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Décision-cadre 2008/978/JAI du Conseil du 18 décembre 2008 relative au mandat européen d’obtention de preuves visant à recueillir des objets, des documents et des données en vue de leur utilisation dans le cadre de procédures pénales

30.12.2008   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

L 350/72


 

Décision-cadre 2008/978/JAI du Conseil du 18 décembre 2008 relative au mandat européen d’obtention de preuves visant à recueillir des objets, des documents et des données en vue de leur utilisation dans le cadre de procédures pénales

 

LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,

 

vu le traité sur l’Union européenne, et notamment son article 31 et son article 34, paragraphe 2, point b),

vu la proposition de la Commission,

vu l’avis du Parlement européen (1),

 

(1)

L’Union européenne s’est donné pour objectif de maintenir et de développer un espace de liberté, de sécurité et de justice. Selon les conclusions du Conseil européen de Tampere des 15 et 16 octobre 1999, et notamment leur point 33, le principe de reconnaissance mutuelle devrait devenir la pierre angulaire de la coopération judiciaire en matière tant civile que pénale au sein de l’Union.

(2)

Le 29 novembre 2000, conformément aux conclusions de Tampere, le Conseil a adopté un programme de mesures destiné à mettre en œuvre le principe de reconnaissance mutuelle des décisions pénales (2). La présente décision-cadre est nécessaire pour concrétiser les mesures nos 5 et 6 de ce programme, qui portent sur la reconnaissance mutuelle des décisions aux fins de recherche de preuves.

(3)

Le point 3.3.1 du programme de La Haye (3), qui est annexé aux conclusions du Conseil européen des 4 et 5 novembre 2004, souligne qu’il importe de mener à bien le programme global de mesures destiné à mettre en œuvre le principe de reconnaissance mutuelle des décisions pénales et fait de l’introduction du mandat européen d’obtention de preuves une question prioritaire.

(4)

La décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (4) est la première concrétisation, dans le domaine du droit pénal, du principe de reconnaissance mutuelle.

(5)

La décision-cadre 2003/577/JAI du Conseil du 22 juillet 2003 relative à l’exécution dans l’Union européenne des décisions de gel de biens ou d’éléments de preuve (5) répond à la nécessité d’une reconnaissance mutuelle immédiate des décisions visant à empêcher toute opération de destruction, de transformation, de déplacement, de transfert ou d’aliénation d’éléments de preuve. Cette décision-cadre ne traite cependant que partiellement de la coopération judiciaire en matière pénale concernant les preuves et prévoit que le transfert ultérieur des éléments de preuve demeure régi par les procédures d’entraide judiciaire.

(6)

Il convient par conséquent d’améliorer encore la coopération judiciaire en appliquant le principe de reconnaissance mutuelle à une décision judiciaire qui prendrait la forme d’un mandat européen, visant à l’obtention d’objets, de documents et de données en vue de leur utilisation dans le cadre de procédures pénales.

(7)

Le mandat européen d’obtention de preuves peut servir à recueillir des objets, des documents et des données en vue de leur utilisation dans le cadre de procédures pénales pour lesquelles il peut être émis. Peuvent notamment être visés: les objets, documents ou données détenus par un tiers ou résultant de la perquisition, y compris au domicile d’un suspect, les relevés de l’utilisation de tous services, y compris de transactions financières, les procès-verbaux des dépositions, des interrogatoires et des auditions, et les autres documents, dont les résultats de techniques d’enquête spéciales.

(8)

Le principe de reconnaissance mutuelle suppose un degré élevé de confiance entre les États membres. Afin de favoriser cette confiance, la présente décision-cadre devrait contenir des garanties importantes afin de protéger les droits fondamentaux. Par conséquent, le mandat européen d’obtention de preuves ne devrait être émis que par des juges, des juridictions, des magistrats instructeurs, des procureurs et certaines autres autorités judiciaires déterminées par les États membres conformément à la présente décision-cadre.

(9)

La présente décision-cadre est adoptée au titre de l’article 31 du traité et porte donc sur la coopération judiciaire au sens de cette disposition, visant à apporter un soutien à la collecte de preuves en vue des procédures définies à l’article 5 de la présente décision-cadre. Bien que des autorités autres que les juges, les juridictions, les magistrats instructeurs ou les procureurs puissent jouer un rôle dans la collecte de ces preuves conformément à l’article 2, point c), ii), la présente décision-cadre n’englobe pas la coopération en matière policière, douanière, frontalière et administrative, qui est régie par d’autres dispositions des traités.

(10)

La définition des termes «perquisition ou saisie» ne saurait être invoquée pour l’application d’aucun autre instrument applicable entre les États membres, notamment la convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959, conclue dans le cadre du Conseil de l’Europe, et les instruments qui la complètent.

(11)

Il y a lieu d’émettre un mandat européen d’obtention de preuves uniquement lorsqu’il est nécessaire et proportionné de recueillir des objets, des documents ou des données demandés aux fins des procédures concernées, qu’elles soient de nature pénale ou autre. Il convient en outre d’émettre un mandat européen d’obtention de preuves uniquement lorsque les objets, documents ou données visés pourraient être obtenus, en vertu du droit de l’État d’émission, dans le cadre d’une procédure comparable. C’est à l’autorité d’émission qu’il appartient de s’assurer du respect de ces conditions. Aucun motif de non-reconnaissance ou de non-exécution ne devrait par conséquent pouvoir être tiré de considérations de cette nature.

(12)

L’autorité d’exécution devrait limiter le caractère intrusif des moyens auxquels elle recourt pour obtenir les objets, les documents ou les données demandés.

(13)

L’autorité d’exécution ne devrait être tenue d’exécuter le mandat européen d’obtention de preuves visant des données électroniques qui ne se trouvent pas dans l’État d’exécution que dans la mesure où sa législation nationale le permet.

(14)

L’autorité d’émission devrait avoir la possibilité, si les dispositions nationales de l’État d’émission transposant l’article 12 le prévoient, de demander à l’autorité d’exécution de respecter certaines formalités et procédures dans les actes juridiques ou administratifs pouvant contribuer à rendre les preuves demandées admissibles dans l’État d’émission, par exemple, l’apposition d’un cachet officiel sur un document, la présence d’un représentant de l’État d’émission ou l’enregistrement d’heures ou de dates, dans le but de créer une chaîne de preuves. Ces formalités et procédures devraient toutefois s’entendre à l’exclusion des mesures coercitives.

(15)

L’exécution d’un mandat européen d’obtention de preuves devrait, autant que possible et sans préjudice des garanties fondamentales énoncées par les législations nationales, être effectuée conformément aux formalités et aux procédures expressément prévues par l’État d’émission.

(16)

Pour garantir l’efficacité de la coopération judiciaire en matière pénale, il importe de limiter la faculté de refuser de reconnaître ou d’exécuter le mandat européen d’obtention de preuves, ainsi que les motifs justifiant le report d’exécution. En particulier, le refus d’exécuter le mandat européen d’obtention de preuves au motif que l’acte qu’il vise ne constitue pas une infraction au regard du droit national de l’État d’exécution (principe de la double incrimination) ne devrait pas être admis pour certaines catégories d’infractions.

(17)

Il devrait être possible de refuser un mandat européen d’obtention de preuves lorsque sa reconnaissance ou son exécution dans l’État d’exécution porterait atteinte à une immunité ou à un privilège dans cet État. Il n’y a pas de définition commune de ce qui constitue une immunité ou un privilège dans l’Union européenne; la définition précise de ces termes relève donc du droit national, qui peut englober les protections applicables aux professions médicales et juridiques, mais ne saurait faire l’objet d’une interprétation qui irait à l’encontre de l’obligation de supprimer certains motifs de refus prévue à l’article 7 de l’acte du Conseil du 16 octobre 2001 établissant, conformément à l’article 34 du traité sur l’Union européenne, le protocole à la convention relative à l’entraide judiciaire en matière pénale entre les États membres de l’Union européenne (6).

(18)

Il devrait être possible de refuser de reconnaître ou d’exécuter un mandat européen d’obtention de preuves dans la mesure où l’exécution risque de nuire à des intérêts nationaux essentiels en matière de sécurité, de mettre en danger la source d’information ou de comporter l’utilisation d’informations classifiées se rapportant à des activités de renseignement particulières Il est toutefois admis que l’on ne pourrait invoquer un tel motif de non-reconnaissance ou de non-exécution que lorsque, et dans la mesure où, pour ces mêmes motifs, les objets, documents ou données ne seraient pas utilisés à titre de preuve dans le cadre d’une procédure nationale similaire.

(19)

Les dispositions spécifiques de l’article 13, paragraphe 3, en liaison avec l’article 13, paragraphe 1, point f) i), ne préjugent pas de la manière dont les autres motifs de refus visés à l’article 13, paragraphe 1, sont appliqués ni de la mesure dans laquelle ils le sont.

(20)

Il convient de fixer des délais si l’on veut que la coopération soit rapide, efficace et cohérente pour l’obtention d’objets, de documents ou de données en vue de leur utilisation dans le cadre de procédures pénales dans toute l’Union européenne.

(21)

Il existe dans le droit de chaque État membre des voies de recours permettant d’attaquer les motifs de fond des décisions rendues en matière d’obtention de preuves, y compris en ce qui concerne la question de la nécessité et de la proportionnalité de la décision, ces voies de recours pouvant cependant différer d’un État membre à l’autre et intervenir à différents stades de la procédure.

(22)

Il convient de mettre en place un mécanisme permettant de vérifier si la présente décision-cadre est bien appliquée.

(23)

Étant donné que l’objectif de la présente décision-cadre, à savoir remplacer le système d’entraide judiciaire en matière pénale entre les États membres aux fins d’obtention d’objets, de documents ou de données ne peut pas être réalisé de manière suffisante par l’action unilatérale des États membres et peut donc, en raison de ses dimensions et de ses effets, être mieux réalisé au niveau de l’Union, le Conseil peut prendre des mesures, conformément au principe de subsidiarité visé à l’article 2 du traité sur l’Union européenne et à l’article 5 du traité instituant la Communauté européenne. Conformément au principe de proportionnalité tel qu’énoncé à ce dernier article, la présente décision-cadre n’excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.

(24)

Les données à caractère personnel traitées dans le cadre de la mise en œuvre de la présente décision-cadre seront protégées conformément aux instruments applicables, notamment les principes énoncés dans la convention du 28 janvier 1981 du Conseil de l’Europe pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, et bénéficieront en outre de la protection complémentaire prévue par la présente décision-cadre, conformément à l’article 23 de la convention du 29 mai 2000 (7) relative à l’entraide judiciaire en matière pénale entre les États membres de l’Union européenne.

(25)

Le mandat européen d’obtention de preuves devrait coexister avec les procédures d’entraide en vigueur, cette coexistence devant toutefois être considérée comme transitoire jusqu’à ce que, conformément au programme de La Haye, les modes d’obtention de preuves exclus de la présente décision-cadre fassent également l’objet d’un instrument de reconnaissance mutuelle, dont l’adoption créerait un régime complet de reconnaissance mutuelle destiné à se substituer aux procédures d’entraide.

(26)

Les États membres sont encouragés à établir, pour eux-mêmes et dans l’intérêt de l’Union européenne, des tableaux qui montrent, dans la mesure du possible, la concordance entre les dispositions de la présente décision-cadre et les mesures nationales d’application, et à les communiquer à la Commission accompagnés du texte de la législation nationale portant application de la présente décision-cadre.

(27)

La présente décision-cadre respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus par l’article 6 du traité sur l’Union européenne et réaffirmés dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, notamment son chapitre VI. Rien dans la présente décision-cadre ne peut être interprété comme une interdiction de refuser l’exécution d’un mandat européen d’obtention de preuves lorsqu’il y a des raisons de croire, sur la base d’éléments objectifs, que ledit mandat a été émis dans le but de poursuivre ou de punir une personne en raison de son sexe, de son origine raciale ou ethnique, de sa religion, de son orientation sexuelle, de sa nationalité, de sa langue ou de ses opinions politiques ou qu’il peut être porté atteinte à la situation de cette personne pour l’une de ces raisons.

(28)

La présente décision-cadre n’empêche pas un État membre d’appliquer ses règles constitutionnelles relatives au respect du droit à un procès équitable, à la liberté d’association, à la liberté de la presse et à la liberté d’expression dans d’autres médias.

(29)

La présente décision-cadre ne porte pas atteinte à l’exercice des responsabilités qui incombent aux États membres pour le maintien de l’ordre public et la sauvegarde de la sécurité intérieure conformément à l’article 33 du traité,

 

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION-CADRE:

 

TITRE I

 

LE MANDAT EUROPÉEN D’OBTENTION DE PREUVES

 

Article premier

Définition du mandat européen d’obtention de preuves et obligation de l’exécuter

1.   Le mandat européen d’obtention de preuves est une décision judiciaire émise par une autorité compétente d’un État membre afin d’obtenir des objets, des documents et des données d’un autre État membre en vue de leur utilisation dans le cadre des procédures visées à l’article 5.

2.   Les États membres exécutent tout mandat européen d’obtention de preuves sur la base du principe de reconnaissance mutuelle et conformément aux dispositions de la présente décision-cadre.

3.   La présente décision-cadre n’a pas pour effet de modifier l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes juridiques fondamentaux tels qu’ils sont consacrés par l’article 6 du traité, ni celle de les faire respecter par les autorités judiciaires des États membres.

Article 2

Définitions

Aux fins de la présente décision-cadre, on entend par:

a)

«État d’émission», l’État membre dans lequel le mandat européen d’obtention de preuves a été émis;

b)

«État d’exécution», l’État membre sur le territoire duquel les objets, les documents ou les données se trouvent ou, dans le cas de données électroniques, sont directement accessibles selon le droit de l’État d’exécution;

c)

«autorité d’émission»:

i)

un juge, une juridiction, un magistrat instructeur ou un procureur; ou

ii)

toute autre autorité judiciaire définie par l’État d’émission et, dans le cas d’espèce, agissant en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre des procédures pénales, compétente en vertu du droit national pour ordonner l’obtention de preuves dans des affaires transfrontalières;

d)

«autorité d’exécution», l’autorité compétente, en vertu de la législation nationale mettant en œuvre la présente décision-cadre, pour reconnaître ou exécuter un mandat européen d’obtention de preuves, conformément à la présente décision-cadre;

e)

«perquisition ou saisie», notamment toute mesure de procédure pénale en vertu de laquelle une personne physique ou morale est légalement tenue de remettre des objets, des documents ou des données, ou d’apporter son concours à la remise de ces objets, documents ou données et qui, en cas de non-exécution, est susceptible d’exécution forcée sans le consentement de la personne en question ou peut donner lieu à une sanction.

Article 3

Désignation des autorités compétentes

1.   Chaque État membre informe le secrétariat général du Conseil de l’autorité ou des autorités qui, conformément à son droit interne, sont compétentes en application de l’article 2, points c) et d), lorsque cet État membre est l’État d’émission ou l’État d’exécution.

2.   Les États membres qui souhaitent faire usage de la possibilité de désigner une ou des autorité(s) centrale(s) conformément à l’article 8, paragraphe 2, communiquent au secrétariat général du Conseil les informations relatives à l’autorité centrale ou aux autorités centrales désignées. Ces indications lient les autorités de l’État d’émission.

3.   Le secrétariat général du Conseil met les informations reçues à la disposition de tous les États membres et de la Commission.

Article 4

Champ d’application du mandat européen d’obtention de preuves

1.   Sans préjudice du paragraphe 2 du présent article, le mandat européen d’obtention de preuves peut être émis, aux conditions visées à l’article 7, en vue de recueillir, dans l’État d’exécution, des objets, des documents ou des données dont l’État d’émission a besoin aux fins des procédures visées à l’article 5. Le mandat européen d’obtention de preuves porte sur les objets, documents et données qui y sont spécifiés.

2.   Le mandat européen d’obtention de preuves ne peut être émis en vue de demander à l’autorité d’exécution:

a)

de mener des interrogatoires, de prendre des dépositions ou de procéder à d’autres types d’auditions de suspects, de témoins, d’experts ou de toute autre personne;

b)

de procéder à un examen ou de prélever du matériel biologique ou des données biométriques directement sur le corps d’une personne, y compris des échantillons d’ADN ou des empreintes digitales;

c)

de recueillir des informations en temps réel en faisant, par exemple, intercepter les communications, de procéder à une surveillance discrète ou de surveiller les comptes bancaires;

d)

d’analyser des objets, des documents ou des données existants; et

e)

d’obtenir des données de communication conservées par les fournisseurs de services de communications électroniques accessibles au public ou un réseau de communications public.

3.   L’échange d’informations sur des condamnations pénales tirées des casiers judiciaires est effectué conformément à la décision 2005/876/JAI du Conseil du 21 novembre 2005 relative à l’échange d’informations extraites du casier judiciaire (8) et aux autres instruments pertinents.

4.   Le mandat européen d’obtention de preuves peut être émis afin de se procurer les objets, documents ou données visés au paragraphe 2, s’ils sont déjà en la possession de l’autorité d’exécution avant l’émission du mandat.

5.   Nonobstant le paragraphe 1, le mandat européen d’obtention de preuves porte aussi, lorsque l’autorité d’émission le précise, sur tout autre objet ou document ou toute autre donnée que l’autorité d’exécution découvre durant l’exécution dudit mandat et que, sans plus ample informé, elle juge utile à la procédure pour laquelle le mandat européen d’obtention de preuves a été émis.

6.   Nonobstant le paragraphe 2, le mandat européen d’obtention de preuves peut aussi porter, à la demande de l’autorité d’émission, sur la prise de dépositions des personnes présentes au cours de l’exécution du mandat européen d’obtention de preuves et ayant un lien direct avec l’objet du mandat. Les règles de l’État d’exécution applicables à cet égard dans les procédures nationales sont également applicables à la prise des dépositions susvisées.

Article 5

Types de procédures pour lesquelles le mandat européen d’obtention de preuves peut être émis

Le mandat européen d’obtention de preuves peut être émis:

a)

aux fins des procédures pénales engagées par une autorité judiciaire ou à engager devant celle-ci concernant une infraction pénale conformément au droit national de l’État d’émission;

b)

dans des procédures pour des faits qui sont punissables selon le droit national de l’État d’émission au titre d’infractions aux règlements poursuivies par des autorités administratives dont la décision peut donner lieu à un recours devant une juridiction compétente, notamment en matière pénale;

c)

dans des procédures pour des faits qui sont punissables selon le droit national de l’État d’émission au titre d’infractions aux règlements poursuivies par des autorités judiciaires dont la décision peut donner lieu à un recours devant une juridiction compétente, notamment en matière pénale; et

d)

dans les procédures visées aux points a), b) et c) portant sur des faits ou des infractions pouvant engager la responsabilité d’une personne morale ou entraîner une peine à son encontre dans l’État d’émission.

Article 6

Contenu et forme du mandat européen d’obtention de preuves

1.   Le mandat européen d’obtention de preuves prévu dans le formulaire figurant en annexe est rempli, signé, et son contenu certifié exact, par l’autorité d’émission.

2.   Le mandat européen d’obtention de preuves est rédigé ou traduit par l’État d’émission dans la langue officielle ou dans l’une des langues officielles de l’État d’exécution.

Tout État membre peut, au moment de l’adoption de la présente décision-cadre ou ultérieurement, indiquer, dans une déclaration déposée auprès du secrétariat général du Conseil, qu’il acceptera des mandats européens d’obtention de preuves ou une traduction d’un mandat européen d’obtention de preuves dans une ou plusieurs autres langues officielles des institutions de l’Union.

 

TITRE II

 

PROCÉDURES ET GARANTIES POUR L’ÉTAT D’ÉMISSION

 

Article 7

Conditions d’émission du mandat européen d’obtention de preuves

Chaque État membre prend les mesures nécessaires pour faire en sorte que le mandat européen d’obtention de preuves ne soit émis que lorsque l’autorité d’émission considère comme réunies les conditions ci-après:

a)

l’obtention des objets, des documents ou des données demandés est nécessaire et proportionnée aux fins des procédures visées à l’article 5;

b)

les objets, documents ou données pourraient être obtenus en vertu du droit de l’État d’émission dans le cadre d’une procédure comparable s’ils étaient disponibles sur le territoire de l’État d’émission, même si des mesures procédurales différentes devaient être prises.

Dans chaque cas, le respect de ces conditions est vérifié uniquement dans l’État membre d’émission.

Article 8

Transmission du mandat européen d’obtention de preuves

1.   Le mandat européen d’obtention de preuves peut être transmis à l’autorité compétente d’un État membre lorsque l’autorité compétente de l’État d’émission est fondée à croire que les objets, documents ou données concernés se trouvent sur le territoire du premier ou, dans le cas de données électroniques, sont directement accessibles selon le droit de l’État d’exécution. Il est transmis sans attendre par l’autorité d’émission à l’autorité d’exécution, par tout moyen permettant de laisser une trace écrite et dans des conditions permettant à l’État d’exécution d’en établir l’authenticité. Toute autre communication officielle est effectuée directement entre l’autorité d’émission et l’autorité d’exécution.

2.   Chaque État membre peut désigner une autorité centrale ou, lorsque son ordre juridique le prévoit, plusieurs autorités centrales, pour assister les autorités judiciaires compétentes. Un État membre peut, si cela s’avère nécessaire en raison de l’organisation de son système judiciaire, confier à sa ou à ses autorités centrales la transmission et la réception administratives du mandat européen d’obtention de preuves, ainsi que de toute autre correspondance officielle la ou les concernant.

3.   Si l’autorité judiciaire d’émission le souhaite, la transmission peut être effectuée par le biais du système de télécommunication sécurisé du réseau judiciaire européen.

4.   Si l’autorité d’exécution lui est inconnue, l’autorité d’émission sollicite par tout moyen, y compris les points de contact du réseau judiciaire européen, le renseignement de la part de l’État d’exécution.

5.   Lorsque l’autorité de l’État d’exécution qui reçoit le mandat européen d’obtention de preuves n’est pas compétente pour le reconnaître et prendre les mesures nécessaires en vue de son exécution, elle le transmet d’office à l’autorité d’exécution et elle en informe l’autorité d’émission.

6.   Toute difficulté ayant trait à la transmission ou à l’authenticité d’un document nécessaire à l’exécution du mandat européen d’obtention de preuves est réglée au moyen de contacts directs entre les autorités d’émission et d’exécution concernées ou, le cas échéant, avec l’intervention des autorités centrales des États membres.

Article 9

Mandat européen d’obtention de preuves lié à un mandat européen d’obtention de preuves précédent ou à une décision de gel

1.   Lorsque l’autorité d’émission émet un mandat européen d’obtention de preuves qui vient compléter un mandat européen d’obtention de preuves précédent ou qui fait suite à une décision de gel prise en vertu de la décision-cadre 2003/577/JAI, elle le précise dans le mandat européen d’obtention de preuves conformément à ce que prévoit le formulaire figurant en annexe.

2.   Si, conformément aux dispositions en vigueur, l’autorité d’émission participe à l’exécution du mandat européen d’obtention de preuves dans l’État d’exécution, elle peut, sans préjudice des déclarations faites en vertu de l’article 3, paragraphe 2, adresser un mandat européen d’obtention de preuves venant compléter le mandat européen d’obtention de preuves précédent directement à l’autorité d’exécution compétente, tant qu’elle est présente sur le territoire de cet État.

Article 10

Conditions d’utilisation des données à caractère personnel

1.   L’État d’émission peut utiliser les données à caractère personnel obtenues en vertu de la présente décision-cadre aux fins:

a)

des procédures pour lesquelles le mandat européen d’obtention de preuves peut être émis;

b)

d’autres procédures judiciaires et administratives directement liées aux procédures visées au point a);

c)

de prévenir un danger immédiat et sérieux pour la sécurité publique.

Les données à caractère personnel obtenues en vertu de la présente décision-cadre ne peuvent être utilisées à d’autres fins que celles énoncées aux points a), b) et c) qu’avec le consentement préalable de l’État d’exécution, sauf si l’État d’émission a obtenu l’accord de la personne concernée.

2.   Selon le cas d’espèce, l’État d’exécution peut demander à l’État membre auquel les données à caractère personnel ont été transmises de l’informer de l’utilisation qui en a été faite.

3.   Le présent article ne s’applique pas aux données à caractère personnel obtenues par un État membre en application de la présente décision-cadre et provenant dudit État membre.

 

TITRE III

 

PROCÉDURES ET GARANTIES POUR L’ÉTAT D’EXÉCUTION

 

Article 11

Reconnaissance et exécution

1.   L’autorité d’exécution reconnaît tout mandat européen d’obtention de preuves transmis conformément à l’article 8, sans qu’aucune autre formalité ne soit requise, et prend sans délai les mesures nécessaires pour qu’il soit exécuté de la même manière que si les objets, les documents ou les données devaient être obtenus par une autorité de l’État d’exécution, à moins que cette autorité ne décide de se prévaloir de l’un des motifs de non-reconnaissance ou de non-exécution prévus à l’article 13 ou de l’un des motifs de report prévus à l’article 16.

2.   Il revient à l’État d’exécution de choisir les mesures qui, en vertu de son droit national, lui permettront de fournir les objets, les documents ou les données requis par un mandat européen d’obtention de preuves et de décider s’il y a lieu de recourir à des mesures coercitives pour fournir cette assistance. Toute mesure rendue nécessaire par le mandat européen d’obtention de preuves est prise selon les règles de procédure applicables dans l’État d’exécution.

3.   Chaque État membre veille:

i)

à ce qu’il puisse également être recouru, aux fins de l’exécution du mandat européen d’obtention de preuves, à toute mesure qui pourrait être prise dans le cadre d’une procédure nationale similaire dans l’État d’exécution;

et

ii)

à ce qu’il puisse être recouru à des mesures, notamment à des perquisitions ou à des saisies, aux fins de l’exécution du mandat européen d’obtention de preuves lorsque celui-ci porte sur l’une des infractions visées à l’article 14, paragraphe 2.

4.   Si l’autorité d’émission n’est pas un juge, une juridiction, un magistrat instructeur ou un procureur, et si le mandat européen d’obtention de preuves n’a pas été validé par une de ces autorités dans l’État d’émission, l’autorité d’exécution peut, dans le cas d’espèce, décider que l’exécution dudit mandat ne peut donner lieu à aucune perquisition ou saisie. Avant de statuer, l’autorité d’exécution consulte l’autorité compétente de l’État d’émission.

5.   Un État membre peut, au moment de l’adoption de la présente décision-cadre, adresser une déclaration ou une notification ultérieure au secrétariat général du Conseil en demandant une telle validation dans tous les cas où l’autorité d’émission n’est pas un juge, une juridiction, un magistrat instructeur ou un procureur et où la loi de l’État d’exécution exigerait, dans une procédure nationale similaire, que les mesures nécessaires à l’exécution du mandat européen d’obtention de preuves soient ordonnées ou dirigées par un juge, une juridiction, un magistrat instructeur ou un procureur.

Article 12

Formalités à respecter dans l’État d’exécution

L’autorité d’exécution respecte les formalités et procédures expressément indiquées par l’autorité d’émission, sauf si la présente décision-cadre en dispose autrement et sous réserve que ces formalités et procédures ne soient pas contraires aux principes fondamentaux du droit de l’État d’exécution. Le présent article ne crée pas une obligation de prendre des mesures coercitives.

Article 13

Motifs de non-reconnaissance ou de non-exécution

1.   La reconnaissance ou l’exécution du mandat européen d’obtention de preuves peut être refusée dans l’État d’exécution:

a)

si son exécution est contraire au principe non bis in idem;

b)

si, dans les situations visées à l’article 14, paragraphe 3, le mandat européen d’obtention de preuves concerne des faits qui ne constituent pas une infraction selon le droit de l’État d’exécution;

c)

s’il n’est pas possible d’exécuter le mandat européen d’obtention de preuves au moyen des mesures dont dispose l’autorité d’exécution dans le cas d’espèce conformément à l’article 11, paragraphe 3;

d)

si le droit de l’État d’exécution prévoit une immunité ou un privilège qui rend impossible l’exécution du mandat européen d’obtention de preuves;

e)

si, dans l’une des situations visées à l’article 11, paragraphe 4 ou 5, le mandat européen d’obtention de preuves n’a pas été validé;

f)

si le mandat européen d’obtention de preuves porte sur des infractions pénales:

i)

qui, selon le droit de l’État d’exécution, sont considérées comme ayant été commises en totalité ou en majeure partie ou pour l’essentiel sur son territoire ou en un lieu assimilé à son territoire;

ii)

qui ont été commises hors du territoire de l’État d’émission, lorsque le droit de l’État d’exécution n’autorise pas que des poursuites soient engagées pour les mêmes infractions commises hors de son territoire;

g)

si, dans un cas déterminé, son exécution risque de nuire à des intérêts nationaux essentiels en matière de sécurité, de mettre en danger la source d’information ou de comporter l’utilisation d’informations classifiées se rapportant à des activités de renseignement particulières; ou

h)

si le formulaire figurant en annexe est incomplet ou manifestement incorrect et qu’il n’a pas été complété ou corrigé dans un délai raisonnable fixé par l’autorité d’exécution.

2.   La décision de refuser l’exécution ou la reconnaissance d’un mandat européen d’obtention de preuves en vertu du paragraphe 1 est prise par un juge, une juridiction, un magistrat instructeur ou un procureur de l’État d’exécution. Lorsque le mandat européen d’obtention de preuves est émis par une autorité judiciaire visée à l’article 2, point c) ii), et qu’il n’a pas été validé par un juge, une juridiction, un magistrat instructeur ou un procureur de l’État d’émission, la décision de refus peut également émaner de toute autre autorité judiciaire compétente en vertu du droit de l’État d’exécution si ce droit le prévoit.

3.   Toute décision prise en application du paragraphe 1, point f) i), portant sur des infractions commises en partie sur le territoire de l’État d’exécution ou en un lieu assimilé à son territoire, est prise par les autorités compétentes visées au paragraphe 2 à titre exceptionnel et cas par cas, en prenant en considération les circonstances particulières à chaque espèce et en tenant notamment compte de la question de savoir si les faits considérés se sont déroulés en majeure partie ou pour l’essentiel dans l’État d’émission, si le mandat européen d’obtention de preuves concerne un acte qui n’est pas une infraction pénale au regard du droit de l’État d’exécution et s’il est nécessaire d’effectuer une perquisition et une saisie aux fins de l’exécution du mandat.

4.   Lorsqu’une autorité compétente envisage de se prévaloir du motif de refus prévu au paragraphe 1, point f) i), elle consulte Eurojust avant de prendre sa décision.

Lorsqu’une autorité compétente ne souscrit pas à l’avis d’Eurojust, les États membres veillent à ce qu’elle motive sa décision et à ce que le Conseil en soit informé.

5.   Dans les cas visés au paragraphe 1, points a), g) et h), avant de décider de ne pas reconnaître ou de ne pas exécuter un mandat européen d’obtention de preuves, en tout ou en partie, l’autorité compétente de l’État d’exécution consulte l’autorité compétente de l’État d’émission par tous les moyens appropriés et, le cas échéant, sollicite sans tarder toute information nécessaire.

Article 14

Double incrimination

1.   La reconnaissance ou l’exécution du mandat européen d’obtention de preuves n’est pas subordonnée au contrôle de la double incrimination, sauf s’il est nécessaire d’opérer une perquisition ou une saisie.

2.   S’il est nécessaire d’opérer une perquisition ou une saisie pour exécuter le mandat européen d’obtention de preuves, les infractions figurant ci-dessous, si elles sont punies dans l’État d’émission d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté d’un maximum d’au moins trois ans telles qu’elles sont définies par le droit dudit État, ne font en aucun cas l’objet d’un contrôle de la double incrimination:

participation à une organisation criminelle,

terrorisme,

traite des êtres humains,

exploitation sexuelle des enfants et pédopornographie,

trafic de stupéfiants et de substances psychotropes,

trafic d’armes, de munitions et d’explosifs,

corruption,

fraude, y compris la fraude portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés européennes au sens de la convention du 26 juillet 1995 relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (9),

blanchiment des produits du crime,

faux monnayage et contrefaçon de monnaie, y compris de l’euro,

cybercriminalité,

crimes contre l’environnement, y compris le trafic d’espèces animales menacées et le trafic d’espèces et d’essences végétales menacées,

aide à l’entrée et au séjour irréguliers,

homicide volontaire, coups et blessures graves,

trafic d’organes et de tissus humains,

enlèvement, séquestration et prise d’otages,

racisme et xénophobie,

vol organisé ou vol à main armée,

trafic de biens culturels, y compris d’antiquités et d’œuvres d’art,

escroquerie,

racket et extorsion de fonds,

contrefaçon et piratage de produits,

falsification de documents administratifs et trafic de faux,

falsification de moyens de paiement,

trafic de substances hormonales et d’autres facteurs de croissance,

trafic de matières nucléaires et radioactives,

trafic de véhicules volés,

viol,

incendie volontaire,

crimes relevant de la Cour pénale internationale,

détournement d’avion/de navire,

sabotage.

3.   Si le mandat européen d’obtention de preuves n’a trait à aucune des infractions visées au paragraphe 2 et que son exécution suppose une perquisition ou une saisie, la reconnaissance ou l’exécution du mandat européen d’obtention de preuves peut être subordonnée à la condition de la double incrimination.

En ce qui concerne les infractions en matière de taxes et d'impôts, de douane et de change, la reconnaissance ou l’exécution ne peut être refusée au motif que la législation de l’État d’exécution n’impose pas le même type de taxe, d’impôt ou de droits ou ne contient pas le même type de réglementation en matière fiscale, douanière ou de change que le droit de l’État d’émission.

4.   Avant le 19 janvier 2014, le Conseil procède à un examen approfondi de la condition de la double incrimination prévue au paragraphe 3 à la lumière des informations qui lui ont été communiquées.

5.   Le Conseil, statuant à l’unanimité et après consultation du Parlement européen dans les conditions prévues à l’article 39, paragraphe 1, du traité, peut décider d’ajouter d’autres catégories d’infractions à la liste du paragraphe 2.

Article 15

Délais de reconnaissance, d’exécution et de transfert

1.   Chaque État membre arrête les mesures nécessaires en vue de faire respecter les délais fixés par le présent article. Si l’autorité d’émission a indiqué dans le mandat européen d’obtention de preuves que des échéances de procédure ou d’autres circonstances particulièrement urgentes requéraient un délai plus court, l’autorité d’exécution tient compte au mieux de cette exigence.

2.   Toute décision de refus de reconnaissance ou d’exécution est prise dès que possible et, sans préjudice du paragraphe 4, au plus tard trente jours après la réception du mandat européen d’obtention de preuves par l’autorité d’exécution compétente.

3.   Sauf s’il existe des motifs de report visés à l’article 16 ou si elle dispose déjà des objets, des documents ou des données demandés, l’autorité d’exécution prend possession sans tarder des objets, des documents ou des données et ce, sans préjudice du paragraphe 4, dans les soixante jours après que l’autorité d’exécution compétente a reçu le mandat européen d’obtention de preuves.

4.   Lorsque, dans un cas donné, il n’est pas possible à l’autorité d’exécution compétente de respecter les délais fixés respectivement aux paragraphes 2 ou 3, elle informe sans tarder l’autorité compétente de l’État d’émission par tout moyen, en indiquant les raisons du retard et une estimation du temps qu’il faudra pour y remédier.

5.   En l’absence de recours intenté conformément à l’article 18 ou de motifs de report visés à l’article 16, l’État d’exécution transfère dans les meilleurs délais à l’État d’émission les objets, documents ou données obtenus en vertu du mandat européen d’obtention de preuves.

6.   Lors du transfert des objets, des documents ou des données obtenus, l’autorité d’exécution précise si elle en exige le renvoi à l’État d’exécution dès qu’ils ne sont plus nécessaires à l’État d’émission.

Article 16

Motifs de report de la reconnaissance ou de l’exécution

1.   La reconnaissance du mandat européen d’obtention peut être reportée dans l’État d’exécution:

a)

lorsque le formulaire figurant en annexe est incomplet ou manifestement incorrect, jusqu’à ce qu’il ait été complété ou corrigé; ou

b)

lorsque dans l’un des cas visés à l’article 11, paragraphe 4 ou 5, le mandat européen d’obtention de preuves n’a pas été validé, jusqu’à ce qu’il le soit.

2.   L’exécution du mandat européen d’obtention de preuves peut être reportée dans l’État d’exécution:

a)

lorsque cette exécution risque de nuire à une enquête criminelle ou à des poursuites pénales en cours, jusqu’au moment que l’État d’exécution juge raisonnable; ou

b)

lorsque les objets, documents ou données concernés sont déjà utilisés dans le cadre d’une autre procédure, jusqu’à ce qu’ils ne soient plus nécessaires à cette fin.

3.   La décision de reporter la reconnaissance ou l’exécution d’un mandat européen d’obtention de preuves en vertu des paragraphes 1 ou 2 est prise par un juge, une juridiction, un magistrat instructeur ou un procureur de l’État d’exécution. Lorsque le mandat européen d’obtention de preuves est émis par une autorité judiciaire visée à l’article 2, point c) ii), et qu’il n’a pas a été validé par un juge, une juridiction, un magistrat instructeur ou un procureur de l’État d’émission, la décision de refus peut également émaner de toute autre autorité judiciaire compétente en vertu du droit de l’État d’exécution si ce droit le prévoit.

4.   Dès que le motif de report cesse d’exister, l’autorité d’exécution prend sans délai les mesures nécessaires à l’exécution du mandat européen d’obtention de preuves et en informe l’autorité compétente concernée de l’État d’émission par tout moyen permettant de laisser une trace écrite.

Article 17

Obligation d’informer

L’autorité d’exécution informe l’autorité d’émission:

1)

immédiatement et par tout moyen:

a)

si, en cours d’exécution du mandat européen d’obtention de preuves, l’autorité d’exécution juge opportun, sans plus ample informé, de diligenter des mesures d’enquête non prévues initialement ou qui n’avaient pas pu être spécifiées au moment de l’émission du mandat, pour permettre à l’autorité d’émission de prendre de nouvelles mesures dans le cas d’espèce;

b)

si l’autorité compétente de l’État d’exécution établit que le mandat européen d’obtention de preuves n’a pas été exécuté en conformité avec la législation de l’État d’exécution;

c)

si l’autorité d’exécution établit que, dans le cas d’espèce, elle ne peut respecter les formalités et procédures expressément indiquées par l’autorité d’émission conformément à l’article 12.

À la demande de l’autorité d’émission, cette information est confirmée sans délai par tout moyen permettant de laisser une trace écrite;

2)

sans délai et par tout moyen permettant de laisser une trace écrite:

a)

de la transmission du mandat européen d’obtention de preuves à l’autorité compétente responsable de son exécution, conformément à l’article 8, paragraphe 5;

b)

de toute décision prise conformément à l’article 15, paragraphe 2, de refuser la reconnaissance ou l’exécution du mandat européen d’obtention de preuves, en indiquant les motifs de cette décision;

c)

du report de l’exécution ou de la reconnaissance du mandat européen d’obtention de preuves, des motifs de ce report et, si possible, de sa durée prévue;

d)

de l’impossibilité d’exécuter le mandat européen d’obtention de preuves parce que les objets, les documents ou les données ont disparu, ont été détruits ou ne peuvent être retrouvés à l’endroit indiqué dans le mandat ou parce que l’endroit où ils se trouvent n’a pas été indiqué de manière assez précise, même après consultation de l’autorité compétente de l’État d’émission.

Article 18

Recours

1.   Les États membres prennent toutes les dispositions nécessaires pour garantir que la reconnaissance et l’exécution de tout mandat européen d’obtention de preuves conformes à l’article 11 puissent faire l’objet d’un recours de la part de toute personne concernée, y compris des tiers de bonne foi, en vue de préserver leur intérêt légitime. Les États membres peuvent limiter les recours ici prévus aux cas des mandats européens d’obtention de preuves dont l’exécution s’accompagne de l’emploi de mesures coercitives. L’action est engagée devant une juridiction de l’État d’exécution, conformément à la législation nationale de cet État.

2.   Les motifs de fond qui sont à l’origine de l’émission du mandat européen d’obtention de preuves, y compris le respect des conditions énoncées à l’article 7, ne peuvent être contestés que par une action intentée devant une juridiction de l’État d’émission. L’État d’émission veille à ce que les recours qui sont possibles dans le cadre d’une procédure nationale comparable soient applicables.

3.   Les États membres veillent à ce que tout délai pour l’exercice du droit d’engager une action en justice prévu aux paragraphes 1 et 2 soit appliqué de manière à garantir la possibilité d’exercer un moyen de recours effectif pour les personnes concernées.

4.   Si le recours est formé dans l’État d’exécution, l’autorité judiciaire de l’État d’émission est informée de ce recours, ainsi que des moyens invoqués, afin qu’elle puisse présenter tous les arguments qu’elle juge utiles. Elle est informée de l’issue du recours.

5.   Les autorités d’émission et d’exécution prennent les mesures nécessaires pour faciliter l’exercice du droit de recours visé aux paragraphes 1 et 2, notamment en fournissant les informations utiles et adéquates aux parties intéressées.

6.   L’État d’exécution peut suspendre le transfert des objets, des documents ou des données dans l’attente de l’issue du recours.

Article 19

Remboursement

1.   Sans préjudice de l’article 18, paragraphe 2, lorsque, dans les conditions prévues par son droit interne, l’État d’exécution assume la responsabilité du dommage causé à l’une des personnes visées à l’article 18 du fait de l’exécution d’un mandat européen d’obtention de preuves qui lui a été transmis conformément à l’article 8, l’État d’émission rembourse à l’État d’exécution les sommes que celui-ci a versées à cette personne à titre de réparation du dommage dont il est responsable, sauf dans la mesure où le préjudice, ou une partie du préjudice, est imputable au comportement de l’État d’exécution.

2.   Le paragraphe 1 s’applique sans préjudice de la législation des États membres relative aux demandes de réparation formulées par les personnes physiques ou morales.

 

TITRE IV

 

DISPOSITIONS FINALES

 

Article 20

Suivi de la bonne application de la présente décision-cadre

1.   Si un État membre a rencontré des difficultés répétées, qu’il n’a pas été possible de résoudre par des consultations, pour faire exécuter des mandats européens d’obtention de preuves par un autre État membre, il en informe le Conseil afin de l’aider à évaluer, au niveau des États membres, la mise en œuvre de la présente décision-cadre.

2.   Le Conseil procède à l’évaluation, notamment de l’application pratique, des dispositions de la présente décision-cadre par les États membres.

Article 21

Relation avec d’autres instruments juridiques

1.   Sous réserve des dispositions du paragraphe 2 et sans préjudice de l’application d’instruments juridiques existants aux relations entre États membres et pays tiers, la présente décision-cadre coexiste, dans les relations entre les États membres, avec les instruments juridiques existants, dans la mesure où ces actes concernent des demandes d’entraide relatives à des preuves relevant du champ d’application de la présente décision-cadre.

2.   Sans préjudice des paragraphes 3 et 4, les autorités d’émission ont recours au mandat européen d’obtention de preuves lorsque tous les objets, documents ou données requis de l’État d’exécution relèvent du champ d’application de la présente décision-cadre.

3.   Les autorités d’émission peuvent recourir à l’entraide judiciaire pour obtenir les objets, documents ou données qui relèvent du champ d’application de la présente décision-cadre, si ceux-ci font partie d’une demande d’entraide plus large ou si elles estiment que, dans le cas d’espèce, cela faciliterait la coopération avec l’État d’exécution.

4.   Les États membres peuvent conclure des conventions ou des accords bilatéraux ou multilatéraux après l’entrée en vigueur de la présente décision-cadre, dans la mesure où ces conventions et accords permettent d’étendre ou d’élargir ses objectifs et contribuent à simplifier ou à assouplir les procédures d’obtention de preuves relevant du champ d’application de la présente décision-cadre.

5.   Les conventions et accords visés au paragraphe 4 ne peuvent en aucun cas affecter les relations avec les États membres qui n’y sont pas parties.

6.   Les États membres notifient au Conseil et à la Commission, dans les trois mois suivant leur signature, les nouvelles conventions ou nouveaux accords visés au paragraphe 4.

Article 22

Dispositions transitoires

Les demandes d’entraide reçues avant le 19 janvier 2011 demeurent régies par les instruments existants relatifs à l’entraide en matière pénale.

Article 23

Mise en œuvre

1.   Les États membres prennent les mesures nécessaires pour se conformer aux dispositions de la présente décision-cadre avant le 19 janvier 2011.

2.   Les États membres communiquent, avant le 19 janvier 2011, au secrétariat général du Conseil et à la Commission, le texte des dispositions transposant dans leur droit national les obligations découlant de la présente décision-cadre.

3.   Tout État membre ayant l’intention de transposer dans son droit national le motif de refus visé à l’article 13, paragraphe 1, point f), le notifie au secrétaire général du Conseil lors de l’adoption de la présente décision-cadre, au moyen d’une déclaration.

4.   L’Allemagne peut, au moyen d’une déclaration, se réserver le droit de subordonner l’exécution d’un mandat européen d’obtention de preuves au contrôle de la double incrimination dans les cas visés à l’article 14, paragraphe 2, qui concernent le terrorisme, la cybercriminalité, le racisme et la xénophobie, le sabotage, le racket, l’extorsion de fonds et l’escroquerie, s’il est nécessaire d’opérer une perquisition ou une saisie pour exécuter le mandat, à moins que l’autorité d’émission n'ait déclaré qu’en vertu du droit de l’État d’émission, l’infraction concernée répondait aux critères décrits dans la déclaration.

Si l’Allemagne souhaite faire usage du présent paragraphe, elle notifie une déclaration à cet effet au secrétaire général du Conseil lors de l’adoption de la présente décision-cadre. La déclaration est publiée au Journal officiel de l’Union européenne.

5.   La Commission présente au Parlement européen et au Conseil, au plus tard le 19 janvier 2012, un rapport évaluant dans quelle mesure les États membres ont pris les dispositions nécessaires pour se conformer à la présente décision-cadre, accompagné, le cas échéant, de propositions législatives.

6.   Le secrétariat général du Conseil notifie aux États membres, à la Commission et à Eurojust les déclarations faites conformément aux articles 16 et 11 ainsi qu’au présent article.

Article 24

Réexamen

1.   Chaque État membre, avant le 1er mai de chaque année, informe le Conseil et la Commission de toute difficulté rencontrée au cours de l’année civile précédente dans l’exécution des mandats européens d’obtention de preuves en ce qui concerne l’article 13, paragraphe 1.

2.   Au début de chaque année civile, l’Allemagne communique au Conseil et à la Commission le nombre de cas où le motif de non-reconnaissance ou de non-exécution visé à l’article 23, paragraphe 4, a été appliqué au cours de l’année précédente.

3.   Au plus tard le 19 janvier 2014, la Commission établit un rapport sur la base des informations reçues conformément aux paragraphes 1 et 2, accompagné de toute initiative qu’elle juge appropriée. Sur la base de ce rapport, le Conseil réexamine la présente décision-cadre pour établir s’il convient d’abroger ou de modifier les dispositions suivantes:

l’article 13, paragraphes 1 et 3, et

l’article 23, paragraphe 4.

Article 25

Entrée en vigueur

La présente décision-cadre entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

 

Fait à Bruxelles, le 18 décembre 2008.

Par le Conseil

Le président

M. BARNIER


(1)  JO C 103 E du 29.4.2004, p. 452.

(2)  JO C 12 du 15.1.2001, p. 10.

(3)  JO C 53 du 3.3.2005, p. 1.

(4)  JO L 190 du 18.7.2002, p. 1.

(5)  JO L 196 du 2.8.2003, p. 45.

(6)  JO C 326 du 21.11.2001, p. 1.

(7)  JO C 197 du 12.7.2000, p. 1.

(8)  JO L 322 du 9.12.2005, p. 33.

(9)  JO C 316 du 27.11.1995, p. 49.


DÉCLARATION DE LA RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE D’ALLEMAGNE

S’il est nécessaire d’opérer une perquisition ou une saisie pour exécuter un mandat européen d’obtention de preuves en vertu de la décision-cadre 2008/978/JAI du Conseil du 18 décembre 2008 relative au mandat européen d’obtention de preuves visant à recueillir des objets, des documents et des données en vue de leur utilisation dans le cadre de procédures pénales (1), la République fédérale d’Allemagne se réserve le droit, en vertu de l’article 23, paragraphe 4 de ladite décision, de subordonner l’exécution au contrôle de la double incrimination dans les cas d’infractions qui concernent le terrorisme, la cybercriminalité, le racisme et la xénophobie, le sabotage, le racket, l’extorsion de fonds et l’escroquerie, qui sont énumérés à l’article 14, paragraphe 2 de ladite décision, à moins que l’autorité d’émission ait déclaré qu’en vertu du droit de l’État d’émission l’infraction concernée répond aux critères décrits ci-après.

Terrorisme:

Tout acte qui constitue une infraction au sens et selon la définition de la Convention internationale pour la répression des actes de terrorisme nucléaire du 13 avril 2005, de la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme du 9 décembre 1999, ou au sens de l’une des conventions énumérées à l’annexe de cette dernière, ou

tout acte punissable en vertu de la décision-cadre 2002/475/JAI du Conseil du 13 juin 2002 relative à la lutte contre le terrorisme (2), ou

tout acte qui doit être interdit en vertu de la résolution 1624 (2005) du Conseil de sécurité des Nations unies du 14 septembre 2005.

Cybercriminalité: Tout acte punissable au sens de la décision-cadre 2005/222/JAI du Conseil du 24 février 2005 relative aux attaques visant les systèmes d’information (3), ou de la section I, titre 1, de la Convention européenne sur la cybercriminalité du 23 novembre 2001.

Racisme et xénophobie: Les infractions définies dans l’action commune 96/443/JAI du Conseil du 15 juillet 1996 concernant l’action contre le racisme et la xénophobie (4).

Sabotage: Tout acte illicite et intentionnel causant des destructions massives à une installation gouvernementale, à une autre installation publique, à un système de transport public ou à une infrastructure entraînant ou risquant d’entraîner des pertes économiques considérables.

Racket et extorsion de fonds: Le fait d’exiger par la menace, le recours à la force ou toute autre forme d’intimidation, des biens, des promesses ou des quittances, ou la signature de tout document contenant ou dont il résulte une obligation, une aliénation ou une décharge.

Escroquerie: L’utilisation de faux noms ou de fausses qualités, ou le recours à des manœuvres frauduleuses pour abuser de la confiance ou de la crédulité d’une personne dans le but de s’approprier une chose appartenant à autrui.


(1)  JO L 350, 30.12.2008, p. 72.

(2)  JO L 164 du 22.6.2002, p. 3.

(3)  JO L 69 du 16.3.2005, p. 67.

(4)  JO L 185 du 24.7.1996, p. 5.


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