Rapport de la Commission européenne du 28 septembre 2011 sur l'application de la directive 2004/114/CE relative aux conditions d’admission des ressortissants de pays tiers à des fins d’études, d’échange d’élèves, de formation non rémunérée ou de volontariat
COM/2011/0587 final
I. INTRODUCTION
La directive 2004/114/CE du Conseil relative aux conditions d’admission des ressortissants de pays tiers à des fins d’études, d’échange d’élèves, de formation non rémunérée ou de volontariat (ci-après «la directive»)[1] était le troisième instrument législatif à être adopté dans le domaine de la migration légale à la suite du traité d’Amsterdam et des conclusions du Conseil européen de Tampere.
L’objectif global consiste à promouvoir l’Europe en tant que centre mondial d’excellence pour les études. Contribuant à cet effort, la directive vise à mettre en place un cadre juridique commun, permettant aux personnes qui ne sont pas des citoyens de l’Union européenne («ressortissants de pays tiers») d’entrer et de séjourner plus facilement dans l’UE en vue d’y suivre des études. L'existence d’un cadre législatif coordonné et transparent contribue à rendre l’UE plus visible, accessible et attrayante pour les étudiants de pays tiers, en tant que destination pour l'enseignement supérieur. De plus, la mobilité des étudiants favorise le développement économique mondial en promouvant la circulation des connaissances et des idées.
La directive prévoit également un ensemble de règles de base relatives aux conditions d’entrée et de séjour dans l’UE des élèves, des stagiaires non rémunérés et des volontaires. Ces formes de «migration temporaire» sont indépendantes de l’état du marché du travail dans l’État membre d’accueil. En les promouvant, la directive vise à encourager un «enrichissement réciproque» entre différents acteurs et «une meilleure compréhension entre les cultures». Les premières années d’enseignement exercent une influence fondamentale sur les valeurs, les attitudes, les aspirations et les connaissances des jeunes. Les stages et la formation professionnelle leur permettent d’acquérir des compétences importantes qui pourront les aider, eux et leurs employeurs, dans de futures situations professionnelles. L’année européenne du volontariat 2011 a souligné à quel point la participation à des activités volontaires peut être une source précieuse d’expériences de formation et d’échanges culturels. Cette participation aide les volontaires à acquérir de nouvelles compétences et promeut la solidarité et les valeurs démocratiques.
Le présent rapport satisfait à l’obligation de la Commission visée à l’article 21 de la directive. Il donne un aperçu de la manière dont la directive a été transposée et mise en œuvre par les États membres et recense les éventuels points problématiques. Il repose sur une étude réalisée pour la Commission[2] et d’autres sources, y compris des enquêtes ad hoc conduites par l'intermédiaire du réseau européen des migrations[3], des réclamations, des questions et des demandes envoyées par des particuliers et des discussions menées avec les États membres sur les questions pratiques découlant de l’application de la directive.
La directive a été adoptée le 13 décembre 2004. Le Danemark, l’Irlande et le Royaume-Uni ne sont pas liés par elle.
Les États membres ont eu la possibilité de réviser et de mettre à jour les informations factuelles fournies.
II. SUIVI ET TRANSPOSITION
En vertu de l’article 22 de la directive, les États membres devaient transposer la directive dans leur législation avant le 12 janvier 2007, et communiquer cette information à la Commission.
Entre 2006 et 2010, la Commission a organisé des réunions avec les États membres pour discuter de questions relatives à la mise en œuvre et à l’interprétation de la directive.
En 2007, la Commission a engagé des procédures d’infraction en application de l’article 258 (ex-article 226) du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à l’encontre de 14 États membres[4] pour défaut de transposition de la directive dans les délais prévus à cet effet ou dûment informé la Commission. Depuis lors, tous les États membres ont adopté des mesures de transposition, et les procédures d’infraction engagées pour non-communication ont été closes.
III. CONFORMITÉ DES MESURES DE TRANSPOSITION
3.1. Champ d’application personnel (article 3)
L’article 3 de la directive précise les catégories de ressortissants de pays tiers qui doivent et peuvent être couverts par les dispositions transposant la directive dans la législation des États membres. Ceux qui doivent être inclus sont les ressortissants de pays tiers demandant à être admis sur le territoire d’un État membre pour y étudier. Ces dispositions peuvent également s’appliquer aux ressortissants de pays tiers demandant à être admis en vue d’un échange d’élèves, d'une formation non rémunérée ou d'un volontariat.
Au total, 10 États membres[5] ont décidé d’appliquer la directive à ces trois catégories facultatives (élèves, stagiaires non rémunérés et volontaires), et 5 autres États membres[6] ont décidé de l’appliquer à une ou deux de ces catégories. Neuf États membres au total (AT, BE, DE, FI, LT, MT, NL, PL et SE) ont transposé uniquement les dispositions relatives aux étudiants.
Les États membres qui ont choisi d’appliquer la directive à l’une quelconque de ces trois catégories (autre que celle des étudiants) sont tenus de transposer les dispositions pertinentes de la directive — à moins que celles-ci ne soient laissées à l’appréciation de l’État membre. Cependant, il semble que les États membres aient parfois méconnu cette règle générale.
3.2. Dispositions plus favorables (article 4)
Quelques États membres ont conclu, avec des pays tiers, des accords bilatéraux qui renferment des dispositions plus favorables que celles de la directive, comme le prévoit l’article 4, paragraphe 1, point b).
En outre, en dehors du contexte des accords bilatéraux ou multilatéraux, l’article 4, paragraphe 2, autorise les États membres à adopter ou à maintenir des dispositions plus favorables que celles de la directive. Cependant, il semble que les États membres aient parfois mal interprété cette possibilité et n’aient pas tenu compte des dispositions obligatoires de la directive, comme l’obligation de conclure une convention de formation pour les stagiaires non rémunérés. Des dispositions plus favorables sont autorisées à condition qu’elles n'affaiblissent pas le niveau des droits déjà accordés aux ressortissants de pays tiers par la directive. Ces dispositions ne sauraient porter atteinte à l’objectif de la directive, qui consiste à garantir un certain niveau d’harmonisation des conditions d’admission et de séjour pour les étudiants de pays tiers, en vue de mettre en place un régime commun transparent au niveau de l’UE.
3.3. Conditions d’admission (articles 5, 6, 7, 9, 10 et 11)
- Conditions générales d’admission (article 6)
L’obligation de présenter un document de voyage en cours de validité visée à l’article 6, paragraphe 1, point a), a été intégrée dans la législation de l’ensemble des États membres, souvent (CY, EL, FR, HU, MT, NL, SE et SI) accompagnée de l’obligation supplémentaire — telle qu’autorisée par la directive — que la période de validité du document de voyage couvre au moins la durée prévue du séjour dans l’État membre d’accueil.
L’article 6, paragraphe 1, point b), exige une autorisation parentale pour le séjour envisagé d’un mineur. On ne sait pas exactement si cette obligation a été transposée en BG, IT et aux NL. En outre, IT et LV exigent des pièces justificatives attestant que le mineur est correctement pris en charge. En AT, BE et SE, l’obligation n’a pas été spécifiquement transposée[7].
En vertu de l’article 6, paragraphe 1, point c), un ressortissant d’un pays tiers doit disposer d’une assurance-maladie couvrant l’ensemble des risques contre lesquels les ressortissants de l’État membre concerné sont habituellement assurés dans ce dernier. On relève à cet égard plusieurs types de pratiques différentes dans les États membres concernés. Au lieu de l’assurance-maladie, BE demande aux ressortissants de pays tiers d’apporter la preuve qu’ils disposent de suffisamment de moyens pour couvrir les frais médicaux. Il est difficile d’établir avec certitude si cette assurance est requise en IT. En outre, BG, CZ[8], LU, PL, RO, SI et SK ne mentionnent pas précisément les risques contre lesquels les ressortissants d’un État membre sont habituellement assurés.
La quasi-totalité des États membres ont introduit l’obligation exposée à l’article 6, paragraphe 1, point d), selon laquelle un ressortissant de pays tiers ne doit pas être considéré comme une menace pour l’ordre public, la sécurité publique ou la santé publique . Il est difficile de savoir si cette obligation a été transposée en IT et de quelle façon.
BG, CY, CZ, EE, DE, HU, LU, NL, PL, SI et SK demandent d’apporter la preuve du paiement des droits exigés pour le traitement de la demande d’admission, comme le prévoit l’article 6, paragraphe 1, point e).
Tous les États membres n’ont pas transposé les dispositions de l’article 6, paragraphe 2, lequel exige d’eux qu’ils facilitent la procédure d’admission pour les ressortissants de pays tiers qui participent à des programmes de l’Union favorisant la mobilité à destination ou au sein de l’Union. BE, BG, EE, DE, IT et RO ne semblent pas avoir transposé cette disposition, et les autres États membres semblent se contenter de recommander une telle simplification plutôt que de la traduire en règles précises prévoyant (par exemple) des droits moins élevés ou des procédures plus rapides. La transposition de cette disposition importante reste donc insatisfaisante.
- Conditions particulières applicables aux étudiants (article 7)
En vertu de l’article 7, paragraphe 1, point b), les États membres sont tenus de rendre public le montant minimum de ressources mensuelles dont devra disposer un étudiant de pays tiers pour couvrir ses frais de subsistance, d’études et de retour. Cette exigence est conforme à l’obligation plus générale qui consiste à informer les ressortissants de pays tiers des règles applicables à l’admission des étudiants, afin de garantir une transparence et une sécurité juridique aux étudiants potentiels et de les encourager ainsi à étudier au sein de l’UE. Des problèmes de transposition sont constatés à cet égard dans un certain nombre d’États membres. En HU, les ressources nécessaires sont évaluées au cas par cas. Pour de nombreux autres États membres (BE, BG, CY, EL, LT, MT, NL, PL, PT, RO et SK), rien ne garantit que les moyens de publication soient suffisants: par exemple, lorsque l’information figure uniquement dans des textes officiels auxquels les ressortissants de pays tiers ne peuvent pas facilement consulter ou comprendre.
Le montant minimum mentionné à l’article 7, paragraphe 1, point b), varie considérablement d’un État membre à l’autre, de 120 euros environ par mois en BG à 795 euros aux NL en 2009. Il est généralement calculé sur la base du minimum vital ou des salaires minimaux dans le pays concerné, ou selon le montant des bourses accordées aux étudiants nationaux. Les types de preuves de ressources suffisantes varient également considérablement d’un pays à l’autre et peuvent comprendre, par exemple, des bourses (voir le considérant 13) ou une preuve du revenu des parents. Lorsqu’ils fixent un seuil de ressources ou qu’ils édictent des règles concernant les types de preuves, les États membres doivent dûment tenir compte du principe de proportionnalité et d’efficacité de la directive.
L’article 7, paragraphe 1, point c), autorise les États membres à demander d’apporter la preuve que le candidat possède une connaissance suffisante de la langue du programme d’études qu’il suivra. EE, DE, IT et MT font usage de cette possibilité. Dans de nombreux États membres, on considère que les connaissances linguistiques sont prouvées par le fait que le demandeur a été accepté par un établissement d’enseignement supérieur.
AT, BG, CY, EL, LT, MT, PL, PT et RO ont transposé l’article 7, paragraphe 1, point d), en vertu duquel le demandeur doit apporter la preuve du paiement des droits d’inscription exigés par l’établissement. Cependant, d’autres États membres peuvent également imposer implicitement cette obligation en exigeant une confirmation de l'inscription du demandeur dans un établissement d’enseignement.
Seuls 11 États membres (CY, FR, EL, HU, IT, LV, PL, PT, RO, SE et SK) ont choisi, en application de l’article 7, paragraphe 2, de ne pas demander aux étudiants de pays tiers de souscrire une assurance-maladie par ailleurs s’ils bénéficient automatiquement d’une telle assurance-maladie du fait de leur inscription auprès d’un établissement.
- Conditions particulières applicables aux élèves (article 9)
Selon les informations disponibles, 12 États membres[9] ont inclus les élèves dans leur législation. Ces 12 pays, à l’exception de BG, semblent avoir transposé l’obligation d’apporter la preuve de l’admission dans un établissement d’enseignement secondaire [article 9, paragraphe 1, point b)]. Cependant, seuls CY, ES, IT, LU, PT, SI et RO ont explicitement transposé l’obligation d’apporter la preuve d'une participation à un programme reconnu d’échange d’élèves [article 9, paragraphe 1, point c)].
L’article 9, paragraphe 1, point d), demande d’apporter la preuve que l’organisation d’échanges d’élèves se porte garante de l’élève, et l’article 9, paragraphe 1, point e), exige que l’élève soit accueilli par une famille répondant à certaines conditions. Ni BG ni SI n’ont démontré qu’ils avaient transposé l’une ou l’autre de ces obligations. ES et PT acceptent qu’un élève soit également accueilli dans un environnement institutionnel.
BG, CZ, ES et SI n’ont pas explicitement transposé les dispositions de l’article 9, paragraphe 1, point a), relatives à l’âge minimum et maximum des élèves, mais cela est toléré en raison de dispositions plus favorables.
Comme le prévoit l’article 9, paragraphe 2, CY applique la réciprocité et admet des ressortissants de pays tiers dans ses programmes d’échange d’élèves uniquement s’ils sont originaires de pays qui offrent la même possibilité aux élèves de CY.
- Conditions particulières applicables aux stagiaires non rémunérés (article 10)
Au total, 12 États membres[10] ont inclus les stagiaires non rémunérés dans le champ d’application de leur législation mettant en œuvre la directive.
IT n’a pas transposé l’obligation concernant l'établissement d'une convention de formation [article 10, point a)] ni l’obligation d’apporter la preuve de ressources suffisantes [article 10, point b)]. Des problèmes de transposition semblables se posent en ce qui concerne l’obligation de rendre public le montant minimum de ressources mensuelles visée à l’article 7, point b).
FR et LV semblent être les seuls États membres à avoir fixé un «montant minimum» précis de «ressources mensuelles» requis pour les stagiaires non rémunérés: les autres États membres fixent le même montant que pour les étudiants.
Seuls EE et RO demandent à l’étudiant de pays tiers de suivre une formation linguistique de base, comme le permet l’article 10, point c).
La législation du LU prévoit que le stage doit faire obligatoirement partie d’un programme universitaire. CY a stipulé que les secteurs d’emploi pour le stagiaire non rémunéré doivent être déterminés et publiés par le ministère du travail et de la sécurité sociale.
- Conditions particulières applicables aux volontaires (article 11)
Sur les 12 États membres[11] qui ont inclus les volontaires dans le champ d’application de leur législation, CY, CZ, EL, HU, IT, LU, PT, RO, et SK ont choisi de fixer des conditions d’âge, comme prévu à l’article 11, point a).
Ces 12 États membres ont transposé l’obligation de produire une convention entre le volontaire et l’organisation chargée du programme de volontariat, telle qu’énoncée à l’article 11, point b). Cependant, les législations ne comprennent pas toujours tous les éléments de cette convention tels que décrits dans la directive (description des tâches, horaire de travail, ressources, etc.). Notamment, la législation du PT ne contient aucun détail, et en EL et au LU, seuls quelques-uns de ces détails sont énumérés.
Aux termes de l’article 11, point c), le demandeur doit apporter la preuve que l’organisation chargée du programme de volontariat a souscrit une assurance responsabilité civile et se porte entièrement garante des volontaires pendant toute la durée de leur séjour, en particulier de leurs frais de subsistance, de santé et de retour. Toujours est-il que PT n’a pas transposé cette obligation. Dans certains États membres, on ne sait pas exactement dans quelle mesure l’organisation se porte garante des trois éléments mentionnés dans la directive.
CY, RO et SK ont fait usage de la possibilité prévue à l’article 11, point d), de faire suivre au volontaire d’un pays tiers une initiation à la langue, à l’histoire et aux structures politiques et sociales de leur pays.
3.4. Mobilité des étudiants (article 8)
L’article 8 énonce les règles applicables en ce qui concerne la question cruciale de la mobilité des ressortissants de pays tiers déjà admis en qualité d’étudiants dans un premier État membre et qui demandent à poursuivre leurs études dans un second État membre.
La plupart des États membres ont indiqué tenir compte du début du cycle d’études lors du traitement de la demande, par exemple au moyen de procédures accélérées (NL) ou de la délivrance d’une autorisation temporaire de séjour sur leur territoire dans l’attente d’une décision définitive sur la demande (BG, DE). Cependant, il ressort des questions posées à la Commission que des règles supplémentaires concernant les visas empêchent bien souvent les étudiants de pays tiers d’exercer réellement leur droit à la mobilité.
En outre, compte tenu de dispositions plus favorables, les États membres appliquent les mêmes conditions et procédures générales que celles énoncées aux articles 6 et 7 de la directive sans appliquer les autres dispositions visées à l’article 8, paragraphe 1, points b) et c)[12].
Bien que la dérogation prévue à l’article 8, paragraphe 2, soit obligatoire pour les États membres qui ont transposé l’article 8, paragraphe 1, point c), PT et SK n’en font pas mention.
Le premier État membre doit fournir au second État membre les renseignements relatifs au séjour de l’étudiant sur son territoire [article 8, paragraphe 3)], mais cette obligation a été transposée uniquement par AT, CY, DE, EL, ES, FI, IT, LV, MT, PL, PT, SE et SK. D’après les informations recueillies, il s’avère que les États membres font rarement usage de la possibilité de demander de tels renseignements.
3.5. Titres de séjour (articles 12, 13, 14 et 15)
- Titre de séjour délivré aux étudiants (article 12)
En vertu de l’article 12, paragraphe 1, un titre de séjour est délivré aux étudiants de pays tiers qui satisfont aux conditions visées aux articles 6 et 7 et ce titre est renouvelé s’ils continuent de satisfaire à ces conditions. La plupart des législations des États membres ne prévoient pas explicitement l’obligation de délivrer le titre et de le renouveler dans ces conditions. Il ressort clairement des réclamations et des questions adressées à la Commission que, même si les ressortissants de pays tiers respectent toutes les dispositions pertinentes de la directive, l’exercice effectif de leur droit de se voir délivrer un titre est souvent entravé, voire invalidé par les exigences supplémentaires en matière de visas. Les États membres qui ne demandent pas de visa et qui se basent uniquement sur le titre de séjour sont peu nombreux.
L’article 12, paragraphe 1, définit également la durée de validité du titre de séjour délivré aux étudiants. La plupart des États membres prévoient une durée maximale d’un an (et renouvelable); dans d’autres, cependant, le titre peut être valable 3, voire 5 ans (par exemple en DE, HU et SK).
L’article 12, paragraphe 2, précise les raisons facultatives particulières qui permettent de refuser et de retirer le titre, les raisons générales étant exposées à l’article 16. Au titre de l’article 12, paragraphe 2, point a), les États membres peuvent refuser de renouveler, ou retirer un titre de séjour si l’étudiant ne respecte pas les conditions d’accès à des activités économiques en vertu de l’article 17. Cette disposition a été transposée par treize États membres[13]. Afin de contrôler ce type d’abus, d’autres États membres invoquent les conditions générales de refus exposées à l’article 16.
Aux termes de l’article 12, paragraphe 2, point b), les États membres peuvent refuser de renouveler, ou retirer un titre de séjour si l’étudiant progresse insuffisamment dans ses études. Cette disposition a été explicitement transposée dans 12 États membres.[14] Dans certains autres États membres, le même résultat est en pratique obtenu au moyen de la désinscription, par leurs établissements d’enseignement, des étudiants dont les résultats ne sont pas satisfaisants. Par conséquent, ces États membres refuseront de renouveler le titre de l’étudiant sur le fondement de l’article 16, au motif qu’il ne remplira plus les conditions d’admission.
- Titre de séjour délivré aux élèves (article 13)
Au total, 12 États membres ont inclus les élèves dans le champ d’application de leur législation mettant en œuvre la directive, et 8 d’entre eux (CY, CZ, EE, LV, LU, PT, SI et SK) ont limité la durée du titre de séjour à un an, comme le prévoit explicitement l’article 13.
La directive ne traite pas spécifiquement de la durée globale du séjour d’un élève, mais certains États membres (ES, HU, SI, PT et RO) ont indiqué qu’ils permettaient aux élèves de séjourner sur leur territoire pendant plus d’un an.
- Titre de séjour délivré aux stagiaires non rémunérés (article 14)
Au total, 12 États membres ont inclus les stagiaires non rémunérés dans le champ d’application de leur législation, et 6 d’entre eux (CY, CZ, LU, PT, RO et SI) ont limité la durée du titre de séjour à un an, renouvelable dans des cas exceptionnels, comme le prévoit la directive. La durée des titres de séjour a été limitée notamment en FR où les stagiaires en formation professionnelle peuvent séjourner pendant une durée maximale de six mois et en RO où le renouvellement du titre de séjour ne peut dépasser six mois. Les dispositions concernant ce point ne sont pas claires en BG et en IT.
En revanche, EE, ES et SK adoptent une approche plus souple que celle prévue dans la directive: ils permettent aux stagiaires de séjourner plus longtemps sur leur territoire (jusqu’à trois ans en SK), en fonction de la durée du programme, sans faire mention de cas exceptionnels.
- Titre de séjour délivré aux volontaires (article 15)
Au total, 12 États membres ont inclus les volontaires dans le champ d’application de leur législation. La législation dans 8 de ces pays (CY, EL, IT, LU, PT, RO, SI et SK) prévoit qu’un titre de séjour est délivré aux volontaires pour une durée maximale d’un an à moins que, dans des cas exceptionnels, le programme de volontariat dure plus longtemps, auquel cas le titre est délivré pour la durée du programme. Ces dispositions sont conformes à l’article 15 de la directive.
HU ne prévoit aucune dérogation à la règle d’un an.
En revanche, EE, ES et CZ appliquent des règles plus souples, en vertu desquelles la durée du titre de séjour doit correspondre à la durée du programme de volontariat.
3.6. Retrait ou non-renouvellement du titre de séjour (article 16)
Contrairement à l’article 12, qui prévoit les raisons de refus et de retrait en ce qui concerne les seuls étudiants, l’article 16 s’applique à toutes les catégories de ressortissants de pays tiers couverts par la directive. Il énonce les trois raisons possibles de refus et de retrait d’un titre de séjour délivré sur la base de la directive: en cas de fraude; lorsque le titulaire ne remplit pas ou ne remplit plus les conditions d’entrée et de séjour; pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique. Aucun problème de transposition n’a été relevé dans ce domaine.
3.7. Activités économiques exercées par des étudiants (article 17)
Tous les États membres ont conféré aux étudiants le droit à l’emploi, conformément à l’article 17 qui prévoit qu'«en dehors du temps dévolu aux études (…) les étudiants sont autorisés à être employés». Cependant, seuls 12 États membres ont décidé de conférer aux étudiants le droit d'exercer une activité indépendante (AT, BE, CZ, DE, EE, ES, HU, IT, LT, LV, PL et SE).
En vertu de l’article 17, paragraphe 1, les États membres peuvent tenir compte de la situation du marché du travail sur leur territoire, comme l’ont fait CY, MT et RO. En outre, NL, DE et AT procèdent à un examen du marché du travail lorsque le temps de travail dépasse un certain seuil[15]. Cependant, il convient d’examiner de près la conformité des législations des États membres avec la directive 2004/114/CE sur ce point. Les étudiants ressortissants de pays tiers ne doivent pas être considérés comme des travailleurs normaux. Leur accès à l’emploi est déjà limité sous l'angle des heures de travail, et si la situation du marché de l'emploi est invoquée de façon systématique, dans la pratique les étudiants peuvent se retrouver totalement exclus de ce marché. Cela porterait atteinte à l’objectif de la directive (voir le considérant 18)[16].
Une autorisation préalable, généralement un permis de travail, doit faire l’objet d’une demande séparée en AT, BE, BG, CY, CZ, EE, EL, ES, LT, MT, NL, RO et SI, comme le permet l’article 17, paragraphe 1.
Conformément à l’article 17, paragraphe 2, de nombreux États membres ont fixé un nombre maximal d’heures de travail par semaine ou de jours par mois/an durant lesquels les étudiants peuvent travailler, allant de 10 heures (la durée minimale requise par la directive) à 30 heures par semaine. CZ, EE, PL, PT, SK ne limitent pas le nombre d’heures de travail mais ont mis en place des restrictions d’ordre plus général, en invoquant généralement le principe selon lequel l’emploi ne doit pas empiéter sur l’objectif premier du séjour du ressortissant de pays tiers, à savoir les études.
Quatre États membres limitent l’accès à l’emploi durant la première année du séjour. Les limitations sont comprises entre six mois (CY) et un an (DE[17], LT, LU[18] et MT), comme le permet l’article 17, paragraphe 3.
Conformément à l’article 17, paragraphe 4, BG, CZ, DE, EE, EL, FI, FR, HU, LT, LU, NL, PT et RO ont instauré des obligations de déclaration. En raison d’une législation générale dans les États membres sur l’immigration ou l’emploi, ces obligations s’appliquent généralement aux employeurs.
3.8. Procédure (articles 18 et 19)
- Garanties procédurales et transparence (article 18)
L’article 18 fait référence aux principes des garanties procédurales et de la transparence qui s’appliquent aux décisions concernant une demande. Il s'agit du délai de traitement de la demande, du droit du demandeur d’être informé et du droit d’exercer un recours juridictionnel contre la décision. La directive couvre l’ensemble de la procédure d’admission des étudiants qui sont ressortissants de pays tiers. Ses dispositions sur les garanties procédurales et la transparence s’appliquent donc également aux visas nationaux de long séjour (s’ils sont exigés), étant donné qu’un visa permet à une personne d’entrer dans l’État membre concerné et que l’étudiant potentiel doit par conséquent faire une demande de visa lorsqu’il souhaite obtenir un titre de séjour.
Dans la plupart des États membres, la législation générale sur l’immigration ou les procédures administratives prévoient déjà les garanties procédurales requises. En outre, certains États membres ont mis en place des mesures pour s’assurer que le demandeur puisse commencer le cycle d’études, la formation ou le programme à temps, et que les délais de traitement des demandes soient publiés. Cependant, il ressort des nombreuses réclamations reçues par la Commission que, dans la pratique, les procédures sont souvent longues et le délai incertain. Le délai de traitement des demandes est compris entre 7 jours ouvrables et 6 mois[19]. Aucun délai précis n’est fixé en BE, CY, DE, FI ou SE.
En outre, d’après les nombreuses réclamations et questions portées à l’attention de la Commission, il s’avère que les règles des États membres en ce qui concerne les visas annulent souvent les garanties de transparence requises par la directive.
Les législations en BG et en IT ne font aucune référence à l’article 18, paragraphe 3, relatif aux procédures de notification ni à l’article 18, paragraphe 4, donnant au demandeur le droit d’exercer un recours juridictionnel contre un rejet .
- Procédure accélérée de délivrance de titres de séjour ou de visas aux étudiants et aux élèves (article 19)
L’article 19 de la directive prévoit la mise en place d’une procédure accélérée d’admission, convenue entre les autorités des États membres et leurs établissements d’enseignement supérieur. Cette disposition a été transposée en FR, en EL, aux NL et en PL.
3.9 Droits (article 20)
La législation de 19 États membres[20] prévoit le paiement de droits, qui sont compris entre 23 euros à MT et 433 euros aux NL. Bien que la directive autorise explicitement les États membres à fixer des droits, cela ne leur donne pas pour autant carte blanche. Des droits ne peuvent pas être fixés à des fins autres que le financement du traitement de la demande, comme indiqué à l’article 19, et ils ne doivent pas être fixés à un niveau qui pourrait rendre la directive inefficace. À cet égard, l'imposition de droits élevés, comme aux NL, soulève des questions de transposition.
3.10. Autres droits (article 24)
L’article 24 dispose que les États membres sont libres d’accorder d’autres droits aux étudiants ressortissants de pays tiers, au-delà de ceux prévus dans la directive, quelle que soit la durée du séjour dans l’État membre d’accueil. Dans ce sens, la législation en LT prévoit que l’acquisition d’autres droits est indépendante de la durée du séjour de l’étudiant dans le pays; PT indique accorder les mêmes droits économiques, sociaux et civils aux étudiants ressortissants de pays tiers qu’à ses propres ressortissants; ES indique leur accorder des droits en matière de sécurité sociale aux mêmes conditions que les ressortissants espagnols.
IV. CONCLUSIONS
Un objectif fondamental de la politique d’immigration de l’UE est d'attirer les étudiants ressortissants de pays tiers dans l’UE, ainsi qu'il a été souligné une fois de plus dans le cadre du programme de Stockholm. En 2009, plus de 200 000 ressortissants de pays tiers sont entrés dans l’UE[21] aux fins de cette directive. Celle-ci contribue de manière décisive à l’enrichissement réciproque des migrants concernés, de leur pays d’origine et de l’État membre d’accueil.
Les États membres accordent une importance accrue à l’internationalisation de leurs systèmes nationaux d’éducation et de formation, comme en témoignent leurs stratégies et leurs investissements dans de nouveaux instruments, tels que de nouveaux programmes de mobilité, des dialogues de fond avec les pays tiers et de nouvelles formes de coopération universitaire. Par ailleurs, les États membres axent davantage leurs efforts sur les activités de promotion et de marketing, reflétant ainsi la prise de conscience croissante de l’existence d'un marché international concurrentiel de l’éducation.
L’UE mène également en parallèle des actions extérieures, axées sur la promotion, le soutien financier ou les dialogues politiques sur la mobilité des ressortissants de pays tiers, et plus particulièrement des étudiants. Outre qu'elle offre des possibilités aux migrants eux-mêmes, l’inclusion d’une dimension internationale dans différents aspects et à différents stades de l’éducation et/ou de la formation présente des avantages considérables pour l’UE, ses citoyens et les marchés du travail. La migration joue un rôle dans le contexte de la mondialisation et l’UE se doit d’être une destination attrayante pour les ressortissants de pays tiers qui envisagent d’étudier, de suivre une formation ou de participer à un programme de volontariat à l’étranger.
Cependant, le rapport laisse entendre que le potentiel de cet instrument européen n’est pas pleinement exploité. En particulier, le niveau d’harmonisation atteint par la directive, adoptée selon la règle de l’unanimité, est plutôt faible, étant donné que seules quelques dispositions de la directive sont juridiquement contraignantes et que de nombreuses autres n'imposent aucune obligation spécifique aux États membres.
V. MESURES À PRENDRE
Afin de garantir une transposition et une mise en œuvre correctes de la directive dans l’ensemble de l’UE, la Commission utilisera pleinement les compétences qui lui sont conférées en vertu du traité et engagera des procédures d’infraction si nécessaire.
La Commission continuera également de travailler sur le plan technique avec les États membres. Le comité de contact compétent continuera de recenser les difficultés et facilitera les échanges de vues sur l’interprétation de la directive. Certains aspects juridiques et techniques pourraient être davantage étudiés et précisés, comme les dispositions plus favorables, l’assurance-maladie, la publication d’informations concernant les étudiants, la mobilité des étudiants.
La Commission entend offrir des informations et une assistance, tant aux États membres qu’aux ressortissants de pays tiers, en utilisant l'internet au mieux, principalement au moyen du futur portail sur l’immigration.
Bien que la priorité consiste à garantir la bonne mise en œuvre de la directive par les États membres, le rapport met également en évidence la nécessité impérieuse de modifier la directive, notamment en ce qui concerne les aspects suivants: renforcement des garanties procédurales (délais spécifiques impartis pour le traitement des demandes, obligation pour les États membres de motiver leurs refus); renforcement des clauses de mobilité; encouragement des synergies avec les programmes européens qui facilitent la mobilité des ressortissants de pays tiers au sein de l’UE; amélioration du niveau d’harmonisation en ce qui concerne les volontaires, les stagiaires non rémunérés et les élèves, en vue d’accélérer l’élaboration d’un cadre juridique européen global dans le domaine de l’éducation, de la formation et des échanges culturels avec les pays tiers.
Enfin, le fait de permettre aux ressortissants de pays tiers d’acquérir des compétences et des connaissances grâce à une période de formation en Europe favorise la «circulation des cerveaux» et la coopération avec les pays tiers dans le domaine du capital humain et de l’emploi, ce qui profite à la fois aux pays d’origine et aux pays d’accueil. Par conséquent, sans empiéter sur la capacité des États membres à déterminer le volume des migrations, la question de l’accès à l’emploi pour les étudiants ressortissants de pays tiers à la fin de leurs études pourrait être spécifiquement examinée, étant donné qu’il semble s’agir d’un élément décisif dans leur choix d’un pays de destination et d’une question d’intérêt commun dans le contexte du recul de la population en âge de travailler et d’un besoin mondial de travailleurs hautement qualifiés.
[1] JO L 375 du 23.12.2004, p. 12.
[2] Étude financée par la Commission et réalisée par GHK.
[3] Voir notamment les questions ad hoc n° 54, 73, 101, 273, 289 et 313.
[4] CY, DE, EE, EL, ES, FI, FR, IT, LU, MT, PL, PT, RO, SK.
[5] CY, CZ, EE, ES, IT, LU, PT, RO, SI et SK.
[6] BG: stagiaires non rémunérés et élèves (projet d’acte législatif); EL: volontaires; FR: stagiaires non rémunérés; HU: élèves et volontaires, LV: élèves.
[7] Ces États membres n’ont mis en œuvre que les parties de la directive relatives aux étudiants, lesquels sont souvent majeurs.
[8] En CZ, cela concerne uniquement la durée initiale du séjour précédant le renouvellement du titre de séjour.
[9] BG, CY, CZ, EE, ES, IT, LU, LV, PT, RO, SI et SK.
[10] BG (projet d’acte législatif), CY, CZ, EE, ES, FR, IT, LU, PT, RO, SI et SK.
[11] CY, CZ, EE, EL, ES, HU, IT, LU, PT, RO, SI et SK.
[12] AT, BE, BG, CZ, FR, HU, LV, LT, NL, PT, RO, SI et SE n’appliquent pas l’article 8, paragraphe 1, point b), et AT, BE, CZ, EE, ES, FR, HU, LT, NL, PL, RO, SI et SE n’appliquent pas l’article 8, paragraphe 1, point c).
[13] BE, CY, CZ, DE, EE, EL, FR, LT, LU, NL, PT, SI et SK.
[14] AT, BE, CY, DE, EL, ES, FR, LT, PL, PT, SE et SK.
[15] Dix heures par semaine aux NL; entre 10 et 20 en AT, en fonction du niveau d’études; 90 journées complètes par an en DE.
[16] La Commission a saisi la Cour de justice de la question de la législation de l'AT sur ce point; cf. communiqué de presse IP/10/1230 de la Commission du 30 septembre 2010. Entre-temps, AT a mis sa législation en conformité avec la directive.
[17] La limitation s’applique uniquement aux étudiants qui suivent un programme de préparation.
[18] La limitation s’applique uniquement aux étudiants de premier cycle.
[19] Les délais sont de 7 jours en ES, 15 jours ouvrables en HU, 30 jours en LV, 2,5 mois en PL, RO, SI et SK; 2 mois en CZ, en EL, au PT et en EE; 3 mois au LU; 4 mois en FR.
[20] AT, BE, BG, CY, CZ, DE, EE, EL, ES, FI, FR, HU, IT, LV, PL, PT, SE, SI et SK.
[21] Les données concernent uniquement les 24 États membres qui sont liés par la directive. En valeur nominale, les pays ayant accueilli le plus grand nombre de ressortissants de pays tiers venus pour y bénéficier d'un enseignement ou y étudier en 2009 sont la France (53 563), l’Italie (32 634), l’Allemagne (31 345), l’Espagne (22 068) et la Suède (13 968). En moyenne, la grande majorité des titres de séjour délivrés dans les États membres aux fins de la directive concernent des étudiants. Source: Eurostat.