Communication de la Commission européenne du 3 juin 2006 des régions sur l'immigration, l'intégration et l'emploi
COM/2003/0336 final
TABLE DES MATIERES
Introduction
1. Le cadre actuel de l'intégration dans l'UE
1.1 Tampere et le cadre législatif au niveau de l'UE
1.2 Mesures prises par l'UE pour soutenir l'intégration, l'emploi et la cohésion sociale
1.3 Approches nationales de l'intégration
2. Le défi économique et démographique: une nouvelle dimension
2.1 Structure des courants d'immigration dans l'UE
2.2 Le rôle économique de l'immigration et son incidence sur l'emploi
2.3 L'impact de l'évolution démographique sur l'emploi et la croissance économique
2.4 Les perspectives en matière d'emploi et le potentiel de l'immigration
2.5 L'immigration est-elle une solution à l'évolution démographique ?
3. Le défi de l'intégration: une approche holistique
3.1 Définition et champ d'action
3.2 Nécessité d'une approche holistique
3.3 Principaux éléments des politiques globales d'intégration
3.4 Principaux acteurs d'une politique d'intégration holistique
3.5 Tenir compte des besoins des groupes spécifiques de migrants dans la politique d'intégration
3.6 Résoudre le problème des migrants clandestins
4. Vers de nouveaux progrès: orientations et priorités stratégiques
4.1 Consolider le cadre juridique
4.2 Renforcer la politique de coordination
4.3 Citoyenneté civique et nationalité: outils visant à faciliter l'intégration
4.4 La stratégie européenne pour l'emploi (SEE)
4.5 Le processus d'inclusion sociale
4.6 Cohésion économique et sociale
4.7 Lutter contre la discrimination
4.8 Coopération dans le domaine de l'éducation
4.9 Approfondir le dialogue avec les pays tiers
4.10 Augmenter le soutien financier de l'UE à l'intégration
4.11 Mieux connaître le phénomène de la migration
5. Conclusions
Annexe 1: Rapport de synthèse sur les politiques nationales d'intégration
Annexe 2: Annexes statistiques
INTRODUCTION
L'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, en mai 1999, et la réunion spéciale que le Conseil européen a tenue à Tampere cinq mois plus tard ont marqué un tournant dans la résolution de l'Union européenne de conjuguer les efforts dans les domaines de la justice et des affaires intérieures, en particulier dans ceux de l'immigration et de l'asile. Dans les conclusions qu'il a adoptées à Tampere le 16 octobre 1999 [1], le Conseil européen a non seulement réaffirmé sa détermination à exploiter pleinement les possibilités offertes par les nouvelles dispositions du traité dans ces domaines, mais également formulé des orientations très précises quant aux politiques à mettre en oeuvre en vue d'une politique européenne commune en matière d'asile et de migration composée de quatre volets clairement définis, à savoir: un partenariat avec les pays d'origine, un régime d'asile européen commun, un traitement équitable pour les ressortissants de pays tiers et la gestion des flux migratoires.
[1] Conclusions de la présidence, Conseil européen de Tampere des 15 et 16 octobre 1999 (SN 200/99).
En novembre 2000, la Commission a publié une importante communication au Parlement européen et au Conseil sur la politique d'immigration [2], exposant la manière dont elle entendait traduire ces orientations dans les faits. Des actions ont été menées depuis dans les quatre domaines retenus par le Conseil européen. Pour tous ces volets sauf un (à savoir les aspects liés à l'intégration qui sont mentionnés dans la section des conclusions de Tampere consacrée au traitement équitable des ressortissants de pays tiers), la Commission a soumis les propositions et les documents d'orientation nécessaires. En passant rapidement en revue, dans un seul et même document, ce qui a déjà été accompli afin de promouvoir une meilleure intégration, d'une part, et les propositions de mesures complémentaires, d'autre part, la présente communication a pour objet de combler cette lacune et de répondre ainsi au voeu formulé par le Conseil «Justice et affaires intérieures» d'octobre 2002 [3].
[2] Communication sur une politique communautaire en matière d'immigration (COM(2000) 757) du 22 novembre 2000.
[3] Conclusions adoptées les 14 et 15 octobre 2002 par le Conseil «Justice et affaires intérieures».
Elle tient compte, en outre, d'événements marquants qui se sont produits depuis Tampere, dont le lancement de la stratégie de Lisbonne, en mars 2000, lorsque l'Union s'est fixé comme nouvel objectif pour la décennie à venir, de devenir l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale. La contribution que les immigrants en séjour régulier pouvaient apporter à la réalisation des objectifs tracés à Lisbonne avait déjà été soulignée dans la communication de la Commission de novembre 2000. Cet aspect de leur intégration est d'autant plus important et d'actualité que les conséquences économiques et sociales du vieillissement de la population s'accentuent. L'accès des immigrants et des réfugiés au marché de l'emploi dans l'UE constitue une composante essentielle du processus d'intégration et contribue par ailleurs, de façon plus générale, au succès de la stratégie de Lisbonne. C'est ce qu'ont souligné, en 2002 et 2003, les rapports de la Commission au Conseil européen de printemps [4] et ce que le Conseil du printemps 2003 a explicitement reconnu. Il faut également tenir compte des causes profondes à l'origine des flux migratoires et de la nécessité de renforcer les liens entre l'UE et les pays d'origine, thèmes qui ont fait l'objet d'une communication de la Commission sur les migrations et le développement [5]. Dans ces conditions, la présente communication:
[4] Dans son rapport du printemps 2002, la Commission a annoncé son intention d'analyser les interactions entre la politique de l'immigration, la politique de l'emploi et la politique sociale et de faire rapport à cet égard en 2003. Dans son rapport du printemps 2003, elle a fait référence à la nécessité «d'adopter une nouvelle approche de l'immigration afin de pouvoir maintenir des taux d'emploi et d'activité élevés au cours des prochaines décennies. À cet égard, toute démarche doit avoir pour but une meilleure intégration des travailleurs migrants - qui sont souvent aptes à apporter une contribution substantielle à l'entreprenariat - dans la société, tout en tenant compte des conséquences d'une telle immigration pour leur pays d'origine» - «Opter pour la croissance: connaissance, innovation et emploi dans une société fondée sur la cohésion - Rapport au Conseil européen de printemps du 21 mars 2003 sur la stratégie de Lisbonne pour le renouveau économique, social et environnemental» (COM(2003) 5 du 14 janvier 2003).
[5] Communication intitulée «L'intégration de la politique des migrations dans les relations de l'Union européenne avec les pays tiers» (COM(2002) 703 du 3.12.2002)
* s'inscrit dans le prolongement de Tampere en passant en revue les pratiques actuelles et l'expérience acquise en matière de politique d'intégration, tant au niveau national qu'à celui de l'UE;
* examine le rôle que joue l'immigration par rapport aux objectifs de Lisbonne, dans le contexte d'un vieillissement démographique, et
* sur cette base, trace des orientations et définit des actions prioritaires, à prendre notamment au niveau de l'UE, afin de favoriser l'intégration des immigrants.
1. LE CADRE ACTUEL DE L'INTEGRATION DANS L'UE
Les modifications qui ont été apportées récemment à la législation nationale sur l'immigration dans plusieurs États membres, dans un climat général de craintes quant à la sécurité et pour répondre au besoin d'une plus grande cohésion sociale, ont déjà relancé le débat sur les stratégies d'intégration des migrants. Pendant la présidence danoise, une conférence, qui s'est tenue à Copenhague en juillet 2002, a été consacrée à l'intégration dans le marché du travail [6]. Une réunion a ensuite eu lieu à Bruxelles, en septembre, à l'invitation du Comité économique et social européen et en coopération avec la Commission, sur le thème «Immigration: le rôle de la société civile dans l'intégration», l'avis du CESE sur la question ayant servi de base de discussion [7]. Ces questions ont à nouveau été abordées lors d'une conférence sur la gestion des flux migratoires organisée à Athènes, les 15 et 16 mai 2003, par la présidence grecque sous le titre «Managing Migration for the benefit of Europe», dans le cadre de l'initiative d'Athènes sur les actions à mener en matière de migration (Athens Migration Policy Initiative).
[6] Report of a European Conference on Successful Integration on the Labour Market, Copenhague 4-5 juillet 2002.
[7] Avis du Comité économique et social européen sur «L'immigration, l'intégration et le rôle de la société civile organisée», CES 365/2002.
La nécessité de trouver une solution aux problèmes de l'immigration, de l'intégration et de l'emploi et de renforcer l'efficacité de ces politiques en harmonisant les règles entre les États membres est reconnue de plus en plus. L'UE dispose aujourd'hui de tout un arsenal d'instruments pour mettre en place un cadre adéquat qui appuie les efforts nationaux.
1.1 Tampere et le cadre législatif au niveau de l'UE
Le Conseil européen de Tampere a expressément invité à définir une «politique plus énergique en matière d'intégration» qui «devrait avoir pour ambition [d'offrir aux ressortissants de pays tiers] des droits et obligations comparables à ceux des citoyens de l'Union européenne». C'est ce principe qui sous-tend les propositions présentées à ce jour par la Commission en vue d'établir le cadre juridique commun sur le statut des ressortissants de pays tiers, conformément au traité d'Amsterdam (article 63 du traité CE). Dans ce contexte, la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne est le texte de référence, la plupart de ses dispositions étant applicables à toutes les personnes, sans distinction de nationalité. La proclamation de la Charte en décembre 2001 a donc marqué un pas important dans la voie d'une définition de ce cadre juridique, et les résultats de la convention sur le statut de la Charte dans le nouveau traité européen seront décisifs.
Le droit au regroupement familial [8] est, en soi, un moyen d'intégration incontournable. Le Conseil est parvenu à un accord politique, le 27 février 2003, sur cette directive, qui reconnaît le droit au regroupement familial pour les ressortissants de pays tiers titulaires d'un titre de séjour d'une durée de validité supérieure ou égale à un an et ayant une perspective fondée d'obtenir un droit au séjour durable. Les États membres auront le droit d'exiger que les ressortissants de pays tiers, pour pouvoir exercer ce droit, respectent certaines mesures d'intégration conformément au droit national. Une disposition essentielle pour l'intégration des membres de la famille est qu'ils ont accès, au même titre que le regroupant, à l'emploi, à l'éducation et à la formation professionnelle.
[8] COM(2002) 225.
La proposition de directive relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée [9] repose sur une longue tradition qui veut, dans les États membres, que la durée du séjour influe sur le niveau des droits de la personne concernée. Cette proposition est un instrument clé pour l'intégration des personnes qui envisagent de s'installer pour une longue durée dans l'Union européenne. Elle fixe les conditions à remplir pour obtenir le statut de résident de longue durée, la condition sine qua non étant une résidence légale et ininterrompue de cinq ans. Le Conseil discute aussi de la possibilité d'imposer comme condition légitime le fait d'être prêt à participer à des mesures d'intégration. L'égalité de traitement avec les ressortissants de l'UE est garantie aux ressortissants de pays tiers résidents de longue durée dans un certain nombre de domaines, notamment la majorité des domaines socio-économiques. Les résidents de longue durée auront également le droit de résider dans un autre État membre à des fins d'emploi ou d'études, dans les conditions prévues par la directive.
[9] COM(2001) 127.
L'objet de la proposition de directive relative aux conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi salarié ou de l'exercice d'une activité économique indépendante [10] est double: prévoir, pour les ressortissants de pays tiers qui travaillent, des modalités leur permettant d'obtenir ultérieurement un statut plus stable, tout en conférant un statut juridique sûr, pendant leur séjour dans l'UE, à ceux qui rentrent dans leur pays d'origine à l'expiration de leur titre de séjour. Cette proposition respecte en outre le principe selon lequel les droits doivent augmenter en même temps que la durée du séjour; elle facilite donc le renouvellement du titre de séjour des travailleurs ressortissants d'un pays tiers qui résident sur le territoire depuis plus de trois ans et aligne les droits - même s'ils sont moins nombreux - de ces travailleurs sur ceux qui sont proposés pour les résidents de longue durée. Elle n'a pas d'impact quantitatif, dans la mesure où elle ne touche pas à la responsabilité qui incombe aux États membres de décider d'admettre ou non des migrants économiques en fonction des besoins de leur marché du travail et de leurs capacités globales de les intégrer.
[10] COM(2001) 386.
En outre, la Commission a présenté une proposition de directive sur l'admission aux fins d'études ou de volontariat et prépare une nouvelle proposition sur l'admission des chercheurs. Cette dernière proposition est cruciale pour pouvoir réaliser les objectifs de Lisbonne en ce qui concerne la compétitivité, ainsi que l'objectif de Barcelone, qui vise à accroître les investissements dans la recherche en portant leur part à 3 % du PIB d'ici à 2010, les deux tiers étant financés par le secteur privé [11].
[11] COM(2003) 226 final et SEC(2003) 489.
Un certain nombre d'instruments législatifs relatifs à la politique en matière d'asile contiennent des dispositions sur l'intégration. C'est le cas de la directive 2003/9/CE du Conseil [12] relative à des normes minimales pour l'accueil des demandeurs d'asile dans les États membres [13]. La proposition de directive concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers et les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou de personne qui, pour d'autres raisons, a besoin d'une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts [14] contient un chapitre distinct qui régit le contenu de la protection internationale et précise les droits qui sont conférés aux réfugiés ou aux personnes bénéficiaires de la protection subsidiaire. La proposition impose aux États membres d'établir des programmes adaptés aux besoins des réfugiés afin de faciliter leur intégration dans la société.
[12] JO L 31 du 6.2.2003, p. 18.
[13] On peut formuler une remarque similaire à propos de la directive 2001/55/CE du Conseil relative à des normes minimales pour l'octroi d'une protection temporaire en cas d'afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil (JO L 212 du 7.8.2001, p. 12).
[14] COM(2001) 510.
L'UE a également mis en place un cadre juridique pour lutter contre les discriminations - lesquelles peuvent compromettre gravement le processus d'intégration - en particulier des normes minimales communes visant à promouvoir l'égalité de traitement et à combattre les discriminations fondées sur la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, l'âge, un handicap et l'orientation sexuelle. Les directives arrêtées en 2000 au niveau de l'UE [15] conféreront de nouveaux droits importants, tant aux migrants qui arrivent sur le territoire de l'UE qu'aux minorités ethniques déjà installées. La législation communautaire qui interdit les discriminations raciales couvre un champ d'application étendu, incluant l'emploi, l'éducation, la sécurité sociale, les soins de santé, l'accès aux biens et services et au logement. Même si ces directives ne s'attaquent pas aux discriminations fondées sur la nationalité et sont sans préjudice des conditions applicables à l'entrée et au séjour de ressortissants de pays tiers et du traitement qui découle de leur statut juridique, elles s'appliquent à toutes les personnes résidant dans les États membres, et donc aux ressortissants de pays tiers. En outre, plusieurs actions d'encouragement des échanges d'expériences et de bonnes pratiques sont menées dans le cadre du programme de lutte contre la discrimination qui accompagne les mesures déjà prises. La Commission soutient également les travaux de l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes.
[15] Directives 2000/43/CE et 2000/78/CE.
L'UE progresse également sur la voie de l'octroi, aux ressortissants de pays tiers, de la même protection que celle dont jouissent les travailleurs de l'UE en matière de sécurité sociale lorsqu'ils se déplacent à l'intérieur de l'Union. La mise en oeuvre du nouveau règlement (CEE) n° 1408/71 devrait avoir pour effet de conférer aux ressortissants non communautaires qui résident légalement dans l'UE les mêmes droits que les ressortissants de l'Union lorsqu'ils se déplacent à l'intérieur de l'UE. L'adoption de ce règlement est une étape clé en vue de l'adoption future des directives sur le statut des résidents de longue durée et sur l'admission aux fins d'emploi.
1.2 Mesures prises par l'UE pour soutenir l'intégration, l'emploi et la cohésion sociale
Sur la base du mandat de Lisbonne, l'UE a défini des méthodes ouvertes de coordination dans les domaines de l'emploi et de l'intégration sociale, politiques qui ont une incidence directe sur l'intégration des immigrants dans l'UE. Ces méthodes conjuguent des objectifs et des actions concrètes, fixés au niveau de l'UE, qui sont ensuite mis en application sous forme de plans d'action nationaux, le recours à des mesures de référence et à des indicateurs afin d'évaluer les progrès accomplis, ainsi que l'échange d'expériences et l'évaluation par des pairs de manière à tirer des enseignements des bonnes pratiques.
Depuis le lancement de la stratégie européenne pour l'emploi (SEE) en 1997, l'intégration des catégories défavorisées, dont les travailleurs migrants et les minorités ethniques, ainsi que la lutte contre les discriminations sont des traits saillants des lignes directrices pour l'emploi. Dans sa communication du 17 juillet 2002 [16], la Commission a dressé un bilan des cinq premières années de la SEE et formulé des questions importantes pour le débat sur l'avenir de cette stratégie. Les défis à relever concernent notamment la réduction des écarts en matière de taux d'emploi entre les ressortissants de l'UE et ceux des pays tiers, l'encouragement de la pleine participation et de l'emploi des migrants de deuxième génération, la nécessité de répondre aux besoins particuliers des femmes immigrées, la lutte contre l'immigration clandestine et la transformation du travail au noir en emploi déclaré. Il convient de noter que l'UE a également mis en place et développé le réseau EURES [17], qui constitue un instrument clé pour la diffusion des offres d'emploi dans toute l'UE. D'autres initiatives ciblées ont déjà été lancées, comme le portail PLOTEUS sur les possibilités d'éducation et de formation, le portail sur la mobilité des chercheurs et le réseau de centres de mobilité qui donnent des informations à l'intention des chercheurs mobiles.
[16] COM(2002) 416 du 17 juillet 2002 «Bilan de cinq années de stratégie européenne pour l'emploi».
[17] Décision 2003/8/CE de la Commission du 23 décembre 2002 - JO L 5 du 10.1.2003, p. 16.
Dans le domaine de l'intégration ou de l'inclusion sociale, le Conseil européen de Nice (décembre 2000) a arrêté une série d'objectifs communs de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale [18]. Il ressort clairement des premiers plans d'action nationaux contre la pauvreté et l'exclusion sociale (PAN/incl), présentés en juin 2001, que les minorités ethniques et les immigrants sont exposés à un risque élevé d'exclusion sociale et de discrimination, même si, ce risque étant pourtant largement reconnu, ces premiers plans d'action manquaient de données sur ces catégories de population.
[18] Promouvoir la participation à l'emploi et l'accès de tous aux ressources, aux droits, aux biens et services; prévenir les risques d'exclusion; agir pour les plus vulnérables et mobiliser l'ensemble des acteurs pour lutter contre l'exclusion sociale.
En juillet 2001, la Commission a proposé une méthode ouverte de coordination de la politique communautaire en matière d'immigration et, en décembre 2001, le Conseil européen de Laeken a préconisé un renforcement des échanges d'informations sur la migration. Les services de la Commission ont donc instauré un système de réunions consultatives de manière à pouvoir procéder à des échanges de vues sur les questions relatives aux migrations dans l'UE. Des réunions ont également lieu en vue de l'échange d'informations et de meilleures pratiques de manière à explorer la question de la mobilité transnationale de certaines catégories de personnes, telles que les chercheurs. En outre, en réponse aux conclusions du Conseil «Justice et affaires intérieures» d'octobre 2002, un réseau de cellules nationales de contact sur les questions d'intégration a été créé.
Un certain nombre d'instruments financiers et d'autres initiatives de l'UE, qui apportent un soutien direct ou indirect à l'intégration des immigrants, sont venus étayer les engagements politiques pris par l'UE dans les domaines de l'intégration, de l'emploi et de la cohésion sociale. C'est le cas, tout particulièrement, des Fonds structurels, notamment le Fonds social européen. L'UE soutient aussi l'intégration grâce à des actions innovantes, à des réseaux et à des échanges d'expériences dans le cadre du programme EQUAL, de l'initiative URBAN II pour ce qui est de la régénération des villes, et grâce à ses programmes en faveur de l'égalité entre hommes et femmes et de lutte contre l'exclusion et les discriminations. Par ailleurs, les fonds communautaires sont mobilisés au titre du programme pluriannuel pour les entreprises et l'esprit d'entreprise (2001-2005) du Fonds européen d'investissement, en faveur des micro-crédits accordés aux chefs d'entreprise issus de l'immigration. En outre, ce programme pluriannuel vise tout spécialement les chefs d'entreprise issus de minorités ethniques dans le cadre de ses activités générales, notamment celles qui se rapportent à la procédure BEST. Dans les domaines de l'éducation et de la culture, plusieurs initiatives ciblées sur l'intégration des immigrants ont été menées dans le cadre des programmes SOCRATES, LEONARDO DA VINCI, YOUTH et CULTURE 2000.
Dans le cadre de l'élaboration d'une politique européenne commune dans le domaine de l'asile, le Conseil a créé un Fonds européen pour les réfugiés (FER) [19] visant à «la promotion de [l']intégration sociale et économique [des réfugiés] en tant qu'elle contribue à la réalisation de la cohésion économique et sociale». De 2000 à 2002, 28,3 % des fonds disponibles (19 millions d'euros) ont été alloués à des actions de ce type. En 2002, la Commission a créé un réseau européen des migrations, afin d'améliorer les analyses et les études en matière de migration et d'asile dans l'UE.
[19] Le Fonds européen pour les réfugiés a été créé sur la base de l'article 63, point 2) b), du traité CE par la décision du Conseil du 28 septembre 2000, pour la période 2000-2004 et avec un budget indicatif (sur la ligne budgétaire B5-810) de 216 millions d'euros pour cinq ans.
1.3 Approches nationales de l'intégration
Les États membres ont, pour la plupart, consenti de gros efforts, ces dernières années, afin d'améliorer l'intégration des immigrants et des personnes bénéficiaires d'une protection internationale, en développant des politiques nationales d'intégration. À la demande du Conseil «Justice et affaires intérieures» informel de Veria, les 28 et 29 mars 2003, la Commission a rédigé, à l'intention du Conseil, un rapport de synthèse sur les politiques nationales d'intégration et les pratiques des États membres en la matière, qui est joint en annexe 1 à la présente communication. Ce rapport, qui est le résultat d'une enquête, fournit des informations plus détaillées sur les politiques nationales d'intégration.
Nombreux sont les États membres à juger insuffisamment efficaces les politiques qu'ils ont menées jusqu'ici. Les préoccupations croissantes que suscite la persistance d'obstacles à une intégration réussie - le fait que la langue du pays d'accueil ne soit pas maîtrisée est l'obstacle le plus fréquent, même si le chôocirc;mage et le faible niveau d'éducation ou de qualifications sont également considérés comme des obstacles importants - en sont une illustration.
Le débat en cours au niveau de l'UE sur les exigences en matière d'intégration traduit l'importance politique que les États membres accordent à une intégration réussie des ressortissants de pays tiers. L'un des grands thèmes de discussion à cet égard concerne la nature des programmes d'intégration et le type de mesures d'intégration à prévoir. Un autre aspect fondamental est la question de savoir si ces mesures devraient être ou non obligatoires et les conséquences, tant juridiques que financières, que pourrait entraîner leur non-respect. La question du retrait éventuel du titre de séjour en cas de non-respect des mesures obligatoires prend une place croissante dans les négociations en cours au Conseil sur les différentes propositions législatives. Ces discussions montrent que les problèmes auxquels les États membres doivent faire face et la manière dont ils s'efforcent d'y répondre présentent un grand nombre de similitudes. Il en résulte une prise de conscience grandissante de la nécessité d'une action collective au niveau de l'UE en concevant des instruments communs supplémentaires et en adaptant les instruments existants de manière à relever les nouveaux défis.
2. LE DEFI ECONOMIQUE ET DEMOGRAPHIQUE: UNE NOUVELLE DIMENSION
Dans un contexte économique et social général qui se caractérise par la pénurie d'un certain nombre de qualifications et de certaines catégories de main-d'oeuvre, par la lutte pour accaparer la main-d'oeuvre la plus qualifiée dans une économie mondialisée et par l'accélération du vieillissement de la population, la structure de l'immigration dans l'UE se modifie, comme l'avait déjà souligné la Commission dans sa communication de novembre 2000 [20]. Des facteurs de répulsion et d'attraction sont à l'origine de l'immigration. Il importe donc de cerner les rapports entre l'immigration, d'une part, et la situation de l'emploi ainsi que l'évolution des besoins du marché du travail, d'autre part. Il est de plus en plus probable que les flux d'immigration vont s'accroître et seront plus que jamais nécessaires, de sorte qu'il faut anticiper ces changements.
[20] COM(2000) 757.
2.1 Structure des courants d'immigration dans l'UE
Les États membres de l'UE ont une longue tradition d'immigration qui, au total, a été positive pour la croissance économique et les capacités d'adaptation du marché du travail, même si la structure et la dynamique de cette immigration ont beaucoup varié dans le temps et d'un pays à l'autre. En 2000, les hommes et femmes non ressortissants de l'UE représentaient 4 % des hommes et des femmes vivant dans l'Union [21]. Pendant les années 90, l'excédent migratoire est devenu la première composante du mouvement de la population dans la plupart des États membres, jusqu'à atteindre, en chiffres nets, un total d'environ 850 000 migrants internationaux par an pour l'UE (y compris les ressortissants de l'UE qui retournent dans leur pays d'origine) d'ici à la fin de la décennie. Pour 2001, ce total est estimé à un peu plus de un million.
[21] Pour obtenir des informations plus détaillées, voir en particulier Eurostat, Migration de femmes et d'hommes en provenance et à destination de l'Union européenne, Statistiques en bref, Thème 3 - 2/2003; Eurostat, Premières estimations démographiques pour 2002, Statistiques en bref, Thème 3 - 25/2002. Les chiffres indiqués dans ce paragraphe sont extraits de ces deux publications. Voir également les figures 1 et 2 de l'annexe 2.
Au cours de la période étudiée, on a aussi assisté à un élargissement et une diversification de la typologie des migrants, de la structure des flux migratoires et de la composition pays d'émigration/pays d'accueil. Du fait des changements qui ont affecté les procédures d'asile, les demandes ont atteint des chiffres records en 1992 et en 1997, imputables dans une large mesure aux conflits qui ont déchiré l'ex-Yougoslavie et aux conflits armés qui ont éclaté de par le monde. En outre, les anciens pays d'émigration (comme les États membres du Sud de l'UE et l'Irlande) sont devenus des pays d'immigration, les flux entrants de migrants les plus importants regroupant des ressortissants d'un État membre de retour dans leur pays d'origine et des ressortissants d'autres pays, le plus souvent des pays tiers. Vu la croissance de la population de jeunes adultes que connaissent de nombreux pays tiers, les écarts socio-économiques et leur instabilité politique, les pressions migratoires ont peu de chances de diminuer dans un avenir prévisible.
Avec l'adhésion de dix nouveaux États membres dans l'UE en 2004, une partie de l'immigration passée se transformera en mobilité interne. L'expérience passée et les estimations récentes [22] montrent que la mobilité de la main-d'oeuvre en provenance des nouveaux États membres pourrait être modérée, voire limitée, hormis dans le cas particulier des régions frontalières. Dans le même temps, l'importance et la dynamique de la contribution des migrations au mouvement de la population dans l'UE-25 tendront probablement à s'accroître, puisque les États membres existants et les nouveaux États membres enregistrent des tendances démographiques similaires.
[22] European Integration Consortium (2001), Analyse de l'impact de l'adhésion sur l'emploi et des marchés du travail dans les États membres de l'UE. Les estimations font apparaître que les flux en provenance des nouveaux États membres vers les 15 États membres existants pourraient ne concerner, dans un premier temps, qu'environ 350 000 personnes. Les flux entrants nets annuels diminueraient par la suite, de sorte que vers 2030, la population totale dans l'UE-15 des personnes non ressortissantes des nouveaux États membres se stabiliserait à un niveau approximatif de 3,5 millions de personnes. L'introduction de périodes transitoires étalerait les flux entrants sur une plus longue période.
2.2 Le rôle économique de l'immigration et son incidence sur l'emploi [23]
[23] L'incidence sur les pays d'origine n'est pas abordée car elle a été traitée plus en détails dans une récente communication de la Commission (COM(2002) 703) du 3.12.2002.
S'il faut reconnaître que l'immigration est source d'enrichissement culturel et social, notamment en contribuant à l'esprit d'entreprise, à la diversité et à l'innovation, son incidence économique sur l'emploi et la croissance est indéniable car elle augmente l'offre de main-d'oeuvre et aide à faire face aux pénuries. Elle tend en outre à influer positivement sur la demande de produits, et donc sur la demande de main d'oeuvre.
Les études réalisées dans le monde entier (entre autres par l'OIT, le FMI, l'OCDE) confirment, en règle générale, qu'elle produit de nombreux effets positifs sur l'économie [24]. Par exemple, on admet désormais que l'immigration aux États-Unis est l'un des facteurs à l'origine de la longue période de prospérité qu'a connue le pays dans les années 90, avec une croissance moyenne annuelle de l'emploi de 1.5% et une croissance économique globale supérieure à 3%. En outre, il semble que le rajeunissement sensible de la société américaine par rapport à la population européenne, qui continue de vieillir, soit principalement dû aux grandes vagues d'immigration légale et clandestine [25] enregistrées aux États-Unis depuis la fin des années 80 (voir la figure 3 en annexe). À l'inverse, il est de plus en plus largement admis que la stagnation de l'économie japonaise dans la dernière décennie a notamment été causée par le déclin de la population en âge de travailler observé depuis le milieu des années 90, le strict contrôle de l'immigration ayant par ailleurs maintenu cette dernière à un niveau beaucoup trop bas pour lui permettre d'amortir les effets du vieillissement rapide sur l'offre de main-d'oeuvre, l'emploi et la croissance (voir la figure 4 en annexe).
[24] Or, bien que ses retombées macro-économiques positives aient été démontrées, nombre de personnes ont une position ambivalente quant à ses effets. Peut-être est-ce dû au fait que, quoiqu'elle puisse être bénéfique d'un point de vue économique global, son coût et ses avantages sont inégalement répartis. En outre, certains des avantages à long terme qu'apporte la population immigrée sont difficiles à démontrer, tels que les effets sur la demande globale en tant que moteur de la croissance économique.
[25] Entre 1990 et 2000, la population américaine s'est accrue de près de 33 millions de personnes. L'immigration comptait pour environ un tiers de la croissance de la population des États-Unis dans les années 80 et pour une part encore plus élevée dans les années 90. Entre 1995 et 2000, près de 40% de la croissance démographique était imputable à l'immigration (UN World Population, hypothèse moyenne, révision de 2000). La contribution non négligeable de la démographie à la croissance américaine explique pourquoi le différentiel de croissance entre les États-Unis et l'Union européenne est plus élevé en termes de PIB que de PIB par habitant.
En Europe, la population en âge de travailler aurait déjà commencé à diminuer dans certains États membres s'il n'y avait pas eu d'immigration (voir la figure 5 en annexe). La récente progression de l'immigration en Irlande semble avoir concouru à la croissance soutenue enregistrée par ce pays [26], qui a alors modifié son régime des permis de travail pour résoudre les pénuries de main-d'oeuvre.
[26] Tendances des migrations internationales, 2002, OCDE.
En termes d'offres d'emploi, il existe peu d'éléments permettant de démontrer que l'immigration a entraîné un accroissement du chômage [27]. À court terme, l'immigration est susceptible de favoriser l'emploi au niveau national car elle augmente la flexibilité des marchés du travail. C'est particulièrement vrai pour les migrations temporaires. En outre, puisque dans l'ensemble les migrants ne prennent pas les emplois des travailleurs nationaux, les compétences et qualifications des immigrés peuvent se révéler complémentaires de celles des ressortissants de l'Union. Cela n'exclut toutefois pas que certains groupes ou secteurs subissent des effets négatifs. Des conclusions empiriques soulignent que les effets indésirables atteignent essentiellement les ouvriers dans l'industrie et les travailleurs non qualifiés dans les services. [28]
[27] J. Coppel et. al., "Trends in Immigration and Economic Consequences", ECO/WKP(2001)10.
[28] European Integration Consortium (2001), ibid.
En général, les ressortissants des pays tiers sont concentrés dans certains secteurs et certaines professions, même si cette tendance s'atténue normalement avec le temps. Par exemple, ils représentent plus de 10% des employés de maison et près de 8% du secteur horeca (contre 3% de la population active totale). Leur proportion dans les emplois manuels est supérieure, pour tous les types de qualifications, à celle des ressortissants de l'Union (et presque deux fois supérieure pour les emplois manuels non qualifiés - groupe professionnel dans lequel plus d'un tiers des emplois sont plutôt médiocres [29]). La répartition géographique de l'immigration varie en outre considérablement selon les États membres et les régions, avec une concentration relativement plus élevée dans les zones urbaines et industrialisées.
[29] Commission européenne, L'emploi en Europe 2001.
La concentration sectorielle des immigrants va de pair avec des barrières à l'entrée réduites et des besoins spécifiques en matière de compétences. Elle peut offrir aux ressortissants des pays tiers la possibilité d'entrer sur le marché du travail et d'acquérir des compétences, notamment linguistiques. En même temps, une part relativement nombreuse de ces ressortissants travaillant dans certains secteurs où les droits ou la marge de mobilité sur le marché du travail sont limités ne sera pas en mesure de réclamer de meilleurs salaires et des emplois plus valorisants. Cette situation peut encore être aggravée par la faible représentation de ces travailleurs dans le dialogue social. La conséquence en sera la réticence accrue des nationaux à occuper ces emplois et une accentuation de la segmentation du marché du travail.
L'impact de l'immigration sur les salaires nationaux se situe dans une fourchette de -0,3 à +0,3 pour cent [30]. Les répercussions sur les salaires et sur l'emploi seraient plus défavorables pour certains travailleurs nationaux que pour d'autres, surtout pour les moins qualifiés, du fait de l'effet de substitution, et elles seraient plus positives pour les travailleurs très qualifiés, probablement en raison des gains de productivité obtenus grâce à la complémentarité de ces travailleurs et des immigrés. Les incidences nettes de l'immigration sur les finances publiques des pays d'accueil, c'est-à-dire sur les recettes et dépenses de l'État, semble avoir été modérée jusqu'à présent [31] et il est démontré qu'elles peuvent être positives dans l'ensemble. De surcroît, la plupart des études concluent que les migrants ne dépendent pas plus de l'aide sociale que les catégories de la population endogène qui se trouvent dans la même situation sociale et professionnelle.
[30] H. Brückner, "Can international Migration Solve the Problems of European Labour Markets?", Institut allemand de la recherche économique, avril 2002, page 34.
[31] J. Coppel et. al., (2002), ibid.
2.3 L'impact de l'évolution démographique sur l'emploi et la croissance économique
L'impact de l'évolution démographique a fréquemment donné matière à débat [32] et peut être illustré par divers scénarios. Dans l'hypothèse d'une immigration modérée, retenue par Eurostat [33], le vieillissement démographique aura pour conséquence que la population en âge de travailler dans l'UE-25 reculera de 303 à 297 millions d'ici à 2020, et à 280 millions d'ici à 2030. Ce fléchissement est imputable aux effets persistants de la baisse du taux de fécondité depuis le milieu des années 70 et il s'ajoutera à une progression du groupe des plus de 65 ans. Selon la même hypothèse [34], le nombre de personnes appartenant à ce groupe d'âge passera de 71 millions en 2000 à 93 millions d'ici à 2020, pour atteindre 110 millions en 2030 dans l'UE-25, ce qui portera le taux de dépendance des personnes âgées de 23% à 40% (voir les figures 6 et 7) [35]. En outre, il est prévu que le nombre des personnes âgées de 80 ans et plus dans l'UE-25 passera de quelque 16 millions en 2000 à environ 30 millions en 2030.
[32] Voir, par exemple, le Rapport conjoint sur la participation au marché du travail et le vieillissement actif; Rapport sur la situation sociale 2002 et 2003
[33] Le scénario de base actuellement retenu par Eurostat tient compte d'un flux entrant net annuel vers l'UE-15 relativement bas, autour de 630 000 personnes, représentant au total une contribution nette à la population en âge de travailler d'environ 450 000 personnes.
[34] En particulier, ces projections à long terme pour l'Union ne rendent pas compte d'évolutions à long terme telles que l'éventuelle adhésion de la Turquie.
[35] Avec un taux d'emploi de 70%, le nombre d'actifs (à l'exclusion des chômeurs) par personne âgée de 65 ans et plus sera ramené de 2,7 en 2010 à environ 2,2 en 2020, 1,8 en 2030 et 1,5 en 2040. Si, une fois l'objectif de Lisbonne atteint, le taux d'emploi devait atteindre 75% entre 2010 et 2020, ce recul serait atténué et l'on obtiendrait le chiffre de 2,4 en 2020.
Aux fins de la présente communication, l'importance de ces évolutions démographiques pour la croissance de l'emploi peut être illustrée par un scénario démographique qui postule que l'objectif de Lisbonne d'un taux d'emploi de 70% d'ici à 2010 et d'un taux d'emploi constant par la suite [36] sera atteint. Dans un tel scénario, on pourrait attendre un déclin général de l'emploi après 2010 (voir le graphique ci-dessous), et la diminution du nombre des actifs entre 2010 et 2030 serait de l'ordre de 20 millions de travailleurs pour l'UE-25 [37]. Dans un autre scénario où le taux d'emploi dépasserait l'objectif de 70% après 2010, pour atteindre 75%, la baisse du volume d'emplois se produirait de toute façon, mais elle serait plus tardive et de moindre ampleur. Le recul de l'emploi prédit par ces scénarios, avec un taux d'emploi constant à compter de 2010 ou 2020, ne peut être inversée par une progression (inattendue) du taux de fécondité car il faudrait plus de deux décennies aux enfants issus du nouveau baby-boom pour être en âge de travailler et contribuer à la croissance de la population active totale.
[36] Pour mettre en évidence les répercussions du changement démographique proprement dit, on conserve la même hypothèse sur les flux migratoires.
[37] 13 millions de travailleurs pour l'UE-15.
Scénario des futurs niveaux de l'emploi (UE-25, 2000-2030)
Population active totale (en millions) en supposant un taux d'emploi de 70% en 2010 et jusqu'en 2030
Le déclin du volume total de l'emploi implique que ce dernier contribue négativement à la croissance économique, puisqu'elle est le résultat combiné de la hausse de l'emploi et de la productivité. L'effet négatif de l'emploi sur la croissance économique pourrait être compensé par des augmentations de productivité. Mais, selon les hypothèses retenues dans le scénario démographique présenté ci-dessus, un taux de croissance moyen du PIB de 2,5% (qui correspond à la croissance moyenne dans l'Union depuis 1990) signifierait qu'entre 2010 et 2020, la croissance de la productivité devrait atteindre 2,8% et qu'entre 2020 et 2030, elle devrait dépasser 3% pour compenser le recul des emplois. Cette augmentation devrait même être supérieure si l'on visait un taux de croissance de 3%, en extrapolant le résultat envisagé à Lisbonne (voir la figure 8 en annexe). En supposant qu'il n'y aura aucun ajustement des autres variables affectant la productivité et la croissance, ces résultats donnent une idée de l'ampleur des effets attendus si l'objectif de Lisbonne d'un taux d'emploi de 70% d'ici à 2010 est atteint et maintenu.
Bien qu'il ne faille pas sous-estimer le potentiel offert par les technologies génératrices d'économies de main-d'oeuvre, on peut se demander si une hausse de la productivité permettra réellement d'atteindre les chiffres mentionnés plus haut, lorsque l'on considère les tendances récentes: dans l'UE-15, la productivité de la main-d'oeuvre a augmenté en moyenne de 4,5% dans les années 60, de 2,5% dans les années 70 et de 2% dans les années 80, avant de retomber, en tendance, à près de 1,2%. L'incidence du déclin de l'emploi et du vieillissement de la population active sur la productivité ne sera pas nécessairement positive. Elle prendra différentes formes : adoption de technologies économisant la main-d'oeuvre à la suite du rétrécissement du marché du travail, difficulté des travailleurs avançant en âge à s'adapter aux nouvelles contraintes du marché du travail, évolution du taux d'épargne qui, à son tour, ralentira les investissements, concrétisation de l'innovation dans de nouveaux biens d'équipement [38], risque que l'investissement en capital humain ne soit plus rentable avec une population vieillissante, changement du rythme des investissements dans la recherche [39], évolution technologique, et modification de la mobilité sectorielle et géographique en général au fur et à mesure que la proportion de jeunes travailleurs dans la population active déclinera.
[38] Le modèle du cycle de vie indique que le taux d'épargne a tendance à diminuer avec l'âge. Mais l'effet négatif qui en résulterait pour l'investissement pourrait être atténué par les nouvelles opportunités dérivées du rendement accru des investissements directs étrangers (voir Rapport économique annuel 2002, chapitre 4)
[39] Voir, en particulier, l'objectif de Barcelone de stimuler l'investissement dans la recherche (COM(2003)226 et SEC(2003)489).
Dans l'ensemble, bien qu'il soit difficile de prévoir comment se conjugueront les facteurs influant sur la productivité, il est légitime de se demander si la hausse de productivité nécessaire à compenser le déclin de l'emploi se produira. En effet, sans une amélioration de la situation de l'emploi obtenue grâce à une immigration accrue, et à moins que la productivité ne dépasse son niveau actuel (0,5 à 1,5%), la croissance moyenne du PIB de l'Union calculée dans le scénario évoqué plus haut se ralentirait, pour atteindre 1% entre 2010 et 2020 et 0,6% entre 2020 et 2030.
Un tel scénario ne tient pas compte des multiples processus d'ajustement auxquels l'économie sera soumise. Il faut en effet s'attendre à des ajustements de variables telles que les taux de change ou d'intérêt, le niveau et la composition de l'épargne, la consommation et l'investissement, ainsi que des mouvements internationaux de capitaux, de biens et de services entre les régions inégalement exposées au vieillissement. Dans son rapport économique annuel 2002, la Commission a inclus ce type d'effet dans un modèle d'équilibre général, en estimant que l'incidence du vieillissement démographique sur la croissance du PIB par habitant représentera, par rapport au scénario de base, une baisse de 0,4% de la croissance annuelle sur la période 2000-2050 Ces estimations ne tiennent toutefois pas compte d'éventuels changements de politique en vue de faire face à la dynamique du vieillissement, ni des effets positifs de cette dernière sur la croissance globale [40].
[40] Les chiffres mentionnés dans le rapport économique annuel 2002 ne sauraient être directement comparés à ceux des scénarios démographiques car ces derniers se réfèrent au PIB et non au PIB par habitant, et reposent de surcroît sur l'hypothèse que l'on atteindra l'objectif de Lisbonne d'un taux d'emploi de 70%.
Les effets du vieillissement démographique sur le système de protection sociale sont déjà sensibles [41]. Une amélioration de la situation de l'emploi réduirait du reste le poids d'autres types de prestations sociales, telles que les allocations de chômage. Cependant, même si l'on atteint et si l'on maintient l'objectif d'un taux d'emploi de 70% au cours des prochaines décennies, le taux de dépendance des personnes âgées continuera de croître (voir figure 7 en annexe). C'est pourquoi il importe de souligner que l'immigration ne peut aider à améliorer la durabilité des systèmes de pensions que si elle ralentit la tendance d'un recul de l'emploi après 2010. Mais à long terme, on ne pourra prévenir les effets du vieillissement sur les systèmes de protection sociale sans une progression significative de la fécondité.
[41] Pour une analyse plus approfondie, voir le rapport économique annuel 2002 et le rapport conjoint du Conseil et de la Commission sur les pensions 2002.
2.4 Les perspectives en matière d'emploi et le potentiel de l'immigration
Si les implications économiques des changements socio-démographiques n'apparaîtront réellement qu'avec le temps, certains effets de l'évolution de la structure démographique et des qualifications de la population en âge de travailler sont néanmoins déjà observables [42]. En particulier, quoique difficiles à mesurer et à suivre, des pénuries de main-d'oeuvre de plus en plus fréquentes ont été constatées au cours du dernier cycle conjoncturel et elles tendent à persister en ces temps de repli économique. Pour relever ces défis et atteindre les objectifs fixés à Lisbonne, l'Union européenne doit avant tout mobiliser les ressources humaines dont elle dispose, notamment les travailleurs migrants résidant sur son territoire. Cependant, la tendance à l'aggravation des pénuries de main-d'oeuvre remettra en cause la capacité des marchés du travail européens à couvrir les besoins des employeurs.
[42] Voir l'Emploi en Europe 2002 pour une analyse des changements structurels affectant les marchés du travail européens.
À court terme, la migration des travailleurs peut certes contribuer à réduire ces pénuries, qui touchent surtout les technologies de l'information et de la communication, les technologies de pointe et le secteur de la santé, mais également certaines professions peu qualifiées. L'expérience des dernières années, au cours desquelles certains secteurs ont constamment connu ces pénuries (informatique, santé, construction), montre toutefois qu'il ne suffit pas de recourir à la population active locale pour y remédier Une solution consisterait à exploiter davantage les possibilités ouvertes par l'accord général OMC sur le commerce des services (GATS) de négocier des engagements autorisant l'entrée temporaire de personnes venant fournir des prestations (ce qu'on appelle le "mode 4"). [43] Ceci pourrait être particulièrement important dans des domaines comme la société de l'information dans lequel des sociétés de pays tiers décrochent des contrats pour fournir par exemple des services informatiques externalisés. Les services sont produits dans le pays tiers mais exigent généralement qu'un nombre de professionnels travaillant pour le prestataire de services soient à même de travailler temporairement dans le pays en question de manière à ce que le contrat se déroule correctement. Actuellement les conditions pour ce type d'entrée varient largement selon les Etats membres. À moyen terme, les pénuries de main-d'oeuvre se renforceront et des besoins pourraient apparaître à tous les niveaux, qu'il s'agisse d'emplois très qualifiés ou non. Le principal défi consistera à attirer et à recruter les migrants idoines pour que la main d'oeuvre de l'Union européenne puisse maintenir la productivité et la croissance économique de l'Union. Face à la pénurie et à l'inadaptation croissantes des qualifications, qui seront longues à surmonter, on commence à admettre que l'immigration économique pourrait avoir un rôle à jouer dans la correction des déséquilibres du marché de l'emploi si les immigrants possèdent les qualifications appropriées.
[43] Il convient de remarquer que ce type de migration temporaire se généralisera probablement dans le secteur des services à la suite des négociations en cours sur l'Agenda de Doha, puisque l'Accord général OMC sur le commerce des services prévoit la possibilité de négocier des engagements autorisant l'entrée temporaire de personnes venant fournir des prestations (ce qu'on appelle le "mode 4"). L'UE recourt déjà à cette option pour marquer sa disposition à accepter certains migrants temporaires très qualifiés (par exemple, les personnes qui bougent au sein d'une entreprise).
Dans la pratique, il pourrait toutefois se révéler difficile de gérer la structure et la dynamique des flux d'immigration futurs pour les adapter aux besoins de l'économie européenne car l'immigration est due à de multiples facteurs qui risquent de déborder le champ de compétences d'une autorité publique unique. Cependant, les gouvernements se rendent bien compte qu'une politique de l'immigration plus proactive et prospective est nécessaire pour faciliter l'intégration dans le monde du travail et que, si l'on ne favorise pas davantage l'immigration légale, l'Union européenne pourrait être soumise à des pressions de plus en plus fortes et s'exposer au risque d'une immigration clandestine accrue. Plusieurs pays de l'OCDE et de l'UE ont déjà mis en place des programmes spécifiques ou modifié leur réglementation afin de faciliter l'accès à leur marché du travail de travailleurs immigrants qualifiés, et en particulier de ceux qui sont très qualifiés, comme les chercheurs et ingénieurs informatiques. Certains États envisagent par ailleurs d'adopter des politiques d'immigration spéciales pour l'emploi afin de remédier aux pénuries de main-d'oeuvre, leurs objectifs et procédures pouvant toutefois différer considérablement d'un pays à l'autre.
Mais ces politiques ne sont pas simples à élaborer et les possibilités qu'elles offrent doivent encore être évaluées, ainsi que leurs limites, à l'aide de statistiques plus précises. Cependant, même avec de meilleures informations, il serait illusoire de croire que l'on pourra pronostiquer avec précision les futurs besoins du marché de l'emploi par secteur et par profession. Les migrants les plus susceptibles de faire coïncider l'offre et la demande sont ceux capables de s'adapter suffisamment pour affronter de nouvelles situations, du fait de leurs qualifications, de leur expérience et de leurs capacités personnelles Les procédures de sélection doivent favoriser ces candidats à l'immigration et leur offrir des conditions suffisamment attrayantes. Il est probable qu'il en résultera une concurrence accrue au sein de l'Union européenne et entre les pays de l'OCDE. Une telle concurrence appelle une coordination en vue d'harmoniser les règles du jeu.
Par ailleurs, les pouvoirs publics soulignent fréquemment le caractère temporaire, voire saisonnier, de l'immigration qu'elles sont disposées à accepter, mais cette option est peu réaliste la plupart du temps. Les expériences antérieures en matière d'immigration ont du reste démontré l'extrême difficulté de maintenir des programmes d'immigration temporaire car les personnes décidées à rester dans un pays trouvent généralement le moyen de le faire. Il ne faut pas oublier non plus que la bonne intégration et l'apport des migrants au marché du travail peuvent demander du temps et que l'atténuation des déséquilibres démographiques attendus à moyen terme sera largement tributaire de l'immigration permanente.
Du point de vue de l'emploi, le succès des politiques globales d'immigration sera déterminé par la capacité de l'UE d'exploiter tout le potentiel de l'immigration tout en ne perdant pas de vue les objectifs plus larges des politiques sociales, économiques, étrangères, commerciales et de développement. Le recours aux immigrants ne doit pas se faire au détriment des pays en développement, notamment en provoquant une fuite des cerveaux [44]. Il ne doit pas non plus avoir pour effet de créer des écarts durables entre la répartition par secteur ou par profession des immigrants et des nationaux dans l'UE. Car ces déséquilibres entraînent une ségrégation du marché du travail, ils empêchent l'amélioration globale de la qualité du travail qui est au coeur de la stratégie européenne pour l'emploi et ils risquent de créer une dépendance durable par rapport aux migrations pour que les emplois médiocres soient pourvus. La gestion de l'immigration requiert par ailleurs que l'on surveille les changements de statut des migrants ou de la durée de leur séjour et que l'on s'attaque au travail non déclaré des immigrants, dans le cadre d'une approche globale du travail au noir.
[44] Voir la discussion dans la communication sur les relations avec les pays tiers (COM(2002)703).
Enfin, l'immigration non économique (regroupement familial et réfugiés) jouera toujours un rôle dans les flux migratoires et il importe de reconnaître et de développer les aptitudes et les qualifications des migrants arrivant par ces filières.
2.5 L'immigration est-elle une solution à l'évolution démographique ?
L'idée de recourir à une immigration de remplacement pour répondre aux besoins d'une population européenne déclinante et vieillissante a fait l'objet d'innombrables études [45]. Comme il a été expliqué plus haut, une absence de progression des flux nets actuels entraînera une chute sensible de l'emploi et de la croissance économique. En même temps, recourir à l'immigration pour compenser totalement les effets du vieillissement démographique sur le marché du travail n'est pas une solution réaliste. En outre, lorsque l'on parle d'immigration nette, il ne faut pas oublier qu'il existe également une émigration au départ de l'Union européenne et que sa structure et sa dynamique sont tout aussi difficiles à prévoir [46].
[45] Voir, par exemple, UN (2000), Replacement Migration: Is it a Solution to Declining and Ageing Populations?,Population Division, Department of Economics and Social Affairs, New York
[46] Comme il a été dit précédemment, les flux migratoires nets ne donnent aucune indication sur la proportion d'entrants et de sortants.
Maintenir le niveau de la population en âge de travailler et, plus encore, le taux de dépendance des personnes âgées, impliquerait une augmentation massive de l'immigration jusqu'en 2030. Du point de vue économique, un facteur susceptible de limiter fortement cette augmentation serait le fait que la population immigrante vieillit elle aussi, de la même façon que les nationaux. C'est pourquoi tout "boom de l'immigration" au cours des prochaines décennies produirait, selon les mêmes hypothèses, une situation similaire à celle que l'on connaît aujourd'hui, mais plus tardivement. Du point de vue de la cohésion sociale, toute augmentation massive des immigrants amplifierait en outre considérablement le défi de l'intégration.
Cependant, il est de plus en plus probable que les flux d'immigration continue vont s'accroître et qu'ils seront plus que jamais nécessaires. En effet, la tendance à la diminution de la population européenne en âge de travailler, alliée à divers facteurs d'incitation dans les pays en développement, est susceptible de générer un flux durable d'immigrants au cours des prochaines décennies. L'immigration peut aider à couvrir les besoins actuels et futurs des marchés du travail de l'UE}. De plus, elle peut contribuer à étaler sur une plus longue période les retombées de la transition démographique qui aura lieu entre 2010 et 2030, tout en ne pouvant à elle seule, il ne faut pas l'oublier, contrer les effets du vieillissement de la population. Il sera donc essentiel de parvenir à gérer ces pressions migratoires grâce à des politiques d'entrée et d'installation adaptées. Il sera tout aussi important de bien percevoir les avantages dont l'immigration est porteuse et de faciliter l'intégration des immigrants grâce à de meilleures politiques d'immigration et d'intégration aux niveaux local, régional, national et communautaire.
3. LE DEFI DE L'INTEGRATION: UNE APPROCHE HOLISTIQUE
L'intégration réussie des immigrés est à la fois une question de cohésion sociale et une condition préalable de l'efficacité économique. Dans le cadre des agendas de Tampere et de Lisbonne, et compte tenu des défis relevés ci-dessus, il est crucial d'assurer une intégration réussie des immigrants déjà établis et futurs. Les problèmes persistants concernant les populations actuelles d'immigrants montrent la nécessité d'une intensification des efforts [47]. Des exemples caractéristiques de ces problèmes sont les faibles taux d'emploi et les taux élevés de chômage, même parmi les immigrés de la deuxième génération.
[47] Pour connaître l'état actuel des projets de l'Union sur ce sujet menés dans le cadre du quatrième programme-cadre de recherche et de développement, voir le rapport "Migration and integration as challenges to European society: assessment of research reports carried out for the European Commission, Targeted Socio-Economic Research (TSER) Programme" disponible sur le site Web http://www.cordis.lu/improving/ socio-economic/publications.htm.
3.1 Définition et champ d'action
Aux fins de la présente communication, l'intégration est un processus à double sens fondé sur des droits réciproques et des obligations correspondantes des ressortissants de pays tiers en résidence légale et de la société d'accueil, qui prévoit la pleine participation de l'immigrant. Cela implique, d'une part, qu'il incombe à la société d'accueil de veiller à la mise en place des droits formels des immigrants d'une manière permettant à ceux-ci de participer à la vie économiqu, sociale, culturelle et civile et, d'autre part, que les immigrants respectent les normes et les valeurs fondamentales de la société d'accueil et participent activement au processus d'intégration, sans devoir abandonner leur identité propre.
Dans sa communication de novembre 2000 [48], la Commission attire l'attention sur les diverses catégories d'immigrants qui devraient bénéficier de mesures d'intégration - principalement les travailleurs migrants, les membres de leur famille admis dans le cadre du regroupement familial, les réfugiés et les personnes bénéficiant d'une protection internationale. L'intégration implique le développement, au fil du temps, d'un équilibre de droits et d'obligations, de sorte que plus un ressortissant de pays tiers réside longtemps légalement dans un État membre, plus il devrait acquérir de droits et d'obligations. Cette approche graduelle implique que tous les ressortissants de pays tiers aient accès à ces mesures d'intégration dès que possible après leur arrivée et, en tout cas, dès que leur séjour atteint un certain degré de permanence ou de stabilité. Il arrive souvent que des immigrants de la deuxième ou de la troisième génération, nés dans l'Union européenne ou ayant acquis la citoyenneté européenne, ou bien des immigrants d'anciennes colonies possédant la nationalité du pays d'accueil, aient besoin eux aussi bénéficier de mesures d'intégration spécifiques.
[48] COM(2000)757.
Les réfugiés, y compris les réfugiés réinstallés et les personnes qui bénéficient d'une protection subsidiaire ou temporaire [49], devraient aussi pouvoir accéder à des mesures d'intégration. Pour ce qui est des autres catégories d'immigrants, ces mesures peuvent varier suivant leurs besoins spécifiques [50] et la durée de leur séjour [51]. Cependant, les demandeurs d'asile constituent un groupe spécial de ressortissants de pays tiers qui n'ont pas le statut ordinaire de personnes résidant légalement dans un État membre et dont le séjour n'est ni permanent ni stable. Des mesures d'intégration, ou plutôt des politiques visant à leur introduction dans le pays d'asile sont nécessaires dans certains cas, mais un examen détaillé de celles-ci ne relève pas du champ d'application de la présente communication. [52].
[49] Directive 2001/55/CE du 20 juillet 2001, JO L 212 du 7.8.2001.
[50] Voir aussi le paragraphe 3.5.1 ci-dessous concernant les besoins spéciaux du groupe vulnérable des réfugiés.
[51] Bien que la protection temporaire au niveau communautaire soit accordée pour une durée de séjour maximale déterminée et que certains travailleurs migrants n'entrent dans l'Union que pour une courte durée déterminée, ces personnes peuvent avoir des raisons légitimes de prolonger leur séjour dans l'UE.
[52] Les mesures d'intégration en faveur des demandeurs d'asile sont expressément abordées à l'article 31 de la proposition de directive du Conseil du 3 avril 2001 relative à des normes minimales pour l'accueil des demandeurs d'asile dans les États membres (COM(2001)181).
3.2 Nécessité d'une approche holistique
La Commission a défini, dans ses communications de 2000 et de 2001 [53], un certain nombre de principes sur lesquels doivent reposer les politiques d'intégration et qui sont encore valables aujourd'hui. Le plus important est la nécessité d'une approche holistique tenant compte non seulement des aspects économique et social de l'intégration mais aussi des questions relatives à la diversité culturelle et religieuse, à la citoyenneté, à la participation et aux droits politiques. Bien que les priorités varient suivant les pays et les régions, les politiques d'intégration doivent être planifiées dans un cadre général cohérent, à long terme, et répondre aux besoins spécifiques des groupes particuliers tout en étant adaptées aux conditions locales. Elles dépendent de l'établissement de partenariats entre un vaste éventail de parties concernées et ont besoin de ressources appropriées. Les membres des communautés d'immigrants concernées, y compris les femmes et les personnes bénéficiant d'une protection internationale adéquate, devraient participer à la conception, à l'élaboration, à l'organisation et à l'évaluation des programmes et des politiques qui les touchent.
[53] COM(2000)757 et COM(2001)387.
Les programmes spécifiques d'intégration représentent certes un élément important de la phase finale de l'intégration, mais l'objectif à long terme devrait être de permettre aux migrants d'accéder aux services existants et de veiller à ce que ceux-ci prennent en compte leurs besoins spécifiques. À noter à ce sujet qu'un grand nombre de mesures d'intégration peuvent avoir une double utilité. Elles faciliteront l'intégration dans le pays d'accueil mais pourront aussi préparer le retour [54]. Ainsi, par exemple, la plupart des mesures éducatives, y compris la formation professionnelle, permettront aux intéressés d'acquérir des qualifications qui pourront servir au développement de leur pays d'origine s'ils y retournent.
[54] Les personnes ayant besoin d'une protection internationale espèrent rentrer dans leur pays lorsque la situation dans celui-ci le permettra, mais cela s'applique aussi aux immigrants séjournant pour une courte durée.
3.3 Principaux éléments des politiques globales d'intégration
L'approche holistique requise nécessite des politiques d'intégration globales. La partie suivante sera consacrée à l'examen d'un certain nombre d'éléments et de questions clés qui présentent un intérêt particulier pour la réussite d'une stratégie de l'intégration. Les problèmes soulevés et les défis identifiés constituent en même temps des éléments qui pourraient faire l'objet d'autres discussions et échanges d'informations et de meilleures pratiques entre les États membres.
3.3.1 Intégration dans le marché du travail
L'accès au marché du travail est crucial pour l'insertion sociale des ressortissants de pays tiers et la grande majorité des immigrants et des personnes bénéficiant d'une protection internationale possèdent des qualités et des compétences dont l'Union européenne a besoin aujourd'hui. Leur pleine intégration dans le marché du travail de l'UE pourrait inciter davantage l'économie européenne à donner sa pleine mesure en matière de compétitivité, de croissance et d'emploi. Les taux d'emploi actuels des immigrants révèlent toutefois que leur contribution potentielle n'est pas toujours pleinement exploitée. Dans l'UE-15, le taux d'emploi des ressortissants de pays tiers, qui s'élève à 52,7%, est sensiblement moins élevé que celui des ressortissants de l'UE, qui atteint 64,4% (cf. figure 9 à l'annexe). Cette différence est particulièrement marquée pour les femmes. En même temps, les immigrants sont surreprésentés dans les secteurs à risques de l'emploi, dans le travail non déclaré de qualité médiocre ainsi que dans les segments de la population particulièrement exposés à des risques sanitaires et à l'exclusion sociale. En outre, les immigrants au niveau d'éducation élevé et hautement qualifiés sont souvent incapables de trouver un travail adapté à leurs qualifications et doivent accepter un travail moins qualifié et moins bien rémunéré.
Pour maximiser la contribution potentielle des migrants, il importe de valoriser l'expérience qu'ils ont déjà acquise et les qualifications qu'ils ont déjà obtenues en dehors de l'UE. La reconnaissance et une évaluation adéquate de leurs qualifications formelles et informelles (y compris les diplômes) sont nécessaires à cet effet. Cela implique aussi d'accorder davantage d'attention à la suppression des obstacles à l'obtention et à la conservation d'un emploi, tels que la rigidité des exigences de l'emploi ou les restrictions légales concernant par exemple les compétences linguistiques ou la nationalité [55]. La discrimination sur le lieu de travail et le comportement raciste constituent également d'importants obstacles à éliminer. Des efforts spéciaux doivent être consacrés à l'évaluation et à l'amélioration des compétences des immigrants, y compris les connaissances linguistiques, pour leur permettre d'entrer sur le marché du travail et veiller à ce qu'ils aient accès à la formation permanente au même titre que les ressortissants nationaux [56]. Ces mesures actives du marché du travail devraient favoriser l'intégration des immigrants dans le marché du travail en vue de réduire de moitié dans chaque État membre l'écart en matière de chômage entre ressortissants de pays tiers et ressortissants de l'UE d'ici 2010 [57]. Les partenaires sociaux ont un rôle important à jouer dans ce domaine, en particulier pour veiller, d'une part, à l'égalité de traitement des travailleurs migrants en matière de rémunération et de conditions de travail et, d'autre part, à ce que des moyens de répondre à tout besoin spécifique soient trouvés.
[55] Conférence européenne "Successful integration on the Labour Market" organisée à Copenhague les 4 et 5 juillet 2002.
[56] Voir aussi l'avis du Comité économique et sociale sur l'immigration, l'intégration et le rôle de la société civile organisée, du 21 mars 2002.
[57] Voir la proposition de décision du Conseil relative à des lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres, COM(2003)176 du 8.4.2003, page 13.
La gestion de la diversité - diversité de la main-d'oeuvre, des modes de vie et du rôle des entreprises dans la société - peut constituer un outil important pour favoriser l'intégration des migrants dans le marché du travail. Elle peut constituer en même temps pour les employeurs une stratégie efficace et profitable, en les aidant à réaliser les objectifs de leurs entreprises en se concentrant sur les possibilités commerciales offertes par la diversité accrue de la société et en tenant pleinement compte des compétences de travailleurs aux antécédents différents (par exemple, connaissances linguistiques et compréhension interculturelle). Gérer la diversité ne consiste pas seulement à recruter une main-d'oeuvre diversifiée mais aussi à gérer et réadapter l'organisation à son profit. L'expérience internationale révèle qu'un grand nombre d'entreprises et d'établissements publics ont su tirer largement parti de la mise en oeuvre de telles stratégies. Bien que l'intégration dans le marché du travail constitue un élément clé du processus d'intégration, sa réussite à long terme est peu probable si elle n'est pas appuyée également par l'intégration des immigrants dans la vie sociale, culturelle et politique de la société d'accueil [58].
[58] Conférence européenne sur l'intégration réussie (Ibid)
3.3.2 Education et compétences linguistiques
L'éducation et la formation sont des facteurs clés d'une intégration réussie. De gros problèmes se posent pour les immigrants en ce qui concerne la reconnaissance de leurs résultats académiques et de leurs qualifications, ce qui nuit à l'efficacité des services d'orientation pédagogique. Un niveau d'éducation insuffisant peut se traduire par des taux d'emploi relativement bas des ressortissants de pays tiers (cf. figure 10 de l'annexe). Une préoccupation majeure de la plupart des États membres est la capacité des immigrants à parler la langue du pays d'accueil. Des lacunes linguistiques sont considérées comme le principal obstacle au succès de l'intégration. En même temps, un grand nombre d'États membres soutiennent que les lacunes linguistiques ne devraient pas empêcher l'accès au marché du travail ou au système éducatif. Ils estiment au contraire que le fait de participer à la vie professionnelle ou à l'éducation et à la formation contribue au développement des compétences linguistiques nécessaires. En tenant compte de la garde des enfants et des dimensions culturelle et religieuse, une telle approche est particulièrement importante pour les femmes migrantes, afin de leur permettre de suivre des cours de langues. Elle l'est d'autant plus que ces cours peuvent influer sur les compétences linguistiques de leurs enfants.
À noter que le système éducatif joue un rôle essentiel non seulement pour l'acquisition de connaissances mais aussi en tant que lieu d'acquisition d'informations formelles et informelles sur les normes et les valeurs de la société et en tant que passerelle culturelle. Il s'agit d'un instrument important pour encourager le pluralisme et la diversité dans la population immigrante et dans la société d'accueil et, partant, pour lutter contre la discrimination.
Plusieurs questions relatives à l'éducation des enfants d'immigrants doivent être abordées. La diversité devrait se refléter dans les programmes d'études; une étroite coopération devrait être poursuivie entre les parents, les communautés d'immigrants et les établissements scolaires, et tout problème spécial (par exemple lorsqu'il y a beaucoup d'enfants d'immigrants dans la même école) devrait être traité.
3.3.3 Problèmes de logement et urbains
La distribution spatiale de l'immigration varie considérablement d'un État membre à l'autre et suivant les régions, avec une concentration relativement plus forte dans les régions urbaines et industrialisées. Les problèmes d'intégration se posent surtout dans les régions pluriethniques - et souvent défavorisées - où le racisme et la xénophobie empêchent les migrants d'avoir un sentiment d'appartenance et de participation. Le lieu de travail a indiscutablement une incidence sur le choix de la résidence, qui peut aussi s'expliquer par les schémas de l'immigration antérieure et la présence de communautés établies. Les immigrants représentent à présent un pourcentage croissant de la population des villes et des régions urbaines et leur nombre augmentera probablement encore au cours des prochaines décennies. L'accès au logement est une nécessité de base de l'intégration et le manque de logements de qualité abordables dans les régions pluriethniques est un problème rencontré par un grand nombre de migrants et de réfugiés.
Le fait qu'un grand nombre d'immigrants vivent dans des régions urbaines défavorisées est imputable à un certain nombre de facteurs de "contrainte et de choix" tels que les possibilités d'obtention d'un logement et d'un travail, le désir de vivre près de parents et de maintenir les réseaux familiaux, la discrimination [59]. Ces concentrations d'ethnies dans des lieux de résidence - appelés aussi ghettos - ont tendance à isoler les communautés et à les empêcher de participer à la société au sens large. Bien que des réseaux communautaires étroits puissent faire revivre et régénérer des quartiers négligés - par exemple, par la création de petites entreprises -, la ségrégation ethnique et sociale urbaine peut aussi constituer un obstacle majeur à l'intégration.
[59] Conférence européenne "Successful integration on the Labour Market" organisée à Copenhague les 4 et 5 juillet 2002.
Des stratégies globales de planification urbaine et régionale prenant en compte, par exemple, l'infrastructure, le logement, les loisirs, les achats, les services de santé, les transports et les équipements scolaires ainsi que les besoins du marché du travail local peuvent surmonter ces obstacles et atténuer les conséquences négatives de la ségrégation urbaine, y compris la tension sociale entre les immigrants et la population d'accueil. Une forte concentration et une ségrégation spatiale génèrent également un grand nombre des conditions propices à l'immigration clandestine et aux trafics, et ces phénomènes favorisent le développement des attitudes discriminatoires dans la société d'accueil.
3.3.4 Services de santé et sociaux
L'accès aux services sociaux et de santé pour les population d'immigrants est un autre domaine important où il peut s'avérer nécessaire d'adapter les politique existantes. Les populations d'immigrants peuvent souffrir de problèmes de santé particuliers liés à leur situation (par exemple, séparation de membres de la famille, incertitudes découlant de leur situation, surtout si elle est temporaire). Un schéma d'insécurité et de mauvaises conditions de vie et de travail peuvent aussi entraîner des problèmes de santé connexes largement évitables par la mise en place de mesures adéquates. En même temps, les populations d'immigrants ont des difficultés à accéder à des services de santé et sociaux de qualité. Il y a plusieurs questions à aborder, dont la mise à disposition d'informations adéquates pour les communautés de migrants et des formations supplémentaires pour le personnel responsable de la prestation de ces services. Une participation accrue de personnes d'origines ethniques différentes à la planification et à la prestation des services de santé devrait contribuer à prévenir la discrimination et garantir que ces services tiennent compte des obstacles culturels et sont sensibles aux problèmes des communautés spécifiques où ils sont fournis.
3.3.5 Environnement social et culturel
L'implication et la participation actives des immigrants et des personnes bénéficiant d'une protection internationale à la vie civile revêtent une grande importance. Il faut des mesures visant à favoriser leur participation, par exemple, à des clubs sportifs, à des conseils scolaires ou à d'autres aspects de la vie associative, et à les encourager à prendre part au débat public. La rencontre avec d'autres personnes est une étape importante de l'adaptation et la participation à la société d'accueil ainsi que l'interaction entre les différentes cultures et religions développeront la tolérance et le respect. Les efforts doivent être intensifiés en raison de la tendance croissance du public à reprocher aux immigrants l'insécurité de nos sociétés et de l'hostilité générale envers les musulmans déclenchée par les événements du 11 septembre 2001 aux États-Unis. Il faut donner des informations exactes sur les immigrants et l'utilité de leur contribution, à la fois économique et culturelle, à nos sociétés car un échec à cet égard pourrait alimenter le ressentiment, l'exclusion sociale ainsi que la montée du racisme et de la xénophobie. Pour favoriser une attitude généralement positive du public envers les immigrants, il faut une volonté politique ferme et un engagement clair à promouvoir des sociétés pluralistes ainsi que la condamnation du racisme. Les politiciens et les mass médias ont à cet égard une très grande responsabilité en tant qu'éducateurs de l'opinion publique. Ils doivent montrer l'exemple à la société civile en insistant sur la valeur de la contribution apportée par les immigrants et en veillant à ce la couverture générale des questions d'intégration ainsi que le ton des débats soient équilibrés et fondés sur des informations exactes.
3.3.6 Nationalité, citoyenneté civile et respect de la diversité
Les conclusions de Tampere ont avalisé l'objectif d'offrir aux ressortissant de pays tiers résidant légalement depuis longtemps dans l'Union la possibilité d'obtenir la nationalité de l'État membre dans lequel ils résident. Il est largement reconnu que l'acquisition de la nationalité est un moyen de faciliter l'intégration, bien qu'elle n'ait pas besoin d'être l'objectif ultime du processus d'intégration et n'évite pas ipso facto les problèmes entraînés par l'exclusion sociale et la discrimination. L'acquisition de la nationalité est toutefois importante car elle favorise un sentiment d'adhésion à la vie nationale. La nationalité donne à celui qui la possède des droits à la pleine citoyenneté garantissant sa participation de jure à la vie politique, civile, sociale, économique et culturelle de l'État membre.
En partant de l'idée qu'il est souhaitable que les immigrants deviennent des citoyens, il est raisonnable de lier l'accès à la citoyenneté à la durée de séjour dans l'État concerné, et d'appliquer des principes différents aux immigrants de la première et de la deuxième ou de la troisième génération. Pour ces derniers, les législations sur la nationalité devraient prévoir un accès automatique ou semi-automatique, tandis qu'il est raisonnable d'exiger des immigrants de la première génération l'introduction d'une demande officielle de naturalisation. La naturalisation devrait être rapide, assurée et non discrétionnaire. L'État pourra exiger une période de résidence, la connaissance de la langue et prendre en compte le casier judiciaire. Les critères de naturalisation devront en tout cas être clairs, précis et objectifs. Les pouvoirs administratifs discrétionnaires doivent être délimités et soumis à un contrôle juridictionnel.
Dans sa communication de 2000 [60], la Commission a introduit la notion de citoyenneté civile, définie comme la garantie aux immigrants d'un certain nombre de droits et d'obligations fondamentaux qu'ils acquerront graduellement sur un certain nombre d'années, et qui leur assureront dans l'État d'accueil le même traitement qu'aux ressortissants dudit État, même s'ils ne sont pas naturalisés. La charte des droits fondamentaux établit pour la citoyenneté civile un cadre de base où certains droits s'appliquent de par leur nature universelle et d'autres, parce qu'ils dérivent de ceux conférés aux citoyens de l'Union [61]. En fait, le droit communautaire confère déjà [62] ou propose déjà de conférer [63] un grand nombre de ces droits à toutes les personnes qui résident légalement dans l'Union. Permettre aux migrants d'acquérir la citoyenneté civile après un certain nombre d'années aidera les immigrants à bien s'intégrer dans la société. Il pourrait aussi s'agir d'une première étape du processus d'acquisition de la nationalité de l'État membre concerné.
[60] COM(2000)757.
[61] Ces droits sont les suivants: droit à la libre circulation et droit de séjour, droit de travailler, de s'établir, de fournir des services, droit de voter, droit de se porter candidat aux élections au Parlement européen et aux élections municipales, droit à une protection diplomatique et consulaire, droit de pétition et d'accès aux documents et droit à la non-discrimination fondée sur la nationalité.
[62] Cf. articles 194 et 195 du traité CE concernant le droit de présenter une pétition au Parlement européen et le médiateur européen et l'article 255 concernant le droit d'accès aux documents.
[63] Cf. article 12 de la proposition de directive relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée qui inclut la libre circulation et le droit de résidence sur le territoire de l'Union ainsi que le droit de travailler, de s'établir et de fournir des services.
Un autre élément important de ce concept est la possibilité de participation à la vie politique. Plusieurs États membres [64] accordent déjà un droit de vote et un droit électoral local à tous les résidents étrangers sous certaines conditions. Du point de vue de l'intégration, il est évident que le droit de vote et le droit électoral local dérivent de la résidence et non de la nationalité [65]. La Commission estime qu'accorder aux immigrants résidents de longue durée des droits politiques est important pour le processsus d'intégration et que le Traité devrait prévoir la base juridique pour ce faire.
[64] Danemark, Irlande, Pays-Bas, Suède et Finlande.
[65] Voir aussi la Convention sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local, adoptée par le Conseil de l'Europe en 1992 et entrée en vigueur en 1997.
3.4 Principaux acteurs d'une politique d'intégration holistique
Une condition essentielle du succès de la mise en oeuvre d'une approche holistique de l'immigration est l'amélioration de la cohérence globale des politiques et des synergies entre l'immigration, l'intégration, les politiques de l'emploi à tous les niveaux et dans tous les domaines. Cependant, bien que cette approche doive être dirigée par les gouvernements, elle devrait bénéficier, en ce qui concerne les politiques, de la coopération des partenaires sociaux, de la communauté des chercheurs et des prestataires de services publics, des ONG et des autres acteurs de la société civile, y compris les immigrants eux-mêmes.
Les politiques d'intégration sont souvent conçues au niveau national et mises en oeuvre au niveau local ou régional, ce qui nécessite une excellente coopération et une très bonne circulation d'informations entre tous les acteurs concernés. Les ONG jouent un rôle central, tant au niveau national qu'au niveau local, en défendant les intérêts des migrants et des personnes bénéficiant d'une protection internationale [66], ce qui est très important pour assurer la coopération et la compréhension entre les prestataires chargés de l'exécution et les utilisateurs. Les partenaires sociaux ont un rôle important à jouer dans le processus d'intégration en tant que facilitateurs de l'intégration au quotidien sur le lieu de travail, et en soulignant l'importance d'une réponse aux différences culturelles, ils peuvent accroître l'efficacité de la main-d'oeuvre et la responsabilité sociale.
[66] Conférence "Immigration: le rôle de la société civile dans la promotion de l'intégration" organisée à Bruxelles les 9 et 10 septembre 2002.
Tous les acteurs susmentionnés ont une part de la responsabilité commune du succès de l'intégration des ressortissants des pays tiers dans nos sociétés. Pour la définition et la mise en oeuvre des politiques, le dialogue avec les acteurs clés revêt une importance cruciale, mais la création d'un esprit d'intégration relève de la société de l'UE dans son ensemble. Sensibiliser la population d'accueil aux avantages et aux défis de l'immigration est un aspect essentiel d'une stratégie proactive de l'intégration.
3.5 Tenir compte des besoins des groupes spécifiques de migrants dans la politique d'intégration
Bien que les immigrants aient un vaste éventail de besoins communs dans l'ensemble de l'Union, certains ont des besoins et des priorités spécifiques qui doivent être pris en compte dans les stratégies d'intégration globales.
3.5.1 Réfugiés et personnes bénéficiant d'une protection internationale
Même si, à bien des égards, les réfugiés et les personnes bénéficiant d'une protection internationale se trouvent dans la même situation que les autres immigrants, les problèmes de ce groupe liés à la nature même de la migration forcée et son besoin de protection doivent être abordés dans les stratégies d'intégration nationales. Il ne faut pas oublier que ces personnes n'ont pas choisi de quitter leur pays d'origine pour des raisons économiques et qu'elles peuvent avoir besoin d'une aide supplémentaire pour s'intégrer et en particulier pour accéder aux activités générales dès que possible. Les programmes spécifiques pour les réfugiés doivent être conçus en complément des services normaux ou servir de passerelles vers ceux-ci et être ciblés sur les groupes vulnérables de la communauté des réfugiés tels que les enfants de réfugiés, les personnes âgées, les victimes de violences sexuelles ou de tortures et les personnes traumatisées à la suite de persécutions et/ou d'une fuite. Une préoccupation essentielle concernant les personnes de ce groupe est de leur permettre de prendre leur vie en main et de les encourager à devenir autonomes et durablement indépendantes. Cela est d'autant plus important que, contrairement aux migrants économiques, ces personnes n'ont souvent aucune famille, aucune communauté ou aucun réseau auxquels elles pourraient avoir recours.
Cependant, les réfugiés ont dans l'ensemble un niveau d'études élevé et de bonnes qualifications et souvent des difficultés à obtenir la reconnaissance de leur expérience et de leurs diplômes. Certaines prescriptions, limitations ou obligations spécifiques en matière d'intégration, applicables aux migrants peuvent ne pas s'appliquer telles quelles aux réfugiés. La sanction ultime de la révocation du permis de résidence, applicable aux autres migrants qui n'ont pas réussi les tests d'intégration, ne peut pas toujours être imposée aux réfugiés ni aux personnes bénéficiant d'une protection internationale.
3.5.2 Questions relatives à l'égalité entre les sexes
Une autre catégorie importante est celle des femmes, en gardant à l'esprit que près de la moitié des immigrants entrant chaque année dans l'UE sont actuellement des femmes dont un pourcentage croissant viennent de leur propre chef pour travailler, souvent en tant qu'infirmières ou dans les professions des soins ou encore en tant que domestiques. Les femmes immigrantes peuvent être victimes d'une double discrimination liée à leur sexe et à leur origine ethnique. Il faut donc veiller spécialement à assurer un accès égal au marché du travail ainsi qu'à une éducation et une formation adéquates et, en particulier à l'éducation et à la formation tout au long de la vie. L'apprentissage des langues, la sensibilisation aux droits de l'homme, aux droits civiques et aux droits sociaux, y compris les normes et les valeurs de la société d'accueil ainsi que l'acquisition de nouvelles qualifications et de nouvelles compétences sont des outils essentiels pour l'intégration des hommes et des femmes. Cela est particulièrement important pour les femmes, étant donné leur rôle de transmetteuses des traditions culturelles dans la famille et leur aptitude à influencer les générations futures.
Bien que le rôle de la famille varie d'une culture à l'autre, celle-ci joue généralement un rôle central dans le processus d'intégration car elle représente pour les immigrants un point fixe de référence dans leur nouveau pays d'accueil. Le regroupement familial autour du noyau familial est un instrument clé à cet égard. Ce sont essentiellement les femmes qui bénéficient des dispositions de regroupement familial et leur situation en matière de résidence dépend donc souvent d'un membre de la famille. Elles peuvent avoir des difficultés à obtenir un emploi, ce qui peut les conduire à entrer dans le secteur informel. C'est pourquoi la directive sur le regroupement familial dispose que les femmes ont accès au marché du travail et reçoivent un titre de séjour indépendant en cas de situation particulièrement difficile.
3.5.3 Immigrants de la deuxième et de la troisième génération
Bien que de nombreux immigrants de l'Union européenne soient bien intégrés, dans plusieurs pays, la situation de la deuxième et de la troisième génération suscite des préoccupations croissantes. C'est le cas notamment pour les jeunes dont l'un ou les deux parents sont des immigrants de pays tiers à l'UE, qui sont plus susceptibles de rester sans emploi [67].La discrimination sociale et raciale peut aussi empêcher des jeunes immigrants de la deuxième et de la troisième génération d'accéder sur un pied d'égalité avec les ressortissants nationaux à des emplois et à des places de la société pour lesquels ils sont qualifiés [68]. Pour un grand nombre d'entre eux, cette situation est aggravée par le manque d'identité claire en cas de sentiment de rejet par la société d'accueil alors qu'en même temps, leurs liens avec leur pays d'origine se sont relâchés ou ont même disparu. L'échec des politiques d'intégration joue un rôle en permettant le développement de ce phénomène. L'identification des causes et l'élaboration de nouvelles politiques destinées à les aborder, où l'éducation et la formation et en particulier l'éducation et la formation tout au long de la vie seront des éléments cruciaux, contribueront à éviter ces problèmes à l'avenir.
[67] Séminaire sur l'intégration des jeunes migrants dans le marché du travail, organisé à Bruxelles les 6 et 7 juin 2002 par le ministère belge de l'emploi et du travail et par l'OCDE.
[68] voir note 67.
3.6 Résoudre le problème des migrants clandestins
Les ressortissants de pays tiers résidant illégalement dans l'UE posent un défi important au processus d'intégration. Il est impossible d'évaluer avec certitude le nombre de ces migrants mais des éléments des procédures de régularisation menées ces dernières années [69], entre autres, révèlent qu'ils sont très nombreux. La mise en oeuvre des plans d'actions sur la migration illégale [70], les contrôles frontaliers [71] et les politiques en matière de retour [72], déjà adoptés par le Conseil, devraient contribuer largement à la réduction des flux de migrants illégaux. Il n'est toutefois pas nécessaire de s'occuper de la situation des personnes qui vivent déjà dans les États membres.
[69] Cf. communication concernant une politique commune en matière d'immigration clandestine (COM(2001)672 du 15 novembre 2001
[70] Plan global de lutte contre l'immigration clandestine et la traite des êtres humains dans l'Union européenne du 28 février 2002 , JO C 142 du 14 juin 2002, p.23
[71] Plan pour la gestion des frontières extérieures des États membres de l'Union européenne du 13 juin 2002, Document du Conseil n°10019/02, FRONT 58
[72] Programme d'aide au retour du 28 novembre 2002, Document du Conseil n° 14673/02, MIGR 125
Dans le contexte de la politique d'immigration commune, la seule approche cohérente pour traiter le problème des résidents illégaux est de veiller à ce qu'ils retournent dans leur pays d'origine. Cependant, dans un grand nombre de cas, il n'est pas possible de mettre en oeuvre cette politique pour des raisons juridiques, humanitaires ou pratiques. Ce groupe de personnes doit être examiné du point de vue, d'une part, de son impact sur le marché du travail et, d'autre part, de l'objectif de l'intégration et de la cohésion sociale. Dans les deux cas, la présence d'un grand nombre de résidents illégaux a une influence négative: il s'agit d'une source de main-d'oeuvre bon marché, susceptible d'être exploitée, qui empêche à long terme la réforme structurelle nécessaire et contribue de ce fait à l'inefficacité du marché du travail. Vu l'interdépendance des secteurs du travail non déclaré et de l'immigration illégale, il existe un lien manifeste entre les politiques générales visant à prévenir et à lutter contre le travail non déclaré, qui doit aussi être renforcé dans le cadre d'un large éventail de mesures destinées à transformer le travail non déclaré en travail régulier. En même temps, les immigrants illégaux ne peuvent participer pleinement à la société en tant que contributeurs ou bénéficiaires, ce qui contribue à leur marginalisation et encourage les attitudes négatives des populations locales à leur égard.
Bien que les politiques de lutte contre l'immigration illégale doivent rester fermes, les politiques d'intégration ne peuvent déboucher sur une pleine réussite à moins que les problèmes entraînés par la présence de ce groupe de personnes ne soient abordés de manière adéquate et raisonnable. Certains États membres ont mis en oeuvre des mesures de régularisation à l'intention des résidents illégaux. Ces procédures peuvent être considérées comme un facteur de développement du processus d'intégration mais aussi comme un encouragement à poursuivre l'immigration illégale. Ce problème doit toutefois être évalué à l'aune des problèmes que posent la présence de nombreux résidents illégaux dans les États membres. Il ne faut pas oublier que les immigrants illégaux sont protégés par les normes universelles des droits de l'homme et doivent jouir de certains droits fondamentaux, notamment aux soins de santé d'urgence et à l'enseignement primaire pour leurs enfants.
4. VERS DE NOUVEAUX PROGRES: ORIENTATIONS ET PRIORITES STRATEGIQUES
Dans le contexte de l'UE, les politiques d'immigration d'un pays se répercutent inévitablement sur les autres pays. À ce facteur commun s'ajoute la pression induite par les changements démographiques qui affectent l'ensemble de l'UE. L'UE doit donc se préparer à l'immigration actuelle et future de manière responsable et efficace. Pour ce faire, l'Union dans sa globalité doit faire preuve d'une efficacité accrue dans l'élaboration de politiques visant à garantir l'intégration des immigrés. La Commission a l'intention d'intensifier ses efforts dans plusieurs domaines, afin de rendre le cadre européen en matière d'immigration plus cohérent et de garantir que l'immigration contribue le plus efficacement possible à relever les nouveaux défis démographiques et économiques qui se posent actuellement à l'UE.
Pour faire face aux conséquences du vieillissement de sa population, l'UE doit d'abord exploiter les ressources humaines dont elle dispose. Il est vital de promouvoir la participation au marché du travail et l'accroissement de la productivité pour atteindre les objectifs de Lisbonne, à savoir le développement de l'emploi, le renforcement de la cohésion sociale et la croissance économique. Les immigrés résidant actuellement dans l'UE peuvent y contribuer de manière significative. Cependant, dans le contexte d'une population en âge de travailler vieillissante et en voie de diminution, des flux migratoires plus soutenus sont, bien qu'ils ne peuvent répondre à tous les effets du changement démographique, de plus en plus souhaitables et nécessaires pour combler les besoins du marché du travail européen.
Il y a lieu d'adopter une approche anticipatrice qui réponde à la fois au besoin de promouvoir une meilleure intégration des nouveaux immigrés et des immigrés qui sont déjà établis et à la nécessité de préparer l'immigration future de manière à ce qu'elle bénéficie à tous. Des nouvelles structures et idées sont nécessaires, tout comme la mobilisation et la coordination d'un éventail de politiques pertinentes et d'une multitude d'acteurs aux différents niveaux. Il est capital de veiller à ce que les besoins spécifiques des migrants soient pleinement pris en compte dans les principales politiques, qui influent sur leur situation.
4.1 Consolider le cadre juridique
La Commission a déjà proposé plusieurs instruments législatifs en vue de créer un cadre juridique de base concernant l'admission des ressortissants de pays tiers et les conditions requises pour leur séjour. Des progrès modestes ont été accomplis en vue d'adopter ces directives. C'est pourquoi, tout en saluant l'accord intervenu récemment au Conseil en matière de regroupement familial, la Commission demande instamment que le processus s'accélère pour ce qui est des initiatives en souffrance. Elle insiste notamment pour:
* que la directive sur le statut des résidents de longue durée soit adoptée dans les délais fixés par le Conseil de Séville (juin 2003) et que les États membres, en transposant cette directive en droit interne, envisagent d'octroyer des droits politiques aux résidents de longue durée, en particulier à l'échelon local;
* qu'une date limite située en 2003 soit fixée pour l'adoption de la directive sur l'admission aux fins d'exercer un emploi, qui créera la transparence et les conditions nécessaires à la gestion efficace de l'admission des travailleurs migrants;
* qi'il soit envisagé, à la lumière de l'adoption de la directive sur le statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée et conformément à l'avis du Comité économique et social européen [73], d'étendre aux ressortissants de pays tiers la directive [74] relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles pour ce qui est des professions réglementées, lorsque cette proposition de la Commission aura été adoptée. Le fait de garantir la reconnaissance des qualifications et périodes d'études des immigrés constituerait une étape importante sur la voie de la pleine intégration de ceux-ci au marché du travail;
[73] Avis du CESOCE (SOC/113) du 18 septembre 2002 sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles COM(2002)119 final.
[74] COM(2002)119final, septembre 2002
* que, dans le souci de promouvoir la lutte contre la discrimination, les États membres veillent à ce que les directives adoptées à l'échelle de l'UE en 2000 soient transposées en droit interne en 2003, dans les délais impartis. La Commission encourage les États membres à dépasser les exigences minimales fixées dans ces directives et à promouvoir des actions positives, spécialement en ce qui concerne l'obligation des pouvoirs publics de garantir l'égalité de traitement pour les migrants, de façon à favoriser leur intégration.
La Commission accordera une attention particulière à la transposition et à la mise en oeuvre des instruments proposés au titre de l'article 63, paragraphe 3, qui auront un impact considérable sur l'intégration des ressortissants de pays tiers. La Commission étudiera également l'opportunité de formuler de nouvelles propositions législatives pour garantir l'intégration des ressortissants de pays tiers, des réfugiés et des personnes bénéficiant d'une protection subsidiaire. Dans l'esprit des propositions existantes (voir point 1.1 ci-dessus), des mesures spécifiques peuvent s'avérer nécessaires pour les demandeurs d'asile et les personnes jouissant d'une protection temporaire.
4.2 Renforcer la politique de coordination
4.2.1 Assurer le suivi de la mise en place de la politique commune en mati&egegrave;re d'immigration: un rapport annuel
Dans sa communication de novembre 2000 [75], la Commission a déjà souligné la nécessité de suivre de près et d'évaluer la politique de l'UE en matière d'immigration. Afin de suivre les progrès au fil du temps et de garantir la cohérence globale, tant des politiques et des instruments de l'UE qui influent sur l'immigration que des politiques nationales, la Commission a l'intention de rédiger un rapport annuel sur la mise en place de la politique d'immigration commune. Ce rapport s'appuiera sur les informations tirées du large éventail de politiques et d'initiatives de l'UE concernant les immigrés, en particulier celles qui sont mentionnées ci-après. Il vise à garantir que les besoins des immigrés sont intégrés de façon rationnelle dans toutes ces politiques et initiatives et à informer le Conseil des avancées constatées dans les politiques et programmes principaux. Le rapport s'appuiera également sur d'autres travaux en cours qui visent à renforcer le suivi et l'évaluation à l'échelle de l'UE de la politique d'immigration (voir point 3.11 ci-dessous). Enfin, il complétera le rapport annuel sur la mise en place d'une politique d'asile commune à l'échelle européenne.
[75] COM (2000)757
4.2.2 Renforcer la coordination des politiques d'intégration
Dans sa communication de juillet 2001 sur une méthode ouverte de coordination de la politique communautaire en matière d'immigration [76], la Commission a par ailleurs identifié plusieurs domaines dans lesquels le renforcement de la coopération et de l'échange d'informations entre les États membres présenterait, selon elle, un intérêt particulier. Parmi ces domaines figure l'intégration des ressortissants de pays tiers en séjour régulier. L'intégration est un processus complexe qui comporte des difficultés sur le plan conceptuel, pratique et politique. Les politiques doivent prendre en compte les caractéristiques de la société d'accueil et sa structure organisationnelle. Il n'existe pas, en la matière, de solution unique ni de réponse simple. Cependant, les problèmes sont souvent semblables et il est possible de s'enrichir considérablement de l'expérience des autres à la recherche des meilleures solutions. L'intégration est également un domaine dans lequel une convergence accrue s'impose en ce qui concerne les concepts et les objectifs stratégiques, en raison de la mise en place d'un cadre juridique commun pour l'admission et le statut des ressortissants de pays tiers.
[76] COM(2001)387
La Commission propose donc de développer la coopération et l'échange d'informations dans le cadre du nouveau Groupe des points de contacts nationaux sur l'intégration [77], en vue de renforcer la coordination des politiques correspondantes à l'échelle nationale, entre autres. Dans un premier temps ce groupe concentrera ses travaux sur les questions d'intérêt commun identifiées par les États membres, en tentant compte des Conclusions du Conseil de Thessalonique. Ce processus de coopération sera développé en parfaite complémentarité et synergie avec les autres politiques de l'UE, en particulier les politiques de cohésion et d'inclusion sociales, la politique de lutte contre la discrimination et la stratégie européenne pour l'emploi. Il enrichira d'autres processus existants par ses apports spécifiques, de façon à ce que les autorités compétentes prennent mieux en compte la dimension d'intégration dans les politiques principales. Il ressort clairement du rapport de la Commission sur les politiques d'intégration nationales, qui a été élaboré à la demande du Conseil "Justice et affaires intérieures" réuni à Veria au mois de mars 2003 (voir annexe I), que les États membres abordent la question de l'intégration par des voies et avec des moyens différents. Les actions menées ou les mesures prises en vue de résoudre un problème donné ne sont pas nécessairement les mêmes dans tous les États membres, en raison des situations nationales, régionales ou locales qui différent parfois. Cela rend d'autant plus nécessaire l'échange d'informations et de bonnes pratiques. Outre l'intégration des immigrés au marché du travail, qui sera abordée dans le cadre de la stratégie européenne pour l'emploi (voir point 4.4 ci-dessous), on peut déjà identifier les domaines prioritaires suivants:
[77] Conformément aux Conclusions, il a été proposé de dresser une liste actualisée et facilement accessible des points de contact nationaux, qui apporteront leur concours à la coopération et à l'échange d'informations entre États membres. Dans le cadre du Comité sur l'immigration et l'asile, un forum destiné aux points de contact (Groupe "Intégration") a été créé par la Commission.
* programmes d'introduction pour les immigrés récents: L'accueil des immigrants est très important dans le processus d'intégration, car il est nécessaire que les nouveaux arrivants se familiarisent avec l'environnement social et culturel général du pays d'accueil. Il est souhaitable que les États membres échangent des informations entre eux, dans le but de définir la meilleure façon d'introduire les immigrés récents. La priorité devrait être accordée aux programmes nationaux, plutôt qu'aux programmes régionaux ou locaux, à l'implication de la société civile dans ces programmes, au financement, y compris le cofinancement par l'immigré, à l'instauration d'obligations et de sanctions correspondantes, au contenu du programme d'introduction et à l'adaptation des programmes à des groupes cibles donnés;
* formation linguistique: la plupart des États membres ont exprimé leur préoccupation quant au fait que les immigrés ne sont pas capables de parler la langue du pays d'accueil. Les échanges doivent être axés, entre autres, sur les façons d'améliorer les connaissances linguistiques des immigrés, et plus particulièrement sur un nombre de questions essentielles, telles que la prise en compte des groupes spécifiques, le financement et le cofinancement par l'immigré, les tests linguistiques nationaux, les langues en rapport avec la naturalisation et les cours de langues combinés;
* participation des immigrés à la vie civique, culturelle et politique: il s'agit d'un aspect important, car il suscite le sentiment d'appartenir à une communauté et à la société en général, et d'en être membre. Un tel sentiment encourage les immigrés à s'investir dans la vie communautaire et dans d'autres activités sociales, culturelles et politiques. Les États membres pourraient échanger des informations sur des aspects essentiels tels que les droits politiques, la citoyenneté civique et la nationalité, les structures nationales, régionales et locales en faveur de la participation des immigrés, y compris le degré de participation des immigrés, les réponses à apporter aux différences culturelles et religieuses au sein de la société, l'évaluation comparative et l'élaboration d'indicateurs afin de mesurer le degré d'intégration en ce qui concerne ces aspects.
4.3 Citoyenneté civique et nationalité: outils visant à faciliter l'intégration
La Commission est d'avis d'utiliser le nouveau concept de citoyenneté civique afin de promouvoir l'intégration. Les droits contenus dans les initiatives existantes de la Commission contribuent à la concrétisation de ce concept. Cependant, elle souligne la nécessité d'entériner les droits et les devoirs des ressortissants de pays tiers en séjour régulier dans le cadre du nouveau Traité, en y incorporant la Charte des droits fondamentaux et en lui conférant un statut juridiquement contraignant [78]. Le Traité devrait prévoir les moyens permettant de traduire dans la réalité la citoyenneté civique et en particulier la participation à la vie politique au niveau local. [79]. La Commission poursuivra déploiera des efforts dans ce sens dans le cadre de la Convention et de la prochaine Conférence intergouvernementale. Elle travaillera également à l'élaboration de ce concept dans le contexte du processus de renforcement de la coordination entre les États membres en matière d'immigration (voir ci-dessus).
[78] Les modalités d'incorporation ont été débattues au sein du groupe de travail II de la Convention, présidé par M. Vitorino. Voir le rapport final du groupe de travail II, GT II - 16 du 22.10.2002.
[79] Cf. le résumé du document soumis par M. Vitorino, Commissaire et membre du groupe de travail X "Libertés, sécurité et justice" de la Convention, GT X - WD 14 du 15.11.2002.
La naturalisation est une stratégie qui peut contribuer à promouvoir l'intégration. Les États membres doivent en être conscient lorsqu'ils autorisent des immigrés et des réfugiés à résider sur leur territoire. La Commission accueille favorablement l'assouplissement des conditions imposées aux candidats à la naturalisation qui est intervenu dans plusieurs États membres au cours des dernières années. Dans le cadre du processus de coordination renforcée, la Commission promouvra l'échange d'informations et de bonnes pratiques relatives à la mise en oeuvre des Codes de la nationalité des États membres. Il est également nécessaire d'approfondir les recherches comparatives sur les Codes de la nationalité des États membres. La Commission en a fait une priorité au sein du 6ème programme-cadre de recherche 2002-2006.
4.4 La stratégie européenne pour l'emploi (SEE)
Suite à sa communication sur l'avenir de la stratégie européenne pour l'emploi du 14 janvier 2003 [80], la Commission a adopté ses propositions de lignes directrices et de recommandations en matière d'emploi le 8 avril 2003, dans laquelle elle souligne le fait que l'immigration doit être mieux prise en compte à l'avenir. Elle propose trois objectifs globaux pour les futurs lignes directrices pour l'emploi, à savoir le plein emploi, la qualité et la productivité du travail ainsi que la cohésion et un marché du travail favorisant l'insertion. Elle demande instamment aux États membres et aux partenaires sociaux d'aborder ces questions et insiste sur la nécessité de promouvoir l'intégration et de lutter contre la discrimination des personnes défavorisées sur le marché du travail et contre le travail non déclaré. Dans le cadre de la SEE, la Commission considère qu'il est opportun d'aborder les questions suivantes:
[80] COM(2003)6 du 14 janvier 2003 "L'avenir de la stratégie européenne pour l'emploi".
* intégration durable des ressortissants de pays tiers au marché du travail. Pour ce faire, il y a lieu de garantir l'accès aux services de formation et d'emploi et d'adopter d'autres mesures visant à accroître la participation au marché du travail. Dans ses lignes directrices pour 2003, la Commission suggère que les États membres s'engagent à combler l'écart entre les ressortissants de l'UE et les ressortissants de pays tiers en termes de chômage d'ici à 2010;
* Combattre le travail non déclaré et réduire l'économie informelle en vue de développer une politique mixte à la fois d'ordre préventif et répressif pour transformer le travail non déclaré en travail régulier;
* suivi plus précis des besoins du marché du travail de l'UE et du rôle de l'immigration pour remédier aux pénuries de main-d'oeuvre actuelles et futures, en tenant compte de la compétitivité accrue entre les pays d'accueil;
* contribution à une plus grande mobilité professionnelle des ressortissants de pays tiers au sein de l'UE, notamment en développant le réseau EURES, en facilitant, dans le cadre de la stratégie européenne pour l'emploi, l'admission de ces ressortissants dans l'UE aux fins d'exercer un emploi;
* échange d'expérience et de bonnes pratiques dans ce domaine, notamment à travers les activités d'évaluation par les pairs menées dans le cadre du programme de promotion de mesures d'incitation au travail. Il faut accorder une attention particulière à la reconnaissance des compétences et des diplômes, à l'esprit d'entreprise, aux initiatives spéciales pour les jeunes immigrés de 2ème et de 3ème génération, aux obstacles à l'intégration au marché du travail, aux stratégies locales pour l'emploi destinées aux immigrés et à la formation linguistique à des fins professionnelles, y compris les programmes "accélérés".
La Commission estime que ces questions doivent également être examinées par les partenaires sociaux à l'échelle de l'UE, dans le cadre de leur programme de travail conjoint.
4.5 Le processus d'inclusion sociale
Les premiers plans d'action nationaux pour l'inclusion sociale (PAN/incl) en 2001 ont montré la nécessité d'aborder la question de l'intégration des immigrés de façon plus cohérente, intégrée et stratégique. Le Conseil européen de Copenhague (décembre 2002) a adopté les objectifs révisés de Nice en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, qui mettent explicitement l'accent sur le risque élevé de pauvreté et d'exclusion sociale auquel sont exposés certaines personnes du fait qu'elles immigrent. Les objectifs communs européens soulignent également la nécessité de mobiliser toutes les organisations concernées dans la préparation et la mise en oeuvre des PAN/incl. Si la lutte contre l'exclusion sociale et la pauvreté est avant tout du ressort des autorités nationales, régionales et locales, un large éventail d'organisations publiques et privées sont concernées, en particulier les partenaires sociaux. À cet égard, la Commission insiste sur les points suivants:
* dans le cadre de leur PAN/incl 2003 qui doit être soumis en 2003, les États membres sont invités à rendre compte des mesures et initiatives stratégiques visant à "favoriser l'intégration sociale des femmes et des hommes risquant, notamment en raison (...) de leur appartenance à un groupe social éprouvant des difficultés particulières d'insertion, de se trouver confrontés à des situations de pauvreté persistante", conformément aux textes adoptés par le Conseil européen de Copenhague;
* plusieurs études (p. ex. sur les conditions de logement des immigrés et des minorités ethniques), des travaux statistiques (p. ex. sur la faisabilité de collectes de données sur les revenus et les conditions de vie spécifiques des immigrés et des minorités ethniques dans le cadre de la nouvelle enquête communautaire sur les revenus et les conditions de vie) ainsi qu'un grand nombre de projets transnationaux visant à intégrer les immigrés seront menés au titre du programme d'action communautaire de lutte contre l'exclusion sociale (2002-2006) [81], ce qui contribuera directement à améliorer l'état des connaissances et à promouvoir l'échange d'expérience.
[81] Décision 50/2002/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 décembre 2001 établissant un programme d'action communautaire pour encourager la coopération entre les États membres visant à lutter contre l'exclusion sociale
4.6 Cohésion économique et sociale
Le troisième rapport de la Commission sur la cohésion économique et sociale dans l'UE, qui sera présenté d'ici à la fin de l'année 2003, ouvrira la voie à un débat ouvert sur l'avenir de la politique de cohésion [82]. La nouvelle période de programmation des Fonds structurels débutera en 2007. À cet égard, la Commission estime qu'il est important d'exploiter l'expérience acquise, en particulier dans le cadre du Fonds social européen et de l'initiative EQUAL, de façon à veiller à ce que:
[82] Voir aussi COM (2003)034, "Deuxième rapport d'étape sur la cohésion économique et sociale", 30 janvier 2003
* la révision à mi-parcours de la période de programmation 2002-2006, prévue en 2003, tienne davantage compte du défi posé par l'immigration dans le domaine de l'emploi et de l'inclusion sociale;
* les leçons stratégiques tirées de l'initiative EQUAL en termes d'intégration des immigrés, en particulier des demandeurs d'asile, soient largement diffusées [83];
[83] Pas moins de 1 500 partenariats de développement EQUAL ont été créés depuis 2001. 127 millions d'euros sont disponibles pour des actions visant à lutter contre le racisme et la xénophobie en ce qui concerne marché du travail et 153 millions d'euros en ce qui concerne les demandeurs d'asile, pour la période de programmation 2001-2006.
* le débat général sur l'avenir de la politique européenne de cohésion prenne pleinement en compte le défi que représente l'intégration des immigrés, notamment pour ce qui est de l'investissement dans les ressources humaines, de l'accès à l'emploi et de la régénération des régions urbaines défavorisées.
4.7 Lutter contre la discrimination
Les immigrés sont trop souvent exposés au risque de discrimination. La Commission estime qu'il est non seulement important de soutenir les États membres dans la mise en oeuvre des deux directives antidiscrimination susmentionnées, mais aussi de renforcer la lutte contre la discrimination, en :
* sensibilisant le public aux législations communautaires et nationales interdisant la discrimination. À cette fin, une campagne d'information majeure, spécialement axée sur les employeurs et les travailleurs, sera lancée en 2003. La Commission rédigera par ailleurs un premier rapport sur l'égalité des sexes et la discrimination dans l'UE, en 2003;
* impliquant les entreprises dans les pratiques non discriminatoires: outre la publication du Livre vert de la Commission sur la responsabilité sociale des entreprises (RSE) [84], la nécessité de promouvoir la diversité et des pratiques de recrutement responsables et de lutter contre la discrimination au travail sera approfondie dans le cadre du nouveau forum multipartite sur la RSE;
[84] COM(2001)366
* assurant un meilleur suivi: conformément au rapport sur la situation de l'emploi des migrants qu'il a publié en décembre 2002, les travaux de l'Observatoire européen du racisme et de la xénophobie en 2003 seront notamment axés sur la collecte de données sur la situation des migrants et des minorités ethniques en matière d'emploi, de logement, d'éducation et de violence à caractère racial;
* échangeant les expériences respectives: dans le cadre du programme d'action communautaire de lutte contre la discrimination (2001-2006), plusieurs projets transnationaux, des échanges d'expérience et de bonnes pratiques et des études seront réalisés afin de mesurer l'ampleur de la discrimination et de renforcer les mesures politiques de lutte contre la discrimination.
4.8 Coopération dans le domaine de l'éducation
Dans le domaine de l'éducation, le plan de travail conjoint sur les objectifs des systèmes d'éducation et de formation adopté par la Commission et le Conseil [85] définit la façon dont la méthode ouverte de coordination sera mis en oeuvre. Il est prévu d'utiliser des critères de référence afin de fixer des objectifs concrets répondant aux défis de la stratégie de Lisbonne (Conseil européen de mars 2000); À cet égard, l'objectif global qui consiste à renforcer la citoyenneté active, l'égalité des chances et la cohésion sociale concerne notamment l'accès des immigrés et de leurs enfants aux systèmes d'éducation et de formation.
[85] JO C 142 du 04.06.02
Conformément à la communication de la Commission sur les critères de référence, adoptée par le Conseil le 5 mai 2003 [86], des critères de référence européens ou "niveaux de référence de la performance moyenne européenne" devront être atteint d'ici à 2010. Les trois critères suivants, qui figurent parmi les cinq critères de référence de l'UE, revêtent une importance particulière dans le contexte de la promotion de l'intégration et de l'emploi de la population immigrée:
[86] COM (2002) 629 final, 20.11.02
* le critère relatif aux jeunes quittant prématurément l'école (le taux moyen de jeunes quittant prématurément l'école dans l'UE ne doit pas dépasser 10 %);
* le critère relatif au taux d'achèvement des études (au moins 85 % des jeunes âgés de 22 ans doivent avoir achevé leurs études secondaires supérieures);
* le critère relatif à l'aptitude à la lecture (le pourcentage de jeunes de 15 ans ayant de mauvais résultats en lecture et en écriture dans l'UE doit au moins diminuer de 20 % par rapport à celui de l'année 2000).
4.9 Approfondir le dialogue avec les pays tiers
La communication de la Commission sur l'intégration de la politique des migrations dans les relations de l'Union européenne avec les Pays tiers [87] souligne que l'amélioration du dialogue avec les pays tiers constitue un élément majeur de la politique de l'UE en matière d'immigration, non seulement pour faciliter la régulation des flux migratoires, mais aussi pour lutter plus efficacement contre l'immigration clandestine, élaborer des nouvelles politiques de gestion des travailleurs migrants et créer une dynamique avantageuse à la fois pour l'UE et pour les pays d'origine, spécialement pour ce qui est des travailleurs migrants temporaires. Le renforcement des liens avec les pays d'origine devrait notamment permettre de garantir que les causes de l'immigration clandestine sont abordées et que la politique de l'UE en matière d'immigration soit conçue de telle sorte qu'elle contribue aux objectifs de développement, assure un partage équitable des coûts et des avantages de l'immigration. Cette politique devrait également faciliter les contacts entre les migrants et leurs familles et communautés dans leur pays d'origine, y compris le transfert de fonds (versements). Elle devrait également inciter les migrants potentiels à suivre les voies officielles d'admission plutôt que de tenter de pénétrer clandestinement dans l'Union européenne. Dans le cadre de ce dialogue, la Commission insiste pour que:
[87] Cf. Communication de la Commission - L'intégration de la politique des migrations dans les relations de l'Union européenne avec les Pays tiers (COM(2002)703 du 3.12.2002).
* le rôle et le potentiel des travailleurs migrants soient pleinement pris en compte;
* sur la base d'étude et de consultation approfondie sur les bénéfices, des progrès soient faits en faveur de la reconnaissance mutuelle sur le statut des qualifications professionnelles acquises par des ressortissants de pays tiers avant leur arrivée dans l'UE sur la base du principe de réciprocité. [88];
[88] Voir aussi les Conclusions du Sommet de Barcelone de 2002, au sujet des personnes possédant des qualifications en sciences et technologies
* l'UE devrait exploiter les possibilités existant dans le cadre de l'Accord général sur le commerce des services (AGCS) pour que les personnes qui migrent vers l'UE en vue d'y fournir des services puissent disposer de mécanismes de mouvement temporaire sûrs. Ceci répondrait aux attentes de nombre de pays en voie de développement.
4.10 Augmenter le soutien financier de l'UE à l'intégration
Une évaluation à mi-parcours du Fonds européen pour les réfugiés (FER) est en cours. Des nouvelles orientations pour la prochaine phase du FER seront proposées à la lumière de cette évaluation, le cas échéant. Quoiqu'il en soit, le FER devrait continuer à financer la mise en place de programmes et de politiques d'intégration des réfugiés et des personnes bénéficiant d'une protection internationale.
La Commission lancera également en 2003 plusieurs projets pilotes pour l'intégration des migrants [89]. Ces actions viseront à soutenir des réseaux et le transfert d'informations et de bonnes pratiques entre les États membres, les autorités régionales et locales et les autres parties prenantes, afin de favoriser un dialogue ouvert et d'identifier des priorités en vue de définir une stratégie plus cohérente en matière d'intégration des migrants en Europe.
[89] Ce programme sera lancé en juillet 2003 et sera doté d'un budget de 12 millions d'euros sur 3 ans. Il complétera les initiatives existantes axées sur l'intégration des immigrés.
4.11 Mieux connaître le phénomène de la migration
Comme indiqué ci-dessus, l'amélioration des connaissances et des outils de suivi et d'évaluation constitue une condition essentielle pour une mise en oeuvre efficace des politiques. Cet aspect est également vital en vue de sensibiliser le public à l'apport des migrants à la vie économique, sociale et culturelle dans l'UE. Faute de données et de connaissances exactes et comparables sur l'efficacité des mesures prises, les États membres et la Communauté ne seront pas en mesure de savoir si leurs politiques ont produit les effets escomptés. La Commission lance actuellement une étude sur l'évaluation comparative qui explorera les possibilités d'élaborer des indicateurs à l'échelle de l'UE et a adopté récemment un plan d'action pour la collecte et l'analyse des statistiques communautaires dans le domaine des migrations [90].
[90] COM(2003) 179
En outre, à la fin de l'année 2002, la Commission a lancé une action préparatoire pour la création d'un réseau européen des migrations (REM). Le REM élaborera une base systématique pour le suivi et l'analyse du phénomène pluridimensionnel de la migration et de l'asile en couvrant les nombreux aspects de ce phénomène - politique, juridique, démographique, économique et social - et en identifiant ses causes. Dix États membres ont désigné des points de contact nationaux en 2002 tandis que d'autres États membres devraient se joindre au projet en 2003. La phase préparatoire, qui peut être prolongée d'une durée maximale de trois ans, testera la possibilité de mettre sur pied une structure plus durable à l'avenir.
Les problématiques d'immigration et d'asile sont à présent pleinement intégrées dans les priorités du programme-cadre de recherche et développement de la Commission et dans le plan d'action de la Commission "Investir dans la recherche" [91]. Un large éventail de questions liées à l'immigration feront l'objet de recherches et d'analyses dans le cadre du 6ème programme-cadre, qui se déroulera de 2002 à 2006.
[91] Voir notamment COM(2003)226, point 3.1 "Favoriser le développement cohérent des politiques nationales et européennes", en particulier l'action nº 2 consistant à "instaurer un processus de coordination ouverte pour les mesures visant à développer les ressources humaines en science et en technologie, en mettant l'accent, en particulier, sur les implications de l'objectif des 3 %, comme une extension du processus actuel concentré sur la mobilité"
Ces actions serviront également à préparer le rapport susmentionné.
5. CONCLUSIONS
La présente communication permet à la Commission à la fois d'achever la mission qui lui a été assignée par le Conseil de Tampere et qui consistait à formuler des propositions détaillées pour soutenir la mise en place de politiques énergiques d'intégration de ressortissants de pays tiers dans l'UE, et de respecter l'engagement qu'elle avait pris dans le rapport de printemps 2003, à savoir l'analyse du rôle des politiques en matière d'immigration, d'intégration et d'emploi dans la réalisation des objectifs de Lisbonne.
L'aptitude de l'UE à gérer l'immigration et à garantir l'intégration des immigr&eaceacute;s influencera grandement sa faculté de maîtriser les mutations économiques et de renforcer la cohésion sociale à court et à plus long terme. Même si les implications économiques des mutations socio-démographiques n'apparaîtront pleinement qu'au fil du temps, il est nécessaire d'adopter dès à présent une approche anticipatrice en matière d'immigration pour être prêt à relever les défis futurs. Pour que les avantages économiques et sociaux de l'immigration puissent se concrétiser, il est nécessaire de parvenir à un taux de réussite plus élevé en matière d'intégration des migrants. L'UE doit donc relever le défi de l'intégration de façon globale. L'adoption rapide par le Conseil des propositions de directive existantes sur les conditions d'admission et de résidence des ressortissants de pays tiers constitue une condition sine qua non pour les actions futures, étant donné que ces propositions définissent l'ensemble des droits fondamentaux sur lesquels toutes les futures politiques d'intégration devront s'appuyer. À cet égard, la Commission suivra la mise en place du concept de citoyenneté civique en tant que nouvel outil d'intégration.
Conformément au principe de prise en compte des politiques d'intégration des immigrés dans les autres politiques, il est à présent nécessaire de traduire dans les politiques et les programmes existant à l'échelle de l'UE, en particulier la stratégie européenne pour l'emploi, le processus d'inclusion sociale ainsi que les programmes d'action communautaire de lutte contre l'exclusion sociale et la discrimination, le soutien accordé au grand nombre de propositions déjà formulées. Entre temps, le Fonds européen pour les réfugiés et les nouveaux projets pilotes visant à promouvoir l'intégration veilleront à ce que l'accent soit mis sur les questions spécifiques concernant les ressortissants de pays tiers qui doivent être abordées en tant que telles et à soutenir les politiques d'intégration nationales.
Enfin, en tenant compte des Conclusions du Conseil européen de Thessalonique, qui se tiendra les 20 et 21 juin 2003, la Commission s'efforcera de renforcer la coordination des politiques. Elle élaborera chaque année un rapport sur les progrès enregistrés dans la mise en place d'une politique d'immigration commune.
La Commission soumettra la présente communication au Comité économique et social européen et au Comité des régions à titre d'information.
ANNEX 1
RAPPORT SUR LES POLITIQUES NATIONALES D'INTÉGRATION
1. Introduction
Lors de la réunion du Conseil informel des ministres de la justice et des affaires intérieures qui s'est tenue les 28 et 29 mars 2003 à Veria, les États membres sont convenus que la Commission devait préparer un rapport de synthèse complet et actualisé sur les politiques d'intégration en vue du prochain Conseil européen, qui aura lieu les 20 et 21 juin 2003 à Thessalonique.
Le présent rapport complète la Communication de la Commission sur l'immigration, l'intégration et l'emploi en ce sens qu'il constitue une enquête sur les politiques d'intégration dans les États membres et démontre clairement l'existence d'un besoin de renforcer la coordination des politiques en matière d'intégration. Le rapport a été préparé sur la base d'un questionnaire relatif à l'intégration des immigrants [92], qui a été envoyé aussi bien aux États membres qu'aux pays en voie d'adhésion. La Commission a reçu 13 réponses des États membres [93] et 8 réponses des pays en voie d'adhésion [94]. La quantité d'informations et les détails fournis varient considérablement. Cependant, il existe manifestement de grandes différences au niveau des politiques d'intégration non seulement par rapport aux pays en voie d'adhésion, mais aussi au sein même de l'Union européenne. Ce constat n'est pas surprenant, étant donné que l'histoire migratoire des pays européens est très différente.
[92] Le questionnaire ne tenait pas compte de l'intégration des réfugiés. Il convient de signaler que dans de nombreux pays, les réfugiés et les immigrants ne sont pas considérés comme des catégories distinctes aux fins de l'intégration.
[93] La Belgique et la France n'ont pas répondu au questionnaire.
[94] La Pologne et la Hongrie n'ont pas répondu au questionnaire.
2. Synthèse des réponses au questionnaire
2.1 Accueil des nouveaux immigrants
Les programmes nationaux d'intégration sont dominants dans les pays où l'essentiel de l'immigration vise principalement la réunification familiale ou a un caractère humanitaire et où, dès lors, les nouveaux immigrants n'arrivent pas dans le pays avec une offre de travail et parlent rarement la langue du pays d'accueil à leur arrivée. En outre, ces pays ont généralement des systèmes de protection sociale très développés. Dans d'autres pays, ces questions ne semblent pas primordiales et les problèmes sont apparemment davantage liés à la mise en place d'infrastructures adéquates permettant d'intégrer les travailleurs migrants, comme l'accès au logement, aux services sociaux et aux soins de santé.
2.1.1 Objectifs des politiques d'intégration
Bien évidemment, les descriptions des objectifs des politiques d'intégration varient; cependant, il semble y avoir un consensus général sur les principaux objectifs des politiques d'intégration des États membres, à savoir, d'une part, permettre aux immigrants de vivre de façon indépendante et de subvenir à leurs besoins et, d'autre part, de leur permettre de participer activement à tous les aspects de la vie.
2.1.2 Description des politiques d'intégration
Dans des pays comme la Finlande, le Danemark et les Pays-Bas, la législation nationale relative à l'intégration a été adoptée en 1998 et en 1999; en Autriche et en Allemagne, des initiatives à cet égard ont également été prises récemment. La législation fournit un cadre général national d'intégration au sein duquel les différents acteurs peuvent élaborer des mesures, qui sont adaptées aux circonstances locales particulières et aux besoins individuels. Les programmes nationaux d'intégration comportent en général trois volets principaux: cours de langue, cours d'orientation ou d'introduction et une formation professionnelle adaptée au marché du travail. Les programmes - qui sont obligatoires dans une certaine mesure - sont le plus souvent adaptés aux besoins spécifiques de l'immigrant. Celui-ci est invité à un entretien, lors duquel son niveau de qualification, son éducation, son expérience pratique et ses connaissances linguistiques sont évalués. À la lumière de cet entretien, les éléments du programme individuel d'intégration sont déterminés. Tous les États membres n'ont pas donné d'information sur la durée de leurs programmes d'intégration; il semble qu'elle varie, mais dans la plupart des cas, elle est de 2 à 3 ans. En Allemagne, par exemple, en vertu de la proposition de loi sur l'immigration, les nouveaux immigrants auront juridiquement le droit de suivre une cours d'intégration, comprenant des cours de langues et d'orientation. Le cours d'orientation vise à donner des informations sur l'ordre juridique, la culture et l'histoire de l'Allemagne. Au Danemark, le cours d'orientation fait partie intégrante des cours de langues, qui sont gratuits pour tous les immigrants.
Dans les autres États membres, il n'existe pas de législation mettant en place un cadre pour les programmes nationaux d'intégration en faveur des immigrants. Cependant, des efforts ont été faits pour mettre au point une politique nationale favorisant l'intégration.
En Suède [95], les pouvoirs publics ont décidé en 1997 de s'intéresser davantage à l'intégration et la politique est axée sur la démarginalisation. Le principe de base est l'égalité des droits, des responsabilités et des chances pour tous et l'intégration est prise en compte dans tous les domaines d'action et doit faire partie des activités quotidiennes de tous les secteurs de la société. Une approche multiculturelle très similaire de l'intégration, basée sur les races et les relations entre elles, a été adoptée au Royaume-Uni, qui est depuis longtemps un pays d'immigration. Parallèlement à la politique d'immigration, plusieurs instruments et règles juridiques visant essentiellement à promouvoir l'égalité raciale et l'égalité des chances dans différents domaines - emploi, éducation, logement et protection sociale - ont été introduits et ces initiatives ont une incidence sur les perspectives de vie des migrants et de leurs descendants. L'Irlande a choisi une approche très similaire à celle du Royaume-Uni. À cet égard, il faut préciser que jusqu'à présent, tous les immigrants qui arrivent en Irlande ont déjà une proposition de travail et l'intégration se fait largement à travers le marché du travail.
[95] Il convient de signaler qu'il n'existe pas en Suède de programme d'intégration pour les réfugiés, tel que ceux mis en oeuvre pour les immigrants en Finlande, au Danemark et aux Pays-Bas.
Récemment, la Grèce a commencé à mettre en oeuvre- dans le cadre de la politique nationale de migration - un plan d'action intégré (2003-2006) en faveur de l'intégration sociale de tous les immigrants résidant légalement sur son territoire. Le plan d'action couvre différentes mesures dans six domaines principaux: information, marché du travail, culture, éducation et langue, services de santé et logement temporaire. Dans le cadre des initiatives relatives au marché du travail, la Grèce met sur pied un mécanisme de recensement des compétences professionnelles des migrants et des mesures sont prises pour favoriser l'entrepreneuriat.
De même, l'Espagne met actuellement en oeuvre un plan national d'intégration: le programme global pour l'immigration (2001-2004). Ce programme a défini des domaines cibles pour améliorer l'intégration: garantir aux immigrants la pleine jouissance de leurs droits (soins médicaux, accès au système scolaire, réunification familiale, liberté religieuse), accès à la citoyenneté, accès au marché du travail, mesures en matière de logement temporaire, amélioration de la structure nationale pour les questions d'intégration (mise en place de mécanismes destinés à intensifier le dialogue entre les autorités publiques à l'échelle nationale, locale et régionale, les ONG et la société civile) et lutte contre le racisme et la xénophobie. Outre les efforts au niveau national, plusieurs gouvernements nationaux mettent en oeuvre des programmes d'immigration, notamment des mesures favorables à l'intégration des migrants et toutes les grandes villes d'Espagne ont élaboré des programmes d'intégration.
Au Portugal, plusieurs initiatives ont été entreprises par la Haute Commission pour l'immigration et les minorités ethniques, organisme national de création récente qui a assumé la responsabilité du développement des politiques d'intégration au Portugal. En particulier, des efforts ont été faits pour accroître l'information aux immigrants nouvellement arrivés. En général, les ONG jouent un rôle important au Portugal, du fait qu'elles mettent en oeuvre des mesures d'intégration, gèrent plusieurs projets d'intégration, dispensent des cours de langues et aident à trouver un logement.
S'agissant de la mise en oeuvre de la politique nationale d'intégration, l'Italie, comme le Portugal, s'appuie très largement sur la société civile et en particulier sur la vaste communauté des ONG, qui sont d'importants fournisseurs de services d'aide sociale de base, y compris le logement. Plusieurs projets d'intégration ont été entrepris au niveau national, provincial et local avec le soutien financier du gouvernement.
En 1993, le Luxembourg a approuvé une loi sur l'intégration des étrangers, qui met en place des programmes coordonnés visant à faciliter l'adaptation sociale, économique et culturelle des étrangers. La proportion d'étrangers au Luxembourg est beaucoup plus grande que dans tout autre pays de l'UE et le pays a trois langues officielles. Une attention prioritaire a été accordée à l'élaboration d'un programme destiné à favoriser l'intégration des enfants étrangers (les enfants immigrants représentent 38 % de la population scolaire totale) et basé sur les principes d'éducation commune, de trilinguisme et d'égalité des chances.
2.1.3 Éléments obligatoires
Dans les États membres qui appliquent des programmes nationaux d'intégration, des éléments obligatoires sont généralement prévus. Au Danemark et en Autriche, les immigrants doivent accepter et respecter un "accord d'intégration" (si le migrant suit de façon satisfaisante le cours national d'intégration, l'accord pourra être respecté). Le non-respect des conditions définies dans l'accord a des conséquences défavorables sur le renouvellement du permis de résidence. En Autriche, les immigrants doivent supporter le coût du programme d'intégration et 50 % au plus peuvent être remboursés par l'État, si le migrant satisfait aux conditions de l'accord d'intégration dans un délai de 18 mois. En Allemagne, lorsque la nouvelle loi sur l'immigration entrera en vigueur, il sera également demandé aux migrants de contribuer financièrement (selon ses moyens personnels) au programme d'intégration et toute omission de suivre le programme peut avoir des conséquences négatives pour le renouvellement du permis de résidence. Tant en Allemagne et aux Pays-Bas, un certificat de participation satisfaisante à un cours d'intégration est délivré et peut réduire - dans le cas de l'Allemagne - la période de naturalisation de 8 à 7 ans. Dans les pays où les immigrants ont droit à une aide sociale pendant le programme, des sanctions sont généralement prises contre ceux qui ne participent pas aux programmes d'intégration: ainsi, ces aides sont réduites ou - dans le cas de migrants qui subviennent à leurs besoins - une amende administrative est imposée [96].
[96] Néanmoins, cette règle s'applique également aux ressortissants et immigrants dans les pays où les immigrants sont dirigés vers les services traditionnels, s'ils ne parviennent pas à prendre part aux activités du marché du travail.
2.1.4 Structure des instances de mise en oeuvre
Dans tous les États membres, la compétence de mettre en oeuvre les politiques d'intégration relève des autorités locales ou régionales, tandis que les entités chargées du paiement effectif des mesures et programmes varient considérablement. Dans certains pays, les autorités tant régionales que locales sont compétentes en la matière, alors que dans des pays, comme l'Espagne et les Pays-Bas, la compétence relève aussi des grandes villes. En Allemagne, l'État définit les lignes directrices des cours d'intégration, mais ceux-ci sont réalisés par des organisations publiques et privées. Le programme d'intégration à l'échelle nationale dans lequel les services d'intégration proposés sont définis doit être élaboré en coopération avec l'État, les gouvernements des Länder et les collectivités locales, ainsi qu'avec les partenaires sociaux et la société civile. Au Danemark et en Finlande, les municipalités sont de façon générale chargées de proposer des programmes d'intégration, mais elles peuvent décider de se faire aider par d'autres organisations publiques ou privées pour mener à bien les programmes.
2.1.5 Financement des politiques
Tous les États membres n'ont pas communiqué le montant exact de leurs dépenses annuelles pour la mise en oeuvre des politiques d'intégration. Comme le tableau l'indique, certains pays dépensent des sommes importantes pour l'intégration des immigrants. Toutefois, comme il n'est pas précisé ce que le montant couvre exactement et qu'il varie suivant le nombre de nouveaux arrivants et la taille du pays concerné, il est difficile de comparer les chiffres et il n'est dès lors pas possible de tirer des conclusions uniformes.
>TABLE>
2.2 Dispositions à moyen et long terme en vue de l'intégration des immigrants
Les États membres qui ont répondu à cette question renvoient généralement à la description des dispositions prises pour les immigrants nouvellement arrivés (décrites ci-dessus) pour expliquer les mesures d'intégration qui s'appliquent de la même façon ou partiellement à ce groupe. Cependant, les immigrants arrivés depuis plus longtemps relèvent généralement des services traditionnels, par exemple les services publics pour l'emploi ou les services sociaux. Dès lors, les politiques destinées à ce groupe sont souvent basées sur des projets, ciblent des groupes spécifiques et satisfont à des besoins particuliers. Les initiatives comprennent des mesures dans les domaines de l'éducation, de l'emploi, de la santé et de la protection sociale, du logement et de la promotion de leur participation dans la vie sociale, culturelle et politique. Aux Pays-Bas, des programmes spéciaux ont été élaborés pour éviter que des minorités ethniques ne deviennent le nouveau groupe défavorisé de la société. La Suède et l'Allemagne signalent que depuis le milieu des années 1970, elles financent des cours de langues pour tous les immigrants qui ne parlent pas correctement la langue, ce service étant gratuit.
2.3 Intégration dans le marché du travail
Les réponses concernant les mesures destinées à améliorer l'intégration dans le marché du travail font apparaître de grandes différences entre les États membres en raison des caractéristiques très différentes de l'immigration et de la demande du marché du travail. Certains États membres recherchent une main-d'oeuvre très qualifiée et d'autres uniquement de la main-d'oeuvre peu qualifiée. Parallèlement, de nombreux États membres sont confrontés à un taux de chômage relativement élevé parmi les immigrants, en particulier ceux des 2e et 3e générations. Il semble que ces différences soient déterminantes pour l'approche choisie pour remédier à ce problème.
2.3.1 Mesures planifiées
L'intégration des immigrants sans emploi dans le marché du travail est encouragée dans tous les États membres au moyen soit de politiques générales, soit de programmes individuels d'intégration, soit de programmes de recherche d'emploi. En Allemagne, des filières d'insertion sont mises au point pour lutter contre le chômage des jeunes, en particulier parmi les immigrants. En Espagne, des programmes visent à exploiter davantage les possibilités d'emplois particulièrement adaptés aux immigrants et à organiser des structures dans le pays pour satisfaire aux offres d'emploi qui restent insatisfaites.
En conformité avec la Stratégie européenne pour l'emploi, les Pays-Bas ont défini des objectifs nationaux spécifiques en matière d'intégration. La politique spécifique du marché de l'emploi vise à réduire de moitié la différence entre le taux de chômage des minorités ethniques et celui des personnes d'origine néerlandaise, ce qui équivaut à réduire de 10% le taux de chômage des minorités ethniques. La Finlande a également défini des objectifs de lutte contre la discrimination et de promotion des droits sociaux, afin de trouver des ressources supplémentaires pour la formation professionnelle des immigrants.
Quelques États membres, à savoir l'Autriche et l'Italie, ont instauré des systèmes spéciaux de quota pour les travailleurs migrants et le Royaume-Uni a l'intention de mettre en place de nouveaux dispositifs pour l'entrée de travailleurs temporaires qui occuperaient des postes peu qualifiés, étant donné qu'un besoin de travailleurs migrants est apparu dans certains secteurs. L'Autriche a conçu des dispositifs prévoyant un quota annuel pour l'entrée de travailleurs tant très qualifiés que saisonniers. En Italie, les employeurs qui emploient des immigrants en vertu du système de quota doivent garantir non seulement un travail, mais également un logement et les frais de déplacement.
2.3.2 Participation des partenaires sociaux
Dans certains États membres, les partenaires sociaux sont impliqués, à l'échelle nationale et locale, dans la préparation et la mise en oeuvre des mesures d'intégration. En Espagne, par exemple, les partenaires sociaux participent à l'élaboration des estimations de pénurie de main-d'oeuvre dans le pays. En Finlande, les organisations dont les activités concernent le marché du travail participent au niveau national à l'intégration des immigrants, principalement par l'intermédiaire d'organes consultatifs au sein desquels elles sont représentées. Au Danemark, un accord relatif aux mesures d'intégration sur le marché du travail a été conclu entre le gouvernement et les partenaires sociaux, ce qui témoigne d'une responsabilité concertée pour l'intégration. En vertu de l'accord, des exceptions aux conventions collectives peuvent être décidées au niveau local, aux fins d'accroître l'intégration des immigrants dans le marché du travail.
2.3.3 Coordination avec d'autres instances
De façon générale, les pouvoirs locaux et régionaux sont responsables de la mise en oeuvre des politiques d'intégration relatives aux immigrants. Dans de nombreux États membres, des orientations générales sont données au niveau national et les mesures sont soigneusement coordonnées souvent en concertation avec les partenaires sociaux.
2.4 Participation des immigrants
Généralement, les immigrants ont librement accès à la vie sociale et culturelle, y compris l'accès à l'éducation, et peuvent participer activement à la vie politique, faire partie de partis politiques, d'associations, de sociétés et d'organisations. Environ la moitié des États membres a accordé des droits politiques d'un certain type aux ressortissants de pays tiers. Après une certaine période de résidence légale (entre 6 mois et 5 ans), les immigrants sont autorisés à voter ou à se présenter aux élections au niveau local et municipal.
2.4.1 Organes consultatifs spéciaux
Dans certains pays, les immigrants et leurs organisations participent depuis longtemps au processus décisionnel et tous les États membres ont créé des organes consultatifs spéciaux pour les immigrants, bien qu'aucun d'entre eux n'ait de compétence directe dans la prise de décision. Les organes consultatifs ont des structures très différentes et leurs mandats varient considérablement.
Au Portugal, un Conseil consultatif pour les questions d'immigration a été créé pour garantir que les associations représentant les immigrants, les partenaires sociaux et les institutions de solidarité sociale participent à l'élaboration des politiques d'intégration sociale et à la lutte contre l'exclusion.
Au Luxembourg, le Conseil national pour les étrangers conseille le gouvernement pour toutes les propositions politiques pertinentes. Le conseil a également le droit de soumettre au gouvernement des propositions visant à améliorer la situation des étrangers. La moitié des membres du conseil sont des étrangers élus par leurs propres associations. À l'échelle locale, les municipalités comptant plus de 20 % d'étrangers sont tenues de constituer une commission consultative spéciale.
Un principe similaire est appliqué au Danemark, où toutes les communes doivent mettre en place un conseil d'intégration si plus de 50 personnes le demandent. Le conseil d'intégration peut rendre des avis consultatifs sur l'effort général d'intégration au sein de la municipalité. Les membres des conseils locaux d'intégration élisent un Conseil national pour les minorités ethniques, qui rend au ministre de l'intégration des avis concernant les questions liées à l'intégration.
En Finlande, un Comité consultatif pour les relations ethniques a été créé dans le but d'assurer le suivi des questions liées à l'intégration et de réaliser des expertises. Aussi bien les immigrants et les minorités ethniques traditionnelles de Finlande que les différents ministères, les partenaires sociaux et les ONG sont représentés au sein du comité.
La Grèce n'a pas d'organe consultatif en tant que tel. Cependant, elle a récemment créé l'Institut de la politique migratoire, qui a pour tâche non seulement de compiler des informations et de faire des recherches, mais aussi d'assurer le suivi des activités et projets pertinents.
L'Italie compte plusieurs organes consultatifs différents. L'Organisation nationale pour la coordination de la politique d'intégration des migrants, qui rend des avis sur les politiques d'intégration, regroupe des représentants des collectivités locales, des immigrants et des partenaires sociaux. À l'échelle locale, un conseiller spécial élu par la communauté des immigrants représente leurs intérêts vis-à-vis des initiatives locales.
2.4.2 Niveau de participation
Dans presque tous les États membres, les immigrants sont représentés au sein des organes consultatifs pour les immigrants. En Espagne, environ un tiers ou un quart des représentants auprès des organes consultatifs sont eux-mêmes des migrants. Au Danemark, tous les membres élus actuels du Conseil pour les minorités ethniques appartiennent à une minorité ethnique.
2.5 Non-discrimination et égalité
Tous les États membres sont en train de réviser leur législation en matière de non-discrimination ou d'adopter une nouvelle législation, afin de se conformer à l'article 13 de la directive 2000/43 relative à la non-discrimination, qui doit être transposée dans la législation nationale d'ici la fin de 2003.
Pour promouvoir l'intégration et lutter contre le racisme, il semble que des campagnes de sensibilisation et des programmes spéciaux fassent partie des activités en cours dans presque tous les États membres. Dans certains pays, des initiatives spéciales ont été prises à la suite des préparations de la Conférence mondiale contre le racisme, qui s'est tenue en 2001 à Durban en Afrique du Sud. Aux Pays-Bas, un réseau national a été mis en place pour soutenir un plan d'action national contre le racisme; en Finlande, un plan national d'action destiné à lutter contre le racisme a été adopté en 2001, tandis qu'en Irlande, un plan d'action est en cours. Plusieurs pays ont lancé en 2001 des campagnes de lutte contre la discrimination et certains pays, comme la Suède et l'Allemagne, ont financé des campagnes de lutte contre le racisme et pour promouvoir l'égalité, en particulier parmi les enfants et les jeunes.
Dans plusieurs États membres, des organismes spéciaux sont chargés d'assurer le suivi des questions d'égalité ou de discrimination ou de fournir des conseils dans ce domaine. Par exemple, en Irlande, l'Autorité pour l'égalité fournit des informations et des conseils à toute personne qui estime être l'objet de discrimination.
2.6 Réussite de l'intégration
2.6.1 Définition officielle
La définition de l'intégration n'est pas identique dans tous les États membres. Pourtant, ils conviennent dans une certaine mesure que l'intégration est composée de différents éléments et qu'elle doit être bilat&eaeacute;rale, c'est-à-dire impliquer aussi bien les immigrants que les collectivités locales. Dans les pays dotés d'une législation spécifique en la matière, l'intégration peut être définie dans le cadre de la loi; toutefois, dans ce cas, l'intégration est considérée comme un processus qui compte des éléments clés.
En résumé, les éléments mentionnés dans les réponses des États membres sont notamment les suivants:
* respect des valeurs fondamentales d'une société démocratique
* droit de conserver son identité culturelle propre
* droits comparables à ceux des citoyens de l'UE et devoirs correspondants
* participation active dans tous les aspects de la vie sur un pied d'égalité (économique, social, culturel, politique, civil)
2.6.2 Principaux facteurs de réussite de l'intégration
La plupart des pays ne disposent pas d'instruments permettant de mesurer l'intégration ou une norme établie d'intégration réussie. D'après les réponses, l'intégration se fait progressivement et se passe différemment pour chaque individu.
Aux Pays-Bas, le principal facteur de réussite de l'intégration est le moment où l'immigrant subvient à ses besoins. Aussi bien le Royaume-Uni que l'Autriche insistent sur le fait que devenir un citoyen est important et témoigne d'une intégration réussie.
2.6.3 Principaux obstacles à l'intégration
La vaste majorité des États membres rappelle qu'un obstacle majeur à la réussite de l'intégration est l'absence de compétences linguistiques suffisantes. L'absence de formation ou de diplômes est également considérée comme un obstacle, de même que les difficultés liées à l'évaluation et à l'agrément des qualifications des immigrants, par exemple la reconnaissance des examens et des diplômes étrangers. Certains pays signalent également qu'un des obstacles majeurs à la réussite de l'intégration tient au fait que l'immigrant est sans emploi, ce qui semble indiquer que l'emploi est un des principaux moyens d'intégration des immigrants dans la société. Les Pays-Bas reconnaissent qu'une connaissance insuffisante de la langue peut causer un retard chez les enfants des minorités ethniques. La Finlande explique que l'attitude de la population a un impact important sur la façon dont les immigrants se sentent considérés en tant que membres de la société finlandaise et que le racisme et la discrimination jouent un rôle majeur, lorsqu'il est question d'intégration. L'Autriche affirme que la religion peut aussi constituer un obstacle à l'intégration, en particulier pour les femmes.
2.7 Suivi des modèles d'intégration
2.7.1 Organes spéciaux chargés du suivi
Dans presque tous les États membres, le suivi joue un rôle important et des programmes spéciaux de suivi ont été élaborés. Tous les États membres assurent, d'une façon ou d'une autre, le suivi du processus d'intégration et de nombreux pays publient des rapports annuels spéciaux, qui sont examinés par les parlements nationaux. Dans les pays dotés d'une législation nationale en matière de programmes d'intégration, les avancées de la mise en oeuvre ou la révision de la législation font l'objet de débats au Parlement.
Aux Pays-Bas, un observateur spécial de l'intégration (sur la base de recherches produisant des faits et des chiffres) fait le point de la situation des minorités ethniques sous trois angles: socio-structurel, socio-culturel et politico-institutionnel. Au Danemark, un groupe d'experts a été constitué pour développer des points de référence en matière d'intégration. L'Italie publie un rapport annuel sur l'évolution de l'intégration des immigrants, lequel rapport est soumis au Parlement. Chaque année, la Finlande examine les taux d'emploi, les conditions de vie, l'éducation, la situation des enfants, des jeunes et des femmes, ainsi que les services sociaux fournis. En Allemagne, en vertu de la nouvelle proposition de loi sur l'immigration, un nouvel organe spécial aura pour tâche d'étudier les capacités nationales d'accueil et d'intégration, ainsi que les tendances actuelles des mouvements migratoires.
2.7.2 Responsabilité du processus de suivi
Dans tous les États membres, la compétence en matière de suivi du processus d'intégration est décentralisée vers les pouvoirs locaux, régionaux ou municipaux, de même que la responsabilité pour la mise en oeuvre des politiques d'intégration. Mais, comme il a été dit plus haut, dans certains pays, le Parlement examine le processus d'intégration au niveau national et les ministres nationaux ont souvent l'entière responsabilité des politiques d'intégration et donc, bien entendu, également du processus de suivi et de l'évaluation des politiques, afin de veiller à obtenir les résultats souhaités.
ANNEXE 2
ANNEXES STATISTIQUES
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Source Eurostat: Ce graphique est tiré de Statistiques en bref - Migration de femmes et d'hommes en provenance et à destination de l'Union européenne - Thème 3 - 2/2003.
Figure 2: taux d'accroissement total brut de la population 2002
Contribution relative de l'accroissement naturel et du solde migratoire
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Ce graphique est tiré de Statistiques en bref - Premières estimations démographiques pour 2002 - Thème 3 - 25/2002.
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Source Eurostat: Ce graphique est tiré de Statistiques en bref - Migration de femmes et d'hommes en provenance et à destination de l'Union européenne - Thème 3 - 2/2003.
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Source: EFT, Eurostat.
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Source: EFT, Eurostat.
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Source: EFT, Eurostat.
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Source: EFT, Eurostat.
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Source: EFT, Eurostat.
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Source: EFT, Eurostat.
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Note: Le taux d'emploi au Japon et aux États-Unis a été fixé au niveau projeté pour 2004 conformément aux comptes nationaux (base de données Ameco). Veuillez noter que le taux d'emploi tiré des comptes nationaux au Japon (74%) diffère de celui figurant dans les Perspectives de l'emploi de l'OCDE (69%). Si le taux OCDE est probablement comparable aux taux de l'UE et des États-Unis, la présentation des tendances à long terme doit s'appuyer sur les comptes nationaux. Toutefois, cette différence n'a que peu d'importance dans le cas présent. Sources: Emploi civil total (selon la définition nationale), comptes nationaux, base de données Ameco, services de la Commission. Historique de l'évolution de la population en âge actif, base de données Ameco. Projection de l'évolution de la population en âge actif dans l'UE15, projections démographiques Eurostat 1999, révision pour l'UE15. Projection de l'évolution de la population en âge actif aux États-Unis et au Japon, Division de la population, Département des affaires économiques et sociales, Secrétariat des Nations unies, Les perspectives d'avenir de la population mondiale, chiffres pour les États-Unis et le Japon. Évolution du PIB réel par habitant 1980-2003, comptes nationaux, base de données Ameco, services de la Commission.
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Note: Le taux d'emploi au Japon et aux États-Unis a été fixé au niveau projeté pour 2004 conformément aux comptes nationaux (base de données Ameco). Veuillez noter que le taux d'emploi tiré des comptes nationaux au Japon (74%) diffère de celui figurant dans les Perspectives de l'emploi de l'OCDE (69%). Si le taux OCDE est probablement comparable aux taux de l'UE et des États-Unis, la présentation des tendances à long terme doit s'appuyer sur les comptes nationaux. Toutefois, cette différence n'a que peu d'importance dans le cas présent. Sources: Emploi civil total (selon la définition nationale), comptes nationaux, base de données Ameco, services de la Commission. Historique de l'évolution de la population en âge actif, base de données Ameco. Projection de l'évolution de la population en âge actif dans l'UE15, projections démographiques Eurostat 1999, révision pour l'UE15. Projection de l'évolution de la population en âge actif aux États-Unis et au Japon, Division de la population, Département des affaires économiques et sociales, Secrétariat des Nations unies, Les perspectives d'avenir de la population mondiale, chiffres pour les États-Unis et le Japon. Évolution du PIB réel par habitant 1980-2003, comptes nationaux, base de données Ameco, services de la Commission.