Rapport de la Commission européenne du 20 avril 2009 fondé sur l'article 18 de la décision cadre du Conseil du 15 mars 2001 relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénale
COM/2009/0166 final
1. INTRODUCTION
1.1. Contexte
Conformément à l’article 18 de la décision-cadre du Conseil du 15 mars 2001 relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales[1] («la décision-cadre»), la Commission doit rédiger un rapport sur les mesures de mise en œuvre prises par les États membres. La Commission a publié un premier rapport le 16 février 2004[2] qui examine la transposition au 25 mars 2003, date à laquelle seuls AT, BE, FI, DE, IT, IE, LU, PT, ES et SE avaient envoyé des contributions relativement complètes sur l'incorporation de la décision-cadre dans leur législation nationale.
Le présent rapport final prend en compte la mise en œuvre de tous les articles de la décision-cadre, à la date du 15 février 2008 dans l’ensemble des 27 États membres.
Bien que l’article 18 impose aux États membres de présenter leurs dispositions nationales de transposition à la Commission au plus tard le 22 mars 2006, en novembre 2007 seuls 13 États membres (AT, DK, DE, ES, LU, NL, PT, SE, UK, CZ, HU, LT, PL) avaient envoyé des informations relativement complètes. La Commission a envoyé des lettres de rappel aux États membres, la date limite finale étant fixée au 15 février 2008. Le présent rapport s’appuie sur l’état des lieux de la transposition à cette date, soit près de deux ans après la date limite du 22 mars 2006. Il doit être lu en complément du premier rapport, qui contient des informations sur la méthode et les critères d'évaluation, ainsi que de l'annexe qui établit, sous forme de tableaux, les dispositions de mise en œuvre présentées par les États membres pour chaque article.
1.2. Remarques générales
Deux États membres (MT et EL) n’ont communiqué aucune disposition de transposition et par conséquent, la Commission ne peut pas déterminer s’ils ont mis en œuvre la décision-cadre.
LV a transmis un ensemble de dispositions nationales en letton le 12 décembre 2007 et d'autres dispositions le 6 mars 2008 (après la date limite), sans aucune description des mesures nationales de mise en œuvre ni note explicative. Par conséquent, la Commission ne peut pas déterminer si LV s'est conformée à l’obligation fixée à l’article 18. D’autres États membres ont transmis des dispositions nationales censées mettre en œuvre, intégralement ou partiellement, la décision-cadre. LU a informé la Commission que le projet de loi mentionné dans le premier rapport n’avait pas encore été définitivement adopté. Il ne sera pas pris en compte dans l’évaluation des mesures de mise en œuvre prises par Lu. UK indique que les mesures concernent l’Angleterre, le Pays de Galles, l'Irlande du Nord et l'Écosse, mais a transmis pour cette dernière une contribution supplémentaire relative à la transposition (le régime écossais est mentionné lorsqu’il y a une divergence avec les dispositions mentionnées pour le reste du Royaume-Uni).
Aucun État membre n’a transposé la décision-cadre à l’aide d’un seul acte législatif national. Tous ont eu recours à des dispositions existantes et nombre d’entre eux se sont appuyés sur leur code de procédure pénale pour la transposition. Quelques-uns ont adopté une nouvelle législation concernant un ou plusieurs articles. De nombreux États membres ont transmis des codes, instructions et chartes non contraignants en lieu et place de dispositions législatives.
Plusieurs États membres ont transposé les dispositions par morceaux, en raison de chevauchements avec diverses dispositions nationales existantes ou récemment adoptées.
2. ANALYSE PAR ARTICLE
Pour la liste des mesures communiquées par les États membres, on se reportera au tableau figurant en annexe.
Article 1 er : Définitions
Cette disposition établit les définitions des termes «victime», «organisme d'aide aux victimes», «procédure pénale», «procédure» et «médiation dans les affaires pénales». Aucun État membre n'a adopté de nouvelle disposition pour mettre en œuvre cet article, bien que plusieurs d'entre eux aient fait référence à des définitions nationales existantes du terme «victime» qui correspondent, de près ou de loin, à la définition donnée par la décision-cadre. Les autres termes définis n’ont fait l’objet d’aucun traitement.
Une définition large du terme «victime» est donnée par UK, BG, RO, LT et SE. La définition slovaque englobe les personnes morales. ES, NL, DK, LU, EE, FI, BE et PT n’ont communiqué aucune disposition de transposition. FR indique que les définitions correspondent de toute façon aux notions communément utilisées. IE précise qu’elle s’est conformée à la décision-cadre au travers de ses dispositions législatives, réglementaires et administratives.
Article 2: Respect et reconnaissance
En vertu de l’article 2, paragraphe 1, la victime doit se voir accorder un «rôle réel et approprié» dans le système judiciaire pénal. Le rapport 2004 concluait que AT, BE, FR, FI, DE, IT, LU, PT et SE s’étaient conformés à la décision-cadre. BG, EE, CZ, HU, IE, PL, LT, RO, UK et ES font explicitement référence à «un rôle réel et approprié». DK et SI soulignent que cette disposition est très générale et que des droits spécifiques sont traités par d’autres articles. L’article 2, paragraphe 2, concerne «les victimes particulièrement vulnérables» (non définies), qui doivent bénéficier d'un «traitement spécifique répondant au mieux à leur situation».
FR, IE, BE, PT, PL, UK, SE, SI et IT protègent certaines personnes considérées comme vulnérables en raison de leur fragilité physique ou mentale (mineurs et handicapés physiques). ES, NL, CY, FI et RO soulignent les situations pouvant créer une telle fragilité (violences familiales, infractions à caractère sexuel, terrorisme, traite d’êtres humains). D’autres optent pour une protection plus large, englobant tout type de personnes ou de situations. En SK et DE, lorsqu’un témoin ne peut se présenter pour être interrogé en raison de son âge, d'une maladie ou d'un handicap, la vidéoconférence est utilisée. LT, HU et CZ prévoient un régime de protection (anonymat ou autres mesures) dans certaines circonstances (menace grave pour la vie de la victime ou du témoin, infractions graves, importance de la déposition). En HU, l’âge de la victime est un critère. BG et PL accordent une protection spécifique à certaines catégories de personnes vulnérables et dans le cas de certaines infractions graves (traite d'êtres humains ou violence domestique). EE n’a communiqué aucune disposition spécifique protégeant les personnes vulnérables.
Article 3: Audition et fourniture de preuves
L’article 3 établit le droit de la victime d’être entendue au cours de la procédure et de fournir des éléments de preuve. La plupart des pays (AT, BE, FI, FR, DE, IT, LU, NL, PT, ES, SE, HU, CZ, BG, PL, SK, SK, RO et EE) accordent à la victime divers droits en sa qualité de partie à la procédure pénale. La victime n’est pas partie à la procédure pénale dans les pays de common law, mais le droit d'être entendu est reconnu au UK et en IE.
La victime peut fournir des éléments de preuve au cours de la procédure dans la plupart des États membres. Trois pays n’ont transmis aucune disposition particulière (DK, NL, UK).
Dix États membres (AT, FI, IT, LU, ES, SE, HU, PL, CZ, BE) ont transposé le second alinéa de l’article 3, qui prévoit que les «autorités n’interrogent les victimes que dans la mesure nécessaire à la procédure pénale». IT limite cette audition aux faits pertinents pour l’accusation. HU donne au témoin la possibilité de faire une déposition écrite. En CZ, une victime ne peut être contrainte à assister à la suite de la procédure, si cela n’est pas nécessaire. En PL, les lignes directrices adoptées par la Cour suprême et le procureur général confèrent à la victime le droit de ne pas être interrogée à plusieurs reprises. UK mentionne l'existence de stages de formation à l'audition des victimes, destinés aux professionnels.
Article 4: Droit de recevoir des informations
L’article 4 porte sur le droit reconnu à la victime de recevoir différents types d'informations.
Son paragraphe 1 énumère dix types d’informations qui doivent être communiquées à la victime. AT, CY, FI, DE, IE, NL, UK (Écosse) et SE ont transposé cette obligation en faisant figurer la plupart de ces renseignements sur des sites internet et/ou en créant des brochures d'information. Néanmoins, les dispositions législatives transmises ne permettent pas de déterminer si la victime a effectivement accès à ces informations dès son premier contact avec les services répressifs.
En IT et au UK, les autorités ne sont aucunement tenues de fournir toutes ces informations aux victimes. Les mesures communiquées par PT n’obligent pas les autorités nationales à transmettre des informations aux victimes.
BE, EE, FR, ES, CZ, HU et SK ont adopté un système acceptable qui fait obligation aux fonctionnaires de police, aux procureurs et aux juges d’informer les victimes de la plupart de leurs droits. En FI, l’obligation des autorités chargées de l’instruction se limite à informer la victime de son droit à une réparation.
En RO, BG, FI, LT et PL, les approches sont mixtes. Les autorités sont obligées d’informer les victimes de leurs droits et ces pays ont créé des sites internet. En BG, à CY et en RO, une ligne téléphonique a été mise en place pour informer les victimes.
Les législations de SI et de CY sont lacunaires et insuffisantes. SI fait référence à des orientations du ministère de l'intérieur qui ne semblent avoir aucun caractère contraignant (le texte n'a pas été transmis). La mise en œuvre par LU est insuffisante, puisque le projet de loi n’a pas été définitivement adopté.
Il convient de relever deux autres faiblesses. La première concerne les langues. Les informations doivent être données «autant que possible dans des langues généralement comprises». Or si certains États membres (DE, UK (Écosse), NL, SE, BG et FI) ont des informations en plusieurs langues (dont l’anglais), la plupart des États membres ne font aucune mention de cet aspect de la question. Seules les législations bulgare et roumaine prévoient spécifiquement la communication d’informations à la victime dans une langue qu'elle comprend. CZ et HU ont adopté des dispositions qui garantissent à toute personne qui ne comprend pas la langue du pays le droit de communiquer avec les autorités dans une langue qu’elle maîtrise.
La seconde concerne les dispositifs particuliers prévus pour les victimes résidant dans un autre État. Cette disposition a été ignorée par les États membres, sauf UK (Écosse) et BG qui se sont dotés d’une ligne téléphonique permettant d’accéder directement à des interprètes. En IE, un service spécial de l’organisme d’aide aux victimes assiste les victimes résidant dans un autre pays.
L’article 4, paragraphe 2, sur les informations relatives à la suite réservée à la plainte, a été correctement transposé, à ceci près que DK, EE, UK, LU, SI et FR ne communiquent pas d’informations sur la décision prise par la juridiction. IT notifie uniquement la décision aux victimes qui se sont constituées parties civiles. FI a incorporé l’obligation c) dans son système national mais n’a transmis aucun acte législatif. Le code de procédure pénale de PT ne garantit pas que la victime sera informée activement par les autorités nationales si elle «en a manifesté la volonté». En IE, la Charte des victimes n’a pas de valeur contraignante. EE n’a transmis aucune mesure de transposition.
L’article 4, paragraphe 3, qui prévoit que la victime soit informée de la remise en liberté de l’auteur de l’infraction, n’a été correctement transposé que par FI, CZ, PL, SK et SE. IE a bien prévu dans la Charte des victimes d'avertir la victime de la remise en liberté de l'auteur. Cependant, en cas de manquement à cette obligation, le seul recours des victimes est alors d'écrire au «Garda Victim Liaison Officer»/«local Superintendent». BG, LU, EE, HU, LT, RO et SI n’ont communiqué aucune mesure de transposition. [Les règles en vigueur au UK présentent deux faiblesses. D’une part, le «Criminal Justice and Court Service Act 2000» exige que la victime soit informée de tout projet de remise en liberté de l'auteur et des conditions attachées à celle-ci, mais seuls sont concernés les auteurs d’infractions violentes ou sexuelles qui ont été condamnés à plus de 12 mois de prison. D'autre part, le système juridique particulier de l'Écosse a certes prévu la possibilité pour la victime d'être avertie de la remise en liberté de son agresseur, mais cet instrument n’a pas de valeur contraignante. La police a pour «pratique courante» d’informer la victime lorsque l’auteur bénéficie d’une libération conditionnelle]. ES mentionne une disposition concernant l'obligation d'informer la victime de toute étape de la procédure susceptible d'affecter sa sécurité. FR déclare que des travaux sont en cours à ce sujet. PT indique qu’il tiendra compte de cette disposition dans le prochain projet de loi modifiant le code de procédure pénale.
L’article 4, paragraphe 4, traite du droit de la victime de choisir de ne pas recevoir d’informations sur la remise en liberté de l’auteur de l’infraction. Seules FI, SE et SK ont entièrement transposé cette disposition. HU, CY, LT et IT indiquent qu’elles n’ont aucune disposition à cet effet. AT, DK, UK, DE, FR, EL, NL, LU, LT, EE, RO, SI et ES n’ont pas communiqué de dispositions de transposition de cet article. En ce qui concerne IE, où la communication des informations visées à l'article 4, paragraphe 3, est facultative, le problème de la valeur juridique de la Charte des victimes se pose à nouveau. Les dispositions portugaises ne garantissent pas à la victime le droit de ne pas recevoir d’informations. BE a transposé cette disposition en partie puisqu’elle ne prévoit que la communication des informations relatives à la libération conditionnelle de l'auteur de l'infraction.
Article 5: Garanties de communication
L’article 5 prévoit l’obligation d’«atténuer, dans toute la mesure du possible, les difficultés de communication» relatives à la compréhension des étapes importantes de la procédure pénale ou à la participation de la victime à celles-ci, d’une manière comparable aux mesures de ce type que les États membres prennent à l'égard des défendeurs. Les difficultés de communication pourraient être interprétées plus largement de manière à inclure la compréhension de la procédure elle-même. Pourtant tous les États membres les ont interprétées comme se limitant aux barrières linguistiques. Seule FI dispose d’un régime d’interprétation efficace qui s'étend à la phase d’instruction. En FR, IT, SI et BE, l’assistance d’un interprète ou d’un traducteur est offerte si la victime a la qualité de partie à la procédure ou de témoin. SK, BG, CZ, IE, DK, FI, HU, SI, ES, PL et RO proposent une assistance linguistique complète.
Les dispositions transmises indiquent un faible niveau de mise en œuvre dans cinq États membres (LT, LU, SE, UK, NL), les défendeurs y bénéficiant d’une meilleure protection. Il est difficile de savoir si en EE les organismes d’aide aux victimes proposent un service de traduction ou si l’assistance se limite à aider les victimes à comprendre la procédure d’une manière globale.
PL et CY n’ont communiqué aucune mesure de transposition.
Article 6: Assistance spécifique à la victime
Cet article impose une double obligation.
Premièrement, les États membres sont tenus de veiller à ce que la victime ait accès, gratuitement lorsque cela est justifié, à toute forme de conseil autre que le conseil ou l’aide juridiques. Seuls dix États membres (BG, EE, BE, ES, IE, SE, FR, RO, UK et DK) ont transposé cette obligation. La définition de «toute forme de conseil» varie d’un État à un autre, et va de l’assistance psychologique aux soins médicaux, en passant par les informations médicales.
D’une manière générale, la mise en œuvre de cet article par les États membres est lacunaire. SI a communiqué l’article 65 du code de procédure pénale qui ne remplit pas l’obligation visée à l’article 6. IT a transmis uniquement les dispositions législatives relatives à l'assistance spécifique offerte aux mineurs victimes d’infractions graves et aux victimes de la traite des êtres humains. Neuf États membres (LU, HU, CZ, FI, PL, SK, LT, CY et NL) ne garantissent pas aux victimes l’accès gratuit à des services de conseil autres que le conseil ou l'aide juridiques.
Deuxièmement, les États membres sont tenus de veiller à ce que la victime ait accès à l’aide juridique lorsqu’elle peut avoir la qualité de partie à la procédure pénale. Cette disposition a été correctement transposée par la plupart des États membres, exception faite de SI. Des différences existent en ce qui concerne les bénéficiaires potentiels de l’assistance. NL a informé la Commission de son système d’assistance juridique limitée (séance de conseil d’une demi-heure), quel que soit le revenu de la personne.
Article 7: Frais exposés par la victime dans le cadre d'une procédure pénale
L’article 7 porte sur les frais exposés par les victimes qui ont la qualité de partie ou de témoin dans le cadre d’une procédure pénale. AT, DE, EE, DK, PL, IT, PT, FI, LT, ES et SE ont établi une distinction entre les victimes qui ont la qualité de partie et celles qui sont témoins. La plupart des États membres (à l’exception de BE, IE, NL et UK) prennent en charge les frais d’avocat lorsque la victime est partie à la procédure. En droit italien, hongrois, espagnol, tchèque, roumain et slovaque, ses honoraires de l’avocat de la victime ne peuvent être réclamés qu’à l’auteur de l’infraction, sauf si la victime a droit à une aide juridique. Ceci pourrait poser des problèmes en cas d’insolvabilité de l’auteur. En BG, les frais de justice peuvent être pris en charge. En LT, les frais des témoins et des victimes sont pris en charge. En PL, les frais de justice de la victime sont supportés par l'auteur de l’infraction et, dans certaines circonstances non précisées, par l’État. En FI, si les frais de justice de la victime ne sont pas payés par l’État, l’auteur de l’infraction peut être tenu de les régler.
Les informations communiquées par CY sont incomplètes et EE ne fait mention que du remboursement des frais supportés par la victime lorsqu'elle est entendue en qualité de témoin.
Article 8: Droit à une protection
L’article 8 confère différents droits à une protection.
Son paragraphe 1 porte sur l’obligation de garantir la sécurité de la victime et de sa famille ainsi que la protection de leur vie privée. Il a été transposé par AT, BE, FI, DE, PT, NL, ES, SE, CY, CZ, RO, SK, SI, BG et HU. FR, LT et PL ont pris des mesures pour protéger la victime mais pas sa famille et n’ont pas communiqué de disposition de transposition pour les autres aspects de l’article 8, paragraphe 1. IE a transposé l’article 8, paragraphe 1, dans sa Charte des victimes (qui n’a pas de valeur contraignante). En ce qui concerne la protection de la vie privée de la victime, tous les États membres, à l’exception de SI, ont indiqué la possibilité de tenir les débats à huis clos. La protection de la vie privée de la famille de la victime n’est explicitement mentionnée que par FI, bien que le texte pertinent n’ait pas été communiqué.
L’article 8, paragraphe 2, fait référence à la protection de la vie privée dans le cadre d’une procédure judiciaire. AT, BE, BG, FR, SK, HU, DE et PT ont communiqué des informations sur la protection du droit à l’image.
DK a communiqué des informations incomplètes sur l’article 8, paragraphes 1 et 2, faisant référence uniquement au régime de protection des témoins.
L’article 8, paragraphe 3, vise à réduire les contacts entre la victime et l’auteur de l’infraction, notamment en prévoyant, dans les locaux judiciaires, des zones d'attente séparées. Seules DE, IT et ES ont communiqué des dispositions transposant l’article 8, paragraphe 3. DE a correctement transposé ce paragraphe, tandis que ES prévoit uniquement des locaux séparés pour les victimes qui ont la qualité de témoin. FI, IE, LU, CZ, UK et SE indiquent qu’ils se conforment à cette disposition dans la pratique (mais pas en droit). PL déclare que les présidents de tribunaux sont conscients de cette nécessité et DK indique que le ministère de la justice a transmis des communications à cet effet. SK indique que le juge peut prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce qu'aucun contact n’ait lieu entre l'accusé et la victime dans les locaux judiciaires, mais cela se limite à certaines affaires et ne garantit pas la mise à disposition de locaux séparés.
L’article 8, paragraphe 4, impose aux États membres de protéger les victimes en leur permettant de déposer d'une manière qui respecte leur vulnérabilité. La plupart des États membres ont transposé cet article dans une certaine mesure. FR, SI, EE, LT et EL n'ont communiqué aucun texte législatif. FI fait état de mesures protectrices destinées aux mineurs prévues dans un projet de loi. UK applique plusieurs mesures protectrices dans les «Crown Courts», mais leur application dans les «Magistrates' Courts» reste limitée à l’utilisation de liaisons audiovisuelles. CZ prévoit une protection limitée pour les personnes de moins 15 ans. DK dispose d’un régime général de protection (non-communication des données personnelles) en cas de risque pour la personne. Ces dispositifs ne remplissent pas l'objectif de la disposition, par exemple en ce qui concerne les jeunes enfants. La mise en œuvre de l’article 8 par EE n'est pas satisfaisante puisqu’aucune mention n'est faite de la protection des familles et des personnes vulnérables. De même, la mise en œuvre par LU est insuffisante, puisque le projet de loi n’a pas été définitivement adopté.
Article 9: Droit à réparation dans le cadre de la procédure pénale
L’article 9, paragraphe 1, oblige les États membres à faire en sorte que la décision relative à la réparation par l'auteur de l'infraction intervienne dans un délai raisonnable. La plupart des États membres ont estimé que la transposition de ce paragraphe pouvait se faire par au moyen d’une constitution de partie civile au pénal.
Les pays de common law n’ont pas de procédure avec constitution de partie civile. IE dispose de mécanismes d'indemnisation en faveur de certaines catégories de victimes. DK, EL et UK n’ont communiqué aucune disposition de transposition. CY, DE, FR, LT, BE, ES et SE prévoient l’indemnisation de certaines catégories de victimes uniquement. De telles mesures ne suffisent pas pour transposer l'article 9, paragraphe 1.
En vertu de l’article 9, paragraphe 2, les États membres sont tenus de favoriser l’effort d’indemnisation de la victime par l’auteur de l’infraction. AT, FR, DE, FI, IE, IT, ES et NL ont pris des mesures appropriées pour mettre en œuvre ce paragraphe. La remise en liberté sous caution ou conditionnelle dépend du comportement de l’auteur de l’infraction à l’égard de la victime. En RO, le procureur ou le juge peut prendre des mesures provisoires, telles que la saisie ou la confiscation des biens de l’auteur de l’infraction, afin de garantir le versement de l'indemnité, mais il n'existe aucune disposition qui garantisse ce versement en cas d’insolvabilité de l’auteur de l’infraction. En LT, FI, HU, SI et CZ, la réparation du préjudice causé par l’infraction peut être une circonstance atténuante en ce qui concerne la condamnation. DK, EE, EL et UK n’ont communiqué aucune disposition de transposition.
L’article 9, paragraphe 3, impose aux États membres de veiller à ce que les biens qui appartiennent à la victime lui soient rendus sans tarder. La plupart des États membres ont transposé cette obligation. DK, FR, DE, EL et ES n’ont communiqué aucune disposition. IE et UK indiquent que cette obligation est remplie, bien qu'ils n'aient transmis aucun texte législatif en ce sens.
Article 10: Médiation pénale dans le cadre de la procédure pénale
L’article 10 fait obligation aux États membres de promouvoir la médiation dans les situations appropriées. La plupart des États membres ont un régime qui permet la médiation. LU n’autorise que le procureur d’État à recourir à la médiation pénale; les parties n'ont aucun droit d'initiative. En SI, c’est le procureur d’État qui décide de soumettre une affaire à la médiation, mais celle-ci ne peut avoir lieu qu'avec le consentement de l'auteur de l'infraction et de la victime; lorsqu'il est informé que les termes de l'accord sont remplis, le procureur d'État abandonne les poursuites. En PL et FI, la médiation peut réduire la sévérité de la sanction. En LT, si les parties acceptent la médiation, la procédure pénale prend fin et en BG, un accord issu de la médiation a une valeur contraignante pour les parties. En SE, la médiation est possible lorsque l’auteur de l’infraction est âgé de moins de 21 ans.
À CY et au DK, la médiation ne fait l’objet d’aucune réglementation. DK réfléchit à la possibilité d’instaurer la médiation d’une manière permanente à l'issue d'un projet pilote débuté en 1994 et prolongé en 2003 et 2007.
Article 11: Victimes résidant dans un autre État membre
L’article 11, paragraphe 1, impose aux États membres d’envisager de permettre aux victimes résidant dans un autre État membre de faire une déposition immédiatement ou d'autoriser le recours à la vidéoconférence prévu aux articles 10 et 11 de la convention relative à l’entraide judiciaire en matière pénale adoptée en 2000. Néanmoins, la convention n’est pas en vigueur en EL, IT, IE et au LU. AT, BE, DK, DE, EL, LU, NL et SI n’ont communiqué aucune disposition. Leur législation semble permettre une déposition immédiate après que l’infraction a été commise. ES n’a pas transposé cet article. NL, LU, SE et UK décrivent leur système, sans en mentionner les sources législatives.
L’article 11, paragraphe 2, permet aux victimes résidant à l’étranger de déposer plainte dans leur État de résidence. FR, IT, CY, PT, ES et SE n’ont pas transposé ce paragraphe. AT, BE, DK, DE, LU, NL, LT, RO, EE, SI et SE n’ont communiqué aucune disposition. BE, IE, DK, HU, NL et SK acceptent les plaintes et les transmettent, si nécessaire, aux autorités de l’État où l'infraction a été commise. Seuls LU et FI ont transposé ce paragraphe.
Article 12: Coopération entre États membres
L’article 12 traite de la coopération entre les États membres. PT, HU et BG ont cité des dispositions nationales de mise en œuvre. UK et CZ mentionnent le rôle joué par leurs organismes d’aide aux victimes dans le cadre du forum européen des services d’aide aux victimes (désormais appelé «Victim Support Europe»). SE mentionne son rôle dans l’organisation de conférences internationales. IT et ES affirment avoir transposé l’article 12 en mettant en œuvre respectivement la directive de 2004 relative à l'indemnisation des victimes de la criminalité et la convention sur l'entraide judiciaire en matière pénale. FR, CY, SI, SK, DK et EE n’ont fait aucune mention de cette disposition. CY, FI et LT indiquent qu’aucun texte législatif n’est nécessaire pour mettre en œuvre cet article.
Article 13: Services spécialisés et organismes d'aide aux victimes
L’article 13 impose aux États membres de promouvoir le rôle des organismes d’aide aux victimes chargés de l’accueil, de l’accompagnement et du soutien des victimes. La plupart des États membres indiquent qu’il existe un service d'aide aux victimes, financé par l'État, qui a pour mission de les informer, de les conseiller et de les soutenir. Seuls AT, BE, BG, FR, PT, EE et SE ont communiqué des dispositions sur les fonctions remplies par ces organismes, notamment sur le soutien des victimes après la clôture de la procédure pénale. CY, SI et SK n’ont fait aucune mention de cet article. IT propose une assistance uniquement à certaines catégories de victimes (mineurs victimes de mauvais traitements, victimes d’extorsion, etc.). RO offre un soutien psychologique gratuit aux victimes de certaines catégories d'infraction. ES et FR se réfèrent à leur législation existante sans préciser les articles pertinents, et il n’est donc pas possible de vérifier si la transposition est correcte. LT indique qu’elle dispose de «programmes nationaux d’aide aux victimes» (sans donner plus d’informations). UK (Écosse), PL et CZ notent que l’État subventionne des organismes d'aide aux victimes et décrit leurs fonctions, mais ne fournissent aucune base législative.
Article 14: Formation professionnelle des personnes intervenant dans la procédure ou ayant des contacts avec les victimes
L’article 14 exige que le personnel entrant en contact avec les victimes (notamment les policiers et les praticiens de la justice) reçoive une formation appropriée. PT, RO et SE sont les seuls pays à avoir transposé les deux paragraphes de cet article. Il est difficile de déterminer si le «personnel d'assistance aux victimes de la criminalité» mentionné par BG englobe les policiers et les praticiens de la justice. La plupart des autres pays, à l’exception de DK et IT, se contentent de mentionner certains organismes chargés de dispenser une formation professionnelle aux intervenants du secteur. On ne sait pas toujours avec certitude si ces organismes sont aussi financés par l'État, comme l'article 14 le prescrit. La disposition communiquée par AT ne transpose pas l'article 14 car elle ne traite pas de la formation professionnelle des intervenants du secteur.
Article 15: Conditions pratiques concernant la situation de la victime dans le cadre de la procédure
L’article 15, paragraphe 1, régit la prévention des préjudices secondaires. Seules AT, IT et ES ont transposé cet article. D’autres États membres, à l’exception de DK et IT, indiquent avoir pris les mesures nécessaires, bien que la description de celles-ci soit trop vague et peu satisfaisante. En BE, les services de police peuvent bénéficier de subventions pour l’aménagement de locaux, qui sont destinés aux seules victimes de violence physique ou sexuelle.
L’article 15, paragraphe 2, impose aux États membres d'adapter les locaux afin de prévenir les préjudices secondaires. La plupart des États membres n’ont fait aucune mention de l'article 15, paragraphe 2. SE déclare que la plupart des services de police disposent à présent d’une salle séparée pour les enfants. Pour les autres catégories de victimes, des travaux sont en cours pour que des conditions propices soient réunies à l’avenir.
Article 16: Champ d’application territorial
UK n’a fourni aucune information indiquant que cette disposition a été transposée pour Gibraltar.
3. CONCLUSION
La mise en œuvre de cette décision-cadre n’est pas satisfaisante. Les dispositions législatives nationales communiquées à la Commission omettent de nombreux éléments. Par ailleurs, elles illustrent largement la pratique existant avant l’adoption de la décision-cadre. L’objectif d’harmonisation des législations dans ce domaine n'a pas été atteint en raison de la grande disparité des droits nationaux. De nombreuses dispositions ont été mises en œuvre au moyen de lignes directrices, de chartes et de recommandations qui n’ont aucun caractère contraignant. La Commission ne peut déterminer si, dans la pratique, ces instruments non contraignants sont appliqués.
La Commission invite les États membres à étudier le présent rapport et à profiter de l’occasion pour lui communiquer, ainsi qu’au Secrétariat général du Conseil, toute information supplémentaire pertinente afin de remplir les obligations qui leur incombent en vertu de l'article 18 de la décision-cadre. En outre, elle encourage les États membres qui ont indiqué être en train d’élaborer une législation en la matière à arrêter et à notifier ces mesures nationales dès que possible.
[1] JO L 82 du 22.3.2001, p. 1.
[2] COM(2004) 54 final/2.