L’article 19, paragraphe 1, du même règlement dispose:

«Lorsqu’un acte introductif d’instance ou un acte équivalent a dû être transmis dans un autre État membre aux fins de signification ou de notification selon les dispositions du présent règlement et que le défendeur ne comparaît pas, le juge est tenu de surseoir à statuer aussi longtemps qu’il n’est pas établi:

a)       ou bien que l’acte a été signifié ou notifié selon les formes prescrites par la législation de l’État membre requis pour la signification ou la notification des actes dressés dans ce pays et qui sont destinés aux personnes se trouvant sur son territoire;

b)       ou bien que l’acte a été effectivement remis au défendeur ou à sa résidence selon un autre mode prévu par le présent règlement

et que, dans chacune de ces éventualités, soit la signification ou la notification, soit la remise a eu lieu en temps utile pour que le défendeur ait pu se défendre.»

8        Les autres paragraphes de l’article 19 du règlement n° 1348/2000 traitent d’hypothèses particulières relatives au défendeur non comparant.

9        L’article 26 du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1), est libellé de la manière suivante:

«1.       Lorsque le défendeur domicilié sur le territoire d’un État membre est attrait devant une juridiction d’un autre État membre et ne comparaît pas, le juge se déclare d’office incompétent si sa compétence n’est pas fondée aux termes du présent règlement.

2.       Le juge est tenu de surseoir à statuer aussi longtemps qu’il n’est pas établi que ce défendeur a été mis à même de recevoir l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent en temps utile pour se défendre ou que toute diligence a été faite à cette fin.

3.       L’article 19 du règlement (CE) n° 1348/2000 […] s’applique en lieu et place des dispositions du paragraphe 2 si l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent a dû être transmis d’un État membre à un autre en exécution de ce règlement.

4.       Lorsque les dispositions du règlement (CE) nº 1348/2000 ne sont pas applicables, l’article 15 de la convention de La Haye [de] 1965 relative à la signification et à la notification à l’étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale s’applique si l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent a dû être transmis en exécution de cette convention.»

10      Par ailleurs, l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 prévoit qu’une décision rendue dans un État membre n’est pas reconnue dans un autre État membre si «l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent n’a pas été signifié ou notifié au défendeur défaillant en temps utile et de telle manière qu’il puisse se défendre, à moins qu’il n’ait pas exercé de recours à l’encontre de la décision alors qu’il était en mesure de le faire».

11      De telles dispositions sont également prévues par la convention du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 1972, L 299, p. 32), telle que modifiée par la convention du 9 octobre 1978 relative à l’adhésion du Royaume de Danemark, de l’Irlande et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord (JO L 304, p. 1, et – texte modifié – p. 77), par la convention du 25 octobre 1982 relative à l’adhésion de la République hellénique (JO L 388, p. 1), par la convention du 26 mai 1989 relative à l’adhésion du Royaume d’Espagne et de la République portugaise (JO L 285, p. 1), ainsi que par la convention du 29 novembre 1996 relative à l’adhésion de la République d’Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède (JO 1997, C 15, p. 1, ci-après la «convention de Bruxelles»). 

12      L’article 20 de cette convention est relatif à la procédure par défaut.

13      L’article 27, point 2, de ladite convention prévoit:

«Les décisions ne sont pas reconnues:

[…]

2.      si l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent n’a pas été signifié ou notifié au défendeur défaillant, régulièrement et en temps utile, pour qu’il puisse se défendre

[…]»

14      L’article 5 de la convention de La Haye, du 15 novembre 1965, relative à la signification et à la notification à l’étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale (ci-après, la «convention de La Haye de 1965»), prévoit:

«L’Autorité centrale de l’État requis procède ou fait procéder à la signification ou à la notification de l’acte:

a)       soit selon les formes prescrites par la législation de l’État requis pour la signification ou la notification des actes dressés dans ce pays et qui sont destinés aux personnes se trouvant sur son territoire,

b)       soit selon la forme particulière demandée par le requérant, pourvu que celle-ci ne soit pas incompatible avec la loi de l’État requis.

[…]

Si l’acte doit être signifié ou notifié conformément à l’alinéa premier, l’Autorité centrale peut demander que l’acte soit rédigé ou traduit dans la langue ou une des langues officielles de son pays. […]»

15      L’article 15, premier alinéa, de cette convention dispose:

«Lorsqu’un acte introductif d’instance ou un acte équivalent a dû être transmis à l’étranger aux fins de signification ou de notification, selon les dispositions de la présente Convention, et que le défendeur ne comparaît pas, le juge est tenu de surseoir à statuer aussi longtemps qu’il n’est pas établi:

a) ou bien que l’acte a été signifié ou notifié selon les formes prescrites par la législation de l’État requis pour la signification ou la notification des actes dressés dans ce pays et qui sont destinés aux personnes se trouvant sur son territoire,

b) ou bien que l’acte a été effectivement remis au défendeur ou à sa demeure selon un autre procédé prévu par la présente Convention,

et que, dans chacune de ces éventualités, soit la signification ou la notification, soit la remise a eu lieu en temps utile pour que le défendeur ait pu se défendre.»

16      L’article 20, premier alinéa, sous b), de la convention de La Haye de 1965 indique que la convention ne s’oppose pas à ce que des États contractants s’entendent pour déroger, notamment, à l’article 5, troisième alinéa, en ce qui concerne l’emploi des langues.

 Droit national

17      L’acte introductif d’instance est défini à l’article 253 du code de procédure civile («Zivilprozessordnung»). Cette disposition est libellée comme suit:

«(1) Le recours est formé par la notification d’un mémoire (requête).

(2) La requête doit comprendre:

1. la désignation des parties et du tribunal

2. l’indication précise de l’objet et de la cause du droit revendiqué, ainsi que des conclusions précises.

(3) La requête doit en outre indiquer, lorsque la détermination de la juridiction compétente en dépend, la valeur de l’objet du litige, sauf si celui-ci consiste en une somme d’argent déterminée, et elle doit préciser s’il existe des raisons faisant obstacle à ce qu’il soit statué sur l’affaire en formation de juge unique.

(4) Par ailleurs, les dispositions générales relatives aux mémoires préparatoires sont également applicables à la requête.»

18      L’article 131 du code de procédure civile est intitulé «Documents annexés». Il est libellé comme suit:

«(1) Les documents que détient la partie et auxquels le mémoire préparatoire fait référence doivent être joints à ce mémoire, sous forme d’original ou de copie.

(2) Si seuls des passages isolés d’un document sont concernés, il suffit de joindre un extrait qui contient le passage introductif du document, celui qui se rapporte à l’affaire, la fin, la date et la signature.

(3) Si la partie adverse connaît déjà ces documents ou si ceux-ci représentent un volume important, il suffit d’indiquer précisément quels sont ces documents en les lui proposant pour consultation.»

 

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

 

19      Sur le fondement d’un contrat d’architecte, l’IHK Berlin réclame au bureau Grimshaw des dommages et intérêts en réparation d’un défaut de conception. Celui-ci s’était engagé, dans le contrat en cause, à fournir des prestations de conception pour un projet immobilier à Berlin.

20      Au point 3.2.6 du contrat d’architecte, les parties ont convenu:

«Les prestations sont fournies en langue allemande. La correspondance entre [l’IHK Berlin] et [le bureau Grimshaw] et les autorités et institutions publiques doit être rédigée en langue allemande.»

21      Il ressort du dossier soumis à la Cour, et cela a été confirmé à l’audience, que le contrat était soumis au droit allemand (point 10.4 du contrat) et que, en cas de litige, les juridictions compétentes étaient celles de Berlin (point 10.2 du contrat).

22      Le bureau Grimshaw a appelé à la cause le bureau Weiss.

23      Dans la requête de l’IHK Berlin, faisant partie du dossier soumis à la Cour, sont citées les différentes preuves invoquées à l’appui des moyens. Ces pièces justificatives sont annexées à la requête, dans un dossier qui constitue environ 150 pages.

24      Ainsi que l’expose la juridiction de renvoi, leur contenu est par ailleurs partiellement reproduit dans la requête. Lesdites annexes comprennent le contrat d’architecte conclu entre les parties, un avenant audit contrat ainsi que son projet, un extrait de la liste des prestations, de nombreux documents ou extraits de documents tels que des rapports techniques ou des décomptes, ainsi que plusieurs lettres, y compris du bureau Grimshaw, qui concernent la correspondance échangée avec les entreprises chargées de constater et de réparer les défauts en cause dans l’affaire au principal.

25      Après que le bureau Grimshaw eut d’abord refusé la réception de la requête en raison de l’absence d’une traduction en anglais, une version en anglais de cette requête et les annexes en allemand non traduites lui ont été remises le 23 mai 2003 à Londres.

26      Par mémoire du 13 juin 2003, le bureau Grimshaw a dénoncé l’irrégularité de la notification au motif que les annexes n’avaient pas été traduites en anglais. Pour cette raison, il a refusé la réception de la requête en invoquant l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1348/2000 et il considère que ladite requête n’a pas été valablement notifiée. Le bureau Grimshaw soulève l’exception de prescription.

27      Le Landgericht Berlin a constaté que la requête a été régulièrement notifiée le 23 mai 2003. L’appel interjeté par le bureau Grimshaw a été rejeté par le Kammergericht Berlin. Le bureau Weiss a formé un recours en «Revision» devant le Bundesgerichtshof contre le jugement en appel.

28      La juridiction de renvoi indique que, selon le code de procédure allemand, une requête qui se réfère à des annexes jointes forme un tout avec celles-ci et qu’une partie défenderesse doit disposer de tous les éléments nécessaires à sa défense invoqués par la partie demanderesse. Il ne serait donc pas acceptable d’apprécier la validité de la notification d’une requête indépendamment de la notification des annexes, au prétexte que les informations essentielles ressortiraient déjà de la requête et que le droit à être entendu serait préservé du fait que, en ce qui concerne le contenu des annexes, la partie défenderesse peut encore suffisamment se défendre au cours de la procédure.

29      Une exception à ce principe serait permise lorsque les besoins d’information du défendeur ne seraient pas substantiellement contrariés, par exemple parce qu’une annexe, non jointe à la requête, a été envoyée de manière quasi concomitante à l’introduction du recours ou parce que le défendeur connaissait déjà les documents avant la formation du recours.

30      La juridiction de renvoi relève que, en l’espèce, toutes les pièces n’étaient pas connues du bureau Grimshaw, notamment celles relatives à la constatation et à la réparation des défauts ainsi qu’aux coûts y afférents. De telles pièces ne sauraient être considérées comme des détails insignifiants dès lors que de leur appréciation peut dépendre la décision de présenter un mémoire en défense.

31      La juridiction de renvoi se demande si c’est à bon droit que le bureau Grimshaw a refusé la requête. Elle précise qu’aucun des organes de ce bureau habilités à le représenter ne comprend la langue allemande.

32      Selon le Bundesgerichtshof, l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1348/2000 peut être interprété en ce sens qu’il ne serait pas possible de refuser une notification au motif que des annexes ne seraient pas traduites.

33      En effet, cette disposition n’évoquerait pas le refus de réception d’annexes. Par ailleurs, le formulaire type prévu par ce règlement, en vertu de son article 4, paragraphe 3, première phrase, pour les demandes de notification dans les États membres de l’Union européenne n’exige des indications sur la nature et la langue du document qu’en ce qui concerne l’acte à notifier (points 6.1 et 6.3), mais pas en ce qui concerne les annexes, dont il exige simplement que soit mentionné le nombre (point 6.4).

34      Pour le cas où il serait possible de refuser la notification au seul motif que les annexes ne sont pas traduites, la juridiction de renvoi expose que, selon elle, le contrat dans lequel la partie demanderesse et la partie défenderesse prévoient que leur langue de correspondance est l’allemand ne suffit pas à écarter le droit de la partie défenderesse à refuser la réception en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1348/2000.

35      En effet, cette clause ne signifierait pas que la partie défenderesse comprend cette langue au sens de ce règlement. Toutefois, ainsi que l’indique la juridiction de renvoi, la doctrine serait partagée, certains auteurs estimant qu’une clause d’utilisation d’une langue dans des relations contractuelles peut faire office de présomption de connaissance de cette langue au sens dudit règlement.

36      Enfin, et pour le cas où une clause contractuelle ne pourrait présumer d’une connaissance de la langue considérée, la juridiction de renvoi se demande s’il est possible, dans tous les cas, de refuser la notification d’une requête dont les annexes ne sont pas traduites ou s’il existe des exceptions, par exemple lorsque le défendeur dispose déjà d’une traduction des annexes ou lorsque le contenu de l’annexe est reproduit littéralement dans la requête traduite.

37      Tel pourrait également être le cas lorsque les pièces en annexe sont rédigées dans la langue valablement choisie par les parties dans le cadre d’un contrat. La juridiction de renvoi évoque l’hypothèse de parties faibles qu’il faudrait éventuellement protéger, tels des consommateurs frontaliers qui auraient accepté, par contrat, que la langue de la correspondance soit celle du professionnel.

38      Elle relève cependant que, dans l’affaire au principal, le bureau Grimshaw a conclu le contrat dans le cadre de son activité professionnelle. Elle ne discerne aucun besoin particulier de protection de ce bureau et ne voit donc aucune nécessité de lui reconnaître le droit de refuser la réception.

39      Dans ces conditions, le Bundesgerichtshof a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)       L’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1348/2000 [...] doit-il être interprété en ce sens que le destinataire n’a pas le droit de refuser la réception lorsque seules les annexes d’un acte à notifier ne sont pas rédigées dans la langue de l’État membre requis ou dans une langue de l’État membre d’origine comprise du destinataire?

2)       En cas de réponse négative à la première question:

L’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1348/2000 doit-il être interprété en ce sens que le destinataire est réputé ‘comprendre’ la langue d’un État membre d’origine au sens de ce règlement lorsqu’il a convenu, dans un contrat conclu avec le requérant dans le cadre de son activité professionnelle, que la langue de correspondance est celle de l’État membre d’origine?

3)       En cas de réponse négative à la deuxième question:

L’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1348/2000 doit-il être interprété en ce sens que le destinataire ne peut en tout cas se prévaloir de cette disposition pour refuser la réception d’annexes à un acte qui ne sont pas rédigées dans la langue de l’État membre requis ou dans une langue de l’État membre d’origine que le destinataire comprend lorsque, dans le cadre de son activité professionnelle, il conclut un contrat dans lequel il convient que la langue de correspondance est celle de l’État membre d’origine, et que les annexes, d’une part, concernent ladite correspondance et, d’autre part, sont rédigées dans la langue convenue?»

 

 Sur les questions préjudicielles

 

 Sur la première question

40      Par sa première question, la juridiction de renvoi demande si l’article 8, paragraphe 1, du règlement nº 1348/2000 doit être interprété en ce sens que le destinataire d’un acte à signifier ou à notifier n’a pas le droit d’en refuser la réception lorsque seules les annexes de cet acte ne sont pas rédigées dans la langue de l’État membre requis ou dans une langue de l’État membre d’origine comprise du destinataire.

41      À titre liminaire, il importe de souligner que le règlement nº 1348/2000 s’applique à des actes à signifier ou à notifier qui peuvent être de nature très différente, selon qu’il s’agit d’actes judiciaires ou extrajudiciaires et, dans le premier cas, selon qu’il s’agit d’un acte introductif d’instance, d’une décision de justice, d’une mesure d’exécution ou de tout autre acte. La question posée à la Cour vise un acte introductif d’instance.

42      Dès lors que le rôle et l’importance des annexes à un acte à signifier ou à notifier peuvent être différents selon la nature de cet acte, il convient de limiter le raisonnement et les réponses figurant dans le présent arrêt au seul acte introductif d’instance.

43      À cet égard, il résulte des observations présentées devant la Cour que le nombre et la nature des documents devant être annexés à un acte introductif d’instance varie considérablement selon les ordres juridiques. Dans certains de ceux-ci, en effet, un tel acte ne doit contenir que l’objet et l’exposé des moyens en fait et en droit de la demande, les pièces justificatives étant communiquées séparément, tandis que dans d’autres ordres juridiques, tel le droit allemand, les annexes doivent être communiquées en même temps que la requête et en font partie intégrante.

44      Il y a lieu de constater que l’article 8 du règlement nº 1348/2000 ne mentionne pas les annexes à un acte à signifier ou à notifier. Toutefois, l’indication «pièces dont la traduction est demandée», figurant au paragraphe 2 de cet article, laisse entendre qu’un acte peut être composé de plusieurs documents.

45      À défaut d’indications utiles dans les termes de l’article 8 du règlement nº 1348/2000, il convient d’interpréter cette disposition à la lumière de ses objectifs et de son contexte et, plus largement, des objectifs et du contexte du règlement n° 1348/2000 lui-même (voir, en ce sens, arrêt du 19 septembre 2000, Linster, C‑287/98, Rec. p. I‑6917, point 43).

46      Ainsi qu’il résulte de son deuxième considérant, le règlement nº 1348/2000 a pour objectifs d’améliorer et d’accélérer la transmission des actes. Ces objectifs sont rappelés aux sixième à huitième considérants. Ainsi, ce dernier indique que, «[a]fin d’assurer l’efficacité du règlement, la possibilité de refuser la signification ou la notification des actes est limitée à des situations exceptionnelles». L’article 4, paragraphe 1, de ce règlement prévoit, par ailleurs, que les actes judiciaires sont transmis dans les meilleurs délais.

47      Ces objectifs ne sauraient, toutefois, être atteints en affaiblissant, de quelque manière que ce soit, les droits de la défense (voir, par analogie, en ce qui concerne le règlement nº 44/2001, arrêt du 14 décembre 2006, ASML, C‑283/05, Rec. p. I‑12041, point 24). En effet, ces droits, qui dérivent du droit à un procès équitable consacré à l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après la «CEDH»), constituent un droit fondamental qui fait partie des principes généraux du droit dont la Cour assure le respect (voir, notamment, arrêt ASML, précité, point 26).

48      Il importe, ainsi, de s’efforcer de concilier les objectifs d’efficacité et de rapidité de la transmission des actes de procédure, nécessaires à une bonne administration de la justice, avec celui de la protection des droits de la défense, notamment lors de l’interprétation de l’article 8 du règlement n° 1348/2000 et, plus particulièrement, de la notion d’acte à signifier ou à notifier lorsque celui-ci consiste en un acte introductif d’instance, afin de pouvoir déterminer si un tel acte doit comprendre des annexes constituées de pièces justificatives.

49      Force est, toutefois, de constater que ces objectifs du règlement n° 1348/2000 ne permettent pas, à eux seuls, d’interpréter la notion d’acte introductif d’instance, dans le cadre de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1348/2000, afin de déterminer si un tel acte peut ou doit comprendre des annexes. Ils ne permettent pas non plus d’établir si la traduction d’un acte introductif d’instance est un élément essentiel des droits de la défense du défendeur, ce qui pourrait éclairer la portée de l’obligation de traduction visée à l’article 8 de ce règlement.

50      L’interprétation du règlement n° 1348/2000 ne saurait, cependant, être dissociée du contexte de développement dans le domaine de la coopération judiciaire en matière civile dans lequel ce règlement s’inscrit et, plus particulièrement, du règlement n° 44/2001, qui, à son article 26, paragraphes 3 et 4, fait expressément référence au règlement n° 1348/2000.

51      En effet, diverses dispositions imposent au juge, avant de prononcer un jugement par défaut ou de reconnaître une décision de justice, de vérifier si les modalités de signification d’un acte introductif d’instance étaient telles que les droits de la défense ont été respectés (voir notamment, s’agissant du défaut, les articles 19, paragraphe 1, du règlement n° 1348/2000, 26, paragraphe 2, du règlement n° 44/2001 ainsi que 20, deuxième alinéa, de la convention de Bruxelles, et, s’agissant de la reconnaissance des décisions, voir notamment les articles 34, point 2, du règlement n° 44/2001 et 27, point 2, de la convention de Bruxelles).

52      Avant l’entrée en vigueur du règlement nº 1348/2000, les significations transfrontalières entre les États membres étaient effectuées conformément à la convention de La Haye de 1965, à laquelle renvoient les articles 26, paragraphe 4, du règlement n° 44/2001 et 20, troisième alinéa, de la convention de Bruxelles, ou d’accords bilatéraux conclus entre États membres. Or, la convention de La Haye et la plupart de ces accords ne prévoient pas une obligation générale de traduire tous les actes à signifier ou à notifier, si bien que les juridictions nationales ont considéré que les droits de la défense sont suffisamment protégés lorsque le destinataire d’un acte signifié ou notifié a disposé d’un délai lui permettant de faire traduire cet acte et d’organiser sa défense.

53      Par ailleurs, le règlement nº 1348/2000 lui-même ne précise pas si le droit de refuser un acte en l’absence de traduction existe également dans le cas d’une signification ou d’une notification par voie postale, réalisée conformément à l’article 14 dudit règlement. Afin d’interpréter cette dernière disposition, il y a lieu d’examiner le rapport explicatif de la convention relative à la signification et à la notification dans les États membres de l’Union européenne des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale, établie par acte du Conseil de l’Union européenne du 26 mai 1997 (JO C 261, p. 1, ci-après la «convention de 1997»; rapport explicatif, p. 26) sur le fondement de l’article K.3 du traité UE et dont le texte a inspiré le règlement n° 1348/2000 (voir, en ce sens, arrêt du 8 novembre 2005, Leffler, C‑443/03, Rec. p. I‑9611, point 47).

54      Le commentaire de l’article 14, paragraphe 2, de la convention de 1997, relatif à la signification ou à la notification par la poste, indique:

«Cet article pose le principe de l’admission de la signification ou de la notification par voie postale.

Les États membres peuvent, toutefois, préciser les conditions, visant à apporter des garanties aux destinataires résidant sur son territoire, dans lesquelles la signification ou la notification peut être effectuée à leur égard par la voie postale. Pourraient, par exemple, être exigés un envoi sous pli recommandé ou l’application des règles de la convention relatives à la traduction des actes.»

55      Certains États membres ont, à tort ou à raison, interprété l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 1348/2000 en ce sens que la traduction de l’acte n’est pas exigée dans le cas de signification ou de notification par voie postale et ont estimé nécessaire de préciser, conformément à la possibilité prévue par l’article 14, paragraphe 2, de ce règlement, qu’ils sont opposés à la signification ou à la notification d’actes judiciaires sans traduction [voir, à cet égard, les communications des États membres conformément à l’article 23 du règlement n°1348/2000 (JO 2001 C 151, p. 4), et la première mise à jour des communications des États membres (JO 2001 C 202, p. 10)].

56      Il résulte de l’examen des dispositions respectivement des conventions de La Haye de 1965, de Bruxelles et de 1997, des règlements nos 1348/2000 et 44/2001 ainsi que des communications des États membres conformément à l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 1348/2000 que, dans les matières couvertes par ces dispositions, la traduction d’un acte introductif d’instance effectuée par les soins du requérant n’est pas considérée, ni par le législateur communautaire ni par les États membres, comme un élément indispensable à l’exercice des droits de défense du défendeur, celui-ci devant uniquement disposer du délai suffisant pour lui permettre de faire traduire l’acte et d’organiser sa défense.

57      Un tel choix du législateur communautaire et des États membres ne va pas à l’encontre de la protection des droits fondamentaux telle qu’elle résulte de la CEDH. En effet, l’article 6, paragraphe 3, sous a), de cette convention, selon lequel tout accusé a droit notamment à être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui, n’est applicable qu’en matière pénale. Aucune disposition de la CEDH n’impose la traduction d’un acte introductif d’instance dans les matières civile et commerciale.

58      En conséquence, si le législateur communautaire a choisi, par l’article 8 du règlement nº 1348/2000, de permettre au destinataire d’un acte de refuser celui-ci s’il n’est pas traduit dans une langue officielle de l’État membre requis ou une langue de l’État membre d’origine qu’il comprend, c’est principalement afin de déterminer, de manière uniforme, qui doit assurer la traduction d’un tel acte et en assumer le coût au stade de la signification ou de la notification de ce dernier.

59      L’examen du droit international et du droit communautaire en ce qui concerne la portée du principe de protection des droits de la défense et, notamment, la nécessité de la traduction d’un acte introductif d’instance ayant permis de préciser la finalité de l’article 8 du règlement n° 1348/2000, c’est au regard de celle-ci qu’il convient de déterminer ce que recouvre la notion d’acte à signifier ou à notifier au sens de cet article 8 lorsque l’acte consiste en un acte introductif d’instance et si un tel acte peut ou doit comprendre des annexes constituées de pièces justificatives.

60      Le règlement n° 1348/2000 doit faire l’objet d’une interprétation autonome, afin de permettre son application uniforme (arrêt Leffler, précité, points 45 et 46). Il en est de même du règlement n° 44/2001 et, notamment, de la notion d’«acte introductif d’instance» au sens des articles 26 et 34, point 2, de ce règlement ainsi que des dispositions équivalentes de la convention de Bruxelles.

61      Statuant sur l’interprétation de l’article 27, point 2, de la convention de Bruxelles, relatif à la reconnaissance des décisions, la Cour a défini la notion d’acte introductif d’instance ou d’acte équivalent au sens de cette disposition comme désignant le ou les actes, dont la signification ou la notification au défendeur, effectuée régulièrement et en temps utile, met celui-ci en mesure de faire valoir ses droits avant qu’un jugement exécutoire ait été rendu dans l’État d’origine (voir, en ce sens, arrêt du 13 juillet 1995, Hengst Import, C‑474/93, Rec. p. I‑2113, point 19).

62      La Cour a ainsi jugé que, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Hengst Import, précité, l’acte introductif d’instance était constitué de la réunion de l’injonction de payer («decreto ingiuntivo»), délivrée par un juge italien conformément à l’article 641 du code de procédure civile italien et de la requête du demandeur. En effet, c’est la signification conjointe de ces deux documents qui fait courir un délai pendant lequel le défendeur peut former opposition. D’autre part, le demandeur ne peut obtenir une décision exécutoire avant l’expiration de ce délai (arrêt Hengst Import, précité, point 20).

63      La Cour a relevé que le «decreto ingiuntivo» est un simple formulaire qui, pour pouvoir être compris, doit être lu avec la requête. Réciproquement, la signification de la seule requête ne permet pas au défendeur de déterminer s’il doit organiser sa défense puisque, sans le «decreto ingiuntivo», il ignore si le juge a accueilli ou a rejeté la requête. Au demeurant, la nécessité de la double signification du «decreto ingiuntivo» et de la requête était confirmée par l’article 643 du code de procédure civile italien, dont il ressortait qu’elle constituait le point de départ de l’instance (arrêt Hengst Import, précité, point 21).

64      Il ressort de cette notion autonome d’acte introductif d’instance, telle qu’interprétée par la Cour, qu’un tel acte doit contenir la ou les pièces, lorsque celles-ci sont intrinsèquement liées, qui permettent au défendeur de comprendre l’objet et la motivation du recours du demandeur, ainsi que l’existence d’une procédure judiciaire au cours de laquelle il peut faire valoir ses droits soit en se défendant à une instance en cours, soit, ainsi que c’était le cas dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Hengst Import, précité, en exerçant un recours contre une décision rendue sur le fondement d’une requête unilatérale.

65      Par ailleurs, ainsi qu’il a été relevé au point 43 du présent arrêt, certains droits nationaux ne prévoient pas que les pièces justificatives d’un dossier doivent être annexées à ce qu’ils définissent comme acte introductif d’instance, mais autorisent leur communication séparée. De telles pièces ne sont donc pas considérées comme intrinsèquement liées à l’acte introductif d’instance en ce sens qu’elles sont indispensables pour que le défendeur soit en mesure de comprendre la demande qui est formée contre lui et l’existence de la procédure judiciaire, mais ont une fonction probatoire, distincte de l’objet de la signification ou de la notification elle-même.

66      À cet égard, il est utile de relever que les conditions de reconnaissance des décisions prévues par le règlement n° 44/2001 ont été assouplies par rapport aux conditions prévues par la convention de Bruxelles.

67      En effet, l’article 34, point 2, de ce règlement abandonne l’exigence de la régularité de l’acte introductif d’instance, visée à l’article 27, point 2, de la convention de Bruxelles, pour mettre l’accent sur le respect effectif des droits de la défense, ceux-ci étant considérés comme respectés lorsque le défendeur a eu connaissance de la procédure judiciaire en cours et a pu exercer un recours contre une décision rendue à son encontre (voir, en ce sens, arrêt ASML, précité, points 20 et 21).

68      Cette modification du règlement n° 44/2001 par rapport à la convention de Bruxelles conforte l’interprétation de la notion d’acte à signifier ou à notifier, lorsque celui-ci consiste en un acte introductif d’instance, selon laquelle un tel acte doit comporter les éléments essentiels pour qu’un défendeur comprenne avant tout l’existence d’une procédure judiciaire, mais non chaque pièce justificative permettant d’établir la preuve des différents éléments de fait et de droit sur le fondement desquels une demande est formée.

69      Il résulte de ces éléments que la notion d’acte à signifier ou à notifier visée à l’article 8 du règlement n° 1348/2000, lorsque cet acte consiste en un acte introductif d’instance, doit être interprétée en ce sens que des pièces justificatives, qui remplissent uniquement une fonction de preuve et ne sont pas intrinsèquement liées à la requête dans la mesure où elles ne sont pas indispensables pour comprendre l’objet et la cause du recours du demandeur, n’en font pas partie intégrante.

70      L’examen de la notion d’acte telle qu’elle ressort de la CEDH et, notamment, de son article 6, paragraphe 3, sous a), rappelé au point 57 du présent arrêt, permet d’arriver à une conclusion similaire en matière pénale. En effet, selon la Cour européenne des droits de l’homme, un acte d’accusation doit permettre à l’accusé d’être informé non seulement de la cause de l’accusation, c’est-à-dire des faits matériels qui sont mis à sa charge et sur lesquels se fonde l’accusation, mais aussi de la qualification juridique donnée à ces faits et ce d’une manière détaillée (voir Cour eur. D. H., arrêts Pélissier et Sassi c. France du 25 mars 1999, Recueil des arrêts et décisions 1999-II, § 51, ainsi que Mattei c. France du 19 décembre 2006, n° 34043/02, § 34). A contrario, le droit de la défense n’est pas remis en cause par le seul fait que l’acte d’accusation ne comprend pas les pièces justificatives des faits mis à la charge de l’accusé.

71      Statuant au regard de l’article 6, paragraphe 3, sous e), de la CEDH, qui reconnaît à l’accusé le droit de bénéficier d’un interprète, la Cour européenne a d’ailleurs jugé que ce droit ne va pas jusqu’à pouvoir exiger une traduction écrite de toute preuve documentaire ou pièce officielle du dossier (Cour eur. D. H., arrêt du 19 décembre 1989, Kamasinski c. Autriche, série A, n° 168, § 74).

72      Or, ainsi qu’il ressort de la constatation faite au point 57 du présent arrêt, la protection des droits de la défense en matières civile et commerciale ne comporte pas des exigences aussi grandes qu’en matière pénale.

73      Eu égard à l’ensemble de ces éléments, il y a lieu d’interpréter la notion d’«acte à signifier ou à notifier» visée à l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1348/2000, lorsque cet acte consiste en un acte introductif d’instance, comme désignant le ou les actes, dont la signification ou la notification au défendeur, effectuée en temps utile, met celui-ci en mesure de faire valoir ses droits dans le cadre d’une procédure judiciaire dans l’État d’origine. Un tel acte doit permettre d’identifier de façon certaine à tout le moins l’objet et la cause de la demande, ainsi que l’invitation à comparaître devant une juridiction ou, selon la nature de la procédure en cours, la possibilité d’exercer un recours devant une juridiction. Des pièces qui remplissent uniquement une fonction de preuve et ne sont pas indispensables à la compréhension de l’objet et de la cause de la demande ne font pas partie intégrante de l’acte introductif d’instance au sens du règlement n° 1348/2000.

74      Une telle interprétation est conforme aux objectifs du règlement n° 1348/2000 d’améliorer et d’accélérer la transmission des actes. En effet, la traduction de pièces justificatives peut demander un temps considérable alors que, en tout état de cause, cette traduction n’est pas requise pour les besoins de l’instance qui se déroulera devant le juge de l’État membre d’origine et dans la langue de cet État.

75      Il appartient au juge national de vérifier si le contenu de l’acte introductif d’instance met le défendeur en mesure de faire valoir ses droits dans l’État d’origine et lui permet, notamment, d’identifier l’objet et la cause de la demande dirigée contre lui ainsi que l’existence de la procédure judiciaire.

76      Si le juge national estime que ce contenu est insuffisant à cet égard au motif que certains éléments essentiels relatifs à la demande se trouvent dans les annexes, il lui incombe de s’efforcer de résoudre le problème dans le cadre de son droit procédural national, en veillant à assurer la pleine efficacité du règlement n° 1348/2000, dans le respect de sa finalité (voir, en ce sens, arrêt Leffler, précité, point 69) tout en préservant au mieux les intérêts de l’une et de l’autre partie au litige.

77      L’auteur de l’acte introductif d’instance pourrait ainsi se voir reconnaître la possibilité de remédier à l’absence de traduction d’une annexe indispensable en envoyant celle-ci selon les modalités prévues par le règlement n° 1348/2000 et dans les meilleurs délais. S’agissant de l’effet de l’envoi d’une traduction sur la date de la signification ou de la notification, la Cour a estimé qu’il y a lieu de le déterminer par analogie avec le système de la double date élaboré à l’article 9, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 1348/2000 (arrêt Leffler, précité, point 65 à 67), afin de préserver les intérêts des parties.

78      Eu égard à l’ensemble de ces éléments, il convient de répondre à la première question que l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1348/2000 doit être interprété en ce sens que le destinataire d’un acte introductif d’instance à notifier ou à signifier n’a pas le droit de refuser la réception de cet acte pour autant que celui-ci met ce destinataire en mesure de faire valoir ses droits dans le cadre d’une procédure judiciaire dans l’État membre d’origine, lorsque cet acte est accompagné d’annexes constituées de pièces justificatives qui ne sont pas rédigées dans la langue de l’État membre requis ou dans une langue de l’État membre d’origine comprise du destinataire, mais qui ont uniquement une fonction de preuve et ne sont pas indispensables pour comprendre l’objet et la cause de la demande. Il appartient au juge national de vérifier si le contenu de l’acte introductif d’instance est suffisant pour permettre au défendeur de faire valoir ses droits ou s’il incombe à l’expéditeur de remédier à l’absence de traduction d’une annexe indispensable.

 Sur la deuxième question

79      Par sa deuxième question, posée dans le cas où il serait répondu en ce sens que le destinataire de l’acte peut en refuser la réception lorsque les annexes de celui-ci ne sont pas traduites, la juridiction de renvoi demande si l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1348/2000 doit être interprété en ce sens que le destinataire d’un acte signifié ou notifié est réputé «comprendre» la langue d’un État membre d’origine au sens de ce règlement lorsqu’il a convenu, dans un contrat conclu avec le requérant dans le cadre de son activité professionnelle, que la langue de correspondance est celle de l’État membre d’origine. Eu égard à la réserve formulée lors de la réponse à la première question, il y a lieu de répondre à la deuxième question.

80      Pour déterminer si le destinataire d’un acte signifié ou notifié comprend la langue de l’État membre d’origine dans laquelle est rédigé l’acte, le juge doit examiner l’ensemble des indices qui lui sont soumis à cet égard par la partie requérante.

81      Les parties ayant présenté des observations sont divisées sur la question de savoir si le destinataire d’un acte est réputé comprendre la langue de l’État membre d’origine en raison du fait qu’il a signé une clause relative à l’utilisation de la langue telle que décrite par la juridiction de renvoi.

82      Selon le bureau Grimshaw, lui seul serait à même de dire s’il comprend l’acte notifié. L’IHK Berlin défend la position opposée, à savoir que la signature d’une telle clause vaut acceptation de cette langue comme langue de la signification d’un acte judiciaire, de la même manière qu’une clause attributive de juridiction est valable entre parties.

83      Les autres parties ayant présenté des observations considèrent qu’on ne peut déduire d’une telle clause une connaissance de la langue de l’acte au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1348/2000, mais qu’elle constitue un indice de la connaissance de cette langue. Le bureau Weiss ainsi que les gouvernements tchèque et slovaque soulignent, notamment, que le degré de connaissance d’une langue nécessaire à la correspondance n’est pas le même que celui indispensable à une défense en justice.

84      L’interprétation du bureau Grimshaw ne saurait être acceptée car cela reviendrait à faire dépendre le caractère effectif de la signification ou de la notification du bon vouloir du destinataire de l’acte.

85      Il n’est pas non plus possible de retenir l’interprétation proposée par l’IHK Berlin. En effet, pour donner un effet utile à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1348/2000, il appartient à la juridiction compétente de vérifier que les conditions de cette disposition sont effectivement remplies. À cet égard, la signature d’une clause prévoyant l’emploi d’une langue donnée dans la correspondance et l’exécution d’un contrat ne peut constituer une présomption de connaissance de la langue convenue.

86      En revanche, il y a lieu de considérer que la signature d’une telle clause constitue un indice de la connaissance de la langue de l’acte signifié ou notifié. Cet indice aura d’autant plus de poids que la clause vise non seulement la correspondance entre parties, mais également celle avec les autorités et institutions publiques. Il pourra être conforté par d’autres indices, tels l’envoi effectif de correspondance par le destinataire de l’acte dans la langue de l’acte signifié ou notifié ou la présence, dans le contrat initial, de clauses attribuant la compétence en cas de litige aux juridictions de l’État d’origine ou soumettant le contrat au droit de cet État membre.

87      Ainsi que le bureau Weiss et les gouvernements tchèque et slovaque l’ont indiqué, le degré de connaissance d’une langue nécessaire à la correspondance n’est pas le même que celui indispensable à une défense en justice. Il s’agit cependant d’un élément de fait que le juge doit prendre en considération lorsqu’il vérifie si le destinataire d’un acte signifié ou notifié est en mesure de comprendre l’acte de manière telle qu’il puisse faire valoir ses droits. Il importe à la juridiction de prendre pour référence, conformément au principe d’équivalence, la manière dont un justiciable domicilié dans l’État d’origine peut comprendre un acte judiciaire rédigé dans la langue de cet État.

88      Il y a lieu de répondre à la deuxième question que l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1348/2000 doit être interprété en ce sens que le fait que le destinataire d’un acte signifié ou notifié a convenu, dans un contrat conclu avec le requérant dans le cadre de son activité professionnelle, que la langue de correspondance est celle de l’État membre d’origine ne constitue pas une présomption de connaissance de la langue, mais est un indice que le juge peut prendre en considération lorsqu’il vérifie si ce destinataire comprend la langue de l’État membre d’origine.

 Sur la troisième question

89      Par sa troisième question, posée pour le cas où il serait répondu de façon négative à la deuxième question telle que posée par la juridiction de renvoi, celle-ci demande si l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1348/2000 doit être interprété en ce sens que le destinataire d’un acte signifié ou notifié ne peut, en tout cas, se prévaloir de cette disposition pour refuser la réception d’annexes à un acte qui ne sont pas rédigées dans la langue de l’État membre requis ou dans une langue de l’État membre d’origine que le destinataire comprend lorsque, dans le cadre de son activité professionnelle, il conclut un contrat dans lequel il convient que la langue de correspondance est celle de l’État membre d’origine, et que les annexes, d’une part, concernent ladite correspondance et, d’autre part, sont rédigées dans la langue convenue.

90      Il résulte de la réponse apportée par la Cour à la première question que la traduction de certaines annexes à un acte introductif d’instance signifié ou notifié peut être requise lorsque le contenu de cet acte qui a été traduit est insuffisant pour identifier l’objet et la cause de la demande et permettre ainsi au défendeur de faire valoir ses droits au motif que certains éléments essentiels relatifs à la demande se trouveraient dans ces annexes.

91      Une telle traduction n’est cependant pas nécessaire lorsqu’il ressort des circonstances de fait que le destinataire de l’acte introductif d’instance a connaissance du contenu de ces annexes. Tel est le cas lorsqu’il en est l’auteur, ou est supposé en comprendre le contenu, par exemple, parce qu’il a signé un contrat dans le cadre de son activité professionnelle, dans lequel il a convenu que la langue de correspondance est celle de l’État membre d’origine, et que les annexes, d’une part, concernent ladite correspondance et, d’autre part, sont rédigées dans la langue convenue.

92      Il convient, dès lors, de répondre à la troisième question que l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1348/2000 doit être interprété en ce sens que le destinataire d’un acte introductif d’instance signifié ou notifié ne peut, en tout cas, se prévaloir de cette disposition pour refuser la réception d’annexes à un acte qui ne sont pas rédigées dans la langue de l’État membre requis ou dans une langue de l’État membre d’origine que le destinataire comprend lorsque, dans le cadre de son activité professionnelle, il a conclu un contrat dans lequel il a convenu que la langue de correspondance est celle de l’État membre d’origine, et que les annexes, d’une part, concernent ladite correspondance et, d’autre part, sont rédigées dans la langue convenue.

 

 Sur les dépens

 

93      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit:

1)      L’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) nº 1348/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que le destinataire d’un acte introductif d’instance à notifier ou à signifier n’a pas le droit de refuser la réception de cet acte pour autant que celui-ci met ce destinataire en mesure de faire valoir ses droits dans le cadre d’une procédure judiciaire dans l’État membre d’origine, lorsque cet acte est accompagné d’annexes constituées de pièces justificatives qui ne sont pas rédigées dans la langue de l’État membre requis ou dans une langue de l’État membre d’origine comprise du destinataire, mais qui ont uniquement une fonction de preuve et ne sont pas indispensables pour comprendre l’objet et la cause de la demande.

Il appartient au juge national de vérifier si le contenu de l’acte introductif d’instance est suffisant pour permettre au défendeur de faire valoir ses droits ou s’il incombe à l’expéditeur de remédier à l’absence de traduction d’une annexe indispensable.

2)      L’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 1348/2000 doit être interprété en ce sens que le fait que le destinataire d’un acte signifié ou notifié a convenu, dans un contrat conclu avec le requérant dans le cadre de son activité professionnelle, que la langue de correspondance est celle de l’État membre d’origine ne constitue pas une présomption de connaissance de la langue, mais est un indice que le juge peut prendre en considération lorsqu’il vérifie si ce destinataire comprend la langue de l’État membre d’origine.

3)      L’article 8, paragraphe 1, du règlement nº 1348/2000 doit être interprété en ce sens que le destinataire d’un acte introductif d’instance signifié ou notifié ne peut, en tout cas, se prévaloir de cette disposition pour refuser la réception d’annexes à un acte qui ne sont pas rédigées dans la langue de l’État membre requis ou dans une langue de l’État membre d’origine que le destinataire comprend lorsque, dans le cadre de son activité professionnelle, il a conclu un contrat dans lequel il a convenu que la langue de correspondance est celle de l’État membre d’origine, et que les annexes, d’une part, concernent ladite correspondance et, d’autre part, sont rédigées dans la langue convenue.

Signatures


Langue de procédure: l’allemand.

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