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CJUE, 30 janvier 2014, aff. C‑285/12, Aboubacar Diakité c/ Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides

 

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

30 janvier 2014

Aboubacar Diakité contre Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides

 

«Directive 2004/83/CE – Normes minimales relatives aux conditions d’octroi du statut de réfugié ou du statut conféré par la protection subsidiaire – Personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire – Article 15, sous c) – Menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé – Notion de ‘conflit armé interne’ – Interprétation autonome par rapport au droit international humanitaire – Critères d’appréciation»

Dans l’affaire C‑285/12,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Conseil d’État (Belgique), par décision du 16 mai 2012, parvenue à la Cour le 7 juin 2012, dans la procédure

Aboubacar Diakité

contre

Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides,

 

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen (rapporteur), président de chambre, M. K. Lenaerts, vice-président de la Cour, faisant fonction de juge de la quatrième chambre, MM. M. Safjan, J. Malenovský et Mme A. Prechal, juges,

avocat général: M. P. Mengozzi,

greffier: M. V. Tourrès, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 29 mai 2013,

considérant les observations présentées:

–        pour M. Diakité, par Me D. Caccamisi, avocate,

–        pour le gouvernement belge, par M. T. Materne et Mme C. Pochet, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement allemand, par MM. T. Henze, N. Graf Vitzthum et B. Beutler, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement français, par M. D. Colas, en qualité d’agent,

–        pour le gouvernement du Royaume-Uni, par MM. L. Christie et A. Robertson, en qualité d’agents, assistés de Mme J. Simor, barrister,

–        pour la Commission européenne, par Mme M. Condou-Durande, en qualité d’agent,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 18 juillet 2013,

rend le présent

 

Arrêt

 

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 15, sous c), de la directive 2004/83/CE du Conseil, du 29 avril 2004, concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts (JO L 304, p. 12, et rectificatif JO 2005, L 204, p. 24, ci-après la «directive»).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Diakité, ressortissant guinéen, au Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (ci-après le «Commissaire général»), au sujet de la décision de ce dernier de ne pas lui octroyer le bénéfice de la protection subsidiaire.

 

 Le cadre juridique

 

 Le droit international

3        L’article 3 commun aux quatre conventions de Genève du 12 août 1949, respectivement, convention (I) pour l’amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne; convention (II) pour l’amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer; convention (III) relative au traitement des prisonniers de guerre, et convention (IV) relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre (ci-après les «quatre conventions de Genève»), stipule:

«En cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international et surgissant sur le territoire de l’une des Hautes Parties contractantes, chacune des Parties au conflit sera tenue d’appliquer au moins les dispositions suivantes:

1)      Les personnes qui ne participent pas directement aux hostilités, y compris les membres de forces armées qui ont déposé les armes et les personnes qui ont été mises hors de combat par maladie, blessure, détention, ou pour toute autre cause, seront, en toutes circonstances, traitées avec humanité [...]

      À cet effet, sont et demeurent prohibées [...], à l’égard des personnes mentionnées ci-dessus:

a)      Les atteintes portées à la vie et à l’intégrité corporelle [...]

[...]

c)      les atteintes à la dignité des personnes, notamment les traitements humiliants et dégradants;

[...]»

4        L’article 1er du protocole additionnel aux conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (protocole II), du 8 juin 1977, stipule:

«1.      Le présent Protocole, qui développe et complète l’article 3 commun aux [quatre conventions de Genève] sans modifier ses conditions d’application actuelles, s’applique à tous les conflits armés qui ne sont pas couverts par l’article premier du Protocole additionnel aux [quatre conventions de Genève] relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux (Protocole I), et qui se déroulent sur le territoire d’une Haute Partie contractante entre ses forces armées et des forces armées dissidentes ou des groupes armés organisés qui, sous la conduite d’un commandement responsable, exercent sur une partie de son territoire un contrôle tel qu’il leur permette de mener des opérations militaires continues et concertées et d’appliquer le présent Protocole.

2.      Le présent Protocole ne s’applique pas aux situations de tensions internes, de troubles intérieurs, comme les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence et autres actes analogues, qui ne sont pas considérés comme des conflits armés.»

 Le droit de l’Union

5        Les considérants 5, 6 et 24 de la directive sont libellés comme suit:

«(5)      Les conclusions du Conseil européen de Tampere précisent également que les règles relatives au statut de réfugié devraient aussi être complétées par des mesures relatives à des formes subsidiaires de protection offrant un statut approprié à toute personne nécessitant une telle protection.

(6)      L’objectif principal de la présente directive est, d’une part, d’assurer que tous les États membres appliquent des critères communs pour l’identification des personnes qui ont réellement besoin de protection internationale et, d’autre part, d’assurer un niveau minimal d’avantages à ces personnes dans tous les États membres.

[...]

(24)      Il convient d’arrêter aussi des normes minimales relatives à la définition et au contenu du statut conféré par la protection subsidiaire. La protection subsidiaire devrait compléter la protection des réfugiés consacrée par la convention [relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 ([Recueil des traités des Nations unies, vol. 189, p. 150, no 2545 (1954)])»

6        Aux termes de l’article 2, sous e), de la directive, aux fins de celle-ci, on entend par «‘personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire’, tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 15 [...] cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays».

7        L’article 15 de la directive dispose, sous le titre «Atteintes graves»:

«Les atteintes graves sont:

[...]

c)      des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.»

 Le droit belge

8        L’article 48/4 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers (ci-après la «loi du 15 décembre 1980») dispose:

«§ 1er.      Le statut de protection subsidiaire est accordé à l’étranger qui ne peut être considéré comme un réfugié et qui ne peut pas bénéficier de l’article 9 ter, et à l’égard duquel il y a de sérieux motifs de croire que, s’il était renvoyé dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, il encourrait un risque réel de subir les atteintes graves visées au paragraphe 2, et qui ne peut pas ou, compte tenu de ce risque, n’est pas disposé à se prévaloir de la protection de ce pays [...]

§ 2.      Sont considérées comme atteintes graves:

[...]

c)      les menaces graves contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international».

 

 Le litige au principal et la question préjudicielle

 

9        Le 21 février 2008, M. Diakité a introduit une première demande d’asile en Belgique en invoquant la répression et les faits de violence qu’il aurait subis dans son pays d’origine en raison de sa participation aux mouvements de protestation contre le pouvoir en place.

10      Le Commissaire général a refusé de reconnaître à M. Diakité la qualité de réfugié et de lui octroyer la protection subsidiaire. Cette double décision a été confirmée par le Conseil du contentieux des étrangers.

11      Sans avoir regagné son pays d’origine dans l’intervalle, M. Diakité a introduit, auprès des autorités belges, une seconde demande d’asile, le 15 juillet 2010.

12      Le 22 octobre 2010, le Commissaire général a pris une nouvelle décision de refus de reconnaissance du statut de réfugié et d’octroi de la protection subsidiaire. Le refus d’accorder la protection subsidiaire était motivé par le constat qu’il n’existe pas, en Guinée, de situation de violence aveugle ou de conflit armé au sens de l’article 48/4, paragraphe 2, de la loi du 15 décembre 1980.

13      Cette double décision a fait l’objet d’un recours devant le Conseil du contentieux des étrangers, lequel a confirmé, par un arrêt du 6 mai 2011, le double refus du Commissaire général.

14      Dans son pourvoi en cassation, introduit devant le Conseil d’État, M. Diakité critique l’arrêt du Conseil du contentieux des étrangers en ce que celui-ci se fonde sur la définition du conflit armé dégagée par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie pour constater que la condition de l’existence d’un conflit armé, requise par l’article 48/4, paragraphe 2, de la loi du 15 décembre 1980, n’est pas remplie.

15      Dans ce contexte, le Conseil d’État estime que, au vu de l’arrêt du 17 février 2009, Elgafaji (C‑465/07, Rec. p. I‑921), il ne peut être exclu que, comme le soutient M. Diakité, la notion de «conflit armé», au sens de l’article 15, sous c), de la directive, puisse être interprétée de façon autonome et revêtir une signification distincte de celle retenue dans la jurisprudence du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie.

16      Dans ces conditions, le Conseil d’État a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Faut-il interpréter l’article 15, sous c), de la directive [...], en ce sens que cette disposition offre uniquement une protection dans une situation de ‘conflit armé interne’ tel qu’interprétée par le droit international humanitaire, et en particulier en référence à l’article 3 commun aux quatre conventions de Genève [...]?

Si la notion de ‘conflit armé interne’ visée par l’article 15, sous c), de la directive [...] doit être interprétée de manière autonome par rapport à l’article 3 commun aux quatre conventions de Genève [...], quels sont dans ce cas les critères servant à apprécier l’existence d’un tel ‘conflit armé interne’?»

 

 Sur la question préjudicielle

 

17      Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 15, sous c), de la directive doit être interprété en ce sens que l’existence d’un conflit armé interne doit être appréciée sur la base des critères établis par le droit international humanitaire et, si tel n’est pas le cas, quels critères doivent être employés pour apprécier l’existence d’un tel conflit afin de déterminer si un ressortissant d’un pays tiers ou un apatride peut bénéficier de la protection subsidiaire.

18      À cet égard, il convient de rappeler que les trois types d’atteintes graves définies à l’article 15 de la directive constituent les conditions à remplir pour qu’une personne puisse être considérée comme susceptible de bénéficier de la protection subsidiaire, lorsque, conformément à l’article 2, sous e), de la directive, il existe des motifs sérieux et avérés de croire que le demandeur court un risque réel de subir de telles atteintes en cas de renvoi dans le pays d’origine concerné (arrêt Elgafaji, précité, point 31).

19      L’atteinte définie à l’article 15, sous c), de la directive est constituée par des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.

20      À cet égard, il importe de constater que le législateur de l’Union a employé l’expression «conflit armé interne ou international», qui diffère des notions qui sont à la base même du droit international humanitaire, ce dernier distinguant, d’une part, les «conflits armés internationaux» et, d’autre part, les «conflits armés ne présentant pas un caractère international».

21      Dans ces conditions, il doit être constaté que le législateur de l’Union a souhaité accorder la protection subsidiaire aux personnes concernées non seulement en cas de conflits armés internationaux et de conflits armés ne présentant pas un caractère international, tels que définis par le droit international humanitaire, mais, également, en cas de conflits armés internes, à condition que ces conflits soient caractérisés par le recours à une violence aveugle. Il n’est pas nécessaire, à cet égard, que soient présents tous les critères auxquels se réfèrent l’article 3 commun aux quatre conventions de Genève et l’article 1er, paragraphe 1, du protocole additionnel II, du 8 juin 1977, qui développe et complète cet article.

22      Par ailleurs, il convient de constater que le droit international humanitaire régit la conduite des conflits armés internationaux et ne présentant pas un caractère international, ce qui implique que l’existence d’un tel conflit constitue la condition d’application des règles qu’il établit (arrêt de la chambre d’appel du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie du 2 octobre 1995, Le Procureur c. Dusko Tadic alias «Dule», affaire no IT-94-1-AR72, point 67).

23      Si le droit international humanitaire vise, notamment, à fournir, dans la zone de conflit, une protection aux populations civiles en limitant les effets de la guerre sur les personnes et les biens, il ne prévoit pas, à la différence de l’article 2, sous e), de la directive, lu en combinaison avec l’article 15, sous c), de celle-ci, l’octroi d’une protection internationale à certains civils en dehors de la zone de conflit et du territoire des parties au conflit. Les définitions de la notion de conflit armé retenues en droit international humanitaire ne visent donc pas à identifier les situations dans lesquelles une telle protection serait nécessaire et devrait être accordée par les autorités compétentes des États membres.

24      D’une manière plus générale, il importe de souligner que, comme M. l’avocat général l’a relevé aux points 66 et 67 de ses conclusions, le droit international humanitaire et le régime de la protection subsidiaire prévu par la directive poursuivent des buts différents et instituent des mécanismes de protection clairement séparés.

25      Par ailleurs, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 70 de ses conclusions, certaines violations du droit international humanitaire donnent lieu à une responsabilité pénale individuelle. De ce fait, le droit international humanitaire entretient des relations très étroites avec le droit pénal international, alors qu’une telle relation est étrangère au mécanisme de la protection subsidiaire prévu par la directive.

26      Dès lors, sauf à méconnaître les domaines propres à chacun des deux régimes définis, respectivement, par le droit humanitaire international et à l’article 2, sous e), de la directive, lu en combinaison avec l’article 15, sous c), de celle-ci, la possibilité de bénéficier de ce dernier régime ne peut être subordonnée à la constatation que les conditions d’application du premier régime sont réunies.

27      Par conséquent, en l’absence de toute définition, dans la directive, de la notion de conflit armé interne, la détermination de la signification et de la portée de ces termes doit être établie, selon une jurisprudence constante de la Cour, conformément au sens habituel de ceux-ci en langage courant, tout en tenant compte du contexte dans lequel ils sont utilisés et des objectifs poursuivis par la réglementation dont ils font partie (arrêts du 22 décembre 2008, Wallentin-Hermann, C‑549/07, Rec. p. I‑11061, point 17, et du 22 novembre 2012, Probst, C‑119/12, point 20).

28      Dans son sens habituel en langage courant, la notion de conflit armé interne vise une situation dans laquelle les forces régulières d’un État affrontent un ou plusieurs groupes armés ou dans laquelle deux ou plusieurs groupes armés s’affrontent.

29      À cet égard, il convient de relever que, alors que, dans la proposition de la Commission ayant conduit à l’adoption de la directive [COM(2001) 510 final], la définition de l’atteinte grave figurant à l’article 15, sous c), de la directive prévoyait que les menaces contre la vie, la sécurité ou la liberté du demandeur pouvaient intervenir soit dans un conflit armé, soit dans des violations systématiques ou généralisées des droits de l’homme, le législateur de l’Union a décidé de ne retenir finalement que l’hypothèse de menaces contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.

30      En outre, il importe de rappeler que l’existence d’un conflit armé interne ne pourra conduire à l’octroi de la protection subsidiaire que dans la mesure où les affrontements entre les forces régulières d’un État et un ou plusieurs groupes armés ou entre deux ou plusieurs groupes armés seront exceptionnellement considérés comme créant des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne du demandeur de la protection subsidiaire, au sens de l’article 15, sous c), de la directive, parce que le degré de violence aveugle qui les caractérise atteint un niveau si élevé qu’il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu’un civil renvoyé dans le pays concerné ou, le cas échéant, dans la région concernée courrait, du seul fait de sa présence sur le territoire de ceux-ci, un risque réel de subir lesdites menaces (voir, en ce sens, arrêt Elgafaji, précité, point 43).

31      À cet égard, la Cour a précisé que plus le demandeur est éventuellement apte à démontrer qu’il est affecté spécifiquement en raison d’éléments propres à sa situation personnelle, moins sera élevé le degré de violence aveugle requis pour qu’il puisse bénéficier de la protection subsidiaire (arrêt Elgafaji, précité, point 39).

32      Dans ce contexte, il n’est pas nécessaire, lors de l’examen d’une demande de protection subsidiaire, de procéder à une appréciation spécifique de l’intensité de ces affrontements en vue de déterminer, indépendamment de l’évaluation du degré de violence qui en résulte, si la condition tenant à l’existence d’un conflit armé est satisfaite.

33      Par ailleurs, il ressort des considérants 5, 6 et 24 de la directive que les critères minimaux d’octroi de la protection subsidiaire doivent permettre de compléter la protection des réfugiés consacrée par la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, en identifiant les personnes qui ont réellement besoin de protection internationale et en leur offrant un statut approprié.

34      Par conséquent, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 92 de ses conclusions, le constat de l’existence d’un conflit armé ne doit pas être subordonné à un niveau déterminé d’organisation des forces armées en présence ou à une durée particulière du conflit, dès lors que ceux-ci suffisent pour que les affrontements auxquels ces forces armées se livrent engendrent le degré de violence mentionné au point 30 du présent arrêt, créant ainsi un réel besoin de protection internationale du demandeur qui court un risque réel de subir des menaces graves et individuelles contre sa vie ou sa personne.

35      Il s’ensuit qu’il convient de répondre à la question posée que l’article 15, sous c), de la directive doit être interprété en ce sens que l’existence d’un conflit armé interne doit être admise, aux fins de l’application de cette disposition, lorsque les forces régulières d’un État affrontent un ou plusieurs groupes armés ou lorsque deux ou plusieurs groupes armés s’affrontent, sans qu’il soit nécessaire que ce conflit puisse être qualifié de conflit armé ne présentant pas un caractère international au sens du droit international humanitaire et sans que l’intensité des affrontements armés, le niveau d’organisation des forces armées en présence ou la durée du conflit fasse l’objet d’une appréciation distincte de celle du degré de violence régnant sur le territoire concerné.

 

 Sur les dépens

 

36      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit:

L’article 15, sous c), de la directive 2004/83/CE du Conseil, du 29 avril 2004, concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts doit être interprété en ce sens que l’existence d’un conflit armé interne doit être admise, aux fins de l’application de cette disposition, lorsque les forces régulières d’un État affrontent un ou plusieurs groupes armés ou lorsque deux ou plusieurs groupes armés s’affrontent, sans qu’il soit nécessaire que ce conflit puisse être qualifié de conflit armé ne présentant pas un caractère international au sens du droit international humanitaire et sans que l’intensité des affrontements armés, le niveau d’organisation des forces armées en présence ou la durée du conflit fasse l’objet d’une appréciation distincte de celle du degré de violence régnant sur le territoire concerné.

Signatures


Langue de procédure: le français.

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