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Livre Vert de la Commission europenne du 17 août 2004 sur la reconnaissance mutuelle des mesures de contrôle présentencielles non privatives de liberté - COM/2004/0562 final

 

Livre Vert de la Commission europenne du 17 août 2004 sur la reconnaissance mutuelle des mesures de contrôle présentencielles non privatives de liberté

 

COM/2004/0562 final


 

Le présent livre vert servira de base à un débat en vue de l'élaboration, par la Commission, d'une proposition de nouvel instrument législatif concernant la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires qui ordonnent, avant le procès, des mesures de contrôle non privatives de liberté. Un document de travail des services de la Commission, qui est annexé au présent livre vert (SEC(2004) 1046), analyse de manière approfondie le cadre juridique applicable en la matière ainsi que l'approche suivie par la Commission en vue de l'élaboration d'un tel instrument.

 

1. Raisons pour lesquelles la Commission présente un livre vert

 

1.1. Exposé du problème

 

Le recours excessif à la détention provisoire (ainsi que la durée de celle-ci) est une des raisons principales à l'origine du surpeuplement carcéral. Étant donné les risques de fuite, les suspects non résidents sont souvent placés en détention provisoire, alors que les suspects résidents font l'objet de mesures de substitution.

Les principes généraux du droit commandent de considérer comme une mesure exceptionnelle le placement en détention provisoire dans l'attente du jugement et de lui préférer, dans toute la mesure du possible, les mesures de contrôle non privatives de liberté. Or, les différentes solutions de substitution à la détention provisoire que prévoit le droit national (par exemple, l'obligation de se présenter régulièrement à la police ou la limitation de la libre circulation) ne sont pas actuellement transposables d'un État à l'autre, dans la mesure où certains pays ne reconnaissent pas les décisions rendues en la matière par des autorités judiciaires étrangères.

La création d'un instrument juridique à cet effet, qui rendrait possible la reconnaissance mutuelle par les États membres de l'Union européenne des mesures de contrôle présentencielles non privatives de liberté, contribuerait à réduire le nombre de détenus provisoires non résidents dans l'Union européenne. En outre, un tel instrument renforcerait le droit à la liberté et la présomption d'innocence dans l'Union européenne considérée dans son ensemble (autrement dit, à l'intérieur de l'espace commun de liberté, de sécurité et de justice) tout en diminuant le risque de traitement inégal des suspects non résidents.

 

1.2. Une action nécessaire

 

De toute évidence, une action dans ce domaine s'impose eu égard aux mesures 9 et 10 du Programme de mesures destiné à mettre en oeuvre le principe de reconnaissance mutuelle des décisions pénales de novembre 2000 [1] (ci-après le «programme sur la reconnaissance mutuelle»), qui a été adopté à la demande du Conseil européen de Tampere. Les différentes composantes de cette action sont exposées au point 2.2.1.3 du document de travail des services de la Commission.

[1] JO C 12 du 15.1.2001, p. 10.

 

Le Parlement européen, dans diverses résolutions, ainsi que d'autres organes ou organisations de coopération régionale tels que le Conseil de l'Europe ou le commissaire pour le développement démocratique du Conseil des États de la mer Baltique, ont insisté sur la nécessité d'une action au niveau européen. Diverses ONG actives dans ce domaine ont également souligné ce besoin.

 

1.3. Solution envisageable

 

L'idée directrice d'un nouvel instrument sur la reconnaissance mutuelle des mesures de contrôle présentencielles non privatives de liberté est de substituer à la détention provisoire une mesure de contrôle non privative de liberté et de transmettre cette mesure à l'État membre dans lequel le suspect réside habituellement. Le suspect pourrait alors faire l'objet d'une mesure de contrôle dans son cadre habituel jusqu'à son procès dans l'État membre où ce dernier doit se dérouler. Différents modèles sont étudiés dans le document de travail des services de la Commission en vue de la mise en oeuvre de cette idée.

Pour qu'une mesure de contrôle non privative de liberté soit effectivement respectée, il faut que le nouvel instrument envisagé prévoie, comme dernier recours, un moyen de coercition afin de renvoyer vers l'État où le procès doit se tenir, si nécessaire par la force, tout suspect qui refuserait de coopérer. Le simple fait qu'une telle possibilité existe, plutôt que sa mise en oeuvre effective, suffirait déjà à assurer le bon fonctionnement de ce nouvel instrument. Il convient de souligner qu'en l'absence de toute possibilité de recours à des mesures coercitives, il y aurait un risque (à court et à long terme) que la catégorie de personnes visée ne bénéficie d'aucune mesure de substitution. Les différents aspects d'un tel moyen de coercition sont également analysés dans le document de travail précité.

 

2. Le processus de consultation

 

Le présent livre vert marque la troisième étape du processus de consultation sur les mesures de substitution à la détention provisoire.

La première étape consistait à établir et diffuser un questionnaire sur la détention provisoire et les mesures de substitution, de manière à recenser les éventuels obstacles à une coopération entre les États membres dans ce domaine. Les 15 anciens États membres de l'Union européenne ont répondu au questionnaire. Le document de travail des services de la Commission contient, à l'annexe 2, un résumé des réponses reçues concernant, entre autres, les mesures de contrôle non privatives de liberté (mesures de substitution à la détention provisoire) et les sanctions applicables en cas de non-respect de ces mesures (ainsi que l'exige la mesure 9 du programme sur la reconnaissance mutuelle).

La deuxième étape a été marquée par la rédaction d'un document de réflexion sur la base des réponses obtenues au questionnaire et par la tenue d'une réunion d'experts. Le document de réflexion en question (daté du 24 avril 2003), qui a été envoyé à un certain nombre d'experts des États membres de l'Union européenne (et des pays adhérents de l'époque) spécialisés dans les questions relatives à la détention provisoire et aux mesures de substitution à cette détention, propose notamment l'instauration d'une obligation européenne de se présenter régulièrement à une autorité désignée, en tant que mesure de contrôle présentencielle non privative de liberté applicable au niveau européen. Ce document de réflexion explore en outre les possibilités d'action, et leurs limites, dans le domaine de la détention provisoire en général. La réunion d'experts s'est tenue à Bruxelles le 12 mai 2003. Plusieurs experts, dont des représentants d'ONG, avaient été invités à titre personnel, tandis que d'autres représentaient leurs États membres respectifs. Eurojust était également représenté. Lors de cette réunion, la discussion a porté sur la détention provisoire et les mesures de substitution à cette détention, en particulier l'idée de la Commission de créer une obligation européenne de se présenter régulièrement à une autorité désignée. Le présent livre vert tient dûment compte des résultats de cette réunion (pour de plus amples détails, se reporter au document de travail des services de la Commission).

 

3. Objectifs du présent livre vert

 

3.1. Étendre le débat à un plus large public

 

L'objectif principal du présent livre vert est d'étendre le processus de consultation à un public plus large, notamment, pour ne citer qu'eux, les praticiens du droit, tels que les magistrats du siège, les magistrats du parquet et les défenseurs, ainsi que les personnels des services de réinsertion sociale et de probation, les personnels des maisons d'arrêt et autres établissements pénitentiaires réservés à la détention provisoire, les organisations professionnelles, les milieux universitaires, les ONG compétentes et les pouvoirs publics.

3.2. Mettre l'accent sur la reconnaissance mutuelle des mesures de contrôle présentencielles non privatives de liberté

Le présent livre vert est axé sur la reconnaissance mutuelle des mesures de contrôle présentencielles non privatives de liberté. Certains aspects du problème (droit à l'assistance d'un avocat, droit de se faire assister d'un interprète et d'un traducteur, groupes de personnes vulnérables, comme les mineurs, assistance consulaire/droit de communiquer et «déclaration des droits») ont déjà été traités dans un autre livre vert [2] et dans la proposition de décision-cadre du Conseil relative à certains droits procéduraux [3]. Même si elles sont liées au cadre juridique de la détention provisoire et des mesures de substitution à ce type de détention, le document de travail des services de la Commission n'effectue pas d'analyse détaillée de ces questions, sauf lorsqu'elle est jugée nécessaire.

[2] COM(2003) 75 final.

 

[3] COM(2004) 328 final.

 

3.3. Explorer les possibilités d'action

 

L'instauration d'un système de reconnaissance mutuelle, au niveau européen, des mesures de contrôle présentencielles non privatives de liberté ne doit toutefois pas être dissociée du cadre juridique qui régit la détention provisoire d'une manière générale. Il convient de rappeler en effet que les mesures de contrôle sont, en principe, des mesures de substitution à la détention provisoire. Certains principes fondamentaux qui sont applicables à la détention provisoire en général sont également applicables, par analogie, aux mesures de contrôle non privatives de liberté. Il faut donc tenir compte de ces principes lors de l'élaboration d'un instrument sur la reconnaissance mutuelle et sur l'exécution des mesures de contrôle présentencielles non privatives de liberté.

Le document de travail des services de la Commission explore les possibilités d'action dans ce domaine, à la lumière des conventions, de la jurisprudence et de la législation nationale existantes.

La Commission vous invite à présenter vos observations sur le présent livre vert (ainsi que sur le document de travail des services de la Commission) et en particulier sur les questions posées ci-après. Elle souhaiterait également connaître votre position sur les nouvelles évolutions enregistrées dans les États membres en ce qui concerne les mesures de substitution à la détention provisoire (y compris les sanctions applicables en cas de manquement à une obligation découlant d'une mesure de contrôle non privative de liberté).

Afin de faciliter les échanges de vues, un site a été créé sur l'internet, sur lequel vous pourrez consulter le présent livre vert et trouver un certain nombre de liens intéressants.

vert

Les réponses doivent être transmises pour le x x 2004 au plus tard, de préférence à l'adresse suivante:

 

ou être envoyées par courrier à l'adresse postale:

Commission européenne

Direction générale Justice et affaires intérieures

Unité D 3 - Justice pénale

B-1049 Bruxelles

Belgique

À l'attention de M. Thomas Ljungquist

La Commission a l'intention d'organiser une audition publique sur le sujet en 2004.

Question n° 1:

Étant donné les conséquences négatives, pour le traitement des suspects non résidents, pouvant découler du cadre juridique actuel pour ce qui est des mesures de substitution à la détention provisoire:

a) Êtes-vous d'accord avec l'approche suivie par la Commission en vue de la reconnaissance mutuelle des mesures de contrôle présentencielles non privatives de liberté, telle qu'elle est décrite au point 4.3 du document de travail des services de la Commission (à savoir la possibilité de contrôler le suspect dans son pays de résidence habituelle et la nécessité d'instaurer un mécanisme garantissant la comparution de l'accusé ou du prévenu à l'audience, sauf si celui-ci peut être jugé en son absence), de manière à assurer la mise en oeuvre intégrale, dans toute l'Union européenne, du droit à la liberté et de la présomption d'innocence?

b) Si vous n'êtes pas d'accord, existe-t-il d'autres solutions?

c) Dans l'affirmative, veuillez les décrire.

d) Un tel mécanisme de reconnaissance mutuelle des mesures de contrôle non privatives de liberté devrait-il aussi être étendu aux infractions mineures (c'est-à-dire à celles qui sont en deçà du seuil prévu à l'article 2, paragraphe 1, de la décision-cadre relative au mandat d'arrêt européen)?

Question n° 2:

Un mécanisme de reconnaissance mutuelle des mesures de contrôle non privatives de liberté devrait-il être étendu

- au cas où un suspect, qui fait déjà l'objet de mesures de ce type et qui veut, à titre permanent ou temporaire, se rendre dans un autre État membre, sollicite la transmission de ces mesures à cet autre État membre (voir la description faite au point 4.2.2.3 du document de travail des services de la Commission)?

- Dans l'affirmative, à quelles conditions?

- au cas où un suspect s'est déjà rendu dans un autre État membre (voir, dans le document de travail des services de la Commission, le point 4.2.3.1 «suspect ayant manqué à une obligation découlant d'une mesure de contrôle présentencielle non privative de liberté» et le point 4.2.3.2 «demande tardive de mesures de contrôle non privatives de liberté»)?

- Dans l'affirmative, à quelles conditions?

Question n° 3:

a) Le nouvel instrument devrait-il contenir une disposition relative à une mesure de contrôle présentencielle spécifique non privative de liberté, telle que l'obligation européenne de se présenter régulièrement à une autorité désignée, éventuellement associée à une limitation de la liberté de circulation, telle que décrite plus haut?

b) Faudrait-il que l'autorité d'émission arrête les mesures de contrôle présentencielles non privatives de liberté à appliquer pendant la phase de contrôle (conformément à son droit national) ou détermine la manière dont le suspect doit s'acquitter d'une obligation européenne de se présenter régulièrement à une autorité désignée (en fixant la fréquence à laquelle il doit se présenter, en désignant l'autorité à laquelle il doit se présenter, etc.)?

c) Vaudrait-il mieux laisser le choix des mesures coercitives à prendre à l'autorité d'exécution, conformément à son droit national, l'autorité d'émission se limitant alors à définir l'objectif à atteindre au moyen des mesures de contrôle?

d) Est-ce que le modèle européen de mise en liberté provisoire (avec ou sans caution) («Eurobail») pourrait convenir?

Question n° 4:

a) Le nouvel instrument devrait-il prévoir des motifs de non-exécution obligatoire en cas d'amnistie, de jugement définitif ou d'autres décisions définitives, ou en considération de la majorité pénale?

b) Les autres motifs de non-exécution énoncés à l'article 4 de la décision-cadre relative au mandat d'arrêt européen sont-ils pertinents dans le cas d'une décision de transmission des mesures de substitution?

c) En particulier, l'autorité d'exécution devrait-elle avoir le droit de refuser l'exécution au motif de l'absence de double incrimination?

Question n° 5:

Pourrait-on subordonner la décision de transmission des mesures de substitution à d'autres conditions que:

- le renvoi de la personne dans son pays de résidence afin d'y subir sa peine?

- la possibilité de réviser la peine lorsque la peine infligée est la réclusion criminelle à perpétuité?

Question n° 6:

a) L'autorité d'émission devrait-elle préciser l'obligation (concernant les trois «risques classiques» - récidive, fuite, et destruction des preuves) que le suspect doit respecter dans le cadre de la mesure de contrôle présentencielle non privative de liberté, en laissant à l'autorité d'exécution le soin (conformément à ce qui a été dit plus haut) d'ordonner des mesures coercitives autres que le placement en détention en cas de manquement à l'obligation en question?

b) L'autorité d'exécution devrait-elle être tenue de signaler tout manquement (grave) à une obligation au regard des «trois dangers classiques»?

c) L'autorité d'exécution devrait-elle être autorisée à placer en détention provisoire tout suspect qui n'a pas respecté une obligation découlant d'une mesure de contrôle et à le maintenir en détention jusqu'au procès, ou bien devrait-elle renvoyer immédiatement le suspect à l'autorité d'émission?

d) La comparution du suspect par liaison vidéo à partir du territoire de l'État membre d'exécution pourrait-elle remplacer la présence physique du suspect devant l'autorité d'émission dans le cadre de la procédure visant (uniquement) à déterminer s'il doit être placé en détention provisoire dans l'État membre d'émission?

e) Quelles solutions faudrait-il mettre en oeuvre lorsque l'autorité d'émission et l'autorité d'exécution ne partagent pas le même avis quant à la question de savoir si une personne qui a manqué à une obligation doit être placée en détention provisoire ou si le risque peut être évité en l'astreignant à une nouvelle obligation?

f) Un mécanisme de renvoi du suspect de l'État membre d'exécution vers l'État membre d'émission devrait-il être prévu tant pour la phase de contrôle que pour la phase du procès?

g) L'autorité d'émission devrait-elle préciser au suspect qu'il a l'obligation de comparaître à l'audience et/ou qu'il pourrait être jugé par défaut en cas de non-comparution et faudrait-il obtenir le consentement préalable du suspect à cette obligation avant qu'il ne puisse bénéficier d'une mesure de substitution dans l'État membre d'exécution?

h) Pendant la phase de contrôle et la phase du procès, l'autorité d'exécution devrait-elle être autorisée à reporter le renvoi du suspect à une date ultérieure?

i) En particulier, l'autorité d'exécution devrait-elle avoir la possibilité de reporter la date de renvoi d'une personne soupçonnée d'avoir commis une nouvelle infraction sur son territoire?

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