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Communication de la Commission européenne du 3 décembre 2002 : L'intégration de la politique des migrations dans les relations de l'Union européenne avec les Pays tiers - I. migrations et développement - II. rapport sur l'efficacité des ressources financières disponibles au niveau communautaire pour le rapatriement des immigrants et des demandeurs d'asile non admis, pour la gestion des frontières extérieures et pour les projets concernant l'asile et les migrations dans les pays tiers

 

Communication de la Commission européenne du 3 décembre 2002 : L'intégration de la politique des migrations dans les relations de l'Union européenne avec les Pays tiers - I. migrations et développement - II. rapport sur l'efficacité des ressources financières disponibles au niveau communautaire pour le rapatriement des immigrants et des demandeurs d'asile non admis, pour la gestion des frontières extérieures et pour les projets concernant l'asile et les migrations dans les pays tiers

 

COM/2002/0703 final


 

TABLE DES MATIÈRES

 

AVANT-PROPOS

I. MIGRATION ET DEVELOPPEMENT

Introduction 6

PARTIE A - CONTEXTE 9

1. Les migrations en Europe et dans le monde 9

2. Les causes des migrations internationales 10

2.1. Les facteurs premiers de la migration 10

2.2. Les facteurs d'attrait 11

2.3. Le « rebond migratoire » 12

3. Le poids de la question des réfugiés pour les pays d'accueil 12

4. Les effets des migrations internationales sur les pays en développement 14

4.1. Les envois de fonds des émigrés vers leur pays d'origine 15

4.2. La mobilité des cerveaux 16

PARTIE B - POLITIQUES EN PLACE 17

5. Politique communautaire de la migration 17

6. Assistance aux pays tiers directement liée à la gestion des migrations 18

7. Aide d'urgence et réhabilitation 21

8. Action à plus long terme: s'attaquer aux causes profondes de la migration 22

PARTIE C - ORIENTATIONS 24

9. Le dialogue politique et la clause sur les flux migratoires 24

10. Les travailleurs qualifiés 25

11. Les accords de réadmission 26

12. Les stratégies et les programmes : révision à mi-parcours 28

13. Le renforcement des capacites institutionnelles : autres mesures 29

II. RAPPORT SUR L'EFFICACITÉ DES RESSOURCES FINANCIÈRES DISPONIBLES AU NIVEAU COMMUNAUTAIRE

1. Introduction 32

2. Contexte de l'intervention financière de la Communauté 33

2.1. Principe de subsidiarité et de proportionnalité de l'action communautaire 33

2.2. Encadrement des dépenses communautaires - respect des perspectives financières et programmation pluriannuelle 34

3. Instruments de politique interne consacrés aux politiques d'asile et d'immigration et à la gestion des frontières extérieures 34

3.1. Evolution des ressources financières communautaires consacrées aux politiques d'asile et d'immigration et à la gestion des frontières extérieures 34

3.2. Instruments financiers adoptés en exécution ou en accompagnement des stratégies de Tampere et Laeken 34

3.2.1. Instruments visant à renforcer la coopération 35

3.2.2. Le Fonds européen pour les Réfugiés (2000-2004) 36

3.2.2.1.Résultats des actions préparatoires (1997-1999) et principes régissant le Fonds européen pour les réfugiés 36

3.2.2.2. Evaluation de la mise en oeuvre du FER 2000-2002 37

3.3. Les développements prévus à court et moyen terme 38

3.3.1. Une meilleure connaissance des phénomènes migratoires 39

3.3.2. La mise en place des systèmes d'information performants 39

3.3.3. Actions préparatoires en matière d'intégration des nationaux des pays tiers 40

3.3.4. L'avenir du Fonds européen pour les Réfugiés 40

4. Instruments de politique externe 42

4.1. Contributions à la préparation de la future Europe élargie 42

4.2. Partenariats avec les pays tiers d'origine et de transit 42

5. Les nouveaux besoins identifiés 44

5.1. Un instrument financier en appui de la politique de retour? 44

5.2. Partage des charges entre les Etats membres et l'Union pour la gestion des frontières extérieures 45

6. En résumé 47

 

CONCLUSIONS

ANNEXES

 

AVANT-PROPOS

 

Le thème de la migration est au coeur du débat politique dans les pays industrialisés. Il constitue désormais une priorité stratégique importante pour l'Union européenne. À condition d'être soigneusement gérées, les migrations peuvent constituer un facteur positif pour la croissance et la réussite tant de l'Union que des pays concernés. À la suite de l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam et du Conseil européen de Tampere, les principaux éléments d'une politique globale des migrations et de l'asile sont progressivement mis en place.

L'intégration des préoccupations liées aux migrations dans la politique extérieure et les programmes de la Communauté fait partie des vastes efforts consentis pour traiter les problèmes de migration de manière cohérente et efficace au niveau de l'Union européenne. Cette démarche est relativement neuve, comme en témoignent les requêtes récentes formulées par le Conseil européen à Séville.

Les Chefs d'État et de Gouvernement ont demandé que la politique en matière d'immigration soit intégrée dans les relations de l'Union avec les pays tiers et ont appelé à une approche ciblée du problème, s'appuyant sur tous les instruments appropriés dont l'Union européenne dispose dans le domaine des relations extérieures. Le Conseil européen a également invité la Commission à présenter un rapport concernant l'efficacité des ressources financières disponibles au niveau communautaire en matière de rapatriement des immigrés et des demandeurs d'asile déboutés, de gestion des frontières extérieures et de projets d'asile et de migration dans les pays tiers.

La Commission est déterminée à poursuivre ces deux objectifs.

La Commission estime que ces deux questions sont indissociables étant donné qu'elles constituent les deux revers de la même médaille. Il faut évaluer le problème et convenir d'une ligne politique claire, tout en nous assurant que nos moyens financiers sont à la hauteur de nos ambitions politiques. D'où la double nature du document ci-joint: une première partie analyse le phénomène des migrations internationales, évalue ses conséquences pour les pays en développement et explore la façon dont nous pouvons les soutenir dans leurs efforts visant à mieux gérer les flux migratoires; le deuxième volet est le rapport de la Commission demandé par le Conseil européen de Séville sur l'efficacité des ressources financières disponibles au niveau communautaire en matière de rapatriement des immigrés et des demandeurs d'asile déboutés, de gestion des frontières extérieures et de projets d'asile et de migration dans les pays tiers. Ce rapport dresse l'état des lieux des ressources existantes et explique l'action actuelle de la Communauté dans le cadre de la coopération en cours. Il suggère également un certain nombre de pistes pour renforcer notre appui à ces actions.

Concilier des politiques différentes mais complémentaires est une tâche difficile dont la responsabilité collective incombe à la Commission et aux États membres. Dans sa volonté d'intégrer les questions liées à la migration dans la politique extérieure de la Communauté, celle-ci devra axer son action sur les quatre principes fondamentaux suivants:

(1) L'intégration des questions de migration dans l'action extérieure de la Communauté doit respecter la cohérence globale de nos politiques et actions extérieures. Le dialogue et les actions menés avec les pays tiers dans le domaine des migrations doivent faire partie intégrante d'une approche globale adoptée au niveau de l'Union européenne, fondée sur des facteurs d'incitation visant à encourager ces pays à adhérer à de nouvelles disciplines tout en ne pénalisant pas ceux qui ne souhaitent pas emboîter le pas ou qui ne sont pas à même d'y adhérer. Notre approche devra également être modulée en fonction de la situation de chaque pays tiers concerné.

(2) En ce qui concerne les migrations, la priorité à long terme de la Communauté devrait être de s'attaquer aux causes profondes des flux migratoires. Les programmes de développement, notamment ceux qui visent l'éradication de la pauvreté, le renforcement des institutions et des capacités et la prévention des conflits, ont un effet à long terme sur les flux migratoires, effet qui devrait être pleinement reconnu. Les ressources consacrées au développement devraient être ciblées sur cet objectif. Il convient au demeurant de noter que la Commission appuie déjà un vaste éventail d'actions dans le domaine des migrations.

(3) Les questions liées aux problèmes de la migration devraient, en premier lieu, être abordées dans le cadre stratégique proposé par la Commission et convenu par les États membres ("Documents de stratégie nationaux et régionaux"). La révision à mi-parcours de ces documents de stratégie, prévue en 2003, constitue à cet égard une occasion unique. Le cadre lui-même, en proposant aux pays en développement un paquet global de mesures en matière de développement, les encouragera à conclure des accords de réadmission. Quant à la révision à mi-parcours, elle devrait permettre une réévaluation, au cas par cas, des problèmes de migration dans les pays tiers et pourrait aboutir à une certaine réorientation de nos priorités et une réaffectation des crédits au sein du Programme indicatif national de chaque pays concerné.

(4) Sans préjuger de la révision à mi-parcours des documents de stratégie, il apparaît d'ores et déjà que des crédits supplémentaires seront nécessaires. Les tâches nouvelles ne pourront être entreprises que si des ressources supplémentaires sont mobilisées. La ligne budgétaire concernée (B7-667: " Coopération avec les pays tiers dans le domaine de la migration") devrait être sensiblement renforcée afin de compléter la démarche entreprise dans le cadre de la révision à mi-parcours. Elle devrait servir au financement d'actions spécifiques et ciblées dans le domaine de la migration, qui devraient compléter les actions financées au titre des lignes budgétaires plus générales. Cette approche devrait permettre de renforcer l'efficacité des initiatives lancées dans le domaine de la migration et leur assurer une plus grande visibilité tout en contribuant à éviter les doubles emplois et la confusion. La ligne budgétaire devra également être gérée conformément aux principes de la réforme de l'aide extérieure, de manière à assurer toute la cohérence nécessaire et à permettre la réalisation d'économies d'échelle.

Pleinement consciente de l'importance de la question des migrations dans le contexte des relations extérieures de l'Union européenne, la Commission invite l'ensemble des parties prenantes à agir de manière déterminée selon ces orientations. C'est la seule façon d'assumer notre responsabilité collective et de trouver, dans notre propre intérêt et dans celui des pays tiers, des réponses appropriées aux défis qui se posent à nous.

La présente communication, qui fait partie intégrante d'une approche globale à l'égard des migrations, sera suivie d'une autre communication de la Commission sur les différentes interactions entre l'immigration, l'emploi et les politiques sociales dans l'Union européenne. Cette communication est prévue pour mars 2003.

 

I. MIGRATION ET DEVELOPPEMENT

 

Introduction

 

Ces dernières années, les migrations internationales sont devenues un thème central du discours politique dans les pays industrialisés. Au niveau de l'Union européenne, le cadre dans lequel doivent s'inscrire les discussions des questions liées aux flux migratoires a été défini en 1999 par le traité d'Amsterdam et le Conseil européen de Tampere. Plusieurs volets d'une politique globale en matière d'immigration se trouvent actuellement sur la table du Parlement européen et du Conseil. Lors des préparatifs du Conseil européen de Séville en juin 2002, une attention spéciale a été accordée au problème de l'immigration clandestine. Les Chefs d'État et de Gouvernement ont à cette occasion attiré l'attention sur la contribution que les politiques et instruments externes de l'Union européenne, notamment la politique de développement, pouvaient apporter en réponse aux facteurs à l'origine des flux migratoires. Dès 1994, la Commission a, dans sa communication au Conseil et au Parlement européen sur les politiques d'immigration et d'asile [1], souligné la nécessité d'adopter une approche globale dans ce domaine, incluant notamment la réduction des pressions migratoires par une coopération avec les principaux pays tiers susceptibles de générer des migrations vers l'Europe.

[1] COM (94)23

À titre préliminaire, il est utile de rappeler que l'immigration ne doit pas seulement être perçue comme un problème, mais aussi comme un phénomène positif, qui a toujours existé partout dans le monde, et qui est à la fois générateur de perspectives et de défis nouveaux. Il est indéniable que les pays industrialisés, dont l'Union européenne, tirent un profit considérable de l'immigration et continueront à en avoir besoin à l'avenir, en particulier dans les secteurs qui emploient une main-d'oeuvre hautement qualifiée ou peu qualifiée. Toutefois, la poursuite escomptée des flux migratoires internationaux, voire leur accélération, aura des conséquences importantes pour l'Union européenne, mais aussi pour les pays tiers d'origine (notamment ceux en développement) . Pour y faire face efficacement, il conviendra de renforcer les politiques ciblées sur les causes profondes des migrations internationales et d'oeuvrer, parallèlement, au développement des capacités de gestion des migrations, tant de l'Union européenne que des pays d'origine.

Les politiques extérieures et programmes engagés par la Communauté européenne pour appuyer les droits de l'homme, consolider la démocratie, réduire la pauvreté, créer des emplois et améliorer, d'une manière plus générale, la situation économique dans les pays d'immigration, maintenir la paix, etc., influent tous sur les migrations étant donné qu'ils s'attaquent aux principaux facteurs sur lesquels il faut agir pour diminuer la pression migratoire.

Cela étant, les préoccupations exprimées ces dernières années au sein de l'Union européenne au sujet des conséquences du phénomène migratoire ont souligné la nécessité d'une contribution plus substantielle et plus ciblée dans le cadre de l'ensemble des politiques, programmes et instruments relevant des relations extérieures de la Communauté. Cette contribution est aujourd'hui en voie de concrétisation. Depuis Tampere, le problème des migrations a été inscrit à l'ordre du jour du dialogue entre la Communauté et de nombreux pays. De plus, en coopération avec les pays tiers concernés, la Commission a programmé une assistance communautaire importante (voir annexes) afin d'aider les pays tiers dans leurs efforts visant à surmonter les problèmes directement liés à la migration légale ou clandestine. Ces programmes doivent à présent être mis en oeuvre, étant entendu que leurs effets ne se feront sentir qu'à moyen et long terme.

La présente communication est consacrée aux relations de l'Union européenne avec les pays en développement à faible et moyen revenu en Afrique, en Asie, en Amérique latine et en Europe, à l'exception des pays candidats à l'adhésion. Elle poursuit un triple objectif. Premièrement, elle tente de resituer le phénomène migratoire dans son contexte plus large, compte tenu des facteurs qui se trouvent à l'origine des migrations internationales, de la situation particulière des personnes qui ont besoin d'une protection et des effets des migrations internationales sur les pays en développement. Deuxièmement, elle passe en revue la politique communautaire en matière d'immigration et la façon dont le problème des migrations est intégré dans les programmes et politiques de coopération extérieures de la Communauté. Enfin, elle tente d'indiquer le sens dans lequel la politique communautaire devrait être développée pour améliorer la contribution de la Communauté à une meilleure gestion des flux migratoires, et notamment à la lutte contre la migration clandestine.

 

PARTIE A - CONTEXTE

 

1. LES MIGRATIONS EN EUROPE ET DANS LE MONDE

 

D'après les Nations unies, environ 150 millions de personnes (quelque 2,5 % de la population mondiale) peuvent être qualifiées de migrants internationaux, étant donné que leur nationalité n'est pas celle conférée par le pays où elles vivent. Leur nombre est en augmentation progressive mais, en termes relatifs, il reste proche du niveau où il se situait au début du XXe siècle.

La plupart des analystes pensent qu'à long terme, l'immigration en Europe restera stable, voire augmentera. Dans l'Union européenne, le taux annuel net d'immigration officielle est actuellement d'environ 2,2 %. C'est moins que ce que connaissent aujourd'hui des pays d'immigration traditionnels, tels que les États-Unis ou le Canada. En 2000, le nombre d'immigrants de pays tiers dans l'Union européenne avoisinait les 680 000 personnes [2].

[2] Le nombre d'immigrés réguliers dans l'UE a atteint un point culminant en 1992 (1,2 millions de personnes), en raison surtout d'un important afflux de réfugiés en provenance de l'ex-Yougoslavie.

 

Les immigrés en situation régulière, qui font l'objet de statistiques fiables, sont constitués des demandeurs d'asile, des parents d'immigrés déjà installés légalement dans un État membre de l'Union, des travailleurs migrants et des personnes relevant de l'immigration d'affaires [3]. Sur le plan juridique, il importe de distinguer les migrants économiques des personnes qui ont besoin d'une protection. Le droit international n'oblige pas les États à ouvrir leurs frontières aux migrants économiques. En revanche, l'asile est un droit de l'homme basé sur des normes de protection internationales, que les Etats sont tenus d'accorder en application de leurs obligations découlant des accords internationaux tels que la Convention de Genève de 1951.

[3] Communication concernant une politique communautaire en matière d'immigration (COM(2000)757).

En plus des immigrés réguliers, on dénombre une proportion importante d'immigrés clandestins ou en situation irrégulière, qui soit sont entrés illégalement sur le territoire d'un État membre, soit sont devenus illégaux en y séjournant au-delà de la période de validité de leur visa ou de leur permis de séjour, ou après le rejet de leur demande d'asile. La nature même du phénomène empêche de dégager des chiffres précis et le nombre d'immigrés en situation irrégulière ne peut dès lors être qu'estimé [4].

[4] Pour plus de détails concernant la communication de la Commission sur une politique commune en matière d'immigration clandestine, voir COM(2000)621 de novembre 2001.

Peu de migrants économiques présents sur le territoire des États membres de l'Union européenne viennent de pays à bas revenu. La plupart sont originaires de pays à moyen revenu ou d'économies en transition. En effet, les ressortissants à faibles revenus des pays en développement ne disposent ni des filières ni des moyens financiers nécessaires pour s'exiler vers d'autres continents. Ceux qui s'expatrient pour des motifs économiques prennent en général la direction de foyers de croissance économique dans leur région. Il y aurait dans les pays d'Afrique plus de 20 millions des travailleurs migrants africains [5].

[5] OIT, Rapport III, 87e session de la Conférence internationale du travail, Genève, 1999.

Ces migrations de main-d'oeuvre sud-sud constituent un phénomène très important et la facilitation des migrations sud-sud et de leur bon déroulement pourrait constituer un aspect pertinent de la coopération au développement de la Communauté avec certains pays. Outre cette incidence directe sur le développement, une meilleure gestion de ces flux sud-sud pourrait également avoir une incidence indirecte sur les migrations sud-nord, en particulier lorsque les migrations internationales sont liées à une urbanisation rapide.

 

2. LES CAUSES DES MIGRATIONS INTERNATIONALES

 

2.1. Les facteurs premiers de la migration

 

Les causes et les schémas précis des migrations varient dans le temps ainsi qu'entre les pays et les régions. Tout au long de l'histoire, l'homme a toujours émigré lorsqu'il ne trouvait plus, à l'endroit où il vivait, les moyens ni les possibilités de satisfaire ses besoins et ses aspirations. Les principaux facteurs « classiques » qui produisent les migrations [6] sont notamment les suivants:

[6] Migration-Development Nexus, State of the Art Overview, Centre for Development Research, Copenhague, février 2002. Cette liste ne se veut pas hiérarchique, car les facteurs incitatifs des migrations ont tendance à varier au cas par cas.

* une croissance économique négative ou faible, combinée à une répartition inégale des revenus;

* la surpopulation et la forte croissance démographique;

* des taux élevés de chômage et de sous-emploi, notamment à la suite de vastes restructurations économiques;

* la forte pression pesant sur les milieux ruraux et urbains;

* les conflits armés et les épurations ethniques;

* les violations des droits de l'homme, les discriminations et les persécutions;

* les catastrophes naturelles et la dégradation de l'environnement;

* un faible niveau de gouvernance.

L'inadéquation ou l'insuffisance des politiques intérieures et l'absence de réformes dans les pays en développement eux-mêmes sont souvent à l'origine des facteurs décrits ci-dessus.

Les facteurs d'incitation économiques des migrations ne sont pas près de disparaître. D'après les statistiques de la Banque mondiale, la main-d'oeuvre des pays à bas revenu devrait passer de 1,4 à 2,2 milliards de personnes d'ici à 2025 [7]. La tendance est la même dans les pays à revenu moyen (d'où émane la majorité des flux migratoires internationaux). Les niveaux actuels de la croissance économique, du commerce et des investissements étrangers dans les pays en développement sont manifestement insuffisants pour pouvoir absorber cette main-d'oeuvre.

[7] « Rapport sur le développement mondial », Banque mondiale, 1996

Contrairement aux migrations économiques, celles occasionnées essentiellement par des situations de conflit et d'insécurité ont en général un caractère plus cyclique. Les flux de réfugiés sont inconstants. Les départs massifs sont fréquemment (mais pas toujours) suivis de retours massifs dès que la sécurité s'améliore. Les émigrants originaires de régions déchirées par un conflit, et surtout ceux qui migrent vers des pays développés, sont généralement poussés par un ensemble de facteurs.

 

2.2. Les facteurs d'attrait

 

Alors que les conflits et la pauvreté sont les principaux facteurs moteurs des migrations, la sécurité et l'amélioration de la situation socio-économique induite par la demande de main-d'oeuvre dans les pays d'accueil sont les grands facteurs d'attrait. Les migrants se déplacent vers les régions où ils peuvent trouver une protection et/ou un emploi. Comme nous l'avons vu dans le chapitre précédent, il s'agit rarement de déplacements intercontinentaux ou du sud au nord. Environ 85 % des réfugiés de la planète trouvent un lieu d'accueil à l'extérieur de l'Union européenne, en général dans des enclaves sécurisées au sein même de la région en conflit. Plus de 90 % des migrants dans le monde vivent et travaillent hors de l'UE, à une distance relativement faible de leur pays d'origine. Près de la moitié des 150 millions de migrants de par le monde sont des femmes, employées dans des secteurs tels que les soins infirmiers et les services domestiques. De même, la majorité des migrants travaillant dans l'industrie du sexe sont des femmes qui, pour la plupart, exercent contre leur gré.

La plupart des pays d'immigration, notamment les États membres de l'Union européenne, souffrent de pénuries de travailleurs hautement et faiblement qualifiés. La première catégorie englobe les informaticiens, le personnel médical, les chercheurs, les scientifiques, les techniciens et les enseignants. La deuxième catégorie comprend les travailleurs agricoles, les ouvriers du bâtiment, les travailleurs employés dans le secteur de l'hôtellerie et de la restauration, etc. Les gouvernements européens et les entreprises implantées en Europe se tournent de plus en plus vers les marchés de l'emploi des pays en développement pour recruter ces travailleurs. Arrivés dans le pays d'immigration, les migrants bénéficient normalement d'un statut légal, mais en réalité nombre d'entre eux, surtout dans les secteurs à faibles qualifications, continuent à trouver un emploi et à s'établir dans l'UE sans disposer de ce statut légal.

Les personnes candidates à l'exode ont besoin de conseils et d'une aide pratique. Ces aspects sont souvent pris en charge par des proches qui ont émigré auparavant ou par le réseau plus vaste de la diaspora expatriée, qui est active dans un segment très précis du marché de l'emploi du pays d'accueil et qui recrute des compatriotes dans un nombre limité de villages ou de régions urbaines du pays d'origine. De plus en plus, ce type d'aide est fourni sans grands risques et à des fins extrêmement lucratives par des organisations criminelles qui pratiquent la traite d'êtres humains.

 

2.3. Le « rebond migratoire »

 

L'évolution positive d'un pays vers le développement peut - dans un premier temps - renforcer les migrations internationales au lieu de les atténuer. En effet, lorsqu'un pays en développement parvient à générer de la croissance économique, une première génération d'hommes et de femmes dynamiques acquiert les moyens et le goût de voyager. Or, dans leur pays, ceux-ci ne trouvent pas encore de perspectives satisfaisantes, les adaptations et les réformes restent incomplètes et le marché de l'emploi n'a pas encore atteint tout son potentiel. Cette situation incite un grand nombre de personnes à tenter leur chance dans un pays industrialisé. Ce phénomène, baptisé « rebond migratoire », s'estompe ultérieurement, lorsque le niveau de développement du pays d'origine aura atteint un plus haut niveau de maturité [8].

[8] Migration, return and development; An institutional perspective, Groupe d'experts, Centre for Development Research, Copenhague, avril 2002.

À plus long terme toutefois, le recul de la pauvreté et la multiplication des perspectives d'emploi réduisent les pressions qui engendrent le phénomène de « migration de survie », de même que le rétablissement de la paix et du développement dans un pays ravagé par les conflits et le dénuement met un terme aux exodes forcés et permet un retour au pays.

 

3. LE POIDS DE LA QUESTION DES REFUGIES POUR LE PAYS D'ACCUEIL

 

Si l'Union européenne abrite un nombre important de réfugiés et de demandeurs d'asile [9], de nombreux pays en développement doivent accueillir des populations de réfugiés dépassant largement les moyennes de l'Union européenne. En 2002, on dénombre 13 millions de réfugiés et de demandeurs d'asile de par le monde, dont 1,9 million (15 %) résident sur le territoire de l'Union européenne [10]. A ceci s'ajoute environ 20 millions de personnes déplacées, dont près de la moitié se trouvent en Afrique, et plus d'un million en Afghanistan.

[9] A l'instar des migrants économiques, la plupart des demandeurs d'asile dans l'Union européenne ne sont pas non plus originaires des pays en développement. Au cours de la dernière décennie, 4 des 6 principaux pays fournisseurs de demandeurs d'asile dans l'Union européenne étaient européens (ex-Yougoslavie, Roumanie, Turquie et Bornie et Herzégovine).

[10] A titre de comparaison: les Etats-Unis accueillent environ 4 % de la population mondiale de réfugiés. Les chiffres pour le Canada, l'Australie et le Japon sont respectivement de 1 %, 0,4 % et de 0,02 %.

D'après des statistiques établies par le HCR, le nombre des demandeurs d'asile arrivant dans l'Union européenne a diminué de moitié au cours de la dernière décennie et s'établit actuellement à moins de 400 000 personnes par an. A titre de comparaison, des pays tels que l'Iran et le Pakistan ont vu arriver sur leur territoire, durant la seule année 2001, plus d'un million de demandeurs d'asile.

La question des réfugiés et demandeurs d'asile pèse lourdement sur les pays en développement, d'autant plus que ceux-ci ne disposent généralement que de capacités financières et institutionnelles limitées. Les réfugiés mettent parfois lourdement à contribution les structures politiques et sociales souvent fragiles des pays en développement qui les accueillent. Des recherches menées par le HCR [11] ont montré que si l'on prend en compte ces facteurs, les cinq pays les plus confrontés au problème des réfugiés sont l'Iran, suivi du Burundi, de la Guinée, de la Tanzanie et de la Gambie. En Afrique, le rapport entre la population de réfugiés et le PIB par habitant [12] est 25 fois plus élevé qu'en Europe.

[11] HCR, Selected indicators measuring capacity and contributions of Host Countries, Genève, avril 2002.

[12] Nombre de réfugiés par 1000 habitants divisé par le PIB par habitant. Ce chiffre donne une indication de la charge relative que les réfugiés entrants constituent pour les ressources financières et économiques du pays qui les accueille. Le Pakistan, la Tanzanie et le Congo se trouvent en tête de ce classement. Bien plus loin dans la liste, c'est-à-dire à la 37ème place, le premier pays de l'Union européenne est l'Allemagne.

La Communauté européenne fournit une assistance humanitaire afin d'aider les populations réfugiées à surmonter leurs difficultés. L'un des objectifs spécifiques de l'aide humanitaire est en effet d'aider à faire face aux mouvements de population (réfugiés, personnes déplacées et rapatriées) et à leurs conséquences. Les actions engagées par la Communauté dans le cadre du règlement 1257/96 concernant l'aide humanitaire [13] (pour laquelle ECHO, l'Office d'aide humanitaire de la Communauté, est compétent) visent à fournir aux partenaires chargés de la mise en oeuvre les crédits nécessaires pour apporter une assistance, un secours et une protection aux populations réfugiées, et ceci durant tout le temps nécessaire.

[13] JO L 163, 2.7.1996, p.1-6.

Dans le strict respect des principes fondamentaux du droit humanitaire international, notamment l'impartialité et la non-discrimination, l'aide humanitaire de la Communauté n'est fournie qu'en fonction des besoins des populations touchées, la priorité étant accordée aux plus vulnérables, tels que les enfants, les femmes, les handicapés et les personnes âgées.

Les projets qui sont financés visent à subvenir aux besoins des réfugiés, et par la même occasion à aider le pays d'accueil à faire face à un afflux de réfugiés, leurs propres infrastructures et capacités institutionnelles étant généralement insuffisantes pour gérer les problèmes de cette nature. Actuellement, la Communauté finance de nombreux projets de ce type dans le monde. De plus, l'aide peut avoir des effets bénéfiques sur les infrastructures du pays d'accueil et bénéficier, subsidiairement, aux populations locales. Enfin, dès que les réfugiés sont retournés dans leur pays d'origine, des ressources financières peuvent être fournies pour la réhabilitation (reboisement notamment) rendue nécessaire par la présence des réfugiés dans le pays d'accueil.

Sous certaines conditions préalables essentielles, des projets sont également financés pour favoriser le rapatriement vers le pays d'origine. Le rapatriement doit être volontaire et il faut qu'il y ait une amélioration globale de la situation dans le pays d'origine. Le pays d'origine doit également avoir fourni des garanties ou des assurances adéquates en ce qui concerne la sécurité des populations rapatriées. Au Timor oriental, par exemple, une protection, des abris et une aide à la réinstallation ont été fournis à 300 000 réfugiés rentrés au pays. De plus, la Communauté met à disposition des crédits pour la réintégration des réfugiés dès que ceux-ci ont été rapatriés afin d'aider les pays d'origine à surmonter les difficultés liées à une sortie de crise prolongée (conflits et destructions). Dans cet ordre d'idée, la Communauté finance le rapatriement par le HCR de dizaines de milliers de réfugiés sierra-léonais de Guinée, de même que les mesures de réintégration en Sierra Leone. Sont aussi financés les projets qui visent à aider les réfugiés ayant quitté leur premier pays d'accueil à se réinstaller dans un pays tiers qui les accepte.

Le séjour des réfugiés, lorsqu'il se prolonge, intensifie la pression sur les maigres ressources économiques et environnementales du pays en développement qui les accueille et peut parfois créer des tensions avec les communautés locales, qui risquent de conduire à des problèmes locaux de sécurité et de criminalité. Dans nombre de pays africains, certains réfugiés se trouvent dans des communautés d'accueil depuis 20 ans, voire davantage. Nombre d'entre eux ont un passé rural et dépendent d'un accès à des ressources naturelles communes, telles que l'eau, des terres arables et des forêts, pour la possession desquelles ils entrent en concurrence avec les populations pauvres de la communauté d'accueil. Ce problème peut être résolu si les pays d'accueil tentent d'intégrer ces réfugiés en leur attribuant des terres, si possible à proximité de leur zone d'origine géographique et ethnique. Des pays tels que l'Ouganda et le Belize se sont essayés à cette stratégie et ont réussi à intégrer des réfugiés dans le processus de développement national. Des actions analogues visant à promouvoir des solutions durables, notamment par des initiatives d'intégration locale, ont été engagées avec l'aide du HCR. Ce fut notamment le cas de «l'initiative Zambie» [14].

[14] L'INITIATIVE ZAMBIE VISE A AIDER LES REFUGIES A DEVENIR DES MEMBRES PRODUCTIFS DE LEUR COMMUNAUTE D'ACCUEIL, CE QUI GARANTIT LEUR INTEGRATION SOCIALE, LA PAIX, LA SECURITE ET LA STABILITE DANS LA REGION. L'INITIATIVE COMPORTE UN ENSEMBLE DE PROGRAMMES DANS DES DOMAINES TELS QUE L'AGRICULTURE, LA SANTE, L'EDUCATION, LES INFRASTRUCTURES, LA BONNE GOUVERNANCE, L'EGALITE HOMMES-FEMMES ET LE VIH/SIDA.

 

4. LES EFFETS DES MIGRATIONS INTERNATIONALES SUR LES PAYS EN DEVELOPPEMENT

 

Les migrations internationales peuvent à la fois contribuer au développement économique des pays industrialisés et avoir des effets positifs sur les pays en développement d'où elles émanent. Par contre, sous certaines formes, comme l'exode de travailleurs hautement qualifiés et les mouvements de réfugiés entre États voisins, elles peuvent mettre ces pays à rude épreuve. Leurs conséquences sur le monde en développement doivent donc être évaluées au cas par cas, puisqu'elles peuvent varier largement d'un pays à l'autre.

 

4.1. Les envois de fonds des émigrés vers leur pays d'origine

 

Selon certaines estimations [15], les transferts annuels vers les pays en développement seraient supérieurs au montant total de l'aide publique au développement. Pour beaucoup de pays, ils représentent une contribution positive importante à la balance des paiements et une source précieuse de devises. Dans un pays comme Haïti, par exemple, ils atteignent 17 % du PIB [16]. Dans la plupart des pays, ce pourcentage est certes largement inférieur, mais toujours important. Ces envois de fonds se répartissent inégalement entre les pays en développement. Ils sont nombreux à prendre la destination de pays au revenu moyen à faible (tels que les Philippines, l'Égypte et le Maroc) ou de grands pays à bas revenu (comme l'Inde et le Pakistan) [17]. Ils restent par contre peu abondants à destination de l'Afrique subsaharienne, même s'ils pourraient être appelés à croître fortement à l'avenir.

[15] Martin, S., Remittance Flows and Impact, 2001.

[16] International mobility in a globalising world, Jan Niessen/Migration Policy Group, mars 2002.

[17] Migration-Development Nexus, Evidence and Policy Options, Centre for Development Research, Copenhague, avril 2002.

Les envois de fonds sont constitués d'argent privé adressé directement aux familles des immigrés dans les pays en développement. Les catégories les plus pauvres qui n'ont pas de proche à l'étranger n'en voient donc pas la trace. Cet argent est généralement dépensé en premier lieu en faveur de la subsistance de la famille et du remboursement de ses dettes. En second lieu, il sert à améliorer le logement, à acheter des biens de consommation durables et à des dépenses d'éducation. Enfin, il peut être investi dans des activités productives et dans l'achat de terres ou d'un petit commerce.

Le potentiel important que ces envois de fonds représentent pour le développement a incité certains pays à mettre en place des mécanismes de levier pour encourager les migrants à consacrer une portion de leurs transferts à des fonds de développement. D'autres ont créé des instruments financiers spécifiques pour absorber une partie des transferts, pour la compléter par des moyens financiers de sources publiques et pour faciliter les entreprises conjointes entre les migrants et les organes de développement local. Les conclusions de la Conférence sur le financement du développement, qui s'est tenue à Monterrey en mars 2002, font également allusion à ces transferts. Le paragraphe 18 stipule: « Il importe de réduire le coût des envois de fonds des travailleurs migrants dans leur pays et d'étudier les moyens d'encourager le placement de ces avoirs dans des activités de développement, y compris le logement ».

Si la Commission est consciente du fait que ces rapatriements de fonds sont une question privée et que les personnes concernées sont libres de dépenser leur argent comme elles le souhaitent, elle estime néanmoins que les administrations publiques des pays d'accueil peuvent jouer un rôle pour tenter d'assurer que ces fonds puissent être transférés vers les pays en développement par des moyens sûrs, légaux et peu onéreux. Les systèmes de transfert financiers officiels existants sont souvent lourds et coûteux, et poussent les émigrés à recourir aux réseaux informels mis en place par certains opérateurs. Il appartient dès lors aux institutions financières, aux banques internationales et aux opérateurs de mettre à la disposition des personnes concernées des systèmes efficaces et autonomes pour rapatrier les fonds vers les pays en développement.

 

4.2. La mobilité des cerveaux

 

La mondialisation est un élément d'incitation à l'émigration. Dès lors que la mondialisation encourage la spécialisation des économies et des pays, il est logique que des travailleurs spécialisés (quel que soit le niveau de qualification de leur profession) soient tentés d'émigrer. Lorsqu'une politique d'immigration n'est pas encore solidement établie - c'est le cas pour l'Union européenne -, ces personnes trouvent l'un ou l'autre moyen (souvent illégal) d'accéder au marché de l'emploi mondialisé. Il est par conséquent essentielle, comme cela a été convenu lors du Conseil européen de Tampere, d'élaborer une politique d'admission harmonisée afin de réglementer l'accès légal à l'Union européenne des travailleurs migrants qualifiés. Cette politique tiendra compte à la fois des intérêts de l'Union et de ceux des pays de provenance des immigrés, et elle devra être cohérente par rapport aux efforts visant à atténuer les effets négatifs de l'exode des cerveaux évoqué ci-après.

Les pays en développement qui connaissent un taux de chômage élevé et une faible croissance économique pourraient bénéficier de l'émigration de travailleurs peu qualifiés, pas simplement en raison de l'argent que ceux-ci pourraient renvoyer au pays, mais aussi parce que la réduction de ce surplus de main-d'oeuvre diminuerait le nombre de sans emploi et exercerait un effet positif sur la position concurrentielle et, partant, sur le revenu de ceux qui resteraient au pays. Par contre, si ce sont des travailleurs qualifiés qui quittent le pays, l'impact sur son économie risque d'être moins positif, surtout à court terme. Cette fuite des cerveaux risque d'avoir des répercussions négatives directes sur le processus de développement.

Il existe des scénarios où les migrations entraînent des retombées positives, pour le pays d'accueil comme pour le pays d'origine et pour les immigrants eux-mêmes [18]. Ce genre de situation survient notamment lorsque les immigrés conservent des liens financiers, sociaux et économiques avec leur pays d'origine et qu'ils y retournent, soit définitivement, soit temporairement. Ces scénarios sont cependant le plus souvent encore des cas isolés. Le 6ème programme cadre de recherche et de développement, qui propose le soutien à la formation des scientifiques des pays tiers, notamment des pays les moins avancés, afin de renforcer les capacités scientifiques et technologiques globales des pays en développement, comporte un certain nombre d'instruments destinés à favoriser le retour au pays de ces scientifiques, tels que l'octroi de primes au retour.

[18] ILO, Migration of Highly Skilled Persons from Developing Countries: Impact and Policy Responses, Genève, 2002.

Il reste que les pays industrialisés, dont les États membres de l'Union européenne, recrutent de plus en plus de travailleurs qualifiés dans les pays en développement: des experts informatiques en Inde, des médecins au Pakistan, des enseignants dans les Caraïbes et du personnel infirmier en Afrique du Sud. Dans certains pays en développement, l'"exportation" de ces personnes qualifiées fait partie intégrante de la politique gouvernementale. Or, cette démarche des pays industrialisés génère souvent de l'incohérence entre leurs objectifs de politique interne et les objectifs assignés à la politique de développement.

Le retour volontaire des émigrés, qu'il soit temporaire ou définitif, draine un important capital financier, humain et social vers les pays en développement. Traditionnellement, ces retours sont considérés comme un élément essentiel pour assurer une corrélation positive entre l'immigration et le développement [19]. L'aspect positif de cette corrélation repose sur l'hypothèse que les émigrés ont passé suffisamment de temps à l'étranger pour acquérir des ressources et des compétences et qu'ils ont la capacité et la volonté d'investir ce capital (ou du moins une partie) dans de nouvelles activités dans leur pays d'origine. Quant aux pays d'origine, ils peuvent faciliter la réinsertion harmonieuse des personnes en retour, réinsertion qui bénéficie à la société dans son ensemble, en créant un cadre social, économique et institutionnel adéquat.

[19] Migration-Development Nexus, Evidence and Policy Options, Centre for Development Research, Copenhagen, avril 2002.

Dans la pratique, cependant, les candidats au retour se heurtent souvent à de gros obstacles, y compris dans leur pays d'accueil. Leur retour risque en effet d'hypothéquer leurs droits à la pension ou leur possibilité de revenir dans l'Union européenne en visite dans leur famille ou chez des amis. Le plus souvent, des solutions administratives concrètes et des programmes d'aide sont nécessaires. Certaines de ces mesures sont en préparation, tel le projet communautaire financé par l'OIM en faveur du retour de travailleurs qualifiés afghans pour participer au redressement, et à la reconstruction de leur pays.

Les émigrés peuvent également fournir un apport positif au développement local de leur pays d'origine sans pour autant retourner y vivre en permanence. Les gouvernements de plusieurs pays d'émigration (notamment la Tunisie, le Sénégal et le Nigeria) disposent de politiques actives pour intensifier les contacts avec leurs émigrés et les impliquer dans leur processus de développement, tant économique que politique. D'autre part, certains pays d'accueil et certaines organisations internationales ont lancé des programmes de « codéveloppement » destinés à faire participer les diasporas au processus de développement de leur pays d'origine.

 

PARTIE B - POLITIQUES EN PLACE

 

Sur la base du traité d'Amsterdam et dans le prolongement des orientations politiques arrêtées par les Conseils européens de Tampere et de Séville, la Commission a défini les grands volets d'une politique commune en matière d'immigration et d'asile. En outre, par l'intermédiaire de ses politiques de développement et de coopération, la Commission s'efforce d'améliorer le dialogue et de renforcer les partenariats noués avec les pays tiers sur la question de l'immigration. Les politiques et les actions mises en place peuvent être classées en trois catégories: la première recouvre les actions qui ont été récemment programmées dans le cadre des programmes communautaires de coopération avec les pays tiers et qui concernent directement la question des migrations; la deuxième englobe d'autres actions qui relèvent du volet général «aide d'urgence et réhabilitation». La troisième touche aux grandes orientations qui sous-tendent la politique communautaire de coopération au développement et les programmes communautaires de développement, dont l'objectif est de diminuer les facteurs favorisant l'émigration en soutenant la croissance et le développement durables et en réduisant la pauvreté.

 

5. POLITIQUE COMMUNAUTAIRE DE LA MIGRATION

 

La Commission a défini les grands volets d'une politique commune de la migration et d'asile dans deux communications générales et dans des propositions législatives plus spécifiques. Le programme de travail convenu à Tampere pour atteindre ces objectifs se subdivise en deux étapes: mise en place d'un cadre juridique de base commun, intégrant un certain nombre de normes minimales dans les domaines couverts par le Traité et mise en convergence progressive de la législation, de la politique et des pratiques par l'adoption d'une méthode ouverte de coordination entre les États membres. Conformément à l'approche globale adoptée par le Conseil, des actions sont engagées concernant différents aspects du phénomène migratoire.

La Commission a désormais présenté toutes les propositions législatives nécessaires pour mettre en place le cadre de base régissant l'admission et les conditions de séjour des immigrés réguliers et de leurs familles. Cela permettra de créer des circuits transparents en vue de l'admission des travailleurs migrants. Certaines des propositions visent également à faciliter la mobilité des ressortissants des pays tiers au sein de l'Union européenne, notamment pour les résidents à long terme ou les ressortissants de pays tiers qui sont étudiants. Dans le même temps, des actions visant à renforcer la lutte contre l'immigration clandestine, les activités des passeurs et la traite d'êtres humains dans l'Union européenne ont été engagées sur la base d'un plan global adopté par le Conseil en février 2002. Des mesures visant à améliorer la coopération en matière de retour des immigrés clandestins sont également en cours d'élaboration sur la base du livre vert d'avril 2002 que la Commission a consacré à cette question.

La Commission a par ailleurs soumis au Parlement européen et au Conseil un certain nombre de propositions législatives afin de jeter les bases d'une politique commune en matière d'asile, respectant pleinement la convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés et les autres obligations internationales des États membres en ce qui concerne les réfugiés, les demandeurs d'asile et les personnes ayant besoin d'une protection internationale.

La Commission a engagé en 2002 un examen des interactions entre les politiques de l'immigration et les politiques sociales et de l'emploi dans l'Union européenne et, sur cette base, elle a l'intention d'adopter une communication en mars 2003 afin de préparer la réunion du Conseil européen de juin.

Les efforts pour promouvoir l'intégration et l'insertion des migrants sont déployés principalement dans le cadre du Fonds social européen, de l'initiative EQUAL et des programmes visant à lutter contre la discrimination, le racisme et la xénophobie.

Il va sans dire que l'adoption rapide des propositions de la Commission, adoption qui relève de la responsabilité du Conseil et des États membres, encouragerait la consolidation de la politique communautaire de l'immigration et, partant, contribuerait à clarifier, pour les pays tiers, la position de la Communauté dans ce domaine. L'établissement d'un cadre communautaire clair dans ce domaine conditionne en effet la crédibilité de la Communauté dans les relations qu'elle entretient avec les pays tiers en ce qui concerne la gestion de l'immigration.

 

6. ASSISTANCE AUX PAYS TIERS DIRECTEMENT LIEE A LA GESTION DES MIGRATIONS

 

L'intégration des préoccupations liées aux migrations dans la politique extérieure en général et dans les politiques et programmes extérieurs de la Communauté en particulier, est une tendance récente. De fait, les questions liées à la migration constituent un nouveau domaine d'action pour les programmes de coopération et de développement communautaires. Depuis Tampere, la Commission européenne a commencé à intégrer différentes questions directement liées à la migration régulière et clandestine dans sa politique et ses programmes de coopération à long terme. Une aide communautaire substantielle, directe et indirecte, a été programmée afin de soutenir les efforts des pays tiers pour traiter les problèmes de migration régulière et clandestine. Les annexes de la présente communication recensent les programmes et activités relatifs à la migration, au niveau régional et national (une description détaillée de ces programmes figure dans les programmes indicatifs nationaux ou régionaux annexés aux documents de stratégie nationaux ou régionaux). Certains de ces programmes - ceux qui sont expressément axés sur la gestion frontalière, la lutte contre l'immigration clandestine et la gestion des migrations - contribueront directement à renforcer la capacité des pays tiers à gérer les flux migratoires. La plupart des programmes concernés seront mis en oeuvre au cours de la période 2002-2004. Certains se trouvent déjà dans la phase de lancement. Sans entrer dans une description des activités pays par pays, on peut résumer comme suit les principales orientations régionales:

S'agissant de la région méditerranéenne, dans le cadre, nouvellement adopté, du programme régional en matière de justice et d'affaires intérieures lancé au titre de MEDA, la Commission aborde les questions générales touchant à la lutte contre la criminalité organisée, et notamment aux réseaux criminels de passeurs et de traite des êtres humains. Elle étudie, en particulier, la possibilité de créer des équipes communes d'enquête policière entre les partenaires méditerranéens et, si possible, entre les États membres et les pays méditerranéens. Le programme régional précité accorde une attention particulière aux questions liées à la migration et la Commission s'est engagée à jeter les bases, avec les pays méditerranéens, d'une approche globale dans ce domaine. Les consultations engagées avec les partenaires méditerranéens au sujet de l'exécution de ce programme régional sont très constructives et des actions contribuant à lutter contre l'immigration clandestine sont à présent envisagées. Elles couvrent en particulier la formation policière et judiciaire ainsi que l'établissement d'un réseau Euromed de collecte des données et de recherches pluridisciplinaires sur les phénomènes migratoires. En outre, dans le cadre des divers programmes régionaux MEDA, la Commission étudiera les modalités de la mise en place de nouvelles mesures de lutte contre l'immigration clandestine. Elle pourrait ainsi examiner la possibilité de créer un réseau entre les ports du sud de la Méditerranée, afin, notamment, de faciliter les échanges d'informations sur les bateaux suspects et l'immigration irrégulière. Enfin, il convient également de s'intéresser à la migration de transit en provenance des pays d'Afrique subsaharienne. La Commission analysera les principales causes de cette migration afin de mieux comprendre les raisons de ce phénomène et de réfléchir à la façon de le traiter.

Dans les Balkans occidentaux, le programme régional CARDS est axé sur le soutien de la participation de l'Albanie, la Bosnie-et-Herzégovine, la Croatie, la République fédérale de Yougoslavie et l'ancienne République yougoslave de Macédoine au processus de stabilisation et d'association (PSA), qui constitue la pierre angulaire de la politique menée par l'Union européenne dans cette région. L'objectif est d'encourager la coopération régionale, entre autres dans le domaine de la justice et des affaires intérieures. Étant donné qu'il s'agit d'une région voisine de l'Union européenne, aux frontières perméables et aux infrastructures précaires, l'appui à la coopération régionale en matière d'immigration revêt une importance particulière. Le soutien en faveur du contrôle des frontières mettra l'accent sur les équipements et les infrastructures et sera complété par des dispositions relatives au renforcement des institutions, à l'assistance technique et à des formules de jumelage. Un accent particulier sera mis d'une part sur le contrôle aux frontières avec la Roumanie, aux aéroports internationaux, aux abords des côtes et dans les ports maritimes et d'autre part sur le contrôle aux principaux points de passage frontaliers, sur la mise en place de services nationaux adéquats de surveillance aux frontières, sur le renforcement des capacités de la police et d'autres agences au niveau national et régional, afin de leur permettre de faire face à la criminalité et à la migration clandestine, sur la coordination entre les autorités chargées des contrôles aux frontières, les autorités nationales de police et les bureaux douaniers, et enfin sur le partage d'informations et la réalisation d'enquêtes conjointes. La coordination internationale sera renforcée tant au niveau de la prévention (par ex. échanges d'informations) que des capacités de réaction (par ex. enquêtes communes pour lutter contre les activités des passeurs ou rapatriement des immigrants en situation irrégulière).

En Europe orientale et en Asie centrale, l'actuel programme régional TACIS relatif à la justice et aux affaires intérieures est centré sur trois grands domaines: premièrement, la mise en place d'un système global de gestion des frontières, de l'immigration et de l'asile afin de combattre les activités des passeurs et de réduire la migration clandestine (au nombre des mesures concrètes figurent la fourniture d'équipements de contrôle des frontières et la formation des gardes frontières ainsi que le renforcement de la capacité des pays partenaires à gérer l'immigration légale et les questions d'asile); deuxièmement, la lutte contre le trafic de stupéfiants par l'instauration d'un «système de filtrage» entre l'Afghanistan et les zones géographiques situées le long de «la route de la soie»; troisièmement, la mise en place de mesures efficaces de lutte contre la corruption dans les pays partenaires en vue de l'adoption d'une législation efficace et de l'élaboration de bonnes pratiques au sein du service public et de la société civile permettant de combattre durablement la corruption. Cette dimension, selon toute évidence, aura également un impact sur la migration illégale. En outre, le nouveau programme régional Tacis en faveur de l'Asie centrale englobera la coopération sur les questions de migration et les aspects connexes, en particulier l'amélioration des capacités de gestion des frontières, la construction de postes frontières dans la région de la vallée de Ferghana, aux trois frontières, afin d'encourager le commerce transfrontalier et la circulation sans entrave des personnes et des marchandises, le développement de la coopération transfrontalière entre les services compétents chargés de faire respecter la législation, les gardes frontières et les services douaniers de la région, la poursuite des mesures de lutte contre les stupéfiants ainsi que la mise en place de dispositifs antiblanchiment au Kazakhstan et en Ouzbékistan.

Si les activités programmées, qui touchent directement à la migration, sont particulièrement importantes pour ces trois régions limitrophes de la future Europe élargie, la question de la migration revêt également une importance croissante dans les discussions et la coopération engagées avec d'autres régions, même si celles-ci sont a un stade moins avancé.

En Asie, dans le cadre de l'ASEM, un dialogue sur l'immigration a déjà débuté, qui est bien engagé. Il a abouti à la tenue, en avril 2002, de la Conférence ministérielle de l'ASEM consacrée à la coopération pour la gestion des flux migratoires, laquelle a débouché sur une déclaration politique relative aux flux migratoires (la «déclaration de Lanzarote»). Il a été convenu en outre qu'une nouvelle coopération suivrait, avec la proposition d'initiatives conjointes par les partenaires intéressés de l'ASEM. À cette fin, il a été décidé d'établir un réseau de points de contact, en vue de la coordination et de la préparation des réunions entre partenaires (au niveau des experts) et des futures réunions de l'ASEM (au niveau des directeurs généraux des services d'immigration) relatives aux flux de migration clandestine ainsi qu'à la détection de documents faux ou falsifiés. La première réunion de ce type pourrait avoir lieu avant la fin de cette année.

En Amérique latine, sur la base de la déclaration politique du sommet tenu à Madrid en mai 2002 entre l'Union européenne et les pays d'Amérique latine et des Caraïbes, dans laquelle les pays de ces deux régions s'engagent à effectuer une analyse intégrée des différents problèmes liés à la migration entre leurs deux régions, la Commission a commencé à réfléchir aux moyens d'instaurer un dialogue consacré aux flux migratoires entre ces deux régions.

S'agissant des pays ACP, l'accord de Cotonou, qui a été signé en juin 2000 et doit bientôt entrer en vigueur, contient des dispositions spécifiques sur la coopération en matière d'immigration, notamment en ce qui concerne la prévention et la lutte contre l'immigration illégale (article 13). La question des migrations fait l'objet d'un dialogue approfondi dans le cadre du partenariat ACP-UE et le Conseil des ministres ACP-CE 'examine les questions liées à l'immigration illégale en vue, le cas échéant, de définir les moyens d'une politique de prévention'. L'accord de Cotonou contient également une clause standard de réadmission ainsi que l'engagement de négocier des accords de réadmission, à la demande de l'une des Parties. Dans le cadre des dispositions légalement contraignantes de Cotonou, il est donc tout à fait légitime de faire figurer la question de l'immigration illégale ou les problèmes dans le domaine de la réadmission à l'ordre du jour du dialogue politique soit de l'ensemble du groupe des ACP soit de certains pays ACP concernés (article 8).

En complément de ces approches régionales à l'égard de la coopération dans le domaine de l'immigration, divers programmes de coopération directement liés à l'immigration sont également mis en place au niveau national, en particulier avec le Maroc, les pays des Balkans, les nouveaux États indépendants, la Chine, etc.

 

7. AIDE D'URGENCE ET REHABILITATION

 

L'aide humanitaire n'est ni suffisante ni adaptée pour répondre à tous les besoins créés par des crises chroniques comme celles des réfugiés et ne saurait par elle-même, garantir des solutions viables et durables. Il convient, dans le cadre de la présente communication, d'accorder une attention particulière au lien important entre l'aide d'urgence, la réhabilitation et le développement. En avril 2001, la Commission a publié une communication sur ce thème afin de veiller en particulier à ce que l'aide d'urgence soit conçue de manière à ce que lorsqu'elle s'achève, d'autres instruments prennent le relais afin de soutenir les objectifs de développement à long terme.

Les actions communautaires au titre du règlement 2130/2001 relatif aux actions dans le domaine de l'aide aux populations déracinées dans les pays en développement d'Amérique latine et d'Asie constituent un exemple d'instrument visant à lier les activités humanitaires et la coopération au développement. Pour ce faire, la Communauté s'efforce de mettre en place l'expérience et les mécanismes pré-institutionnels sur lesquels peut s'appuyer le développement futur. Pour d'autres régions, ces actions d'aide aux populations déracinées sont directement financées au moyen d'autres instruments financiers généraux, tels que le Fonds européen de développement (FED) et MEDA [20].

[20] Dans ce contexte, la Commission est favorable à l'intégration d'actions financées au titre du règlement 2130/2001 dans le programme plus vaste ALA.

La réinstallation des réfugiés ou le soutien aux réfugiés rentrés dans leur pays après un conflit appelle une coopération étroite entre pays voisins. Dans les zones de conflit où les divisions peuvent rester profondes et les traumatismes et la méfiance collective très vivaces, le retour prématuré de réfugiés peut engendrer de nouvelles tensions, des conflits ou de la violence. Le choix du moment et la coordination jouent donc un rôle capital. Plusieurs programmes d'aide aux populations déracinées sont déjà en cours de mise en oeuvre ou d'élaboration (entre autre dans le contexte de CARDS). La Communauté continuera de soutenir certaines initiatives telles que les programmes visant à faciliter l'installation, au sein d'un pays d'accueil, de réfugiés non désireux de rentrer dans leur pays d'origine, et à réduire les pressions sociales et politiques que cette installation semi-permanente engendre (par exemple: retour des non-Albanais déplacés dans l'ancienne République de Yougoslavie), et les programmes cherchant à faciliter les retours transfrontaliers dans une situation post-conflit. La communauté internationale doit soutenir cette coopération, en particulier par le biais des échanges d'informations et de la recherche d'un consensus sur des approches communes en matière de citoyenneté, de retraites, de sécurité sociale, de santé et d'éducation.

 

8. ACTION A PLUS LONG TERME: S'ATTAQUER AUX CAUSE PROFONDES DE LA MIGRATION

 

La Commission estime que la politique communautaire de coopération au développement contribue à l'efficacité de la politique d'immigration de l'Union européenne et à son objectif de gestion des flux migratoires. La politique de développement communautaire contribue à traiter les causes profondes des flux migratoires, et à aider les pays bénéficiaires à réduire la durée du «rebond migratoire». Elle a aussi pour but d'empêcher et de réduire les migrations forcées, tant du sud vers le nord qu'à l'intérieur même de l'hémisphère Sud, et aide les pays en développement à faire face aux flux de réfugiés et de personnes déplacées à l'intérieur de leur pays. À cet égard, il semble que l'accent mis sur la réduction de la pauvreté dans la politique communautaire de développement et les secteurs prioritaires actuels de cette politique doivent être maintenus.

Le Conseil européen a avalisé cette approche en confirmant, lors du sommet de Séville, qu'«une approche intégrée, globale et équilibrée visant à s'attaquer aux causes profondes de l'immigration illégale doit rester l'objectif constant de l'Union européenne à long terme». Il a souligné dans ce contexte que «l'intensification de la coopération économique, le développement des échanges commerciaux, l'aide au développement, ainsi que la prévention des conflits, sont autant de moyens de favoriser la prospérité économique des pays concernés et, de ce fait, de réduire les causes qui sont à l'origine des mouvements migratoires»' [21].

[21] Conclusions du Conseil européen de Séville des 21 et 22 juin 2002.

En novembre 2000, le Conseil et la Commission ont adopté une déclaration sur la politique communautaire de développement dont l'un des objectifs était de concentrer la coopération communautaire au développement sur un nombre limité de domaines prioritaires. Le cadre général de la politique de développement est à présent bien défini et ne devrait pas être modifié par de nouveaux domaines prioritaires. Six secteurs prioritaires de la politique de développement sont ainsi répertoriés, l'accent étant mis de manière générale sur la réduction de la pauvreté [22]. La déclaration du Conseil et de la Commission recense en outre trois préoccupations 'horizontales' ou 'transversales' (égalité hommes-femmes, environnement et droits de l'homme).

[22] COM(2000) 212 final du 26 avril 2000.

Afin de maximiser les effets positifs que pourrait avoir la migration sur le développement et d'en réduire les effets négatifs, les questions de migration devraient faire partie intégrante de la politique communautaire de développement et des stratégies de réduction de la pauvreté. Afin de garantir la cohérence entre la politique communautaire de développement et celle de l'immigration, il est nécessaire d'évaluer systématiquement les liens entre, d'une part, les questions liées à la migration et, d'autre part, les secteurs prioritaires et les thèmes transversaux de la politique de développement de l'UE, avant d'envisager, le cas échéant, certaines actions. Dans ce contexte, les domaines pertinents de la politique de développement à prendre en considération pour la mise en oeuvre de nouvelles actions sont les suivants:

 

Commerce et développement

 

La création et le maintien d'emplois dans les pays en développement représentent les moyens les plus efficaces de répondre au principal facteur moteur des flux migratoires internationaux: le chômage et l'absence de perspectives économiques. Afin de contribuer à la réalisation des objectifs de la politique communautaire en matière d'immigration, la Communauté doit donc continuer à encourager l'amélioration de l'accès des produits des pays en développement à ses propres marchés et à ceux des autres pays industrialisés ainsi que l'intégration des pays en développement dans le système commercial mondial, conformément aux objectifs fixés par le programme de Doha pour le développement. La Communauté continuera en outre à oeuvrer au renforcement du commerce sud-sud, à stimuler les investissements étrangers directs dans les pays en développement et à promouvoir les normes fondamentales du travail. Les politiques menées dans ces domaines contribuent à la réalisation des objectifs de la politique communautaire en matière d'immigration et devraient donc - lorsque cela est possible - être renforcées.

Par rapport aux progrès déjà réalisés dans la libéralisation des flux de marchandises et de capitaux, les discussions internationales sur la libre circulation des personnes en sont encore à leurs premiers balbutiements. La Communauté européenne devrait donner un nouvel élan aux discussions et aux réflexions dans ce domaine, y compris au sein des organisations internationales concernées, comme l'OMC, l'OIT et la Banque mondiale.

 

Prévention des conflits, intégration et coopération régionales

 

Comme le montre l'histoire de l'Europe, l'intégration et la coopération régionales représentent la meilleure méthode de prévention des guerres et des conflits violents. De même, les efforts pour promouvoir l'intégration régionale dans les pays en développement constituent une contribution structurelle à la prévention des conflits qui génèrent des réfugiés. Les activités et les programmes actuellement menés dans les domaines de l'intégration régionale et de la prévention des conflits se poursuivront et seront, le cas échéant, renforcés, en particulier pour ce qui est de l'appui aux organisations régionales dotées d'une mission claire de prévention des conflits.

Le soutien communautaire aux activités axées sur la prévention des conflits au plan régional sera renforcé (par ex. mesures de réconciliation, soutien aux programmes de démobilisation, de désarmement, de réinsertion et de réhabilitation des combattants, réseaux pour la paix, gestion partagée des ressources naturelles rares). La CE continuera également à appuyer les programmes de coopération des régions frontalières destinés à promouvoir la réconciliation régionale et à atténuer les tensions frontalières au moyen, par exemple, de projets d'infrastructure qui profitent directement aux activités de production, à l'environnement commercial local, à la société civile et aux activités des ONG.

 

Renforcement des capacités institutionnelles et bonne gouvernance

 

Structures démocratiques déficientes, institutions faibles, absence d'État de droit et mauvaise gouvernance constituent autant de puissants facteurs d'incitation en matière d'émigration forcée. La politique communautaire de développement s'emploie à remédier à ces carences et continuera à le faire, notamment dans un but de prévention des flux de réfugiés. Au nombre des actions qui présentent un intérêt dans ce domaine figurent les réformes institutionnelles et constitutionnelles, le soutien du dialogue entre l'État et les groupes d'opposition, la réforme du système électoral et des élections, le renforcement du système de partis, des médias et de la société civile, la médiation entre groupes rivaux, l'adoption de mesures visant à garantir et à renforcer les droits de l'homme et des minorités, l'adoption de mesures anti-corruption ainsi que la réforme de la police, du système judiciaire et de la fonction publique.

 

Sécurité alimentaire et développement rural durable

 

La faim représente un puissant moteur d'émigration. Dans l'histoire récente, de nombreux flux massifs et notoires de réfugiés avaient pour origine la sécheresse ou de mauvaises récoltes. Dès lors, les politiques de développement qui contribuent à la sécurité alimentaire et qui facilitent l'accès à la nourriture et à l'eau potable limitent l'émigration de «survie».

Dans un contexte plus large, les politiques de développement visant à assurer un développement rural durable, en offrant un nombre suffisant d'emplois et en garantissant des revenus satisfaisants aux populations rurales atténuera le phénomène d'exode rural. C'est en effet des villes que partent généralement les migrations internationales.

Le lien entre flux migratoires et développement rural devient particulièrement pertinent dans le contexte des migrations sud-sud, lorsque des réfugiés d'origine rurale reprennent des activités à caractère agricole dans leur pays d'accueil. Dans ce contexte, la politique communautaire de développement doit procurer aux pays en développement qui accueillent des réfugiés une aide à la réinstallation volontaire des réfugiés et à leur intégration au processus de développement rural.

 

PARTIE C - ORIENTATIONS

 

9. LE DIALOGUE POLITIQUE ET LA CLAUSE SUR LES FLUX MIGRATOIRES

 

Dans le contexte de ses accords d'association ou de coopération actuels ou futurs, l'Union s'emploiera à inscrire systématiquement le lien entre l'immigration et le développement à l'ordre du jour de son dialogue politique avec les pays tiers et à intégrer les questions migratoires dans le dialogue économique et social. Ce dialogue ne devrait pas se limiter à la manière de traiter la question de la migration illégale et de la réadmission; il pourrait également aborder d'autres questions, telles que :

* les causes premières de la migration et les moyens de les aborder de façon globale;

* la politique de la Communauté européenne en matière d'immigration régulière et la gestion des flux migratoires par le pays tiers concerné et, le cas échéant, la mise en place de mesures de lutte contre l'immigration illégale, notamment en ce qui concerne le passage en fraude et la traite d'êtres humains, ainsi que la facilitation des retours et la réadmission d'immigrés en situation irrégulière;

* la meilleure intégration des immigrés en situation régulière qui vivent et travaillent dans l'Union européenne, en examinant en particulier la question de l'égalité de traitement appliquée aux travailleurs étrangers légalement employés, ainsi que les mesures visant à prévenir toute discrimination à l'encontre de ressortissants de pays tiers ; une attention particulière devrait être accordée à la lutte contre le racisme et la xénophobie, ainsi qu'à l'éducation et à la formation, et en particulier à la question de l'insertion professionnelle des étudiants dans leur pays d'origine ; les moyens de réglementer l'offre et la demande de travailleurs peu qualifiés, en accordant par exemple des permis de travail temporaires, afin de diminuer de façon radicale ce facteur d'attrait pour l'immigration illégale dans l'Union ;

* les moyens de faciliter la "mobilité des cerveaux" et d'aider les immigrés en séjour régulier sur le territoire de l'Union et qui désirent participer au développement de leur pays d'origine;

Le Conseil européen de Tampere a souligné que le partenariat avec les pays d'origine et de transit jouera un rôle déterminant dans les politiques extérieures menées par l'Union européenne en matière d'immigration. En juin 2002, le Conseil européen de Séville a demandé instamment que « dans tout futur accord de coopération, accord d'association ou accord équivalent que l'Union européenne ou la Communauté européenne conclura avec quelque pays que ce soit, soit insérée une clause sur la gestion conjointe des flux migratoires ainsi que sur la réadmission obligatoire en cas d'immigration illégale .» [23]

[23] Conclusions du Conseil européen, Séville, 21 et 22 juin 2002.

Comme d'autres accords de partenariat ou de coopération récents, l'accord de Cotonou, liant l'Union européenne aux États ACP, comporte des dispositions spécifiques sur la coopération dans le domaine des migrations, notamment en ce qui concerne la prévention et la lutte contre l'immigration illégale. En tenant compte des conclusions du Conseil relatives à l'intensification de la coopération avec les pays tiers en matière de gestion des flux migratoires, adoptées en novembre 2002, la Commission estime que l'article 13 de l'accord de Cotonou prévoit un programme d'action global et équilibré, qui pourrait servir de modèle à de futures clauses sur les flux migratoires à négocier avec d'autres pays tiers. Toutefois, ce modèle doit demeurer suffisamment souple pour pouvoir être adapté aux spécificités et au type de négociation propres à chaque cas.

 

10. LES TRAVAILLEURS QUALIFIES

 

La politique européenne de coopération au développement est souvent entravée par les conséquences négatives de la "fuite des cerveaux" hors des pays tiers en développement. Il importe, pour remédier à ce problème, de tenter de multiplier les offres d'emploi locales financièrement intéressantes. Dans ce contexte, les stratégies suivantes pourraient être prises en considération :

* le développement d'accords d'externalisation entre pays développés et pays en développement, notamment dans les domaines des technologies de l'information et de la RDT, de manière à créer des modalités de télétravail en fonction desquelles des travailleurs hautement qualifiés (et relativement bien payés) des pays en développement offriront leurs services à des entreprises des pays développés. Ces accords d'externalisation pourraient également prévoir la possibilité d'affectations temporaires dans l'Union européenne. Afin de faciliter ce processus, les États membres pourraient envisager de revoir leur politique de restrictions à l'octroi de visas;

* l'incitation, dans le cadre du dialogue politique, à l'adoption par les pays en développement de politiques de l'emploi qui visent à attirer les travailleurs qualifiés actuellement employés à l'étranger et à favoriser leur réintégration professionnelle dans leur pays d'origine. Ces politiques prévoiront l'offre de conditions de travail favorables, mais aussi des dispositions pratiques telles que la reconnaissance des diplômes et de l'expérience professionnelle acquise à l'étranger;

* le soutien au 'retour virtuel' des migrants qui veulent contribuer au développement économique et social de leur pays d'origine, sans pour autant retourner y vivre de façon permanente. Dans ce domaine, il conviendrait d'envisager notamment la possibilité de renforcer les canaux de communication entre les collectivités transnationales et leur pays ou leur région d'origine (par exemple en facilitant l'organisation de téléconférences par des universitaires de la diaspora pour les universités de leur pays, dans leur langue).

Le secteur africain de la santé - tout absorbé par la lutte contre l'épidémie de sida - semble la principale victime du phénomène de fuite des cerveaux. En Zambie, les trois quarts des médecins autochtones ont quitté le pays en l'espace de quelques années. Au Nigeria, plus de 21 000 médecins se sont expatriés dans des pays industrialisés. Le Nigeria et l'Afrique du Sud sont des pouvoyeurs importants de personnel infirmier pour l'Union européenne, où les salaires sont jusqu'à dix fois supérieurs.

* Compte tenu de la situation sanitaire particulièrement dramatique à laquelle sont confrontés ces pays, l'Union européenne pourrait étudier la possibilité d'élaborer un code de bonne conduite destiné aux établissements médicaux publics, visant à mettre un frein au recrutement actif de personnel médical en Afrique subsaharienne et dans les autres pays en développement souffrant d'une pénurie de main-d'oeuvre dans ce secteur.

On estime à 100 000 le nombre d'Africains qui travaillent aujourd'hui dans l'Union européenne et en Amérique du Nord [24]. Dans le même temps, quelque 100 000 experts non africains vivent et travaillent en Afrique subsaharienne, la plupart dans le domaine de l'assistance humanitaire et de l'aide au développement. Ces migrants économiques non africains, dont une part importante travaillent dans le domaine médical, occupent des fonctions auxquelles les Africains qualifiés n'ont généralement pas accès aux mêmes conditions.

[24] OIM, World Migration Report.

* Dans ce domaine, la Communauté pourrait envisager d'offrir des emplois actuellement occupés par du personnel expatrié (notamment dans le secteur de la coopération au développement) aux travailleurs locaux à des conditions financières qui soient suffisamment intéressantes pour les dissuader d'émigrer. Afin de faciliter ce processus, les modalités d'assistance technique aux pays en développement doivent faire l'objet d'une réforme, sous la coordination du programme des Nations unies pour le développement.

 

11. LES ACCORDS DE READMISSION

 

La Communauté a signé un accord de réadmission avec Hong Kong le 27 novembre 2002. Un accord a été paraphé avec le Sri Lanka en mai 2002 et avec Macao en octobre 2002. En outre, suivant les recommandations de la Commission, le Conseil a adopté des décisions autorisant la Commission à négocier des accords de réadmission entre la Communauté européenne et la Russie (2000), le Pakistan (2000), le Maroc (2000) et l'Ukraine (2002). Des contacts préliminaires ont eu lieu avec ces pays afin de préparer les négociations officielles.

A la suite des conclusions du Conseil du 29 avril 2002 et de celles de Séville, la Commission a présenté au Conseil, en octobre 2002, des recommandations pour l'adoption de quatre décisions du Conseil autorisant la Commission à négocier des accords de réadmission entre la Communauté européenne et l'Albanie, l'Algérie, la Chine et la Turquie.

En outre, au nom de la Communauté, et si et lorsque celle-ci le demande, la Commission ouvrira des négociations pour de nouveaux accords de réadmission avec les pays ACP, sur la base et après ratification de l'accord de Cotonou. L'Article 13 de l'accord de Cotonou comprend déjà un engagement clair de chacun des États ACP "d'accepter le retour et de réadmettre ses propres ressortissants illégalement présents sur le territoire d'un État membre de l'Union européenne, à la demande de ce dernier et sans autres formalités". Toutefois, dans la mesure où l'un des principaux problèmes rencontrés avec les résidents illégaux est l'absence de documents d'identification et, par conséquent, la difficulté d'établir leur nationalité, il pourrait s'avérer nécessaire d'étendre cette obligation aux ressortissants des pays tiers. Les éventuels futurs accords de réadmission avec les pays ACP pourraient aborder cette question et également mettre l'accent sur les modalités de réadmission et de retour, ainsi que sur leur organisation pratique et administrative. Ces accords seront négociés dans le cadre plus large de la mise en oeuvre de l'article 13, notamment pour ce qui concerne le développement et d'autres aspects particulièrement importants pour les pays ACP. Ces aspects feront l'objet de nouvelles propositions de la Commission à un stade ultérieur, notamment de la présentation prochaine de la communication sur l'intégration dans l'Union européenne des immigrés en situation régulière.

L'expérience a démontré qu'il ne faut pas sous-estimer le temps nécessaire à la négociation d'un accord de réadmission, perçu comme répondant au seul intérêt de la Communauté, ni escompter des résultats rapides. Ces négociations ne peuvent aboutir que si elles s'inscrivent dans le cadre d'un agenda de coopération plus large, prenant pleinement en compte les difficultés rencontrées par les pays partenaires pour traiter efficacement les questions de migrations. C'est pourquoi la Commission estime que la question des "moyens de persuasion" - autrement dit, des mesures incitatives visant à s'assurer la coopération des pays-tiers dans la négociation et la conclusion d'accords de réadmission avec la Communauté européenne - devrait être envisagée pays par pays, dans le contexte plus large du dialogue de politique, de coopération et de programmation engagé avec les pays tiers concernés.

Dans ce domaine, la Commission pourrait envisager, au besoin, de fournir une aide spécifique à la préparation et la mise en oeuvre des accords de réadmission par les pays tiers, visant à renforcer son assistance technique et financière et, ce faisant, à encourager une meilleure gestion des flux migratoires. Cette aide spécifique pourrait être financée par la ligne budgétaire B7-667, dotée des ressources suffisantes pour cette tâche. La programmation de cette ligne budgétaire devra par ailleurs être cohérente avec la stratégie globale de développement visant les pays concernés. Il importe en outre que sa mise en oeuvre soit conforme avec les principes, procédures et modalités de programmation et de mise en oeuvre des programmes d'aide extérieure de la Communauté. Enfin, il faut souligner que ces mesures de soutien seront élaborées en collaboration avec les États membres, en respectant le principe de la répartition des tâches et du partage rationnel de la charge de travail.

Il est possible que, dans certains cas, ces mesures d'accompagnement spécifiques ne constituent pas un encouragement suffisant. Il est vrai que les conséquences des accords de réadmission peuvent être importantes pour les pays tiers concernés. En tant que pays de transit, il se peut qu'ils aient à faire face à une tâche considérable, sur un plan technique et financier, dans la mesure où ils devront se charger du rapatriement des personnes concernées. Même la réintégration de ses propres ressortissants peut être source de difficultés pour un pays, étant donné qu'elle pèse sur son marché du travail ou sur ses programmes d'aides publiques.

Dans ces cas, et dans le cadre plus large du dialogue de politique, de coopération et de programmation engagé avec les pays tiers, la Communauté européenne et les États membres devraient être prêts à envisager la mise en place de mesures d'incitation supplémentaires. Il faut toutefois reconnaître qu'au niveau communautaire, la marge de manoeuvre pour ce type de mesures est étroite.

En effet, les mesures d'incitation consistant en un meilleur accès au marché ou en des préférences tarifaires accordés aux pays tiers faisant preuve de coopération ne pourraient être envisagées que dans la mesure où elles seraient totalement compatibles avec les règles de l'OMC. En outre, si les fonds disponibles restent constants, la Communauté, en accordant une aide au développement supplémentaire aux pays avec lesquels elle souhaite négocier un accord de réadmission, diminuerait l'aide destinée aux autres pays tiers. Cette diminution aurait pour effet de pénaliser les pays qui ne posent pas de problèmes importants en matière de migration. Des mesures compensatoires dans le domaine de la politique d'immigration, telles qu'une politique des visas plus généreuse à l'égard des pays faisant preuve de coopération ou l'augmentation des quotas pour les travailleurs migrants de ces pays, semble tout aussi difficile à négocier au niveau communautaire, en particulier parce qu'elle supposerait un important effort de coopération et de coordination de la part des États membres et entre eux.

Dans la mesure où l'article 13 de l'accord de Cotonou prévoit déjà des obligations juridiques claires pour les parties à l'accord concernant la réadmission de leurs propres ressortissants illégalement présents sur le territoire d'une autre partie, ainsi que la conclusion d'accords de réadmission bilatéraux, la Commission estime que de telles mesures d'incitation financière ne sont pas nécessaires et que, par conséquent, elles ne devront pas être appliquées à ces pays.

Là encore, la Commission estime que, pour adopter une approche équilibrée, il convient d'étudier les solutions possibles au cas par cas, en tenant compte non seulement de l'importance du pays tiers concerné en terme de flux migratoires vers l'Union européenne, mais également de la situation spécifique du pays, de l'état des relations et du niveau de coopération qu'il entretient avec la Communauté et avec les États membres.

 

12. LES STRATEGIES ET LES PROGRAMMES : LA RÉVISION À MI-PARCOURS

 

Lors de la planification, la programmation et la mise en oeuvre pluri-annuelle des actions mentionnées aux chapitres 6, 7 et 8, la question de savoir si les flux migratoires devaient faire l'objet d'une attention particulière (et si oui, sous quelle forme) a été abordée au cas par cas, dans le cadre de l'élaboration des documents de stratégie nationale ou régionale, à laquelle les États membres ont été pleinement associés. La prise en compte du phénomène migratoire dans les documents de stratégie nationale et régionale, au travers du dialogue normal de programmation, a permis la pleine participation et le réel engagement du pays ou de la région concernée, de même que la différenciation et la définition des priorités en fonction des besoins observés et des politiques existantes. La Commission a également cherché à assurer la pleine coordination et la complémentarité des actions mises en oeuvre par la Communauté et les États membres.

Selon les mêmes procédures, la Commission a déjà indiqué qu'elle est disposée à profiter de la révision à mi-parcours des documents de stratégie nationale et régionale (qui devrait débuter en 2003) pour examiner, pays par pays et dans le cadre du dialogue de programmation, si et dans quelle mesure il serait souhaitable d'accorder une plus grande priorité aux programmes spécifiques relatifs à la migration. Il pourrait en résulter un réajustement des actions extérieures de la Communauté, visant à donner plus de poids à la politique migratoire et à d'autres questions connexes.

Toutefois, la Commission tient à souligner que la révision des documents de stratégie nationale ou régionale devra toujours être guidée par les objectifs de coopération de la Communauté, qui n'auront pas changé. En outre, dans la définition de l'ampleur de la révision, il convient de garder à l'esprit que les programmes pluriannuels sont conçus pour fixer le pays partenaire et la Communauté dans un engagement à long terme en matière de développement qui présente un degré limité de flexibilité.

Il faut ajouter que la question de la migration n'est pas la seule préoccupation à prendre en compte à l'occasion de la révision de notre politique de coopération avec les pays tiers. Il conviendra également de s'interroger sur la réponse à apporter à d'autres changements ou de nouvelles orientations survenus dans le domaine des politiques communautaires, notamment dans le domaine commercial après Doha, dans celui du développement durable après Johannesburg, ou encore dans celui de la criminalité et du terrorisme. Et il va sans dire que, compte tenu du fait que les ressources communautaires disponibles sont limitées, la Commission devra procéder à des arbitrages entre priorités concurrentes. C'est précisément dans le cadre de l'élaboration des documents de stratégie nationale ou régionale que cet arbitrage peut être fait, car c'est à ce moment là, et avec la participation de tous les acteurs concernés, qu'une stratégie communautaire équilibrée et cohérente à l'égard des pays tiers peut être mise en place.

 

13. LE RENFORCEMENT DES CAPACITES INSTITUTIONNELLES : AUTRES MESURES

 

L'aide communautaire envisagée au chapitre précédent pour la préparation et la mise en oeuvre des accords de réadmission par des pays tiers, basée sur les ressources disponibles de la ligne budgétaire B7-667, pourrait s'appuyer sur l'expérience acquise en matière de renforcement des capacités institutionnelles et d'assistance technique et donnerait notamment plus d'importance aux aspects suivants:

* l'amélioration des législations nationales et de la gestion des flux migratoires réguliers et du droit d'asile, dans le respect des conventions internationales;

* le renforcement de l'efficacité des législations nationales dans la prévention et la lutte contre l'émigration illégale et de la lutte contre les activités criminelles, le crime organisé et la corruption;

* le renforcement des capacités institutionnelles et de l'assistance technique de manière à mieux équiper les pays en développement dans la lutte contre le passage en fraude et la traite des êtres humains;

* le renforcement des capacités institutionnelles dans le domaine des douanes et de la police (au besoin en fournissant du matériel), en prenant toutes les garanties nécessaires, eu égard notamment aux doubles usages éventuels.

La conception et la mise en oeuvre des mesures envisagées se fonderont sur des principes garantissant une articulation harmonieuse entre les actions financées par cet instrument et celles qui reçoivent un financement d'autres instruments communautaires de coopération et de développement, de façon à préserver la cohérence globale de l'action extérieure de la Communauté.

 

II. RAPPORT SUR L'EFFICACITE DES RESSOURCES FINANCIERES DISPONIBLES AU NIVEAU COMMUNAUTAIRE EN MATIERE DE RAPATRIEMENT DES IMMIGRANTS ET DEMANDEURS D'ASILE DEBOUTES, DE GESTION DES FRONTIERES EXTERIEURES ET DE PROJETS D'ASILE ET DE MIGRATION DANS LES PAYS TIERS.

 

1. INTRODUCTION.

 

Lors de sa réunion de Séville les 21 et 22 juin 2002, le Conseil européen a demandé à la Commission de présenter au Conseil « un rapport sur l'efficacité des ressources financières disponibles au niveau communautaire en matière de rapatriement des immigrants et demandeurs d'asile déboutés, de gestion des frontières extérieures et de projets d'asile et de migration dans les pays tiers. » (Conclusions de la Présidence, 38).

La présente communication vise à répondre à cette demande, en examinant les instruments existants répondant, directement ou indirectement, aux domaines identifiés par le Conseil européen. Toutefois, la Commission considère que cet exercice est l'opportunité d'une démarche d'analyse plus large, qui doit englober non seulement tous les instruments financiers déjà mis en oeuvre, mais aussi ceux qui sont envisagés à ce jour dans le cadre des politiques communes d'asile et d'immigration. Il est aussi utile de rappeler que la référence dans les conclusions de Séville aux « ressources disponibles au niveau communautaire » ne permet pas de faire l'impasse sur les règles applicables à toute dépense fondée sur le budget communautaire (nécessité d'une base légale, conformité avec les principes de subsidiarité et de proportionnalité, respect des perspectives financières, programmation pluriannuelle et évaluation ex-ante et ex-post).

Ce rapport s'appuie sur les résultats de la mise en oeuvre des instruments disponibles à ce jour. Il faut cependant souligner que l'évaluation des résultats et de l'impact de programmes et d'actions, législatives ou financières, est un processus de long terme. Or, la plupart des initiatives dans les domaines concernés sont relativement récentes, et de nombreux programmes et projets soutenus n'ont pas encore atteint le stade de la mise en oeuvre ou sont toujours en cours de réalisation.

Conformément à la stratégie définie par la Commission européenne en matière d'évaluation et d'étude d'impact de ses politiques [25], ces programmes et actions feront l'objet d'une évaluation régulière, si possible par des consultants externes. Le présent document ne peut donc être interprété comme un bilan exhaustif.

[25] Notamment la Communication de la Commission SEC(2000)1051 "Mettre l'accent sur les résultats : renforcer l'évaluation des activités de la Commission" du 26.07.2000.

Il est néanmoins possible de dégager certains enseignements de l'expérience acquise. En outre, pour beaucoup de ces actions, les années 2003 et 2004 seront décisives en terme d'orientation, qu'il s'agisse de la fin de programmation en cours ou de phases préparatoires, de la mise en oeuvre de nouveaux instruments ou de la prise en considération de priorités politiques récemment dégagées. Il est donc souhaitable de mener également un exercice prospectif quant à une utilisation optimale, cohérente et coordonnée des ressources financières, qu'elles relèvent de la politique interne ou de la dimension extérieure de l'action communautaire, en complémentarité avec les instruments et politiques mis en oeuvre par les Etats membres.

Ce rapport donne également l'opportunité de s'interroger sur une vision à plus long terme des défis auxquels la Communauté et les Etats membres devront faire face dans les années à venir. La Commission considère donc qu'il convient d'anticiper et de définir des orientations sur les besoins futurs de la Communauté, notamment en termes de ressources financières, qui lui permettront de répondre aux demandes émises par le Conseil européen lors de ses réunions de Tampere, Laeken et Séville.

Ces démarches doivent bien entendu s'inscrire dans le strict respect de la réglementation financière en vigueur, des perspectives financières définies d'un commun accord entre les institutions communautaires, ainsi que des principes de rationalité et d'efficacité de l'utilisation du budget communautaire.

 

2. CONTEXTE DE L'INTERVENTION FINANCIERE DE LA COMMUNAUTE.

 

L'utilisation des ressources du budget communautaire en application ou en soutien de politiques relevant de la compétence de la Communauté ou de l'Union européenne est régie par les dispositions des Traités constitutifs. Elle doit répondre en particulier aux principes de subsidiarité et de complémentarité.

 

2.1 Principe de subsidiarité et de proportionnalité de l'action communautaire.

 

En vertu de l'article 5 du Traité instituant la Communauté européenne, « dans les domaines ne relevant pas de sa compétence exclusive, la Communauté n'intervient, conformément au principe de subsidiarité, que si et dans la mesure où les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison des dimensions ou des effets de l'action envisagée, être mieux réalisés au niveau communautaire ». Ce principe s'applique également et impérativement lorsque le financement en tout ou en partie d'une action est prévue à partir du budget communautaire, selon le protocole sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité.

En application de ce principe, toute proposition législative communautaire, y compris les propositions visant au financement d'actions sur le budget communautaire doit :

- répondre à une question présentant des aspects transnationaux qui ne peuvent pas être réglés de manière satisfaisante par l'action des Etats membres ;

- porter sur un domaine ou des actions pour lesquels une action au seul niveau national ou l'absence d'action de la Communauté serait contraire aux exigences du Traité ou léserait gravement d'une autre manière les intérêts des Etats membres ;

- démontrer qu'une action menée au niveau communautaire présenterait des avantages manifestes en raison de ses dimensions ou de ses effets, par rapport à une action des Etats membres.

 

2.2 Encadrement des dépenses communautaires - respect des perspectives financières et programmation pluriannuelle.

 

L'évolution des instruments financiers et la proposition de nouvelles initiatives doit s'inscrire dans le cadre des perspectives financières définies par l'accord institutionnel du 6 mai 1999 [26]. A ce titre, la marge de manoeuvre tant au niveau des politiques internes (Rubrique 3), incluant les mesures liées à l'établissement d'un espace européen de liberté, de sécurité et de justice, que des actions extérieures (Rubrique 4) est relativement réduite.

[26] Accord interinstitutionnel du 6 mai 1999 entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire, JOCE C 172 du 18.06.2002, p. 1.

Toute évolution substantielle dans l'utilisation de ces ressources doit s'inscrire dans les limites prévues, et éventuellement faire l'objet d'arbitrages et de réallocations en fonction des priorités politiques de l'Union. Il va de soi que la Commission, dans le cadre de sa stratégie de politique annuelle peut décider de mettre l'accent sur l'une ou l'autre priorité politique qui sera ensuite traduite en termes budgétaires dans l'avant-projet de budget, mais la responsabilité finale sur l'allocation des ressources relève au premier chef de l'Autorité budgétaire

 

3. INSTRUMENTS DE POLITIQUE INTERNE CONSACRES AUX POLITIQUES D'ASILE ET D'IMMIGRATION ET A LA GESTION DES FRONTIERES EXTERIEURES.

 

Tous les instruments financiers dans ces domaines relèvent de bases légales établies en accord entre les institutions et l'autorité budgétaire, en ce compris le Conseil des ministres. Développés à l'origine en tant que projets-pilotes ou actions préparatoires, ils ont donné lieu à l'instauration, par Décision du Conseil, de programmes pluriannuels.

 

3.1 Evolution des ressources financières communautaires consacrées aux politiques d'asile et d'immigration et à la gestion des frontières extérieures.

 

Les ressources allouées au titre B5-8 « Espace de liberté, de sécurité et de justice » du budget communautaire aux politiques d'asile, de migration et de gestion des frontières extérieures ont connu une augmentation importante depuis l'entrée en vigueur du Traité d'Amsterdam, passant de 29.559.694 EUR en 1998 à 51.310.000 EUR en 2002. Le Fonds européen pour les Réfugiés (FER) reçoit à lui seul 43 % des crédits du titre B5-8. Cependant, les crédits consacrés à la politique communautaire en matière d'asile, d'immigration et de frontières extérieures représentent à peine 0,83 % des dépenses prévues au titre des politiques internes de la Communauté en 2002.

 

3.2 Instruments financiers adoptés en exécution ou en accompagnement des stratégies de Tampere et Laeken.

 

Le développement progressif d'une politique commune dans les domaines de l'immigration et de l'asile a eu pour corollaire la création de plusieurs instruments financiers, au rang desquels il est possible de distinguer essentiellement deux types d'interventions : le renforcement de la coopération administrative et les « mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les Etats membres pour accueillir des réfugiés et des personnes déplacées et supporter les conséquences de cet accueil » [27].

[27] Article 63.2.b du Traité instituant la Communauté européenne.

 

3.2.1. Instruments visant à renforcer la coopération administrative.

 

L'objectif des programmes de coopération, en complément de la mise en oeuvre de dispositions législatives visant à créer un espace de liberté, de sécurité et de justice, est d'améliorer la compréhension mutuelle entre les services nationaux compétents et la manière dont ils mettent en oeuvre la législation communautaire applicable, dans le but de développer une culture administrative commune et d'uniformiser les pratiques des Etats membres lorsqu'ils appliquent le droit communautaire.

Il est utile de rappeler que les premiers fondements dans ces actions n'étaient pas particulièrement axés sur les domaines identifiés par le Conseil européen de Séville et ont été établis par le lancement du programme pilote SHERLOCK (1996-2000), relatif à la formation, l'échange et la coopération dans le domaine des documents d'identité, en particulier la détection de faux documents. En 1998, les activités de ce programme ont été intégrées dans le programme ODYSSEUS. Doté d'un budget indicatif de 12 MEUR sur la période 1998-2002, ODYSSEUS s'est en fait achevé à la fin de 2001, la totalité des crédits prévus ayant été épuisés à cette date. Ce programme a permis de financer 155 projets de coopération associant majoritairement des services administratifs nationaux ou des organisations internationales, et dans une moindre mesure des organisations non gouvernementales et des institutions d'enseignement ou de recherche. Ces projets, portant sur des actions de formation et de stages du personnel administratif, échanges de fonctionnaires ou autres agents habilités, ou de recherche et d'études ont été répartis de manière quasi égale entre les trois domaines couverts par le programme : asile (28 % des projets), immigration (28 %), franchissement des frontières extérieures (23 %) et projets relatifs à plusieurs de ces problématiques (21 %). Durant les deux derniers exercices (2000-2001), des synergies ont été recherchées entre les projets soutenus au titre d'ODYSSEUS avec de nouvelles initiatives communautaires, telles que la coopération avec les pays tiers en matière de migration, et la participation des pays candidats à l'adhésion a été favorisée.

Une nouvelle étape a été franchie avec l'adoption du programme ARGO le 13 juin 2002 [28] pour une période de 5 ans, et doté d'une enveloppe indicative de 25 MEUR. Si ODYSSEUS a créé les bases de la coopération administrative, ARGO représente un pas décisif vers la mise en place de coopérations opérationnelles, en soutenant la réalisation de projets communs concrets : mise en commun de ressources, et possibilité de créer des centres opérationnels communs et d'équipes composées d'agents de plusieurs Etats membres. Le programme prévoit par ailleurs des modalités de lien entre dimensions interne et externe des politiques des Etats membres, en prévoyant la capacité de soutenir les activités des Etats membres dans les pays tiers, notamment les pays d'origine et de transit. ARGO est enfin doté de dispositions permettant une flexibilité et une capacité de réaction rapide dans des situations d'urgence.

[28] Décision du Conseil 2002/463/CE du 13 juin 2002 portant adoption d'un programme d'action concernant la coopération administrative dans les domaines des frontières extérieures, des visas, de l'asile et de l'immigration (programme ARGO), JOCE L 161/11 du 19.06.2002, p. 11.

Dès l'adoption de la décision établissant le programme ARGO, la Commission a pris les dispositions nécessaires au lancement d'études (étude de faisabilité concernant les contrôles aux frontières maritimes, étude de faisabilité sur les aspects techniques et financiers d'un système d'information en matière de visas) et d'un appel à propositions dans le cadre du programme. Les premiers projets présentés au titre du programme ARGO ont été reçus par la Commission en octobre 2002 et sont en cours d'évaluation. Ils pourront démarrer dès la fin de l'année 2002.

 

3.2.2. Le Fonds européen pour les Réfugiés (2000-2004)

 

Le Fonds européen pour les Réfugiés est à l'heure actuelle le principal programme en terme de volume financier dans le domaine des politiques communes d'asile et d'immigration.

 

3.2.2.1 Résultats des actions préparatoires (1997-1999) et principes régissant le Fonds européen pour les réfugiés.

 

Le Fonds est basé sur l'expérience des actions préparatoires mises en oeuvre entre 1997 et 1999 sur les lignes budgétaires B3-4113 (aide à l'intégration des réfugiés), B7-6008 (aide au rapatriement volontaire des réfugiés) et B5-803 (aide à l'accueil et au séjour de réfugiés et personnes déplacées, accès aux procédures d'asile). Pendant ces trois années, 370 projets ont été soutenus, pour un total de plus de 80 MEUR, dont EUR 14.300.000 ont été débloqués pour permettre aux Etats membres de faire face à l'afflux massifs de personnes déplacées en provenance du Kosovo. Les conditions d'accueil ont recueilli 24 % des fonds sur la période 1997-1999 (36,7 % si l'on tient compte des crédits supplémentaires octroyés en 1999 au titre du Kosovo), les mesures d'intégration 37,8 % (31,1%) et l'aide au retour volontaire 38 % (31,3%).

La majorité des actions financées au titre de l'accueil ont permis de renforcer et d'améliorer la capacité et la qualité des structures d'accueil de demandeurs d'asile et réfugiés dans les Etats membres, en particulier pour les personnes les plus vulnérables (femmes et mineurs non accompagnés), ainsi que de développer l'assistance à l'accès aux procédures d'asile.

Les actions financées en matière d'intégration portaient sur des actions de conseil et de développement des capacités, en particulier en matière de formation professionnelle et d'accès au marché de l'emploi, d'éducation et d'intégration à la communauté locale du pays d'accueil, de santé, d'accès au logement.

60 % des projets soutenus dans le cadre des actions préparatoires au titre de l'aide au rapatriement volontaire ont été destinés au retour de réfugiés ou personnes bénéficiant de protection subsidiaire ou temporaire originaires de Bosnie.

Basé sur l'article 63.2.b du Traité instituant la Communauté européenne, le Fonds européen pour les réfugiés (ligne B5-810) a été établi par Décision du Conseil le 28 septembre 2000 [29] pour la période 2000-2004, et doté d'un budget indicatif de 216 millions d'Euros sur 5 ans (dont 50 MEUR à titre de réserve pour d'éventuelles mesures d'urgence). Il traduit en termes opérationnels et financiers le principe de solidarité entre les Etats membres dans la mise en oeuvre d'une politique commune en matière d'asile, et mis en oeuvre en gestion partagée avec les Etats membres, puisque 95 % des fonds sont gérés directement par ces derniers.

[29] Décision du Conseil 2000/596/CE du 28 septembre 2000 portant création d'un Fonds européen pour les réfugies, JOCE L 252 du 6.10.2000, p.12.

Le FER couvre des actions visant à l'accueil, à l'intégration et au retour (y compris à la réintégration dans le pays d'origine) des réfugiés, demandeurs d'asile ou de personnes bénéficiant ou ayant demandé à bénéficier de régimes de protection subsidiaires ou temporaires dans un Etat membre [30].

[30] Le FER est notamment lié à la mise en oeuvre de la Directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l'octroi d'une protection temporaire en cas d'afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil, JOCE n° L212 du 7.8.2001, p.12.

Les activités du FER sont complétées par une partie (domaine thématique 9) des actions du Programme d'Initiative Communautaire EQUAL, qui vise à favoriser l'accès au marché de l'emploi des demandeurs d'asile, dans le respect des règles nationales régissant le cadre de travail et établissant les droits d'accès des demandeurs d'asile à l'emploi. 46 projets ont déjà été approuvés pour les années 2001 et 2002.

 

3.2.2.2. Evaluation de la mise en oeuvre du FER 2000-2002

 

Une évaluation indépendante des actions du FER portant sur la période 2000, 2001 2002 est prévue par la Commission et sera disponible dans le courant de 2003. En effet, compte tenu de l'adoption de la Décision du Conseil en septembre 2000, les programmes de financement sur les années 2000 et 2001 ont été adoptés simultanément à la fin de l'année 2000, et courent jusqu'à la fin de l'année 2002. Afin d'obtenir des informations pertinentes sur les résultats de ces deux premiers exercices, la Commission a donc décidé de faire procéder à une évaluation indépendante portant sur un cycle complet d'actions, ce qui ne pourra être réalisé qu'au début de 2003. Toutefois, le présent rapport peut, selon les termes définis dans la Décision du Conseil établissant le programme, effectuer un premier bilan des deux premières années de mise en oeuvre du programme (bilan de la mise en oeuvre à mi-parcours).

Un certain nombre d'éléments peuvent donc être dégagés à ce stade, qui ne peuvent cependant préjuger des résultats de l'évaluation indépendante qui sera effectuée en 2003 :

- au regard des modalités du partage de la charge entre les Etats membres, les mécanismes de calcul prévus à l'article 10 de la Décision du Conseil ont permis de faire évoluer le partage des fonds disponibles au titre du FER en fonction de l'évolution de la charge à laquelle devaient faire face les Etats membres. De plus, parmi les paramètres définis dans la décision du Conseil pour le calcul des allocations annuelles des Etats membres, les montants fixes prévus à l'article 10.1 ont joué leur rôle de rééquilibrage de la charge relative supportée par chaque Etat membre. Enfin, l'Autorité budgétaire a augmenté la dotation financière de cette ligne par rapport à la prévision détaillée dans la proposition initiale de la Commission, ce qui a permis d'augmenter les ressources disponibles pour chacun des Etats membres participant au FER.

- le principe de solidarité, ainsi que les modalités du partage des ressources entre Etats membres, trouve cependant certaines limites dans le fait que les calculs annuels sont basés sur l'évolution du nombre de personnes bénéficiant ou demandant à bénéficier du statut de réfugié ou d'une forme de protection subsidiaire ou temporaire, et ne tient donc pas compte des différences structurelles entre les Etats membres, et notamment des besoins d'investissement en matière de réception, d'intégration ou de retour volontaire. On a ainsi pu constater dans la pratique qu'un certain nombre d'Etats membres n'ont pas mobilisé dans des projets la totalité des allocations qui leur ont été attribuées en application des critères définis à l'article 10 de la Décision du Conseil.

- la mise en oeuvre des calculs prévus à l'article 10, basés sur les données disponibles via Eurostat et mises à jour par les Etats membres, a également mis à jour des différences parfois importantes en matière de méthodologies statistiques. Tant ce problème « concret » que la mise en oeuvre et l'évaluation des besoins et de l'impact de politiques communes en matière d'asile et de migrations appellent une harmonisation accrue de ces méthodologies. La Commission envisage donc de renforcer la coopération dans ce domaine.

- la part respective des fonds consacrés par les Etats membres aux différentes mesures a relativement peu varié entre 2000 et 2002 : une majorité des allocations nationales du FER sont consacrées à des investissements dans les conditions d'accueil des demandeurs d'asile (49,4 %), les projets en matière d'intégration recueillant 28,3 % des fonds, le rapatriement volontaire recevant 22,23 % des fonds. Un accroissement substantiel des fonds consacrés au rapatriement a cependant été constaté entre 2000 et 2002 (de 15 % des fonds FER en 2000 à 24 % en 2002).

- le mode de « gestion partagée », s'il est par essence une traduction du principe de solidarité, présente cependant l'inconvénient d'une certaine « isolation » des différents programmes et actions mis en oeuvre au niveau national. Des actions d'échanges d'expérience et de mise en réseau au niveau transnational peuvent être encouragées dans le cadre des actions communautaires, mais il ressort des trois premières années du programme que cette possibilité est très peu utilisée par les Etats membres.

- les premières années de mise en oeuvre du FER sont caractérisées, en comparaison des actions préparatoires de la période 1997-1999, par une certaine rigidité du système de gestion, due notamment au rythme annuel du processus d'allocation des fonds, qui limite la possibilité de financer des initiatives structurelles ou ayant besoin d'une durée de mise en oeuvre relativement longue pour produire leurs effets. A cela s'ajoute le transfert de la gestion administrative de la sélection et de la gestion des projets aux Etats membres, ce qui a posé à certaines administrations nationales des difficultés dans la mise en place des systèmes et ressources humaines nécessaires à cette nouvelle tâche.

 

3.3 Les développements prévus à court et moyen terme.

 

L'évolution des orientations politiques a permis de dégager de nouvelles possibilités d'action pouvant être développées dans le cadre financier existant, en accord avec l'autorité budgétaire. Il s'agit en particulier de l'amélioration des systèmes d'information et de connaissance sur les phénomènes migratoires et du lancement d'actions préparatoires en faveur de l'intégration des ressortissants de pays tiers résidant légalement sur le territoire d'un Etat membre.

 

3.3.1. Une meilleure connaissance des phénomènes migratoires.

 

La mise en oeuvre d'une politique commune en matière d'asile et d'immigration, et l'évaluation des résultats de cette politique impliquent une meilleure information des phénomènes migratoires et le développement d'instruments et d'indicateurs fiables dans les domaines de l'asile et de l'immigration.

Dans cette perspective, l'amélioration de la qualité et des échanges d'informations, notamment statistiques, en matière d'asile et de migrations, est une priorité importante. Le Conseil JAI a adopté en mai 2001 des conclusions relatives à l'analyse commune et l'échange amélioré de statistiques en matière d'asile et d'immigration. La Commission poursuit la mise en oeuvre de l'action préparatoire « observatoire européen des migrations », amorcée en 2002, et qui prévoit notamment la création d'un réseau de points focaux nationaux pour l'échange et le suivi d'informations couvrant à la fois les dimensions politiques, économiques, démographiques et sociales des phénomènes migratoires. Le réseau travaillera en coopération avec l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes.

La Commission présentera prochainement au Conseil un Plan d'action qui couvrira plusieurs types de mesures, y compris la proposition de nouvelles méthodes statistiques et l'extension du champ des données collectées à ce jour. Ces actions ont été dotées en 2002 d'un budget de 1,4 MEUR, et devraient en 2003 disposer de crédits pour un montant de 2,6 MEUR.

 

3.3.2. La mise en place de systèmes d'information performants.

 

Le système Eurodac de comparaison des empreintes digitales, créé pour soutenir une mise en oeuvre efficace de la Convention de Dublin, a été le premier système d'information important développé au niveau communautaire dans le domaine de la justice et des affaires intérieures. Un montant de 9,6 MEUR a été investi dans le développement de ce système, qui sera opérationnel le 1er janvier 2003.

Des ressources importantes su budget communautaire devront également être mobilisées pour le développement de la deuxième génération du Système d'Information Schengen (SIS II), et le Système d'Information sur les Visas (VIS). En ce qui concerne le système SIS II, le Conseil a déjà pris la décision d'affecter le financement de cet instrument au budget communautaire (Règlement du Conseil 2001/2421/CE et Décision du Conseil 2001/886/JAI). Les ressources nécessaires ont été estimées par la Commission à 23 MEUR [31]. Dans ses lignes directrices pour le système VIS, le Conseil a également demandé à la Commission de quantifier les ressources financières nécessaires, afin d'allouer les fonds adéquats dans le cadre de la procédure budgétaire communautaire.

[31] Communication de la Commission du 18.12.2001 au Parlement européen et au Conseil - Le développement du Système d'Information Schengen, Com(2001)720 Final.

En tout état de cause, les ressources nécessaires à la mise en oeuvre de ces deux projets dépendront largement des options retenues par le Conseil, et qui seront détaillées dans les bases légales. Ceci comprendra également la définition des responsabilités respectives de la Communauté et des Etats membres, ainsi que les choix qui seront faits quant à la gestion de ces instruments lorsqu'ils seront opérationnels.

 

3.3.3 Actions préparatoires en matière d'intégration des nationaux des pays tiers.

 

Bien que n'étant pas spécifiquement citée dans le paragraphe 38 des conclusions du Conseil européen de Séville, il convient de mentionner que l'intégration des migrants dans nos sociétés demeure une dimension centrale de la stratégie globale de l'Union européenne en matière d'immigration.. Cette priorité a été explicitement reconnue lors du Conseil européen de Tampere, qui a fait du « traitement équitable des ressortissants des pays tiers » l'un des titres principaux de ses conclusions. De plus, le développement d'interactions entre Etats membres, collectivités territoriales et locales et le secteur des organisations non-gouvernementales est essentiel à la diffusion de bonnes pratiques, dans un domaine qui demande à la fois un grand niveau d'expertise et une sensibilité à la diversité culturelle.

De nombreux efforts ont été développés au niveau communautaire dans cet objectif. Des programmes tels qu'ESQUILLE en matière d'emploi et d'accès à l'emploi, les autres initiatives développées dans le cadre des fonds structurels, le programme d'action communautaire de lutte contre la discrimination, les activités de l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes et le programme Leonardo da Vinci ont apporté une contribution importante dans ce domaine.

La nouvelle ligne budgétaire (B5-815), portant sur des projets pilotes et proposée par la Commission dans le cadre de l'avant projet de budget 2003, a pour objectif de renforcer cette action d'intégration des ressortissants de pays tiers, migrants économiques, en encourageant le dialogue entre les acteurs de cette intégration, en soutenant la création de réseaux européens et en promouvant la connaissance et l'information sur ces questions. Un budget de 3 MEUR est proposé par la Commission pour cette première année de mise en oeuvre. Les actions préparatoires dans le cadre de cette nouvelle ligne budgétaire incluront :

- des échanges d'information et de bonnes pratiques en vue d'identifier des modèles transférables ;

- des coopérations transnationales au niveau national, régional et local impliquant les organismes gouvernementaux, les représentants de la société civile, y compris les migrants ;

- le soutien à des programmes d'accueil de migrants de pays tiers, avec une attention particulière pour les groupes les plus vulnérables ;

- des actions d'information visant à favoriser la prise de conscience.

L'Autorité budgétaire a d'ores et déjà montré un soutien important à cette nouvelle initiative en proposant de porter sa dotation pour l'année 2003 à 4 MEUR.

 

3.3.4. L'avenir du Fonds européen pour les Réfugiés.

 

Le F.E.R. dans sa phase actuelle se termine au 31/12/2004. Les résultats de l'évaluation à mi-parcours, ainsi que les priorités qui se seront dégagées dans la gestion d'autres instruments ou actions préparatoires détermineront l'approche de la Commission dans sa proposition relative aux actions à mener après 2004 au niveau communautaire en faveur des réfugiés et demandeurs d'asile. Deux éléments fondamentaux doivent d'ores et déjà être pris en compte dans la réflexion sur l'avenir du Fonds européen pour les Réfugiés après 2004 :

- Le F.E.R. est l'un des instruments de la politique commune en matière d'asile. La deuxième phase de cet instrument devra donc refléter les progrès et les réalisations de cette politique depuis 1999, et répondre à des objectifs et des priorités d'intervention plus précises, découlant notamment de l'entrée en vigueur des directives et règlements communautaires ; cette deuxième phase pourrait également être le levier du développement de nouvelles initiatives, en intégrant par exemple parmi ses activités les programmes de réinstallation (« resettlement »), évoqués par la Commission dans sa Communication « Vers une procédure d'asile commune et un statut uniforme, valable dans toute l'Union, pour les personnes qui se voient accorder l'asile » du 22/11/2000 [32];

[32] Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen Vers une procédure d'asile commune et un statut uniforme, valable dans toute l'Union, pour les personnes qui se voient accorder l'asile,COM/2000/0755 final, 22.11.2000.

- le développement éventuel de nouvelles initiatives en matière d'intégration des migrants et de politiques de retour posera également la question de l'articulation de ces instruments avec les mesures prévues dans le cadre du FER dans ces mêmes domaines.

Par ailleurs, l'accentuation de la priorité accordée au rapatriement, en particulier celui des personnes en séjour irrégulier, pourrait être prise en compte dans ce contexte. En effet, le Fonds permet déjà aux Etats membres de cofinancer des actions visant au rapatriement de demandeurs d'asile et de réfugiés. Ces actions représentent à ce jour 22 % des montants utilisés. Comme on le verra plus loin, la création d'un instrument financier de soutien à une politique de retour devrait nécessairement passer par une réallocation d'une partie des crédits du FER, compte tenu de la marge de manoeuvre réduite des perspectives financières au titre des politiques internes.

Une réflexion s'impose donc, qui devra tenir compte tant de la spécificité des populations visées et du besoin d'efficacité des actions promues que des impératifs de rationalité dans la gestion des instruments financiers communautaires. A cet égard, une option radicale pourrait être de limiter la partie du Fonds au seul accueil des réfugiés et personnes déplacées, dans l'hypothèse de la création de programmes distincts en matière d'intégration (qui couvrirait dès lors tous les profils de migrants, à des fins de protection internationale ou non), et l'aide au retour. Sans doute logique par rapport à un certain réagencement des priorités politiques, ce choix aurait néanmoins pour effet, compte tenu des nécessaires réallocations de ressources qui l'accompagneraient, de réduire d'autant la base financière propre à l'effort d'authentique solidarité ayant présidé à la mise en place du Fonds.

 

4. INSTRUMENTS DE POLITIQUE EXTERNE.

 

4.1 Contributions à la préparation de la future Europe élargie.

 

De nombreux efforts ont été développés au cours des dernières années pour renforcer la politique migratoire et la gestion des frontières dans les pays candidats. Dans le cadre de l'élargissement, la migration, l'asile, le contrôle aux frontières et les questions douanières ont toujours reçu une attention particulière. Entre 1997 et 2001, un montant total de 356 MEUR a été dépensé sur différents projets sur mesure dans le cadre des programmes Phare nationaux pour 10 pays candidats. Un grand nombre de ces projets ont consisté en une composante de "twinning" grâce à laquelle les experts de migration des États membres ont été affectés, pour une période minimale d'une année, dans l'administration d'un pays candidat.

En complément de ces initiatives, un programme régional Phare "migration, visas, gestion des contrôle aux frontières extérieures" a débuté en janvier 2001, couvrant 10 pays candidats. Le Danemark était responsable du module de migration. Ce programme comprend des actions de formation interactive des formateurs, et des séminaires dans le cadre de chacun des modules ont été mis en oeuvre à partir de l'automne 2001. Le projet a donné lieu à la production de recommandations conjointement convenues entre États membres et pays candidats, comprenant pour ces derniers un calendrier de mise en oeuvre pour de module.

 

4.2 Partenariats avec les pays tiers d'origine et de transit.

 

Le Conseil européen a, lors de sa réunion de Tampere en octobre 1999, posé les bases de l'intégration des préoccupations liées à l'asile et l'immigration dans la dimension externe de l'action communautaire, en soulignant qu'une approche intégrée, globale et équilibrée visant à s'attaquer aux causes profondes de l'immigration illégale doit rester l'objectif constant de l'Union européenne à long terme, et que le partenariat avec les pays tiers concernés constitue un élément déterminant du succès de cette politique.

A cette fin, la Commission, sur la base des instruments financiers dont elle dispose pour son action extérieure, a programmé diverses actions visant à répondre, directement ou indirectement, à la stratégie définie à Tampere.

Compte tenu des nouvelles compétences transférées à la Communauté par le Traité d'Amsterdam, la question des migrations et en particulier de la lutte contre l'immigration illégale a également été intégrée dans tous les accords d'association et de coopération signés depuis 1999, notamment avec les pays tiers du bassin méditerranéen, ainsi que dans les accords de partenariat et de coopération avec les Nouveaux Etats Indépendants d'Europe Centrale et d'Asie Centrale, les Balkans et les Etats A.C.P. Des initiatives ont été prises avec certains pays et régions dans le cadre de la programmation de l'aide extérieure, contribuant directement à traduire ces nouvelles priorités en matière de gestion des flux migratoires. Ces actions concernent le développement de régions traditionnellement sources d'émigration, la mise en place de politiques et d'infrastructures d'accueil en matière d'asile, le renforcement des capacités institutionnelles, notamment des forces de police et du système judiciaire ou l'amélioration du contrôle aux frontières extérieures, la lutte contre l'immigration illégale et le trafic d'être humains, le retour et la réintégration de réfugiés et de personnes déplacées On peut citer par exemple le programme de lutte contre l'immigration illégale par le soutien à l'amélioration de la gestion des contrôles aux frontières adopté dans le cadre de la coopération avec le Maroc pour la période 2002-2004, doté d'un budget de 40 MEUR. De même, plus de 37 MEUR sont prévus dans le cadre du programme CARDS pour soutenir la lutte contre l'immigration illégale et le trafic d'êtres humains et le renforcement des capacités institutionnelles en matière de gestion des politiques d'asile et de migration dans les pays des Balkans occidentaux. En tout, et sans prendre en compte les actions dans les domaines de l'aide à la réhabilitation ou les actions de développement destinées à s'attaquer aux causes profondes de la migration, ce sont environ 440 millions d'Euros qui ont été programmés, essentiellement sur la période 2002-2004, pour des actions dédiées à l'amélioration de la gestion des frontières et de la migration ainsi qu'à la promotion de la lutte contre la migration illégale.

Toujours au titre de l'action extérieure de la Communauté, les stratégies et mesures visant à faire le lien entre l'aide d'urgence, la réhabilitation et le développement, telles que le programme communautaire d'aide aux populations déracinées en Asie et Amérique latine en matière de retour, de réintégration et de réhabilitation des populations déracinées peuvent également jouer un rôle positif dans des zones géographiques marquées par des déplacements massifs de populations. En complément de la politique de pacification, de réconciliation et de prévention des conflits, ces programmes favorisent également des solutions durables pour les populations réfugiées suite à des catastrophes naturelles ou des situations de conflits armés, tout en limitant les phénomènes de déplacement secondaires de ces populations,. A titre d'exemple, une assistance de 48,7 MEUR a été allouée en 2002 pour soutenir la réintégration des réfugiés et des personnes déplacées en Afghanistan.

Toutes ces initiatives ont été conçues selon les principes qui sous-tendent la réforme de la gestion de l'aide extérieure, mise en oeuvre depuis 2000, et basée notamment sur un processus de programmation pluriannuelle des instruments de l'assistance extérieure. Ce processus repose essentiellement sur les documents de stratégie nationale ou régionale (« Strategy Papers ») dans le cadre desquels sont définis, pour une période de cinq à sept ans et en accord avec les pays tiers et régions concernés, les domaines d'intervention prioritaires de l'action communautaire. Sur la base de ces documents de stratégie sont définis les Programmes Indicatifs Nationaux, qui couvrent une période de deux à trois ans, et déterminent l'allocation des moyens financiers pour la réalisation des objectifs de la stratégie définie.

Une autre initiative spécifique a été mise en place à partir de 2001 en vue de répondre directement à l'approche définie par le Conseil européen. Cette initiative consiste à financer, à partir de la ligne budgétaire B7-667 en phase pilote pour une durée de trois années, des projets novateurs en matière de coopération avec les pays tiers dans le domaine des migrations. L'objectif est de promouvoir une approche globale du phénomène migratoire et d'établir, dans le cadre des partenariats avec les pays tiers d'origine et de transit, les conditions d'une gestion efficace des flux migratoires. Dotée d'un budget de 10 MEUR en 2001 et 12,5 M EUR en 2002, que l'Autorité budgétaire envisage de porter à 20 MEUR en 2003, cette initiative a permis en 2001 de soutenir 15 projets portant sur la mise en place de politiques de gestion des migrations (7 projets), d'aide aux initiatives de retour volontaire et de réintégration (5 projets), et de prévention et de lutte contre l'immigration illégale (3 projets). Il convient cependant de relever que le mode de gestion de cette ligne budgétaire et la mise en oeuvre de ces projets sont pour l'instant en dehors du cadre de programmation de l'aide extérieure.

 

5. LES NOUVEAUX BESOINS IDENTIFIES.

 

Le Conseil européen de Séville a invité la Commission à évaluer les ressources financières disponibles dans trois domaines particuliers : le rapatriement des personnes en séjour irrégulier (migrants et demandeurs d'asile déboutés), la gestion des frontières extérieures et les projets de coopération avec les pays tiers en matière de migrations.

 

5.1 Un instrument financier en appui de la politique de retour ?

 

Le Livre Vert et la communication de la Commission sur une politique communautaire de retour des résidents en séjour irrégulier [33] évoquent la possibilité, conjointement au développement de standards minimum communs et de modalités de coopération accrues entre les Etats membres, de la création d'un instrument financier spécifique.

[33] Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen relative à une politique communautaire en matière de retour des personnes en séjour irrégulier, COM (2002) 564 final du 14 octobre 2002.

La Commission tire notamment les leçons des projets de retour volontaire mis en oeuvre dans le cadre des actions préparatoires du FER, et en particulier de la nécessité d'une approche intégrée de telles opérations, comprenant des mesures de conseil et de préparation, mais également l'accompagnement du rapatriement par des dispositifs d'accueil et de réintégration dans le pays d'origine, condition sine qua non du caractère durable du retour. Également applicable en ce qui concerne les retours forcés, une telle approche ne pourrait, dans un premier temps être concrétisée qu'au prix d'une réallocation des ressources actuellement disponibles au titre des politiques internes et externes de la Communauté.

La mise en place d'un tel instrument doit impérativement se fonder sur l'identification et la quantification des besoins de l'Union européenne en la matière, et la valeur ajoutée qu'une intervention financière communautaire pourrait apporter en réponse à ces besoins. Les résultats du Programme de l'Union européenne de retours en Afghanistan, en élaboration à l'initiative de la Présidence danoise, pourraient à ce titre servir d'étude de cas sur les moyens effectivement nécessaires à la mise en oeuvre de telles actions, et aux complémentarités à rechercher entre l'action des Etats membres et une éventuelle contribution du budget communautaire. Au-delà de la question de la complémentarité en terme de moyens financiers, il serait également impératif d'assurer, par le recours aux mécanismes appropriés existants, une articulation plus harmonieuse de ces actions spécifiques, ciblées sur les questions de migration et de retour, avec les mécanismes, les objectifs et les programmes spécifiques à court, moyen et à long terme développés dans le cadre de l'action extérieure de la Communauté.

La question des moyens éventuellement disponibles pour un programme européen de retour doit tenir compte des perspectives budgétaires, qui s'imposent jusqu'en 2006. Comme indiqué ci-dessus, on peut cependant envisager une réallocation après 2004 d'une partie des crédits du Fonds européen pour les Réfugiés, dont 22 % des ressources entre 2000 et 2002, soit 14 MEUR, ont été utilisées par les Etats membres aux fins de mesures de retour volontaire de réfugiés et de demandeurs d'asile.

 

5.2 Partage des charges entre les Etats membres et l'Union pour la gestion des frontières extérieures

 

La conclusion 32 du Conseil européen de Séville confie à la Commission la tâche de réaliser, pour juin 2003, "une étude sur le partage des charges entre les Etats membres et l'Union concernant la gestion des frontières extérieures".

Cette demande fait suite à l'adoption, le 13 juin 2002, par le Conseil des Ministres JAI du Plan pour la gestion des frontières extérieures des Etats membres de l'Union européenne. Ce plan propose le développement d'une politique commune de gestion intégrée des frontières extérieures et a pour but "d'établir un cadre cohérent pour une action en commun sur le moyen et court terme".

Le Plan identifie cinq composantes de cette politique commune, et le partage des charges en est une. En particulier, le Plan dispose d'évaluer les différentes options pour la réalisation du partage de la charge financière, en reprenant de nombreux éléments sur cette question contenus dans la Communication de la Commission "Vers une gestion intégrée des frontières extérieures des Etats membres de l'Union européenne". [34]

[34] Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen "Vers une gestion intégrée des frontières extérieures des Etats membres de l'Union européenne", COM(2002)233 final du 7.5.2002.

Le Plan adopté par le Conseil rappelle les conditions nécessaires pour recourir au budget communautaire, et notamment le fait que les budgets nationaux doivent demeurer la source principale des investissements et dépenses prévues, qui concernent essentiellement les équipements et les ressources humaines, mais également le fait que les bases du partage seraient établies au niveau de l'Union et dans le respect des perspectives financières communautaires.

Le Plan suggère deux domaines fondamentaux pour lesquels une contribution du budget communautaire peut être envisagée :

- le financement des acquisitions de matériels communs, en particulier aux fins d'appuyer les opérations communes;

- l'établissement d'un mécanisme de redistribution financière entre Etats membres.

En conformité avec la feuille de route établie par la Présidence du Conseil, la Commission doit rédiger le rapport final d'évaluation pour identifier les options financières de réalisation de ce partage pour juin 2003. Il est également prévu que soit présenté un rapport intermédiaire à la mi-novembre 2002, rapport dont tient lieu la présente Communication. En effet, l'objet du rapport intermédiaire était d'établir une évaluation des ressources financières consacrées au niveau national à la gestion des frontières extérieures, en s'appuyant sur les réponses des Etats membres à un questionnaire agréé par eux, qui a été envoyé au début du mois d'août 2002. A la date limite fixée d'un commun accord avec les Etats membres au 30 septembre 2002, très peu de réponses avaient été reçues.

Le questionnaire vise à déterminer, d'une part, l'état des dépenses nationales pour les investissements et pour le fonctionnement dans le cadre de la gestion des frontières extérieures pour les contrôles et la surveillance des personnes. D'autre part, il exige des Etats membres des données sur la réelle pression migratoire aux frontières nationales extérieures. L'ensemble des réponses devrait permettre à la Commission d'effectuer une évaluation comparative viable des dépenses nationales afin d'établir l'ordre de grandeur des charges financières de chaque Etat membre pour garantir une qualité et une efficacité des contrôles et de la surveillance des personnes, qui soient d'un niveau conforme aux dispositions européennes. A cet égard, la comparaison des contributions apparaît problématique, notamment en raison de l'hétérogénéité des méthodes d'évaluation des investissements et besoins ainsi que de la difficulté objective qu'ont les autorités des Etats membres à identifier avec une précision suffisante l'enveloppe financière destinée à couvrir les activités des gardes frontières et l'utilisation des équipements aux fins exclusives du contrôle et de la surveillance des personnes.

Au-delà des données nationales sur les dépenses pour la gestion des frontières extérieures, il est clair que l'évaluation des charges nationales en matière de gestion des frontières extérieures ne pourra pas ignorer les éléments objectifs suivants :

- La situation géographique de chaque pays membre et la nature des frontières;

- La pression migratoire aux différents types de frontière, terrestre, maritime et aéroportuaire;

- Le nombre de contrôles effectués sur les personnes à l'entrée et à la sortie du territoire Schengen;

- Le niveau de qualité des contrôles et de la surveillance des frontières extérieures, suivant l'analyse commune des risques appliquée à chaque type de frontière.

Compte tenu de ces éléments, il convient de constater que l'établissement de ce mécanisme de solidarité financière entre Etats membres devra avoir une dimension substantielle s'il a pour ambition de s'attaquer à des problèmes structurels. Une telle envergure soulève à nouveau la question de la compatibilité de cet exercice avec les actuelles perspectives financières, compte tenu également des implications supplémentaires afférentes aux conséquences de l'élargissement. [35]

[35] En fait, les pays candidats ont d'ores et déjà bénéficié de contributions financières importantes dans le cadre de la préparation à l'adhésion et en particulier, pour l'application de l'acquis de Schengen en matière de frontières extérieures.

La Commission est consciente de ce qu'il s'agit là d'un enjeu fondamental de la solidarité qui doit fonder la politique commune de gestion des flux migratoires, comme toute politique communautaire d'ailleurs. C'est pourquoi elle poursuivra son travail d'examen des aspects budgétaires en vue de proposer des options viables à moyen et long terme. Il appartiendra au Conseil et au Parlement européen d'évaluer la question de la compatibilité avec les perspectives financières afin de lui donner la solution la plus appropriée.

Dès lors, il convient de rechercher dans le domaine du possible et du concret des interventions financières ciblées, réalisables à court et moyen terme, qui permettraient de satisfaire les besoins les plus pressants découlant de la mise en oeuvre du Plan d'Action adopté par le Conseil en juin dernier, tout en constituant un premier effort de solidarité entre Etats membres dans la réalisation de l'objectif d'un meilleur contrôle aux frontières extérieures.

Dans la limite des crédits disponibles, la Commission, ensemble avec les Etats membres, pourraient orienter de manière systématique le volet « frontières extérieures » du programme ARGO, en subsidiant des projets sur base de priorités définies en commun au sein du Conseil, et tenant compte des méthodes d'analyse des risques actuellement développées, de l'évaluation des centres de coordination mis en place au titre des projets-pilotes, ou bien encore des besoins de formation identifiés à partir de la définition de curriculums communs.

Dans cette perspective, la gestion du programme ARGO, du moins dans sa dimension « frontières extérieures », permettrait de concilier le soutien au renforcement de la coopération administrative, pour lequel il a été initialement conçu, avec une première forme d'expression de la solidarité, en recentrant l'usage des crédits disponibles sur l'amélioration des parties les plus faibles du dispositif de contrôle aux frontières extérieures communes. Même modeste, cette démarche devrait néanmoins s'appuyer sur un renforcement des ressources disponibles, vers laquelle l'Autorité budgétaire semble s'orienter en prévoyant dès 2003 une enveloppe supplémentaire de 3 MEUR à cet effet.

 

6. EN RESUME

 

Les premiers crédits relatifs à la coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures, et en particulier en matière d'asile et d'immigration, ont été inscrits au budget communautaire dès avant l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam. Depuis lors, l'augmentation en a été régulière et significative jusqu'à atteindre, pour l'exercice 2002, un montant de 51.310.000 EUR au titre des politiques d'asile, d'immigration et des frontières extérieures. Cet effort a été soutenu tant par la Commission, qui s'est efforcée de procéder, lorsque c'était nécessaire, aux arbitrages internes indispensables pour permettre l'inscription de crédits en augmentation dans son avant-projet de budget, que par l'Autorité budgétaire qui a même parfois estimé nécessaire d'aller au-delà de ce dernier. Néanmoins cette progression est toujours restée strictement dans les limites des perspectives financières.

La structure des différents instruments mis en place a, normalement, reflété les nouvelles priorités se dessinant dans le cadre de ces politiques en développement.

Ainsi, la création du Fonds européen des réfugiés a traduit le besoin de solidarité renforcée souligné dans le traité d'Amsterdam lui-même, ainsi que dans les conclusions du Conseil européen de Tampere. La transition d'ODYSSEUS à ARGO a reflété l'arrivée à maturité d'une culture administrative commune, permettant le passage à un véritable programme de coopération administrative. Enfin, le lancement d'un instrument spécifique destiné à soutenir la coopération avec les pays tiers dans le domaine de la migration, a illustré la volonté de concrétiser de manière plus appropriée l'intégration des préoccupations liées à la migration dans la dimension extérieure de l'action communautaire. Manifestement, de nouveaux besoins se dessinent. Les conclusions du Conseil Européen de Séville ont souligné toute l'importance que l'Union Européenne attachait désormais au renforcement de sa coopération avec les pays tiers dans la gestion des phénomènes migratoires. De même, elles ont mis en lumière un nouveau domaine dans lequel il convenait que se concrétise la solidarité communautaire, à savoir le contrôle aux frontières extérieures. D'autres priorités s'affirment, liées respectivement à la mise en place progressive d'une politique commune en matière de retour et à la promotion de l'intégration. En outre, le budget communautaire, qui finance déjà les dépenses d'investissement et de fonctionnement d'EURODAC, doit se préparer à assumer la charge du développement de grands systèmes venant en soutien de ces politiques communes, le VIS pour les visas et la deuxième génération du SIS.

Comme les précédentes, ces évolutions devront répondre aux impératifs de bonne gestion financière et, surtout, devront s'inscrire à l'intérieur des limites des perspectives actuelles. Or, il est clair que la marge de flexibilité à l'intérieur de ces dernières est désormais très réduite. Des attentes trop ambitieuses ne pourraient être prises en considération qu'au prix de réallocations significatives au détriment d'autres politiques ou d'autres priorités à l'intérieur des domaines JAI, choix difficiles dont la responsabilité incombe en dernière instance à l'Autorité budgétaire, sur proposition de la Commission.

La prochaine révision des perspectives financières, qui aura lieu après l'élargissement, pourrait être l'occasion de réajustements structurels permettant de rencontrer plus concrètement les besoins découlant des véritables politiques communes d'immigration et d'asile qui devraient, à cette échéance, avoir été mis en place. Dans cette attente, la présente Communication évoque un certain nombre de pistes concrètes possibles visant à une meilleure prise en compte des thèmes liés aux phénomènes migratoires. . La Commission veillera à ce que ce thème figure en bonne place parmi les priorités définies au titre de sa stratégie de politique annuelle pour 2004 et puisse ainsi être traduit en terme concret au moment de l'élaboration de l'avant-projet de budget. Il reviendra ensuite à l'Autorité budgétaire de confirmer l'approche proposée.

Il appartiendra également aux Etats membres, et en particulier à ceux qui supporteront le moins les responsabilités de la protection des frontières extérieures de l'Europe élargie, d'indiquer la manière dont ils seraient disposés à mettre leurs propres budgets nationaux à contribution pour venir en soutien de leurs partenaires appelés à porter la plus grande part du fardeau commun.

 

CONCLUSIONS

 

Une prise en compte accrue des politiques d'asile et de migration dans les relations extérieures de la Communauté.

La Commission considère que le domaine de la migration est une priorité politique importante. Elle partage totalement l'opinion du Conseil quant au fait que les diverses politiques et instruments de l'action extérieure de l'Union, y compris la politique de développement, ont une contribution significative à apporter pour répondre aux causes profondes des flux migratoires.

Le Conseil européen a appelé lors de sa réunion de Séville en juin 2002 à une prise en compte accrue de la question migratoire -et en particulier du problème de l'immigration clandestine - en tant que priorité dans la politique extérieure de la Communauté européenne. Soulignant qu'il « importe d'assurer la coopération des pays d'origine et de transit en matière de gestion conjointe et de contrôle des frontières ainsi qu'en matière de réadmission », le Conseil européen a rappelé que l'Union est disposée à fournir l'aide technique et financière pour que cette coopération vise à obtenir des résultats à court et moyen terme, « auquel cas la Communauté devra se voir accorder les ressources appropriées, dans le cadre des perspectives financières ». La Communauté et la Commission sont appelées à utiliser les outils politiques et économiques à leur disposition pour réduire les causes profondes des migrations et soutenir la coopération avec les pays tiers clés en matière de gestion des migrations.

Par ailleurs, dans ses conclusions du 19 novembre 2002 sur l'intensification de la coopération avec les pays tiers en matière de gestion des flux migratoires, le Conseil insiste à nouveau sur l'importance politique des efforts visant à intégrer pleinement la dimension externe des questions JAI dans les relations actuelles et futures de l'Union européenne avec des pays tiers. La Commission entend donner une suite concrète à cet engagement, dans la ligne de son action antérieure.

L'intensification de la coopération avec les pays tiers dans le domaine de la migration couvre trois niveaux d'objectifs :

- premièrement, une approche globale et équilibrée s'adressant visant à répondre aux cause profondes des mouvements migratoires. L'action de la Communauté dans ce domaine est importante. Ses programmes et politiques de coopération extérieure et de développement visant à promouvoir les droits de l'homme, le renforcement de la démocratie, la lutte contre la pauvreté, la prévention des conflits, l'amélioration de la situation économique et sociale, etc., visent notamment les principaux facteurs de pression migratoire dans les pays tiers et ont donc un effet indirect sur celle-ci, effet qui, même s'il est difficilement mesurable, ne devrait pas être sous-estimé.

- deuxièmement, un partenariat en matière de migration découlant de la définition d'intérêts communs avec les pays tiers. La réalisation de l'objectif d'une meilleure gestion des flux migratoires requiert que la Communauté poursuive l'intégration de la question des migrations dans son dialogue politique avec les régions et pays tiers, dialogue qui devrait porter non seulement sur l'immigration illégale, mais également sur les canaux d'immigration légale.

 

- Troisièmement, des initiatives concrètes et spécifiques d'assistance aux pays tiers, visant à améliorer leur capacité en matière de gestion migratoire. A ce sujet, depuis le Conseil européen de Tampere, la Commission s'est efforcée d'intégrer de manière spécifique le thème de la migration dans ses programmes de coopération avec les pays tiers. Une quantité importante d'aide a été programmée (934 MEUR , voir les annexes 2 et 2 bis), principalement pour la période 2002-2004, afin de soutenir les pays tiers directement dans leurs efforts pour traiter les problèmes relatifs à la migration légale et illégale. Il est maintenant nécessaire que cette programmation soit mise en oeuvre.

 

En outre, profitant de la révision à mi-parcours de la majorité des "Country Strategy Papers" au cours des exercices 2003-2004, la Commission procédera à leur réexamen en vue d'apporter, au cas par cas, les révisions nécessaires à la prise en compte des priorités découlant de cette nouvelle approche des questions migratoires, tout en gardant à l'esprit que les marges de manoeuvre demeurent limitées eu égard aux ressources disponibles, et que des arbitrages devront être effectués entre priorités concurrentes. La Commission contribuera ainsi à l'établissement d'un cadre financier susceptible de répondre, dans le moyen et long terme, aux besoins découlant principalement des deux premiers objectifs identifiés ci-dessus.

 

Enfin, la réalisation du troisième objectif pourra être complétée par le renforcement significatif de la ligne budgétaire B7-667. Tirant les enseignements nécessaires des actions préparatoires financées au cours des exercices 2001, 2002 et 2003, la Commission entend proposer la création, et la mise en oeuvre à partir de 2004, d'un programme pluriannuel visant à répondre, de manière spécifique et complémentaire, aux besoins des pays tiers d'origine et de transit dans leurs efforts en vue d'assurer une meilleure gestion des flux migratoires dans toutes leurs dimensions et, en particulier, à stimuler les pays tiers dans leur préparation à la mise en oeuvre des accords de réadmission ou à les accompagner dans la mise en oeuvre elle-même. Ce programme spécifique constituera un signe tangible de la solidarité de l'Union à l'égard de ceux qui se sont engagés résolument dans ces efforts. Il sera mis en oeuvre conformément aux principes essentiels de la réforme de l'aide extérieure, dans le respect de la cohérence globale de l'action extérieure de la Communauté et en complémentarité avec les autres instruments communautaires de coopération et de développement.

 

De plus, la Commission s'assurera que les questions relatives au domaine de la migration seront prises en compte dans le cadre de la préparation de sa Stratégie Politique Annuelle (APS) pour 2004.

 

L'ensemble de ces éléments constituent, du point de vue de la Commission, une réponse crédible des politiques et programmes de coopération et de développement communautaires aux préoccupations liées à l'intégration du thème de la migration.

 

Enfin, il faut rappeler que les ressources de la Communauté, et donc ses marges de manoeuvre, ne sont pas sans limites. De plus, la mise en oeuvre de l'approche "intégrée, globale et équilibrée" à laquelle se réfèrent les conclusions de Séville requiert une cohérence d'action et un partage des responsabilités entre tous les acteurs concernés, en ce compris la Communauté et les Etats membres.

 

ANNEXES

 

Annexe 1: Ressources financières disponibles au titre des politiques d'asile, d'immigration et de gestion des frontières extérieures 1998-2003 (rubrique 3 des perspectives financières)

 

Annexe 2: Ressources financières programmées au titre de l'aide extérieure 2000-2006 liées à la question migratoire (rubrique 4 des perspectives financières)

 

Annexe 2 bis: Actions programmées et liées directement à la question des migrations (rubrique 4 des perspectives financières)

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Annexe 2 bis

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